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Décisions | Chambre civile

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C/25223/2013

ACJC/1046/2024 du 27.08.2024 sur ORTPI/430/2024 ( SCC ) , JUGE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/25223/2013 ACJC/1046/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 27 AOÛT 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [GE], recourante contre une ordonnance ORTPI/430/2024 du Tribunal de première instance du 11 avril 2024, représentée par Me Patrick BLASER, avocat, Borel & Barbey, rue de Jargonnant 2, case postale 6045, 1211 Genève 6,

et

Monsieur B______, domicilié ______ [GE], intimé, représenté par Me Christian LUSCHER, avocat, CMS von Erlach Partners SA, esplanade de Pont-Rouge 9, case postale 1875, 1211 Genève 26.

 


EN FAIT

A. a. A______, née en 1955, et B______, né en 1960, se sont mariés le ______ 1987. Ils se sont séparés en septembre 2011. A______ est restée au domicile conjugal, sis rue 1______ no. ______ à Genève.

b. Le 29 novembre 2013, B______ a déposé devant le Tribunal de première instance une demande unilatérale en divorce.

c. Par décision partielle limitée au principe du divorce du 10 février 2021, rendue sur demande de B______, le Tribunal a notamment prononcé le divorce de époux. La Cour a confirmé ce jugement, attaqué par A______, et le Tribunal fédéral a rejeté dans la mesure où il était recevable le recours formé par celle-ci contre l'arrêt de la Cour.

d. Le 6 mars 2019, le Tribunal a rendu une ordonnance de preuve, dans laquelle il a relevé que B______ possédait "une importante collection de bandes dessinées, de planches, de dessins, etc., qu'il constitu[ait] depuis son adolescence".

Le Tribunal a dit qu'il incombait à B______ d'établir la "part de la collection de bandes dessinées, planches, dessins constituée de biens propres" et à A______ d'établir l'"étendue de la collection de bandes dessinées, planches, dessins de B______ au moment du dépôt de la demande".

Il a notamment ordonné l'expertise de la "collection BD", en précisant qu'une ordonnance de preuve séparée détaillerait la mission de l'expert.

e. Par ordonnance du 12 mai 2022, le Tribunal a ordonné une expertise de divers biens mobiliers, dont les "planches de BD", et désigné en qualité d'expert C______ ([maison de vente aux enchères] D______, rue 2______ no. ______, [code postal] Genève), autorisé à se substituer une personne de son choix aux qualifications équivalentes. L'expert était chargé d'arrêter la valeur vénale des "planches de BD" qui lui seraient désignées par les parties et/ou leurs conseils.

L'avance de frais a été fixée à 6'000 fr. et mise à la charge de chacune des parties par moitié.

f. Par ordonnance du 7 octobre 2022, le Tribunal a notamment autorisé C______ à faire appel à E______ ( [librairie] F______, rue 3______ no. ______, [code postal] Genève) dans le cadre de l'expertise et fixé aux parties un délai pour verser chacun 2'000 fr. au titre de complément de l'avance de frais d'expertise.

g. Il résulte d'un message électronique du 8 décembre 2022 de C______ aux parties, que l'expert estimait que "l'expertise des albums en main de" A______ "ne rentr[ait] pas dans la demande initiale". Il entendait ainsi solliciter une avance de frais complémentaire de 5'000 fr.

Par courrier du 12 décembre 2022, B______ a fait savoir à l'expert qu'il considérait qu'une expertise complémentaire n'était pas justifiée, "son coût représentant une fraction importante de la - faible - valeur des livres à expertiser".

h. Le 22 décembre 2022, C______ a établi deux expertises, l'une portant sur l'"évaluation en valeur de réalisation des biens" en mains de B______, y compris les bandes dessinées, l'autre portant sur l'"évaluation en valeur de réalisation des biens" en mains de A______, ne comprenant pas les bandes dessinées.

i. Lors de l'audience du Tribunal du 22 novembre 2023, B______ a déclaré que, pour éviter des frais inutiles d'expertise, il était prêt à reconnaître une valeur de 10'000 fr. pour les bandes dessinées qui se trouvaient dans la cave de la rue 1______, lot qui n'avait pas fait l'objet d'un rapport d'expertise. Moyennant ce prix, il était prêt à reprendre ses bandes dessinées qui avaient une valeur sentimentale.

Le Tribunal a mentionné au procès-verbal qu'un délai serait imparti à A______ pour qu'elle se détermine sur cette offre et qu'en cas de refus, une expertise serait ordonnée aux frais de la précitée.

Le conseil de A______ a déclaré que celle-ci souhaitait que l'expertise des bandes dessinées soit confiée à G______.

j. Le 31 janvier 2024, A______ a écrit au Tribunal qu'elle acceptait l'offre faite par B______, en précisant que contre paiement de 5'000 fr., elle remettrait à celui-ci "environ 300 bandes dessinées de - faible - valeur, et en présence d'un huissier".

k. Le Tribunal a procédé à l'audition des experts C______ et E______ lors d'une audience du 7 février 2024.

L'expert E______ a déclaré que pour établir les valeurs indiquées dans l'expertise, il s'était fondé sur le [catalogue] "H______" [H______, ______ de la bande dessinée H______, Catalogue encyclopédique et argus de la BD de collection]. Au jour de l'audition, l'évaluation était inférieure, dans la mesure où le marché s'était effondré.

l. Lors de l'audience du Tribunal du 12 mars 2024, les parties ont déclaré qu'elles souhaitaient qu'une expertise complémentaire soit faite sur les BD qui étaient entreposées dans la cave de la rue 1______.

A______ estimait que le nombre de ces BD était supérieur à 450. Devant la Cour, elle allègue qu'il y en aurait 1'400 (allégué 62 du recours).

Elle a déclaré qu'elle sollicitait une contre-expertise sur les biens mobiliers, notamment au motif que l'expertise C______ était à son avis entachée d'erreurs. B______ s'y est opposé.

Il s'est déclaré prêt à laisser à A______ tous les biens qui étaient actuellement en sa possession, hormis les BD qui se trouvaient à la cave, les planches de BD et les sérigraphies. A______ a refusé cette offre et déclaré qu'elle refusait que l'expert E______ procède à l'expertise "des BD et livres de la rue 1______".

A l'issue de l'audience, le Tribunal a notamment ordonné une "expertise complémentaire sur les BD et livres entreposés dans la cave de la rue 1______" et dit qu'il rendrait "une ordonnance concernant la contre-expertise".

B. Par ordonnance ORTPI/430/2024 du 11 avril 2024, reçue le lendemain par les parties, le Tribunal a ordonné une expertise aux fins de déterminer la valeur des bandes dessinées et livres acquis avant le mariage (sic) et entreposés dans la cave de la rue 1______ (chiffre 1 du dispositif), désigné E______ en qualité d'expert, l'exhortant à répondre conformément à la vérité et le rendant attentif aux conséquences pénales d'un faux rapport (ch. 2 à 4), confié à l'expert la mission suivante: a) prendre connaissance des dossiers remis directement par les parties à première réquisition, b) déterminer, en fonction de la date d'édition ou de parution, les bandes dessinées et livres acquis après ______ 1987 (date du mariage), c) déterminer de manière globale la valeur vénale actuelle de la collection acquise après cette date, d) faire toutes autres observations ou conclusions qu'il estimerait utiles et e) concilier les parties si possible (ch. 5), invité l'expert à dresser son rapport avant le 15 juillet 2024 (ch. 6), fixé l'avance de frais à 500 fr., mise provisoirement à la charge de A______, un délai au 13 mai 2024 lui étant imparti pour effectuer cette avance, l'expert étant invité à informer le Tribunal au cas où l'avance de frais ne couvrirait plus le coût de l'expertise en cours et à arrêter ses travaux jusqu'au versement par les parties d'un complément d'avance (ch. 7) et réservé la suite de la procédure (ch. 8).

C. a. Par acte déposé le 22 avril 2024 à la Cour de justice, A______ forme recours contre cette ordonnance. Elle conclut, principalement, à l'annulation de l'ordonnance et à ce qu'il soit constaté qu'un accord entre les parties a été trouvé quant aux albums de bandes dessinées se trouvant dans la cave de la rue 1______ et à ce que cet accord soit entériné en tant que de besoin. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation des chiffres 1, 2, 5b, 5c, 6 et 7 (2ème et 3ème ligne) du dispositif de l'ordonnance attaquée et cela fait, à ce que la Cour statue à nouveau comme suit : 1. Confirme que l'expertise ordonnée porte également sur la détermination de la valeur des albums de bandes dessinées entreposés dans la cave de la rue 1______; 2. Désigne en qualité d'expert G______, I______.ch, rue 4______ no. ______, [code postal] J______ [GE]; 5c. Détermine la valeur vénale actuelle de chaque objet; 6. Invite l'expert à dresser son rapport d'expertise écrit à déposer en trois exemplaires au greffe du Tribunal dans un délai de trois mois après l'entrée en force de l'arrêt de la Cour de justice à ce sujet; 7 (2ème ligne) Dit qu'elle sera supportée par les parties à parts égales; 7 (3ème ligne) Impartit aux parties un délai au 30ème jour après l'entrée en force de l'arrêt de la Cour à ce sujet pour effectuer l'avance de frais.

Plus subsidiairement, A______ conclut au renvoi de la cause au Tribunal pour prise d'une nouvelle décision dans le sens des considérants. Enfin, elle conclut à ce que les frais soient mis à la charge de B______, y compris une participation à ses dépens à hauteur de 5'000 fr.

b. Par arrêt ACJC/577/2024, la Cour, statuant sur la requête formée à titre préalable par A______, a suspendu l'effet exécutoire du dispositif de l'ordonnance attaquée et dit qu'il serait statué sur les frais avec la décision sur le fond.

c. B______ conclut, avec suite de frais judiciaires et dépens, à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet, du recours dirigé contre les chiffres 1 à 6 et 8 du dispositif de l'ordonnance du 11 avril 2024, et au rejet du recours dirigé contre le chiffre 7 du même dispositif.

d. Les parties ont répliqué et dupliqué, en persistant dans leurs conclusions.

e. Elles ont été informées le 14 juin 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Le recours est recevable contre les décisions finales, incidentes et provisionnelles de première instance qui ne peuvent pas faire l'objet d'un appel (art. 319 let. a CPC) et contre les autres décisions et ordonnances d'instruction de première instance dans les cas prévus par la loi (art. 319 let. b ch. 1 CPC) ou lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable (ch. 2).

Par définition, les décisions visées à l'art. 319 let. b CPC ne sont ni finales, ni partielles, ni incidentes, ni provisionnelles. Il s'agit de décisions d'ordre procédural par lesquelles le tribunal détermine le déroulement formel et l'organisation matérielle de l'instance (Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 11 ad art. 319 CPC; Freiburghaus/Afheldt, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2016, n. 11
ad art. 319 CPC).

Les ordonnances relatives au versement de l'avance de frais sont des ordonnances d'instruction au sens de l'art. 319 lit. b ch. 1 CPC; en vertu d'une disposition spéciale, elles sont susceptibles d'un recours immédiat sans conditions restrictives (art. 103 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_9/2012 du 30 avril 2012
consid. 2.3.2).

1.2 Aux chiffres 1 à 6 et 8 du dispositif de l'ordonnance du 11 avril 2024, le Tribunal a notamment ordonné une expertise, désigné un expert et défini la mission de celui-ci. Il a ainsi rendu une ordonnance d'instruction par laquelle il a statué sur le déroulement et la conduite de la procédure. En particulier, la formulation des questions à l'expert constitue également une ordonnance d'instruction (VOUILLOZ, Code de procédure civile, Petit commentaire, 2021, n. 8 ad art. 185 CPC et le références citées). Les chiffres 1 à 6 et 8 du dispositif de l'ordonnance attaquée peuvent faire l'objet d'un recours, si elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable (art. 319 let. b CP).

La voie du recours est en revanche ouverte sans restriction contre le chiffre 7 du dispositif de l'ordonnance du 11 avril 2024.

1.3 Le recours, écrit et motivé, doit être déposé auprès de l'instance de recours dans un délai de dix jours à compter de la notification de la décision (art. 321
al. 1 et 2 CPC).

En l'espèce, le recours a été introduit dans le délai et la forme prescrits par la loi (art. 130, 131 et 321 CPC).

Le recours dirigé contre la décision relative à l'avance de frais (ch. 7 du dispositif de l'ordonnance attaquée) est ainsi recevable.

2. Reste à déterminer si les chiffres 1 à 6 et 8 du dispositif de l'ordonnance attaquée sont susceptibles de causer un préjudice difficilement réparable à la recourante.

2.1 La notion de "préjudice difficilement réparable" est plus large que celle de "préjudice irréparable" consacré par l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Ainsi, elle ne vise pas seulement un inconvénient de nature juridique, mais toute incidence dommageable, y compris financière ou temporelle, pourvu qu'elle soit difficilement réparable. L'instance supérieure devra se montrer exigeante, voire restrictive, avant d'admettre la réalisation de cette condition, sous peine d'ouvrir le recours à toute décision ou ordonnance d'instruction, ce que le législateur a clairement exclu. Il s'agit de se prémunir contre le risque d'un prolongement sans fin du procès (ATF 138 III 378 consid. 6.3; 137 III 380 consid. 2; Colombini, Code de procédure civile, condensé de la jurisprudence fédérale et vaudoise, 2018, n. 4.1.3 ad art. 319 CPC; Jeandin, op. cit., n. 22 ad art. 319 CPC et références citées).

Le préjudice sera ainsi considéré comme difficilement réparable s'il ne peut pas être supprimé ou seulement partiellement, même dans l'hypothèse d'une décision finale favorable au recourant (Reich, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2010, ad art. 319 CPC n. 8; Jeandin, op. cit., n. 22a ad art. 319 CPC).

En d'autres termes, la notion de préjudice difficilement réparable doit être interprétée restrictivement puisque la personne touchée disposera le moment venu de la faculté de remettre en cause la décision ou ordonnance en même temps que la décision au fond : il incombe au recourant d'établir que sa situation procédurale serait rendue notablement plus difficile et péjorée si la décision querellée était mise en œuvre. Une simple prolongation de la procédure ou un accroissement des frais ne suffisent pas (Jeandin, op. cit., n. 22 et 22a ad art. 319 CPC). Il en va de même d'un préjudice financier ou du risque de ne pas obtenir gain de cause (BASTONS BULLETTI, Code de procédure civile, Petit commentaire, 2021, n. 12 ad art. 319 CPC et le références citées).

On retiendra l'existence d'un préjudice difficilement réparable lorsque ledit préjudice ne pourra plus être réparé par un jugement au fond favorable au recourant, ce qui surviendra par exemple lorsque des secrets d'affaires sont révélés ou qu'il y a atteinte à des droits absolus à l'instar de la réputation, de la propriété et du droit à la sphère privée (Jeandin, op. cit., n. 22a ad art. 319 CPC).

Il appartient au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision attaquée lui cause un préjudice difficilement réparable, à moins que cela ne fasse d'emblée aucun doute (par analogie ATF 134 III 426 consid. 1.2 et 133 III 629 consid. 2.3.1).

Si la condition du préjudice difficilement réparable n'est pas remplie, le recours est irrecevable et la partie doit attaquer la décision incidente avec la décision finale sur le fond (ACJC/1609/2023 du 5 décembre 2023 consid. 2.1; ACJC/580/2017 du 9 mai 2017 consid. 1.2; Message du Conseil fédéral relatif au CPC, FF 2006 6841, p. 6984; Brunner, Schweizerische Zivilprozessordnung,
n. 13 ad art. 319 CPC).

Est irrecevable le recours contre une décision refusant d'ordonner une deuxième expertise, le recourant conservant la possibilité de contester la valeur probante de l'expertise dans le cadre de la procédure au fond. Est également irrecevable le recours contre la décision ordonnant une expertise, aucun préjudice difficilement réparable ne résultant du fait que cette expertise serait prétendument contraire à la loi dès lors qu'elle porterait sur des points de droit. La mise en œuvre d'une expertise judiciaire standard n'entraîne pas de préjudice difficilement réparable, même en procédure simplifiée, qui suppose une instruction complète et sans limitation de preuve (Colombini, op. cit, n. 4.4.12.1 et 4.4.12.2 ad art. 319 CPC).

2.2 En l'espèce, la recourante n'établit pas en quoi consisterait le préjudice difficilement réparable auquel elle serait exposée si l'expertise litigieuse était exécutée par l'expert désigné et selon les instructions données par le Tribunal à celui-ci. Elle se borne à soutenir que, dans la mesure où la décision relative à l'avance de frais est immédiatement attaquable, il serait nécessaire, par économie de procédure, de "régler toutes les autres questions contenues dans la même ordonnance". De plus, à son avis, l'avance de frais serait "en lien direct" avec les questions de la nécessité de l'expertise et de la personne de l'expert. Il ne serait pas "dans l'esprit du CPC de régler les questions des frais d'une expertise qui pourrait s'avérer ne pas être nécessaire ou qui devrait être refaite (avec de nouveaux frais) par un autre expert".

Cette argumentation est vaine, dans la mesure où la recourante pourra faire valoir ses griefs dirigés contre l'ordonnance et contester la valeur probante de l'expertise dans le cadre d'un éventuel appel contre la décision finale, dans le cas où celle-ci lui serait intégralement ou partiellement défavorable.

A toutes fins utiles, il sera relevé que l'expertise litigieuse a été ordonnée à la demande expresse formée également par la recourante lors de l'audience du Tribunal du 12 mars 2024. Ainsi, la question - soulevée par la recourante - de savoir si un accord a été conclu par les parties au sujet des bandes dessinées qui n'ont pas encore été expertisées peut demeurer indécise. En tout hypothèse, si accord il y a eu, ce qui ne semble pas le cas vu la détermination de la recourante du 31 janvier 2024 (ci-dessus, "En fait", let. A.j), les parties sont revenues sur celui-ci, en sollicitant conjointement l'expertise litigieuse.

La recourante admet qu'elle ne poursuit qu'un but d'économie de procédure. Elle n'établit ainsi pas que sa situation procédurale serait rendue notablement plus difficile et péjorée par la mise en œuvre de l'ordonnance attaquée, étant rappelé qu'une simple prolongation de la procédure ou un accroissement des frais ne suffisent pas.

Dès lors, les chiffres 1 à 6 et 8 du dispositif de l'ordonnance attaquée ne sont pas susceptibles de causer à la recourante un préjudice difficilement réparable. Le recours contre chiffres 1 à 6 et 8 du dispositif de l'ordonnance attaquée est donc irrecevable.

3. Reste à examiner le recours, recevable sans restriction pour violation du droit
(art. 320 let. a CPC), dirigé contre le chiffre 7 du dispositif précité.

3.1 Selon l'art. 102 al. 1 CPC, chaque partie avance les frais d'administration des preuves qu'elle requiert. Lorsque les parties requièrent les mêmes moyens de preuve, chacune avance la moitié des frais (art. 102 al. 2 CPC).

Alors que des avances couvrant les émoluments forfaitaires et autres frais généraux du tribunal ne peuvent être exigées, aux conditions de l'art. 98 CPC, que du demandeur, les frais d'une mesure probatoire doivent être avancés par la partie qui la requiert. Selon le texte légal, le critère est bien le fait d'avoir demandé la preuve concernée, non le fardeau de la preuve ou la provenance de l'allégué à prouver : une partie devra ainsi avancer les frais même d'une contre-preuve qu'elle sollicite sur un allégué de la partie adverse dont la preuve incombe en principe à cette dernière. Lorsque les deux parties sont instantes à la même preuve, ce qui arrive souvent pour certains témoignages, mais aussi par exemple en matière d'expertise, chacune avance selon l'art. 102 al. 2 CPC la moitié des frais (TAPPY, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 3 et 8
ad art.102 CPC).

3.2 Le grief de la recourante est ainsi fondé en ce qui concerne la répartition de l'avance de frais (ch. 7 du dispositif de l'ordonnance attaquée). Dans la mesure où les deux parties ont requis l'expertise complémentaire litigieuse, l'avance de frais de celle-ci doit être mise à la charge de chacune d'elles par moitié. Ce qui précède ne préjuge pas de la répartition des frais qui sera opérée par le Tribunal à l'issue de la procédure.

Le chiffre 7 du dispositif de l'ordonnance querellée sera par conséquent modifié, dans le sens qui précède, étant précisé que le montant fixé par le Tribunal n'est pas contesté. Il incombera au Tribunal d'impartir aux parties un délai pour verser l'avance.

4. Compte tenu de l'issue de la procédure (art. 106 al. 2 CPC), les frais judiciaires du recours, arrêtés à 1'000 fr. (art. 41 RTFMC), comprenant les frais judiciaires relatifs à la décision sur effet suspensif, seront mis à la charge de chacune des parties par moitié. Ils seront compensés avec l'avance effectuée par la recourante, qui demeure acquis à l'Etat de Genève, et l'intimé versera 500 fr. à la recourante (art. 111 al. 1 et 2 CPC).

Chaque partie supportera ses propres dépens de recours.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare irrecevable le recours interjeté le 22 avril 2024 par A______ contre les chiffres 1 à 6 et 8 du dispositif de l'ordonnance ORTPI/430/2024 rendue le 11 avril 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/25223/2013-19.

Le déclare recevable en tant qu'il est dirigé contre le chiffre 7 du dispositif de la même ordonnance.

Au fond :

Annule le chiffre 7 du dispositif de l'ordonnance attaquée et, statuant à nouveau sur ce point :

Dit que l'avance de frais de 500 fr. sera provisoirement supportée par chacune des parties par moitié.

Dit que cette avance sera versée par les parties dans le délai qui leur sera imparti par le Tribunal de première instance.

Déboute les parties de toutes autres conclusions de recours.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de recours à 1'000 fr., les met à la charge de chacune des parties par moitié et les compense avec l'avance de frais effectuée, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne B______ à verser 500 fr. à A______.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN et Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

Le président :

Ivo BUETTI

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.