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Décisions | Chambre civile

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C/3910/2023

ACJC/1225/2024 du 01.10.2024 sur JTPI/7304/2024 ( SDF ) , CONFIRME

Descripteurs : PROTECTION DE L'UNION CONJUGALE;OBLIGATION D'ENTRETIEN;CONJOINT;REVENU HYPOTHÉTIQUE
Normes : CC.176
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3910/2023 ACJC/1225/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 1ER OCTOBRE 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 11 juin 2024, représentée par Me Delphine HOTTELIER, avocate, LUBINI AVOCATS, rue de la Cité 3, 1204 Genève,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, représenté par Me Camille LA SPADA-ODIER, avocate, ODIER HALPERIN STEINMANN SARL, boulevard des Philosophes 15, case postale 427, 1211 Genève 4.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/7304/2024 rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale le 11 juin 2024, reçu par les parties le 13 juin suivant, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a notamment :

- autorisé les époux à vivre séparés (ch. 1 du dispositif),

- attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal (ch. 2),

- prononcé la garde alternée sur C______, devant s'exercer, sauf accord des parents, à raison d'une semaine sur deux, ainsi que la moitié des vacances scolaires chez chacun des parents (ch. 3), le domicile légal de C______ étant fixé chez sa mère (ch. 4),

- donné acte à B______ de son engagement à prendre en charge la totalité des frais de D______ et de C______ (ch. 6 et 7),

- donné acte au père de son engagement à verser à la mère 1'000 fr. du 1er avril 2023 au 30 avril 2024, puis 2'000 fr. dès le 1er mai 2024 à titre de participation à l’excédent pour C______, ce dernier étant, par conséquent, condamné à verser 13'000 fr. à titre d’arriérés de contribution d’entretien pour C______ du 1er avril 2023 au 30 avril 2024 (ch. 8 et 9),

- condamné B______ à verser à A______ 135'305 fr. à titre d’arriérés de contribution à son entretien du 1er avril 2022 au 30 avril 2024 (ch. 10), respectivement 13'000 fr. à titre de contribution mensuelle à son entretien dès le 1er mai 2024 (ch. 11).

Le premier juge a arrêté les frais judiciaires à 2'000 fr., compensés avec l’avance versée par l'épouse et répartis à raison de la moitié à la charge de chacun des époux, B______ étant en conséquence condamné à payer 1'000 fr. à A______ (ch. 13), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 14) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 15).

B. a. Par acte déposé le 24 juin 2024 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a appelé de ce jugement, dont elle a sollicité l'annulation des chiffres 10 et 11 de son dispositif.

Elle a conclu, avec suite de frais judiciaires et dépens, à ce que la Cour condamne B______ à lui verser une contribution à son propre entretien de 20'214 fr. du 1er avril 2022 au 31 mars 2023, de 22'006 fr. du 1er avril 2023 au 31 octobre 2023, de 21'290 fr. du 1er novembre 2023 au 31 décembre 2023, de 22'422 fr. du 1er janvier 2024 au 30 avril 2024, puis de 24'660 fr. dès le 1er mai 2024, et constate qu'entre le 1er avril 2022 et le 30 avril 2024, il s'est acquitté de 126'380 fr. à titre de prestations d'entretien en sa faveur.

b. Dans sa réponse du 12 juillet 2024, B______ a conclu à ce que la Cour confirme le jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Il a répondu aux allégués de son épouse et a formulé en sus ses propres allégués en lien avec les questions de fait remises en cause en appel.

Il a également produit des pièces nouvelles, à savoir un courriel que son épouse lui a adressé le 17 mars 2022 (pièce 1), des extraits du compte Instagram de cette dernière, ainsi que des extraits d'un site internet concernant des formations dispensées en 2022 et 2023 (pièce 2), et un relevé des recharges du véhicule électrique de son épouse pour la période allant du 12 juillet au 7 août 2023 (pièce 3).

c. Par réplique du 26 juillet 2024, A______ a conclu à l'irrecevabilité desdites pièces nouvelles et a, pour le surplus, persisté dans ses conclusions.

d. Par courriers du 20 août 2024, les époux ont été informés par la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits suivants résultent du dossier soumis à la Cour :

a. A______, née le ______ 1977, de nationalité française, et B______, né le ______ 1976, de nationalité italienne, se sont mariés à Monaco le ______ 2006.

De cette union sont issus :

- D______, né le ______ 2006, devenu majeur le ______ avril 2024, et

- C______, née le ______ 2010.

b. Devant le Tribunal, les époux se sont accordés à dire que leur séparation est intervenue le 1er avril 2022, date dès laquelle ils se sont partagés la garde de leurs enfants, exercée une semaine sur deux en alternance au domicile conjugal, copropriété des époux, le père ayant pris à bail un logement à la rue 1______ à Genève dès une date et pour un loyer indéterminés et la mère ayant loué une maison en France pour un loyer de 500 euros par mois dès novembre 2022.

Le partage du domicile conjugal a prévalu jusqu'en février 2023, soit jusqu'à ce que le père ait acquis, en mars 2023, un appartement à E______ (Genève), dans lequel il a emménagé, laissant alors la disposition de la maison conjugale à son épouse.

c. Par acte déposé au Tribunal le 3 mars 2023, A______ a requis le prononcé de mesures protectrices de l’union conjugale.

d. Cette dernière a, notamment, pris des conclusions en versement d'une contribution à son propre entretien dès le 1er avril 2022, qu'elle a chiffrée à 8'331 fr. par mois dans sa requête, puis qu'elle a augmentée à deux reprises. En dernier lieu, ses conclusions à cet égard sont celles reprises en appel (cf. supra let. B.a.); B______ s'est, pour sa part, engagé à verser une contribution de 10'000 fr. par mois en sa faveur.

S'agissant des enfants, le père s’est engagé à prendre en charge tous les frais d’entretien de D______ et la mère a renoncé au versement de toute contribution à son entretien pour son fils. Concernant C______, les parents se sont mis d’accord pour que le père prenne en charge directement tous ses frais fixes, y compris ses activités extrascolaires, et qu'il verse la somme totale de 13'000 fr. à titre d’arriérés de participation à l’excédent pour la période allant du 1er avril 2023 au 30 avril 2024 (1'000 fr. par mois), puis 2'000 fr. par mois dès le 1er mai 2024, la mère s’étant, quant à elle, engagée à prendre en charge tous les frais de vêtements de sa fille dès cette date.

e. La cause a été gardée à juger sur mesures protectrices à l'issue de l'audience tenue le 29 avril 2024 par le Tribunal.

f. Par acte déposé le 5 avril 2024 au Tribunal, B______ a déposé une demande unilatérale en divorce.

g. La situation personnelle et financière des parties et de leurs enfants se présente de la manière suivante :

g.a Les époux sont copropriétaires du domicile conjugal. Les frais d'entretien courant y relatifs se sont élevés à 190 fr. selon l'épouse en 2022 et 2023; en 2024, des travaux de rénovation, notamment du toit de la maison, ont été effectués sur ce bien à hauteur d'environ 21'000 fr.

Les parties sont également copropriétaires d'une résidence secondaire à F______ (France).

g.b B______ travaille au sein de la banque G______ en qualité de banquier d’affaires. Il a perçu des revenus mensuels à hauteur de 40'664 fr. 75 fr. nets en 2021 (bonus bruts de 252’708 fr. et frais de représentation de 44'271 fr. compris), de 55'305 fr. 30 en 2022 (bonus bruts de 462'911 fr. et frais de représentation de 65'292 fr. compris) et de 72'649 fr. 80 en 2023 (bonus bruts de 675'102 fr. – lequel n'est, selon l'époux, pas représentatif, mais à mettre en lien avec la faillite de [la banque] H______ - et frais de représentation de 88'177 fr. compris). Son salaire de base a peu varié en 2022 et 2023 et est demeuré inchangé en 2024.

Le Tribunal a retenu que les revenus nets de l'époux s'élevaient à 36'975 fr. par mois en 2021, à 49'865 fr. en 2022 et à 65'300 fr. en 2023, comprenant le salaire de base et les bonus, à l'exclusion des frais de représentation; pour 2024, il a estimé ses revenus nets à 60'000 fr. par mois.

A______ allègue qu'il aurait fallu inclure les frais de représentation, ce que conteste l'intéressé, qui fait valoir qu'il s'agit de frais effectifs; il en veut pour preuve ses relevés de salaire produits, dont il ressort qu'il bénéficie d'un montant forfaitaire de frais de représentation de 1'650 fr. par mois, auquel s'ajoute un montant variable de frais qui lui est remboursé.

Le Tribunal a retenu que les charges de B______ s'élevaient à 24'397 fr. par mois d’avril à décembre 2022, à 24'386 fr. de janvier à décembre 2023, à 27’034 fr. de janvier à avril 2024, puis à 24'410 fr. dès mai 2024, comprenant ses frais de logement (2'473 fr. d'intérêts hypothécaires et de frais de copropriété, ce montant étant également retenu pour la période entre la séparation et l’installation dans le nouveau logement à défaut d’indications plus précises), les primes d’assurance-maladie (525 fr. en 2022 et 2023, puis 549 fr. en 2024), les frais médicaux (11 fr. en 2022), la prime d'assurance RC-ménage (88 fr.), les frais de téléphonie (50 fr.), la prime d'assurance de son véhicule (136 fr.), la moitié de l'amortissement de la maison familiale (560 fr.), la moitié des frais de réparation de la maison familiale en 2024 (10'000 fr.), ses primes de 3ème pilier (574 fr. et 640 fr.), les frais pour la résidence secondaire des époux à F______ (1'320 fr.), les impôts (16'670 fr., correspondant aux impôts dus pour l'année 2022) et le montant de base selon les normes OP (1'350 fr.).

L'épouse remet en cause les frais de location pour un logement avant l'acquisition de l'appartement, dès lors que B______ n'a pas produit de contrat de bail et n'a donc pas justifié leur effectivité. Elle allègue qu'il conviendrait de tenir compte à ce titre de la moitié des frais relatifs au domicile conjugal jusqu'à l'acquisition dudit appartement, d'aucun amortissement (celui-ci devant être mis intégralement dans ses propres charges) et d'aucun frais de réparation. De plus, la charge fiscale retenue par le Tribunal, qui ne tient pas compte des déductions des contributions d'entretien, serait, selon elle, surévaluée.

Elle chiffre, pour sa part, les frais fixes de son époux à 14'820 fr. 60 par mois entre le 1er avril 2022 et le 31 mars 2023 (comprenant la moitié des frais relatifs au domicile conjugal (à l'exclusion de frais pour la location d'un appartement non justifiés) et d'impôts qu'elle estime à 8'160 fr.), puis à environ à 18'500 fr. dès le 1er avril 2023 (comprenant les frais relatifs à l'appartement qu'il a acquis et dans lequel il a emménagé (+ environ 250 fr.), ainsi que d'impôts qu'elle estime à 11'630 fr.).

Selon l'avis de taxation pour l'année 2021, les parties se sont acquittées de 13'000 fr. par mois d'impôts cette année-là.

g.c Juriste de formation, A______ a travaillé auprès de la banque I______ à Monaco, puis à Genève comme "legal advisor" jusqu’en 2007, de [la banque] G______ de 2008 à 2013, de [la banque] J______ en qualité de "compliance officer" de 2013 à 2017 (à 90% pour un salaire de base initial de 135'000 fr. brut par an), puis de [la banque] K______ en tant que "responsable investigations" au sein du département "compliance" avec une position de sous-directrice de 2017 à janvier 2020 (à 80% pour un salaire de base initial de 137'750 fr. brut par an, auquel s'ajoutaient 7'250 fr. de frais de représentation annuels).

Depuis février 2020, elle est employée à 50% au sein de la banque L______ comme "compliance officer"; son salaire net (bonus compris) s’est élevé à 7'933 fr. par mois en 2022 (celui-ci ayant, selon elle, été plus élevé en raison d'heures supplémentaires exceptionnelles nécessitées par l'absence de sa supérieure), respectivement à 7'414 fr. en 2023; depuis mars 2024, son salaire de base a augmenté d'environ 350 fr. nets par mois.

Elle allègue que son état de santé ne lui permettrait pas d’envisager un poste à un taux d’activité supérieur à 50%, aux motifs qu'elle a souffert d'un burn-out en 2017 et 2019 et qu'elle souffre de répercussions psychologiques du comportement inadéquat adopté par son époux depuis la séparation, générant un stress l'ayant conduit à des malaises vagaux durant l'été 2023; à l'appui de ces allégations, elle a produit deux documents établis par son médecin psychiatre, à savoir une attestation datée du 20 mars 2023 (selon laquelle il la suit de manière hebdomadaire depuis janvier 2020 pour une prise en charge de départ portant sur un trouble anxio-dépressif dans le contexte d'un épuisement (burn-out), la thérapie étant "actuellement" centrée sur la gestion des émotions liées à ses difficultés), ainsi qu'un certificat d'incapacité de travail pour la période allant du 11 au 24 juillet 2023.

Elle allègue également qu'il ressort des deux attestations établies les 24 mai 2023 et 22 avril 2024 par son employeur qu'il n'a pas la possibilité d'augmenter le taux d'activité de son employée.

B______ allègue, pour sa part, que son épouse a démissionné en 2020, non pas en raison de problèmes de santé, mais pour débuter son activité de yoga. En effet, parallèlement à son activité à la banque, elle propose, depuis 2020, sur ses sites internet (P______.ch et Q______.com), des massages pour femmes enceintes et post-partum, des cours et des retraites de yoga, notamment à R______ (Bourgogne, France), ainsi que des consultations ayurvédiques. Elle allègue que ces prestations ne lui auraient rapporté que de maigres revenus, soit quelques 150 fr. par mois, et qu’elle aurait cessé cette activité, ce que son époux conteste.

Les frais liés aux dépenses alimentaires de l'épouse et des enfants ont été payés par l’époux par l’entremise de la nounou au moyen d'une carte de crédit que ce dernier lui a remise.

Le premier juge a retenu que, depuis la séparation des parties le 1er avril 2022 et jusqu’à la fin avril 2024, l'épouse avait uniquement pris en charge une partie de son montant de base selon les normes OP et de ceux des enfants, estimés à 150 fr. par mois pour chacun de ces derniers et à 750 fr. pour elle-même (comprenant les frais de SIG et d’internet de la maison familiale), dans la mesure où l'époux avait pris en charge les frais de nourriture de la famille, son 3ème pilier A depuis janvier 2023 (588 fr.), les frais d’alarme de la maison familiale depuis avril 2023 (85 fr.), ses primes d’assurance-maladie LAMal et LCA depuis avril 2023 (586 fr. d’avril à décembre 2023, puis 771 fr. dès 2024) et ses frais de téléphonie depuis novembre 2023 (63 fr.). Le Tribunal n'a pas pris en compte le loyer de la maison en Bourgogne, cette habitation étant utilisée par l'épouse pour ses seuls loisirs.

Depuis la séparation, A______ avait ainsi payé ses propres charges mensuelles à hauteur de 750 fr. d’avril à décembre 2022, de 1’338 fr. de janvier à mars 2023, de 2’009 fr. d’avril à octobre 2023, de 2'072 fr. en novembre et décembre 2023 et de 2'072 fr. de janvier à avril 2024, soit au total 37'259 fr.; elle avait en outre assumé 300 fr. par mois jusqu’en mars 2023 pour D______ et C______, respectivement 150 fr. par mois d’avril 2023 à avril 2024 pour C______ uniquement.

Dès mai 2024, le Tribunal a arrêté les charges dont elle devait s'acquitter à 7’054 fr. par mois, comprenant les intérêts hypothécaires pour la maison familiale (1'906 fr.), la moitié de l'amortissement de la maison familiale (560 fr.), les charges pour la maison familiale (304 fr.), la prime d’assurance bâtiment (98 fr.), la prime d’assurance ménage (73 fr.), les primes d'assurance-maladie LAMal et LCA (771 fr.), les frais médicaux (137 fr.), la cotisation pour le 3ème pilier A (588 fr.), les frais de téléphonie (63 fr.), la prime d’assurance voiture (149 fr.), les impôts liés à ses propres revenus (1'055 fr.) et le montant de base selon les normes OP (1'055 fr.). S'y ajoutaient également, pour C______, 150 fr., ainsi que ses frais de vêtements conformément à l'accord des parties.

A______ allègue que sa charge fiscale sera supérieure à celle retenue par le Tribunal compte tenu des contributions allouées à C______ et elle-même, ainsi que de l'éventuel revenu hypothétique retenu à son encontre.

Pour le surplus, elle chiffre ses charges mensuelles (en les listant, mais sans fournir plus d'explications à cet égard) à 10'751 fr. du 1er avril 2022 au 31 mars 2023 (comprenant 500 fr. de frais de logement en France et une charge fiscale estimée à 3'950 fr.), à 15'328 fr. du 1er avril 2023 au 31 octobre 2023 (comprenant l'entier des frais relatifs au domicile conjugal (+1'900 fr.), à l'exclusion des frais de logement en France (-500 fr.), et une charge fiscale estimée à 7'100 fr.), à 15'288 fr. du 1er novembre 2023 au 31 décembre 2023 (comprenant une charge fiscale estimée à 8'500 fr., mais plus de frais de paiement de son véhicule
(− 1'270 fr.)), à 17'008 fr. du 1er janvier au 30 avril 2024 (comprenant 1'560 fr. de frais de rénovation pour la toiture et 160 fr. supplémentaires de prime d'assurance-maladie LCA), puis à 16'663 fr. dès le 1er mai 2024 (comprenant une charge fiscale estimée à 8'100 fr.).

En première instance, elle a reconnu que son époux s'était acquitté en sa faveur de paiements directs à titre de contribution d’entretien totalisant 126'380 fr. au total depuis le 1er avril 2022.

Le Tribunal a retenu qu'entre le 1er avril 2022 et le 30 avril 2024, B______ avait directement pourvu à l'entretien de son épouse à hauteur de 7'745 fr. par mois d’avril à décembre 2022, de 6’858 fr. de janvier à mars 2023, de 5’830 fr. d’avril à octobre 2023, de 4’797 fr. en novembre et décembre 2023 et de 7’422 fr. de janvier à avril 2024 (comprenant, notamment, la moitié de l'amortissement du domicile conjugal (560 fr. pendant 25 mois, à savoir 14'000 fr.) et la moitié des frais de rénovation du toit de la maison (10'500 fr.)), soit à raison de 170’371 fr. au total (montant qui, sans tenir compte de la part d’amortissement et des frais de réparation de la maison familiale, avoisinait celui admis par l'épouse). A______ conteste ce montant, alléguant que son époux n'aurait pas justifié ses paiements directs et qu'elle aurait elle-même payé les travaux de rénovation.

g.d D______ était scolarisé au Collège de M______ jusqu’en octobre 2023. Depuis novembre 2023, il poursuit ses études au sein de [l'école privée] N______.

Il vit exclusivement chez son père depuis fin avril 2023.

Le Tribunal a retenu que ses frais fixes - lesquels étaient assumés par le père - s'élevaient à 538 fr. par mois d’avril 2022 à mars 2023, 688 fr. d’avril à octobre 2023, 2’824 fr. en novembre et en décembre 2023, 2'827 fr. de janvier à avril 2024, puis 3'737 fr. depuis mai 2024, comprenant son écolage (2'136 fr. depuis novembre 2023), les cours de boxe et de piano (226 fr. par mois), les primes d’assurance-maladie LAMal et LCA (183 fr. en 2022 et 2023, 190 fr. de janvier à avril 2024, puis estimés à 500 fr. dès sa majorité en mai 2024), les frais de transports publics (45 fr.), les frais de téléphonie (45 fr.) et le montant de base (450 fr. d’avril 2022 à mars 2023, 600 fr. d’avril 2023 à avril 2024 et 1'200 fr. depuis sa majorité, ces montants comprenant les frais de loisirs, notamment les frais de ski de 125 fr. par mois), allocations d’études déduites (411 fr. par mois en 2022 et 2023 , respectivement 415 fr. dès 2024).

La mère allègue que les cours de boxe et de piano ne font pas partie du minimum vital selon le droit de la famille et que le montant de base de D______ demeure à 600 fr. par mois après sa majorité, puisqu'il poursuit ses études et vit chez son père. Elle chiffre les frais fixes de son fils à 517 fr. 40 du 1er avril 2022 au 31 octobre 2023, à 2'653 fr. 20 du 1er novembre 2023 au 31 décembre 2023, à 2'659 fr. 50 du 1er janvier 2024 au 30 avril 2024, puis à 2'919 fr. 83 dès le 1er mai 2024, lesdits frais tenant compte, notamment, de primes d'assurance-maladie LAMal et LCA à hauteur de 450 fr. dès le 1er mai 2024, à l'exclusion des frais de téléphonie et sous déduction de 311 fr. d'allocations familiales, sans qu'elle ne motive son appel sur ces points.

g.e C______ est scolarisée à [l'école privée] O______.

Le premier juge a retenu que le père s'est acquitté à son égard de frais fixes à hauteur de 3’443 fr. par mois d’avril 2022 à décembre 2023, puis de 3’436 fr. depuis janvier 2024, comprenant son écolage (1’642 fr.), les frais de natation (338 fr.), les frais de nounou (1’052 fr.), les primes d’assurance maladie LAMal et LCA (182 fr. en 2022 et 2023, puis 189 fr. depuis janvier 2024), les frais de transports publics (45 fr.), les frais de téléphonie (45 fr. en 2022 et 2023, puis 35 fr. depuis 2024) et le montant de base (450 fr., ces montants comprenant les frais de loisirs, notamment les frais de ski d'environ 75 fr. par mois), allocations familiales déduites (311 fr. en 2022 et 2023 et 315 fr. dès 2024).

La mère allègue que les cours de natation ne font pas partie du minimum vital selon le droit de la famille. Elle évalue les frais fixes de son fille à 3'342 fr. 50 du 1er avril 2022 au 31 octobre 2023, à 3'384 fr. 80 du 1er novembre 2023 au 31 décembre 2023, puis à 3'391 fr. 10 dès le 1er janvier 2024, en tenant compte, notamment, d'écolage (frais de cantine inclus) à hauteur de 1'774 fr. du 1er avril 2022 au 31 octobre 2023, de 1'816 fr. 30 dès le 1er novembre 2023, ainsi que d'un montant de base de 600 fr., à l'exclusion des frais de téléphonie sans qu'elle ne motive son appel sur ces points.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices de l'union conjugale, qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC, dans les causes dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Dès lors que le litige porte sur le montant de la contribution à l'entretien de l'épouse, il est de nature pécuniaire (ATF 133 III 393 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_42/2013 du 27 juin 2013 consid. 1.1; 5A_906/2012 du 18 avril 2013 consid. 1; 5A_236/2011 du 18 octobre 2011 consid. 1; 5A_511/2010 du 4 février 2011 consid. 1.1).

En l'espèce, en vertu de l'art. 92 al. 2 CPC, la capitalisation du montant de la contribution d'entretien restée litigieuse au vu des dernières conclusions des parties devant le premier juge excède 10'000 fr.

Les jugements de mesures protectrices étant régis par la procédure sommaire selon l'art. 271 CPC, le délai d'introduction de l'appel est de 10 jours à compter de la notification de la décision motivée ou de la notification postérieure de la motivation (art. 239, 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC).

L'appel ayant été formé en temps utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1 et 314 al. 1 CPC), il est recevable.

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

La présente cause est soumise aux maximes de disposition (art. 58 al. 1 CPC; ATF 128 III 411 consid. 3.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_693/2007 du 18 février 2008 consid. 6) et inquisitoire limitée (art. 272 CPC; ATF 129 III 417 précité; arrêt du Tribunal fédéral 5A_245/2019 du 1er juillet 2019 consid. 3.2.1).

1.3 La Cour applique le droit d'office (art. 57 CPC). Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, elle le fait uniquement sur les points du jugement que l'appelant estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante et, partant, recevable. Hormis les cas de vices manifestes, elle doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).

1.4 Les mesures protectrices de l'union conjugale étant soumises à la procédure sommaire (art. 271 let. a et d CPC; arrêts du Tribunal fédéral 5A_918/2014 du 17 juin 2015 consid. 4.2.1; 5A_635/2013 du 28 juillet 2014 consid. 3.2.1), sa cognition est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2014 du 20 août 2014 consid. 1.5).

Le tribunal établit les faits d'office (art. 272 CPC).

1.5 L'appelante conclut à l'irrecevabilité des allégués propres formulés par son époux dans sa réponse.

1.5.1 La partie intimée à l'appel peut elle aussi présenter des griefs dans sa réponse à l'appel, si ceux-ci visent à exposer que malgré le bien-fondé des griefs de l'appelant, ou même en s'écartant des constats et du raisonnement juridique du jugement de première instance, celui-ci est correct dans son résultat. L'intimé à l'appel peut ainsi critiquer dans sa réponse les considérants et les constats du jugement attaqué qui pourraient lui être défavorables au cas où l'instance d'appel jugerait la cause différemment (arrêt du Tribunal fédéral 4A_258/2015 du 21 octobre 2015 consid. 2.4.2 et les réf. cit.).

1.5.2 En l'occurrence, les allégués propres formulés par l'intimé portent sur les questions de fait remises en cause en appel et sont, par conséquent, recevables.

1.6 L'appelante conclut à l'irrecevabilité des pièces nouvelles produites par l'intimé.

1.6.1 L'art. 317 al. 1 CPC prévoit que les faits et moyens de preuve nouveaux sont admissibles en appel pour autant qu'ils soient invoqués ou produits sans retard (let. a) et qu'ils n'aient pas pu l'être en première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b). Ces conditions sont cumulatives (arrêt 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.1). S'agissant des vrais nova ("echte Noven"), la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée. En ce qui concerne les pseudo nova ("unechte Noven"), à savoir les faits et moyens de preuves qui étaient déjà survenus à la fin de l’audience des débats principaux de première instance, il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être produit en première instance (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

1.6.2 In casu, les pièces produites par l'intimé sont irrecevables, dès lors qu'elles auraient pu être présentées au premier juge avant que la cause ait été gardée à juger par celui-ci en date du 29 avril 2024, étant toutefois relevé qu'elles ne sont pas déterminantes pour l'issue du litige.

2. L'appelante remet en cause le jugement entrepris s'agissant de son propre entretien.

2.1 Le Tribunal a considéré que l'épouse n'avait pas rendu vraisemblable une atteinte à sa santé, qu'elle avait auparavant travaillé à un taux d'activité supérieur et qu'elle ne pouvait soutenir de manière crédible que son activité professionnelle secondaire ne lui rapportait aucun revenu. Pouvant être attendu d'elle qu'elle fournisse des efforts identiques à ceux de son époux, il lui a imputé un revenu hypothétique pour une activité à 90% (taux qu'elle avait pratiqué durant la quasi-totalité de la vie commune) et ce, depuis janvier 2023 afin de tenir compte d’une période d’adaptation de 9 mois depuis la séparation, soit un salaire net d'environ 13'350 fr. par mois en 2023 et de 14'000 fr. en 2024. Après paiement de ses frais et de ceux de enfants demeurant à sa charge (cf. supra EN FAIT let. g.c) et compte tenu des paiements directs effectués par son époux, elle disposait d'un solde d'environ 6'800 fr. d'avril à décembre 2022, 11'000 fr. de janvier 2023 à avril 2024, puis 6'800 fr. dès mai 2024.

S'agissant de l'époux, une fois couvertes ses propres charges, celles de son épouse (jusqu'en avril 2024) et celles des enfants (cf. supra EN FAIT let. g.d), il disposait d'un solde d'environ 13'700 fr. par mois d'avril à décembre 2022, 30'000 fr. de janvier à mars 2023, 27'000 fr. d'avril 2023 à octobre 2023, 26'000 fr. de novembre 2023 à décembre 2023, 15'300 fr. de janvier à avril 2024, puis 28'400 fr. dès mai 2024.

Ainsi, pour la période allant d'avril 2022 à avril 2024, l'appelante pouvait prétendre, en sus des montant d’ores et déjà pris en charge par l’époux, au versement d’une participation à l’excédent de 3'429 fr. 50 par mois d’avril à décembre 2022, de 9'181 fr. 50 de janvier à mars 2023, de 7'881 fr. d’avril à octobre 2023, de 7'361 fr. en novembre et décembre 2023 et de 1'751 fr. 50 de janvier à avril 2024, soit à un total à 135'305 fr. Dès mai 2024, elle pouvait prétendre au versement d’une participation à l’excédent de 10'810 fr., à laquelle s'ajoutaient des impôts supplémentaires afférents à la contribution versée estimés à 2'000 fr., soit au montant arrondi de 13'000 fr.

2.2 L'appelante sollicite la couverture des déficits qu'elle allègue subir depuis la séparation, ainsi que de parts d'excédent (à hauteur de 1/3, respectivement de 2/5 dès la majorité de D______, soit dès le 1er mai 2024) supérieures à celles arrêtées par le Tribunal.

Elle fait valoir que la situation financière des parties a été mal évaluée, que les conditions pour lui imputer un revenu hypothétique ne sont pas remplies (revenus des époux confortables, impossibilité d'augmenter son taux d'activité auprès de son employeur actuel, atteinte à santé résultant de son burn-out, attitude de son époux depuis la séparation et besoin de disponibilité pour la prise en charge de C______ une semaine sur deux), que le premier juge n'a pas indiqué dans quel domaine elle pouvait bénéficier dudit revenu hypothétique, semblant s'être contenté de doubler son salaire, alors que son employeur actuel n'était pas en mesure de lui offrir un taux d'occupation supérieur, que, selon les statistiques fédérales, elle ne pourrait prétendre à un salaire supérieur à environ 7'000 fr., de sorte qu'elle n'aurait aucune raison de démissionner de son emploi actuel très bien rémunéré en dépit de son mi-temps, et qu'en tout état, un délai d'adaptation d'au moins 12 mois aurait dû lui être octroyé de manière non rétroactive.

L'intimé relève, pour sa part, que les revenus représentatifs du niveau de vie durant la vie commune sont en dernier lieu ceux de l'année 2021 (qu'il chiffre à 36'975 fr. 50 nets par mois, frais de représentation déduits), que son épouse s'est précisément fondée sur les revenus de cette année-là (frais de représentation inclus) pour fixer ses conclusions initiales dans sa requête et que ses revenus ultérieurs dépassent le train de vie mené par les parties durant la vie commune et, partant, la limite supérieure du droit à l'entretien de son épouse. Il adhère, par ailleurs, à l'imputation d'un revenu hypothétique à l'égard de son épouse.

S'agissant des arriérés de contributions, l'épouse considère que seul le montant total de 126'380 fr. qu'elle a admis avoir perçu sous forme de paiements directs doit être porté en déduction, ce que l'intimé conteste.

2.3

2.3.1 Lorsque le juge constate que la suspension de la vie commune est fondée, il fixe la contribution pécuniaire à verser par une partie à l'autre (art. 176 al. 1 ch. 1 CC).

Le principe et le montant de la contribution d'entretien due selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC se déterminent en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux. Même lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur une reprise de la vie commune, l'art. 163 CC demeure la cause de l'obligation d'entretien réciproque des époux (ATF 138 III 97 consid. 2.2; 137 III 385 consid. 3.1; 130 III 537 consid. 3.2, in SJ 2004 I 529). Tant que dure le mariage, les époux doivent ainsi contribuer, chacun selon leurs facultés, aux frais supplémentaires engendrés par l'existence parallèle de deux ménages. Si la situation financière des époux le permet encore, le standard de vie antérieur, choisi d'un commun accord, doit être maintenu pour les deux parties. Quand il n'est pas possible de conserver ce niveau de vie, les époux ont droit à un train de vie semblable (ATF 119 II 314 consid. 4b/aa; arrêts du Tribunal fédéral 5A_173/2013 du 4 juillet 2013 consid. 4.2; 5A_236/2011 du 18 octobre 2011 consid. 4.2.3).

2.3.2 Pour arrêter les contributions en droit de la famille, il y a lieu de se fonder sur la méthode en deux étapes avec répartition de l'excédent, sauf situations très particulières dans lesquelles son application ne ferait aucun sens, comme le cas de situations financières exceptionnellement favorables. Cette méthode consiste d'abord à établir les ressources financières à disposition - y compris d'éventuels revenus hypothétiques - puis à déterminer les besoins de la personne dont l'entretien est concerné (entretien dit convenable; ATF 147 III 301 consid. 4.3; 147 III 293 consid. 4.5 in fine147 III 265 consid. 6.6 in fine; arrêt du Tribunal fédéral 5A_476/2024 du 28 février 2024 consid. 3.2.1).  

Selon cette méthode, on examine les ressources et besoins des personnes intéressées, puis les ressources sont réparties entre les membres de la famille concernés de manière à couvrir, dans un certain ordre, le minimum vital du droit des poursuites ou, si les ressources sont suffisantes, le minimum vital élargi du droit de la famille, puis l'excédent éventuel (ATF 147 III 265 consid. 7).

Le juge jouit d'un large pouvoir d'appréciation et applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC; ATF 140 III 337 consid. 4.2.2; 134 III 577 consid. 4;
128 III 411 consid. 3.2.2).

Les besoins sont calculés en prenant pour point de départ les lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP, en y dérogeant s'agissant du loyer (participation de l'enfant au logement du parent gardien). Pour les enfants, les frais médicaux spécifiques et les frais scolaires doivent être ajoutés aux besoins de base. Lorsque les moyens financiers le permettent, l'entretien convenable doit être étendu au minimum vital du droit de la famille. Pour les parents, les postes suivants entrent généralement dans l'entretien convenable (minimum vital du droit de la famille) : les impôts, les forfaits de télécommunication, les assurances, les frais de formation continue indispensable, les frais de logement correspondant à la situation (plutôt que fondés sur le minimum d'existence), les frais d'exercice du droit de visite, un montant adapté pour l'amortissement des dettes, et, en cas de circonstances favorables, les primes d'assurance-maladie complémentaires, ainsi que les dépenses de prévoyance privée des travailleurs indépendants. En revanche, le fait de multiplier le montant de base ou de prendre en compte des postes supplémentaires comme les voyages ou les loisirs n'est pas admissible. Ces besoins doivent être financés au moyen de la répartition de l'excédent. Toutes les autres particularités devront également être appréciées au moment de la répartition de l'excédent (ATF 147 III 265 consid. 7.2).

Lorsqu'il reste des ressources après la couverture du minimum vital de droit de la famille, l'entretien convenable de l'enfant peut inclure une participation à cet excédent (ATF 147 III 265 consid. 7.2). L'excédent doit en principe être réparti entre les parents et les enfants mineurs par "grandes têtes" et "petites têtes", la part d'un enfant correspondant à la moitié de celle d'un parent (ATF 147 III 265 consid. 7.3).

L'entretien de l'enfant majeur est limité au minimum vital du droit de la famille; celui-ci n'a pas le droit à une part de l'excédent (ATF 147 III 265 consid. 7.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_52/2021 du 29 octobre 2021 consid. 7.2; 5A_1072/2020 du 25 août 2021 consid. 8.4).

Le minimum vital du débirentier doit en principe être préservé (ATF 137 III 59 consid. 4.2).

2.3.3 L'obligation pour chacun des époux de subvenir à ses propres besoins (principe de l'indépendance financière) par la reprise ou l'extension d'une activité lucrative existe déjà à partir du moment de la séparation, lorsqu'il n'existe plus de perspective raisonnable de reprise de la vie conjugale. Un époux ne peut prétendre à une contribution d'entretien que si, en dépit des efforts que l'on peut raisonnablement exiger de lui, il n'est pas ou pas totalement en mesure de pourvoir lui-même à son entretien convenable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_513/2023 du 20 mars 2024 consid. 6.3.2.1 et les réf. cit.).  

Pour fixer la contribution d'entretien, le juge doit en principe tenir compte du revenu effectif des parties, tant le débiteur d'entretien que le créancier pouvant néanmoins se voir imputer un revenu hypothétique supérieur. Il s'agit ainsi d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et qu'on peut raisonnablement exiger d'elle afin de remplir ses obligations (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_513/2023 du mars 2024 consid. 6.3.2.2).  

Lorsque le juge entend tenir compte d'un revenu hypothétique, il doit examiner successivement deux conditions. Il doit d'abord déterminer si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé. Le juge doit ensuite établir si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_645/2020 précité consid. 5.2.1). Pour déterminer si un revenu hypothétique peut être imputé, les circonstances concrètes de chaque cas sont déterminantes. Les critères dont il faut tenir compte sont notamment l'âge, l'état de santé, les connaissances linguistiques, la formation, l'expérience professionnelle et la situation du marché du travail (arrêts du Tribunal fédéral 5A_734/2020 du 13 juillet 2021 consid. 3.1).

Il y a en principe lieu d'accorder à la partie à qui l'on veut imputer un revenu hypothétique un délai approprié pour s'adapter à sa nouvelle situation; ce délai doit être fixé en fonction des circonstances du cas particulier (ATF 129 III 417 consid. 2.2; 114 II 13 consid. 5; arrêts 5A_192/2021 du 18 novembre 2021 consid. 7.1.1; 5A_484/2020 précité loc. cit.; 5A_534/2019 du 31 janvier 2020 consid. 4.1), notamment le temps durant lequel l'époux a été éloigné du marché du travail, la conjoncture économique, le marché du travail, la situation familiale, le temps nécessaire pour adapter la prise en charge des enfants, le besoin de formation et de réorientation nécessaires à une réinsertion professionnelle etc. (ATF 147 III 308 consid. 5.4; 147 III 481 consid. 4.6 et les références; 129 III 417 consid. 2.2). En ce qui concerne spécifiquement la réinsertion professionnelle, le délai transitoire doit servir à créer les conditions nécessaires à cet effet. La réorientation interne ainsi que le processus de candidature sur le marché du travail peuvent prendre un certain temps; il se peut aussi qu'une formation continue s'avère utile pour atteindre l'objectif d'une réinsertion professionnelle adéquate, car plus la capacité d'autosuffisance du créancier potentiel est élevée, plus le débiteur est déchargé par la suite, de sorte qu'il doit également s'intéresser à cet objectif. Dans ce contexte et selon les circonstances, des délais transitoires de longue durée peuvent être adaptés, en particulier lorsqu'ils permettent la perspective d'une augmentation claire de l'autonomie financière par le suivi d'une formation complémentaire. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que même dans ces cas, il ne doit s'agir que d'une période transitoire (ATF 147 III 308 consid. 5.4). 

Il peut être attendu du parent se consacrant à la prise en charge des enfants qu'il recommence à travailler, en principe, à 50% dès l'entrée du plus jeune enfant à l'école obligatoire, à 80% à partir du moment où celui-ci débute le degré secondaire, et à 100% dès la fin de sa seizième année (ATF 144 III 481 consid. 4.7.6). Ces lignes directrices ne sont pas des règles strictes. Leur application dépend du cas concret; le juge en tient compte dans l'exercice de son large pouvoir d'appréciation (art. 4 CC; ATF 144 III 481 consid. 4.7.9; arrêts du Tribunal fédéral 5A_329/2019 du 25 octobre 2019 consid. 3.3.1.2; 5A_931/2017 du 1er novembre 2018 consid. 3.1.2).

Lorsqu'un revenu hypothétique est imputé au débirentier ou au crédirentier, sa charge fiscale doit être estimée en fonction dudit revenu (arrêt du Tribunal fédéral 5A_246/2019 du 9 juin 2020 consid. 5.3.4 et les réf. cit.).

2.3.4 Pour l'enfant majeur, il y a lieu de retenir le même montant de base selon les normes OP que pour les mineurs lorsque l’enfant majeur demeure chez un parent et ne dispose pas de revenus (arrêt du Tribunal fédéral 5A_292/2023 du 6 mai 2024 consid. 6.5.2.2).

2.3.5 Des contributions doivent être déduits les montants dont l'intimé s'est d'ores et déjà acquitté à titre d'entretien (arrêt du Tribunal fédéral 5A_454/2017 du 17 mai 2018 consid. 5.3, non publié in ATF 144 III 377).

Si le débiteur prétend avoir déjà versé des prestations d'entretien au crédirentier depuis la séparation des époux, il est nécessaire que le juge du fond statue sur les montants qui doivent être déduits de l'arriéré; il ne peut pas se contenter de réserver dans sa décision l'imputation des prestations déjà versées sans en chiffrer le montant (ATF 138 III 583 consid. 6.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_428/2012 du 20 septembre 2012 consid. 3.3).

2.4 En l'espèce, il n'est pas contesté que la situation financière des parties doit être examinée en tenant compte de leurs minimas vitaux selon le droit de la famille.

La fixation du dies a quo à la date du 1er avril 2022 n'est pas non plus critiquée.

Les revenus de l'intimé ont sensiblement augmenté depuis 2021. Dans ses calculs de contributions pour son propre entretien depuis le 1er avril 2022, l'appelante ne tient compte que des revenus que son époux a réalisés en 2023, ce qui ne saurait être suivi. En effet, premièrement, elle ne saurait se fonder, en 2022, sur des revenus que l'intimé n'a pas encore réalisés. Deuxièmement, comme le relève à raison ce dernier, le droit à l'entretien de l'appelante est limité au train de vie des époux au moment de la séparation. Or, les parties se sont séparées le 1er avril 2022 et l'épouse n'a pas rendu vraisemblable ni même allégué qu'elle aurait bénéficié de l'augmentation des revenus de son époux depuis le 1er janvier 2022, ce qui apparaît de surcroît peu probable, dès lors que le salaire de base de l'intimé n'a pas beaucoup varié et que cet accroissement de revenus résulte d'un bonus plus important versé vraisemblablement peu avant la séparation. Par conséquent, il convient de retenir que les revenus de l'intimé déterminant pour évaluer le train de vie des parties au jour de la séparation correspond à ceux de l'année 2021, à savoir 38'625 fr. nets par mois (à savoir 36'975 fr., auxquels s'ajoutent 1'650 fr. de frais de représentation forfaitaires non étayés, mais à l'exclusion des autres frais de représentation variables, dont il ressort des fiches de salaire produites qu'ils ont été remboursés à la demande et vraisemblablement pour des frais spécifiques).

De son côté, l'appelante a perçu un salaire net de 7'939 fr. par mois en 2022, de 7'414 fr. en 2023, puis d'environ 7'760 fr. depuis 2023. Si le principe de l'imputation d'un revenu hypothétique pour une activité à 90% à son égard n'apparaît pas critiquable conformément au principe de l'indépendance financière dès la séparation des époux et du fait que l'intéressée n'a pas rendu vraisemblable être empêchée de travailler en raison d'une atteinte à sa santé, tant la question du montant de ce revenu que celle du délai approprié qui devrait lui être octroyé pour le réaliser peuvent néanmoins rester indécises au vu des considérations qui suivent.

Lors de la séparation intervenue le 1er avril 2022, les parties se sont accordées pour partager l'ancien domicile conjugal à raison d'une semaine chacune en alternance. Cette organisation a prévalu jusqu'au 1er avril 2023, date à laquelle l'intimé a emménagé dans un appartement qu'il a acquis. De ce fait, il convient de tenir compte des frais de logement supplémentaires de l'appelante (500 fr.) entre le 1er avril 2022 et le 31 mars 2023; tel ne sera pas le cas pour l'intimé, qui n'a pas justifié de frais effectifs de logement supplémentaires.

L'appelante allègue qu'entre le 1er avril 2022 et le 31 mars 2023, les charges de la famille auraient été de 14'820 fr. 60 pour son époux (incluant 8'160 fr. d'impôts), de 10'751 fr. pour elle-même (incluant lesdits frais de logement supplémentaires de 500 fr. et 3'950 fr. d'impôts), de 3'342 fr. pour C______ et de 517 fr. pour D______. Les impôts globaux qu'elle allège pour son époux et elle-même (12'000 fr.) correspondent à peu près à ceux payés par la famille en 2021 (13'000 fr.), de sorte que les impôts qu'elle allègue à l'égard de son époux semblent corrects (quand bien même il est tenu compte de revenus moins élevés que ceux allégués par l'appelante) et que les seuls frais engendrés par la séparation des parties en 2022 sont les frais de logement en France de l'appelante de 500 fr., qui seront, par conséquent ajoutés aux revenus de l'intimé afin de permettre leur couverture et le maintien du train de vie.

Ainsi, quand bien même l'on tient compte des charges alléguées par l'appelante elle-même, il apparaît que, entre le 1er avril 2022 et le 31 mars 2023, cette dernière aurait droit à la couverture de son déficit, lequel avoisinerait environ 3'300 fr. (en tenant compte du salaire de 2023 de 7'414 fr. – ce qui lui est favorable – par mesure de simplification), ainsi qu'à 1/3 de l'excédent des parties s'élevant à environ 17'110 fr. ([38'625 fr. + 500 fr. + 7'414 fr.] – [14'820 fr. + 10'751 fr. + 3'342 fr. + 517 fr.]), soit à une part d'excédent d'environ 5'700 fr. L'appelante pourrait ainsi prétendre à une contribution d'entretien de l'ordre de 9'000 fr. (3'300 fr. de déficit et 5'700 fr. de part d'excédent).

Dès le 1er avril 2023, l'appelante fait état d'une modification de ses charges en raison de sa prise en charge à 100% des frais relatifs au domicile conjugal (+ 1'400 fr. dès le 1er avril 2023 (1'900 fr. – 500 fr. de loyer en France)), de la fin du paiement du crédit de son véhicule (-1'270 fr. dès le 1er novembre 2023), de l'augmentation des frais d'entretien de la maison (+1'560 fr. dès le 1er janvier 2024 en raison des frais de rénovation de la toiture), ainsi que de sa prime d'assurance-maladie LCA (+160 fr.) et de l'accroissement de ses impôts (+ 3'150 fr., qu'elle n'explicite pas). Or il ne peut être tenu compte des frais de rénovation de la toiture dans ses charges, ceux-ci étant extraordinaires et leur sort devant être réglés dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial. S'agissant des autres postes, ils représentent - hors impôts - une augmentation globale de ses charges de l'ordre de 300 fr. par mois (1'400 fr. – 1'270 fr. + 160 fr.), portant son entretien à 9'300 fr., étant relevé que l'on peut attendre de l'intimé qu'il couvre les frais supplémentaires de scolarité de D______ encourus dès le 1er novembre 2023 au moyen de ses revenus qui ont augmenté depuis la séparation afin de maintenir le train de vie de son épouse.

Pour la période allant du 1er avril 2022 au 30 avril 2024, le Tribunal a arrêté le solde des arriérés de contributions dus par l'intimé à 135'305 fr. Si l'on ajoute à ce montant la somme totale des paiements directs effectués par l'intimé admise par l'appelante (126'380 fr.), il apparaît que le solde des arriérés fixé par le premier juge lui procure une contribution moyenne de 10'450 fr. par mois ([135'305 fr. + 126'380 fr.] / 25 mois), montant qui couvre l'entretien précité auquel elle a droit, ainsi que l'alourdissement de sa charge fiscale personnelle dès le 1er avril 2023 résultant d'une l'augmentation de son entretien estimée à moins de 300 fr.

Dès le 1er mai 2024, soit dès la majorité de D______, l'appelante peut prétendre à une part d'excédent de 2/5 (soit de 6'850 fr. au lieu de 5'700 fr.), à savoir à une contribution de l'ordre de 10'750 fr. (9'300 fr. + 300 fr. + 6'850 fr. - 5'700 fr.), de sorte que son entretien et l'augmentation de sa charge fiscale personnelle sont également couverts (et ce, sans même avoir tenu compte d'un revenu hypothétique), dès lors que l'appelante se voit attribuer une contribution de 13'000 fr. par mois.

Par conséquent, les chiffres 10 et 11 du dispositif du jugement entrepris seront confirmés.

3. Les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie succombante (art. 95 et 106 1ère phrase CPC). Le juge peut s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation, notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC).

Les frais judiciaires de la procédure d'appel seront fixés à 2'000 fr. (art. 31 et 37 RTFMC), entièrement couverts par l'avance de frais opérée par l'appelante, laquelle demeure intégralement acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Vu l'issue du litige, ils seront mis à la charge de l'appelante (art. 95, 104 al. 1, 105 et 106 al. 1 CPC).

Compte tenu de la nature du litige et par équité, chaque partie supportera ses propres dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 24 juin 2024 par A______ contre les chiffres 10 et 11 du dispositif du jugement JTPI/7304/2024 rendu le 11 juin 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/3910/2023-6.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 2'000 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance fournie, laquelle demeure entièrement acquise à l'Etat de Genève.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile, les moyens étant limités selon l'art. 98 LTF.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.