Décisions | Chambre civile
ACJC/1231/2024 du 08.10.2024 sur ACJC/720/2023 ( SDF ) , MODIFIE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/260/2022 ACJC/1231/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU MARDI 8 OCTOBRE 2024 |
Entre
Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 2ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 25 novembre 2022, représentée par Me Anne BOUQUET, avocate, ULMANN & ASSOCIÉS, route des Jeunes 4, 1227 Carouge,
et
Monsieur B______, domicilié ______, intimé, représenté par Me Ana KRISAFI REXHA, avocate, AVOCATS ASSOCIÉS, boulevard des Tranchées 36, 1206 Genève.
Cause renvoyée par arrêt du Tribunal fédéral du 20 mars 2024
A. a. B______, né le ______ 1975, et A______, née le ______ 1980, tous deux de nationalité française, se sont mariés le ______ 2013 en France.
Ils sont les parents de C______, née le ______ 2013, et D______, né le ______ 2015, tous deux à Genève.
b. Après avoir déposé, en mars 2021, une première requête de mesures protectrices de l'union conjugale devant le Tribunal de première instance, qu'elle a retirée, A______ en a déposé une seconde le 10 janvier 2022.
B______ a quitté le domicile familial au mois de mai 2022.
c. Par ordonnance de mesures provisionnelles OTPI/328/2022 du 19 mai 2022 puis par jugement sur mesures protectrices JTPI/14059/2022 du 25 novembre 2022, le Tribunal a réglé les modalités de la vie séparée.
Dans le cadre de ce dernier jugement, il a notamment ordonné la mise en place d'une garde alternée sur les enfants, a statué sur les contributions dues par B______ à l'entretien des mineurs (ch. 6 à 8 du dispositif) ainsi que sur la prise en charge des frais extraordinaires de ces derniers (ch. 10 et 11), a dit que les allocations familiales en faveur des enfants seraient perçues par A______ (ch. 9) et a débouté cette dernière de ses conclusions en versement d'une contribution d'entretien (ch. 12).
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr. et partiellement compensés avec les avances de 1'200 fr. et 400 fr. fournies respectivement par A______ et B______, ont été mis à la charge des parties pour moitié chacune, la première ayant en conséquence été condamnée à verser aux Services financiers du Pouvoir judiciaire la somme de 300 fr. et le second la somme de 1'100 fr. (ch. 13). Il n'a pas été alloué de dépens (ch. 14).
d. Par acte expédié au greffe de la Cour de justice le 8 décembre 2022, A______ a formé appel à l'encontre du jugement sur mesures protectrices du 25 novembre 2022, dont elle a sollicité l'annulation des chiffres 6 à 8 et 11 à 15 du dispositif. Elle a notamment conclu à ce que la Cour condamne B______ à lui verser, par mois et d'avance, à compter du 10 janvier 2022, allocations familiales non comprises, 3'000 fr. au titre de l'entretien de chacun des enfants C______ et D______, sous déduction des montants déjà versés, ainsi qu'à prendre en charge les frais extraordinaires de ceux-ci, jusqu'à leur majorité, voire au-delà en cas de formation sérieuse, dise que les allocations familiales devaient lui être versées et condamne B______ à lui verser, à titre de contribution à son entretien, par mois et d'avance, 15'000 fr. à compter du 10 janvier 2022 jusqu'au 1er août 2022 puis 17'000 fr. dès cette dernière date, sous déduction des montants déjà versés.
e. Par arrêt ACJC/720/2023 du 6 juin 2023, la Cour a annulé les chiffres 6 à 8 et 10 à 12 du dispositif du jugement entrepris et, statuant à nouveau, a condamné B______ à verser en mains de A______, par mois et d'avance, sous déduction des montants déjà versés, hors allocations familiales, une contribution à l'entretien de chacun des enfants de 1'700 fr. du 1er avril au 31 mai 2022, de 2'450 fr. du 1er juin au 30 novembre 2022 et de 2'250 fr. du 1er décembre 2022 au 31 août 2023. A compter du 1er septembre 2023, elle a fixé la contribution de B______ à l'entretien des enfants à 2'350 fr. par mois pour C______ et à 2'250 fr., respectivement à 2'350 fr. à compter du 1er novembre 2025, pour D______. Elle a également condamné B______ à verser à A______, par mois et d'avance, une contribution à son entretien de 900 fr. du 1er juin au 31 juillet 2022, de 9'300 fr. du 1er août au 30 novembre 2022, de 9'200 fr. du 1er décembre 2022 au 31 mai 2024 et de 3'300 fr. à compter du 1er juin 2024, le jugement entrepris ayant pour le surplus été confirmé et les parties déboutées de toutes autres conclusions.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., ont été mis par moitié à la charge des parties, qui ont été condamnées à verser chacune 1'500 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire à titre de frais judiciaires d'appel. Il n'a pas été alloué de dépens.
La Cour a estimé les revenus réels perçus par B______ depuis mai/juin 2021 à 30'000 fr. nets par mois, comprenant 16'080 fr. déclarés pour son emploi au sein de E______ SA à un taux d'activité effectif allégué de 80%, 4'000 fr. pour une activité complémentaire à 20%, 8'405 fr. de bénéfice tiré de la société E______ SA, versé à son épouse jusqu'au 1er août 2022, et 2'000 fr. générés par les trois biens immobiliers dont il est propriétaire en France à 100% ou 50%. Elle a ensuite arrêté ses charges mensuelles élargies à 9'184 fr. entre le 1er juin et le 30 novembre 2022 puis à 8'134 fr. dès le 1er décembre 2022, incluant le montant mensuel de base de 1'200 fr., augmenté à 1'350 fr. à compter du 1er décembre 2022 en raison de la mise en place d'une garde alternée sur les enfants, ses frais de logement de 4'000 fr., réduits à 2'800 fr. dès le 1er décembre 2022 pour tenir compte de la part aux frais de logement des enfants (70% de 4'000 fr.), ses primes d'assurance-maladie obligatoire et complémentaire de 660 fr., sa prime d'assurance responsabilité civile et ménage de 41 fr. et sa charge fiscale de 3'283 fr., montant correspondant à celui retenu par le Tribunal, non critiqué en appel par les parties.
En ce qui concerne A______, la Cour lui a imputé un revenu hypothétique de 8'200 fr. nets par mois pour une activité à 80% à compter du 1er juin 2024 et a fixé ses charges élargies mensuelles à 5'700 fr. du 1er juin 2022 au 31 mai 2024, comprenant le montant mensuel de base de 1'350 fr., ses frais de logement de 1'560 fr. (70% de 2'230 fr.), ses primes d'assurance-maladie obligatoire et complémentaire de 720 fr., son assurance responsabilité civile et ménage de 163 fr., ses frais de véhicule de 690 fr. et sa charge fiscale estimée à 1'200 fr. (1'900 fr. – 700 fr. de part des enfants). A compter du 1er juin 2024, ses charges élargies mensuelles ont été fixées à 6'300 fr. en raison de l'augmentation de sa charge fiscale à 1'800 fr. par mois (2'500 fr. – 700 fr. de part des enfants).
Le coût d'entretien mensuel de chacun des enfants a été arrêté à 1'450 fr. entre le 1er juin et le 30 novembre 2022, à 2'050 fr. dès le 1er décembre 2022 puis à 2'250 fr. dès l'âge de 10 ans, soit par souci de simplification, dès le 1er septembre 2023 pour C______ et dès le 1er octobre 2025 pour D______. Il a été tenu compte de 400 fr. de montant mensuel de base, respectivement de 600 fr. dès l'âge de 10 ans, de 335 fr. de participation aux frais de logement de leur mère [15% de 2'230 fr.] et, dès le 1er décembre 2022, de 600 fr. de participation aux frais de logement de leur père [15% de 4'000 fr.], de 194 fr. de primes d'assurance-maladie obligatoire et complémentaire, de 55 fr. de frais médicaux, de 195 fr. de restaurant scolaire et parascolaire, de 175 fr. de frais de garde, de 40 fr. de fourniture scolaire et de 350 fr. de participation à la charge fiscale de leur mère, dont à déduire 300 fr. d'allocations familiales.
Enfin, pour fixer les contributions dues, la Cour a appliqué, sous réserve de la période d'avril et mai 2022, la méthode du minimum vital élargi avec répartition de l'excédent après avoir déduit de l'excédent une somme de 1'389 fr. à titre d'épargne réalisée durant la vie commune, correspondant aux cotisations d'assurance-vie de chacun des époux. Elle a limité la part d'excédent de chacun des enfants à verser à leur mère à 1'000 fr. par mois pour des motifs éducatifs et au vu de leurs besoins concrets et celle de A______ à 5'200 fr., correspondant à son niveau de vie durant la vie commune. En outre, dès la mise en place de la garde alternée, soit dès le 1er décembre 2022, la Cour a tenu compte du fait que B______ s'acquittait directement de la moitié du montant mensuel de base des mineurs et de la participation de ceux-ci à ses frais de logement.
B. a. Le 7 juillet 2023, B______ a formé un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral contre l'arrêt précité, concluant à son annulation, à la confirmation du jugement de mesures protectrices du 25 novembre 2022, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'autorité précédente afin qu'elle statue dans le sens des considérants de l'arrêt du Tribunal fédéral, et à ce qu'il soit dit qu'aucune contribution d'entretien n'était due à A______.
B______ a remis en cause plusieurs des postes retenus pour fixer le budget des parties et des enfants. Il a en particulier contesté le délai accordé à A______ pour retrouver une activité lucrative et le montant comptabilisé dans les charges de celle-ci à titre d'impôts. Il s'est par ailleurs prévalu d'éléments nouveaux tendant à démontrer que A______ exercerait une activité lucrative.
A______ a conclu au rejet du recours.
b. Par arrêt 5A_513/2023 du 20 mars 2024, le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours, a annulé l'arrêt du 6 juin 2023 et a renvoyé la cause à la Cour pour nouvelle décision dans le sens des considérants, y compris sur les frais judiciaires et dépens de la procédure cantonale.
Après avoir relevé que le taux d'activité auquel il pouvait être exigé que A______ travaillait et le montant du revenu hypothétique imputé n'étaient pas contestés, le Tribunal fédéral a retenu que l'octroi d'un délai de deux ans à cette dernière depuis la communication de la date de la fin de ses rapports de travail avec la société E______ SA au mois de juin 2022 pour lui permettre de mettre à jour ses connaissances et retrouver un emploi était excessivement long, eu égard aux circonstances du cas d'espèce. Il a en conséquence renvoyé la cause à la Cour afin qu'elle procède à un nouveau calcul des contributions d'entretien tenant compte de l'imputation d'un revenu hypothétique en faveur de A______ de 8'200 fr. à compter du 1er septembre 2023 au lieu du 1er juin 2024, en précisant qu'il lui appartiendrait, dans le cadre de ce nouveau calcul, de procéder, le cas échéant, à une nouvelle estimation de la charge fiscale des parties. Pour le surplus, les autres griefs soulevés par B______ ont été rejetés, notamment relativement au montant de ses revenus, et les éléments nouveaux invoqués par ses soins déclarés irrecevables.
c. Les parties ont été invitées à se déterminer à la suite de l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral.
c.a Dans ses déterminations du 13 mai 2024, B______ a conclu principalement, sous suite de frais, au déboutement de A______ de toutes ses conclusions et à la confirmation du jugement de mesures protectrices du 25 novembre 2022. Subsidiairement, il a conclu à ce qu'il soit dit qu'il ne doit aucune contribution en faveur de A______ et des enfants à compter du 1er juillet 2023, au partage par moitié entre les parties des allocations familiales dès le 1er juillet 2023 ainsi que de l'excédent entre le 1er juillet et le 30 septembre 2023, à la prise en charge, dès le 1er octobre 2023, de l'entretien convenable des enfants par les parties à raison d'une moitié chacune et au remboursement par A______ des contributions perçues à tort dès le 1er juillet 2023, le jugement entrepris devant être confirmé pour le surplus. Plus subsidiairement, il a conclu à ce qu'il soit dit qu'il ne doit aucune contribution en faveur de A______ dès le 1er septembre 2023 et des enfants à compter du 1er octobre 2023 et à ce que les allocations familiales soient partagées par moitié entre les parties dès le 1er octobre 2023, les chiffres 4 et 5 du dispositif de l'arrêt du 6 juin 2023 devant être annulés.
B______ a déposé plusieurs pièces nouvelles, relatives à la situation financière de A______ et aux charges des enfants (pièces nos 1002 à 1006, 1012 à 1019), à ses propres charges (pièces nos 1020 à 1028 et 1030) ainsi qu'à une procédure en modification des mesures protectrices ordonnées introduite par ses soins (pièces nos 1007 à 1011 et 1029; cf. infra C).
Préalablement, il a conclu à ce que lesdites pièces ainsi que les allégués de fait y relatifs soient déclarés recevables et à ce qu'il soit ordonné à A______ de produire divers documents - qu'il désigne - relatifs à sa situation financière et à celle des enfants.
A l'appui de ses déterminations, il a fait valoir que la situation financière de la famille devait être entièrement revue dès lors que A______ avait retrouvé un emploi à 100% à compter du 13 juillet 2023 lui procurant un salaire mensuel brut de 12'083 fr., bonus et autres avantages non compris, que ses propres revenus auraient, selon les précisions apportées par l'arrêt du Tribunal fédéral, été surestimés, et diminué depuis le mois d'octobre 2023 à la suite de la réduction de son taux d'occupation à 70% et que les charges de la famille s'étaient modifiées.
c.b Dans ses déterminations du 22 mai 2024, A______ a, sous suite de frais, repris les conclusions de son mémoire d'appel du 8 décembre 2022 telles que résumées ci-dessus (cf. let. A.d).
A______ a fait valoir qu'il ne se justifiait pas de revoir les contributions d'entretien fixées à la baisse à compter du 1er septembre 2023 dès lors qu'elle-même et les enfants avaient droit au maintien de leur train de vie et que leurs charges avaient augmenté.
Elle a produit des pièces nouvelles relatives à des recherches d'emploi effectuées (pièces UU et VV) et aux charges des enfants (pièces XX, YY, ZZ et AAA), ainsi qu'une pièce relative à la procédure en modification des mesures protectrices introduite par B______, également déposée par ce dernier à l'appui de ses déterminations (pièce BBB; infra C).
d. Les parties ont spontanément répliqué le 5 juin 2024 et dupliqué 13 juin 2024, persistant dans leurs conclusions respectives.
Elles ont chacune produit une pièce nouvelle, B______ relativement à la situation professionnelle de son épouse (pièce no 1031) et A______ au sujet des arriérés de contribution dus au 31 août 2023 (pièce CCC).
e. Les parties ont par la suite déposé d'autres déterminations spontanées. B______ a, dans ce cadre, encore déposé une pièce nouvelle relativement à la situation professionnelle de A______ (pièce no 1032).
f. Par plis séparés du 13 août 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.
C. a. Parallèlement, B______ a, le 15 décembre 2023, déposé auprès du Tribunal une demande en modification des mesures protectrices de l'union conjugale ordonnées, assortie d'une requête de mesures provisionnelles (C/1______/2023). Il a notamment sollicité la suppression des contributions précédemment fixées au motif que son épouse avait commencé une activité lucrative à plein temps au mois de juillet 2023 et que ses revenus avaient diminué.
b. Par ordonnance sur mesures provisionnelles OTPI/222/2024 du 8 avril 2024, le Tribunal a condamné B______ à verser à A______, par mois et d'avance, dès le 15 décembre 2023, sous déduction des montants déjà versés, une contribution à l'entretien de celle-ci de 1'620 fr. ainsi qu'une contribution à l'entretien des enfants de 2'000 fr. en faveur de C______ et de 1'865 fr. en faveur de D______, allocations familiales non comprises, lesdites allocations familiales devant être versées à A______.
Il a considéré que la prise par A______ d'un emploi à temps complet constituait un fait nouveau, a actualisé la situation financière de la famille et a procédé à un nouveau calcul des contributions d'entretien.
c. Aucun recours n'a été formé contre cette ordonnance. La procédure de modification est toujours en cours.
1. Il n'y a pas lieu de revenir sur la recevabilité de l'appel qui a été admise par la Cour dans son arrêt du 6 juin 2023 et qui n'a pas été critiquée devant le Tribunal fédéral.
2. 2.1 Conformément au principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi, l'autorité cantonale à laquelle une affaire est renvoyée est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l'arrêt du Tribunal fédéral. Sa cognition est limitée par les motifs de l'arrêt de renvoi, en ce sens qu'elle est liée par ce qui a déjà été tranché définitivement par le Tribunal fédéral, ainsi que par les constatations de fait qui n'ont pas été critiquées devant lui ou qui l'ont été sans succès (ATF 143 IV 214 consid. 5.2.1).
Cela signifie que l'autorité cantonale doit limiter son examen aux points sur lesquels sa première décision a été annulée et que, pour autant que cela implique qu'elle revienne sur d'autres points, elle doit se conformer au raisonnement juridique de l'arrêt de renvoi. En revanche, les points qui n'ont pas ou pas valablement été remis en cause, qui ont été écartés ou dont il avait été fait abstraction lors de la procédure fédérale de recours, ne peuvent plus être réexaminés par l'autorité cantonale, même si, sur le plan formel, la décision attaquée a été annulée dans son intégralité (ATF 143 IV 214 consid. 5.2.1;
135 III 334 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_279/2018 du 8 mars 2019 consid. 3).
2.2 En l'espèce, le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à la Cour afin qu'elle procède à un nouveau calcul des contributions d'entretien en faveur de l'appelante et des enfants tenant compte d'un revenu hypothétique en faveur de la précitée de 8'200 fr. à compter du 1er septembre 2023 et qu'elle effectue, cas échéant, une nouvelle estimation de la charge fiscale des parties pour cette période. L'examen doit donc porter uniquement sur ces deux points.
Il ne saurait ainsi être revenu sur les autres postes du budget des parties et des enfants, lesquels ont soit été définitivement tranchés par le Tribunal fédéral, soit n'ont pas été remis en cause devant celui-ci. Tel est en particulier le cas des revenus respectifs des parties. En effet, l'estimation des revenus de l'intimé effectuée par la Cour dans son arrêt du 6 juin 2023, soit 30'000 fr. nets par mois, a été confirmée par le Tribunal fédéral qui a rejeté l'ensemble des griefs soulevés à ce sujet. Contrairement à ce que soutient l'intimé, il ne résulte pas de l'arrêt de renvoi qu'il conviendrait de déduire de ses revenus la somme de 8'405 fr. nets à titre de bénéfice de la société E______ SA versé à son épouse jusqu'au mois d'août 2022 (cf. consid 4.6.2 de l'arrêt). Les revenus de l'appelante ont, quant à eux, été fixés à 8'200 fr. dès le 1er septembre 2023.
Il ne saurait non plus être revenu sur la période antérieure au 1er septembre 2023, les calculs opérés pour cette période n'ayant pas fait l'objet de critiques de la part du Tribunal fédéral.
3. 3.1 Les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont admis que dans la mesure où ils concernent les points faisant l'objet du renvoi et où ils sont admissibles selon le droit de procédure applicable devant l'autorité à laquelle la cause est renvoyée (ATF 135 III 334 consid. 2; 131 III 91 consid. 5.2, arrêts du Tribunal fédéral 5A_392/2021 du 20 juillet 2021 consid. 2.1; 5A_631/2018 du 15 février 2019 consid. 3.2.1).
L'admissibilité d'éléments nouveaux en appel est régie par l'art. 317 al. 1 CPC. Cela étant, lorsque le juge est saisi de questions relatives aux enfants dans les affaires de droit de la famille, les pièces et faits nouveaux sont recevables, indépendamment des conditions de l'art. 317 CPC, eu égard à la maxime inquisitoire illimitée (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).
3.2 En l'espèce, les pièces nouvelles produites par les parties relativement à la situation professionnelle de l'appelante, aux charges des membres de la famille et aux arriérés de contribution dus au 31 août 2023 (pièces nos 1002 à 1006, 1012 à 1028, 1030 à 1032 et pièces UU à ZZ, AAA, CCC), ainsi que les allégués de fait s'y rapportant, seront déclarés irrecevables, dès lors qu'ils concernent des points ne faisant pas l'objet de l'arrêt de renvoi. Il en va de même des réquisitions de pièces formulées par l'intimé dans ses déterminations du 13 mai 2024 dans la mesure où elles portent sur des éléments sortant du cadre dudit arrêt de renvoi.
En revanche, les pièces nouvelles produites par les parties relativement à la procédure en modification des mesures protectrices (pièces nos 1007 à 1011 et 1029 et pièce BBB) seront admises, dans la mesure où elles influent sur l'étendue de la période de calcul des contributions d'entretien fixée par le Tribunal fédéral.
4. Reste à procéder à un nouveau calcul des contributions d'entretien en faveur de l'appelante et des enfants postérieurement au 1er septembre 2023 en se conformant au cadre fixé par le Tribunal fédéral.
4.1 Pour calculer les contributions d'entretien du droit de la famille, il convient d'appliquer la méthode dite en deux étapes, ou méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent. Selon cette méthode, les ressources et besoins des personnes intéressées sont déterminées, puis les ressources sont réparties entre les membres de la famille de manière à couvrir, dans un certain ordre, le minimum vital du droit des poursuites ou, si les ressources sont suffisantes, le minimum vital élargi du droit de la famille, puis l'excédent éventuel (ATF 147 III 265 consid. 7).
Pour les parents, entrent généralement dans le minimum vital du droit de la famille les postes suivants: les impôts, un forfait de télécommunication, les assurances, les frais de formation continue indispensable, les frais de logement correspondant à la situation réelle (plutôt que fondés sur le minimum d'existence), les frais d'exercice du droit de visite, un montant adapté pour l'amortissement des dettes, et, en cas de circonstances favorables, les primes d'assurance-maladie complémentaires, ainsi que les dépenses de prévoyance privée des travailleurs indépendants. Chez l'enfant, le minimum vital du droit de la famille comprend une part des impôts, une participation aux frais de logement du parent gardien adaptée aux circonstances financières concrètes et les primes d’assurance-maladie complémentaire (ATF 147 III 265 consid. 7.2).
4.2 Lorsqu'un revenu hypothétique est imputé au débirentier ou au crédirentier, sa charge fiscale doit être estimée en fonction dudit revenu (arrêt du Tribunal fédéral 5A_246/2019 du 9 juin 2020 consid. 5.3.4 et les références citées).
La charge fiscale à inclure dans les besoins élargis de l'enfant correspond à la proportion du revenu de l'enfant (incluant les contributions d'entretien en espèces, allocations familiales, rentes d'assurances sociales à l'exception notamment de la contribution de prise en charge) au regard du revenu total imposable du parent bénéficiaire (y compris la contribution d'entretien) appliquée à la dette fiscale totale du parent bénéficiaire, de sorte que si le revenu attribuable à l'enfant représente, par exemple, 20% du revenu du foyer fiscal, la même proportion de la dette fiscale totale du parent bénéficiaire doit être incluse dans les besoins de l'enfant et, par conséquent, seule la différence doit être incluse dans les besoins du parent bénéficiaire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_816/2019 du 25 juin 2021 consid. 4.2.3.5).
4.3 Les mesures protectrices de l'union conjugale jouissent d'une autorité de la chose jugée relative, en ce sens qu'elles déploient leurs effets aussi longtemps qu'elles n'ont pas été modifiées ou supprimées par de nouvelles mesures entrées en force (cf. ATF 145 III 36 consid. 2.4; 142 III 193 consid. 5.3; 141 III 376 consid. 3.3.4; 127 III 496 consid. 3a et les références citées).
4.4 En l'espèce, à la suite de l'introduction par l'intimé d'une procédure en modification des mesures protectrices, le Tribunal a, par ordonnance du 8 avril 2024, adapté, à compter du 15 décembre 2023, les contributions d'entretien en faveur de l'appelante et des enfants fixées sur mesures protectrices afin de tenir compte de l'emploi retrouvé par l'appelante, rémunéré plus de 10'000 fr. nets par mois. Cette décision étant entrée en force, la présente procédure de mesures protectrices ne saurait déployer ses effets au-delà du 14 décembre 2023.
Le nouveau calcul des contributions d'entretien en faveur de l'appelante et des enfants requis par le Tribunal fédéral ne sera en conséquence opéré que pour la période du 1er septembre au 14 décembre 2023. A compter du 15 décembre 2023, les nouvelles mesures protectrices prononcées par le Tribunal dans son ordonnance du 8 avril 2024 s'appliquent.
4.4.1 Conformément à ce qui a été jugé précédemment, les revenus mensuels nets de l'intimé pour la période du 1er septembre au 14 décembre 2023 doivent être fixés à 30'000 fr. nets par mois. Ses charges mensuelles pour cette période seront arrêtées à 8'134 fr. Elles se composent des postes retenus par la Cour dans son arrêt du 6 juin 2023 et non remis en cause par le Tribunal fédéral (1'350 fr. de montant mensuel de base, 2'800 fr. (70% de 4'000 fr.) de part aux frais de logement, 660 fr. de primes d'assurance-maladie obligatoire et complémentaire et 41 fr. de prime d'assurance responsabilité civile et ménage) ainsi que de sa charge fiscale. Celle-ci sera fixée à 3'283 fr. par mois, soit au montant précédemment comptabilisé par la Cour pour la période postérieure au 1er juin 2024. Ce montant n'a en effet pas fait l'objet de contestations devant le Tribunal fédéral et, lors de la période concernée, tant la situation financière de l'intimé que les contributions allouées étaient identiques à ce qui a retenu dans le cadre du présent arrêt. Il n'y a en conséquence pas lieu de s'en écarter. En tout état, dans la mesure où il a précédemment été retenu que l'intimé ne déclarait pas l'ensemble de ses revenus, il ne peut être retenu que ledit montant serait erroné.
4.4.2 Conformément à l'arrêt de renvoi, un revenu hypothétique de 8'200 fr. par mois doit être imputé à l'appelante pour la période du 1er septembre au 14 décembre 2023. Ses charges mensuelles seront arrêtées à 6'300 fr. Elles se composent des postes n'ayant pas été critiqués devant le Tribunal fédéral ou l'ayant été sans succès (1'350 fr. de montant mensuel de base, 1'560 fr. de part aux frais de logement [70% de 2'230 fr., soit de 2'138 fr. d'intérêts hypothécaires + 92 fr. de charges d'entretien], 720 fr. de primes d'assurance-maladie obligatoire et complémentaire, 163 fr. de prime d'assurance responsabilité civile et ménage et 690 fr. de frais de véhicule) ainsi que de sa charge fiscale. Celle-ci sera estimée au même montant que celui retenu par la Cour dans son arrêt du 6 juin 2023 pour la période postérieure au 1er juin 2024, soit à 1'800 fr. par mois (2'500 fr. -700 fr. de part des enfants), dans la mesure où la situation financière familiale retenue pour cette période, contributions d'entretien comprises, est identique à celle présentement arrêtée. Aucune des parties ne soutient au demeurant que cette charge fiscale n'aurait pas été correctement évaluée, l'intimé ayant uniquement fait valoir, dans son recours auprès du Tribunal fédéral, que celle-ci devait être revue à la baisse puisque les contributions allouées devaient être diminuées. En tout état, une évaluation de la charge fiscale de l'appelante pour l'année 2023 au moyen de la calculette disponible sur le site de l'Administration fiscale genevoise confirme le montant fixé.
4.4.3 Le coût d'entretien de C______ sera arrêté à 2'250 fr. par mois (600 fr. de montant mensuel de base + 335 fr. de participation aux frais de logement de sa mère [15% de 2'230 fr.] + 600 fr. de participation aux frais de logement de son père [15% de 4'000 fr.] + 194 fr. de primes d'assurance-maladie obligatoire et complémentaire + 55 fr. de frais médicaux + 195 fr. de restaurant scolaire et parascolaire + 175 fr. de frais de garde + 40 fr. de fournitures scolaires + 350 fr. de part de charge fiscale [30% de 2'500 fr.] - 300 fr. d'allocations familiales) et celui de D______ à 2'050 fr. (400 fr. de montant mensuel de base + 335 fr. de participation aux frais de logement de sa mère [15% de 2'230 fr.] + 600 fr. de participation aux frais de logement de son père [15% de 4'000 fr.] + 194 fr. de primes d'assurance-maladie obligatoire et complémentaire + 55 fr. de frais médicaux + 195 fr. de restaurant scolaire et parascolaire + 175 fr. de frais de garde + 40 fr. de fournitures scolaires + 350 fr. de part de charge fiscale [30% de 2'500 fr.] - 300 fr. d'allocations familiales).
4.4.4 Au vu de ce qui précède, l'excédent de la famille du 1er septembre 2023 au 14 décembre 2023 s'élève à 18'100 fr. par mois (30'000 fr. + 8'200 fr. - 8'134 fr.
- 6'300 fr. - 2'250 fr. - 2'050 fr. - 1'389 fr. de part d'épargne constituée durant la vie commune). Ce montant est identique à celui retenu par la Cour dans son arrêt du 6 juin 2023 pour la période postérieure au 1er juin 2024, date à partir de laquelle elle a admis l'imputation d'un revenu hypothétique de 8'200 fr. à l'appelante.
La méthode de calcul appliquée par la Cour pour fixer les contributions d'entretien en faveur de l'appelante et des enfants n'ayant pas été critiquée devant le Tribunal fédéral, il n'y a pas lieu de s'en écarter. Des contributions identiques à celles précédemment retenues pour la période postérieure au 1er juin 2024 seront en conséquence fixées pour la période du 1er septembre au 14 décembre 2023.
Ainsi, l'intimé sera condamné à verser, par mois et d'avance, pour la période du 1er septembre au 14 décembre 2023, une contribution à l'entretien de chacun des enfants, hors allocations familiales, de 2'350 fr. en faveur de C______ et de 2'250 fr. en faveur de D______ ainsi qu'une contribution à l'entretien de l'appelante de 3'300 fr.
Pour le surplus, les autres points au fond précédemment tranchés, lesquels ne font pas l'objet de l'arrêt de renvoi, seront confirmés, le Tribunal fédéral ayant en effet annulé dans son intégralité l'arrêt de la Cour du 6 juin 2023 uniquement pour des motifs formels.
Les chiffres 6 à 8 et 10 à 12 du dispositif du jugement entrepris seront annulés et modifiés dans ce sens.
5. Selon l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral, il appartient à la Cour de statuer à nouveau sur les frais judiciaires et dépens de la procédure cantonale.
5.1 Les frais judiciaires de première instance et d'appel avant renvoi, arrêtés à 3'000 fr. pour chacune des instances, ont été répartis par moitié entre les parties et il n'a pas été alloué de dépens. Compte tenu de la nature du litige et de l'issue de celui-ci (art. 106 al. 2 et 107 al. 1 let. c CPC), il n'y a pas lieu de s'écarter de ce qui a été précédemment décidé.
5.2 Il sera renoncé à percevoir un émolument de décision dans le cadre de la présente procédure de renvoi, celle-ci ayant été rendue nécessaire par l'annulation de l'arrêt de la Cour de justice du 6 juin 2023 par le Tribunal fédéral.
Pour le surplus, l'octroi de dépens en lien avec ladite procédure de renvoi ne se justifie pas (art. 107 al. 1 let. c CPC).
* * * * *
La Chambre civile :
Statuant sur renvoi du Tribunal fédéral :
Au fond:
Annule les chiffres 6 à 8 et 10 à 12 du dispositif du jugement entrepris et, statuant à nouveau sur ces points:
Condamne B______ à verser en mains de A______, par mois et d'avance, sous déduction des montants déjà versés, hors allocations familiales, au titre de l'entretien de chacun des enfants C______ et D______, 1'700 fr. du 1er avril au 31 mai 2022, 2'450 fr. du 1er juin au 30 novembre 2022 et 2'250 fr. du 1er décembre 2022 au 31 août 2023, ainsi que, pour la période du 1er septembre au 14 décembre 2023, 2'350 fr. en faveur de C______ et 2'250 fr. en faveur de D______.
Condamne B______ à verser à A______, par mois et d'avance, au titre de contribution à son entretien, 900 fr. du 1er juin au 31 juillet 2022, 9'300 fr. du 1er août au 30 novembre 2022, 9'200 fr. du 1er décembre 2022 au 31 août 2023 et 3'300 fr. du 1er septembre au 14 décembre 2023.
Confirme le jugement entrepris pour le surplus.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires d'appel à 3'000 fr. et les met à la charge des parties par moitié chacune.
Condamne A______ et B______ à verser chacun 1'500 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à titre de frais judiciaires d'appel.
Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.
Dit qu'il n'y a pas lieu à perception de frais judiciaires, ni à fixation de dépens pour la procédure postérieure à l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral.
Siégeant :
Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Monsieur
Jean REYMOND, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.