Skip to main content

Décisions | Chambre civile

1 resultats
C/20228/2022

ACJC/1338/2023 du 06.10.2023 sur JTPI/7308/2023 ( SDF ) , MODIFIE

Recours TF déposé le 09.11.2023, 5A_850/2023
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/20228/2022 ACJC/1338/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 6 OCTOBRE 2023

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 21 juin 2023, représentée par Me Pierre SIEGRIST, avocat, Grand-Rue 17, 1204 Genève,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, représenté par Me Martin AHLSTROM, avocat, Dayer Ahlström Fauconnet, quai Gustave-Ador 38, case postale 6293, 1211 Genève 6.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/7308/2023 du 21 juin 2023, reçu le 26 juin 2023 par A______ [recte : A______], le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a donné acte aux époux B______ et A______ de ce qu'ils vivaient séparés depuis le 2 septembre 2022 (ch. 1 du dispositif), attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal sis chemin 1______ no. ______, [code postal] C______ [GE] (ch. 2), condamné B______ à verser en mains de A______, par mois et d'avance, 985 fr. à compter du 2 septembre 2022 au titre de contribution à son entretien (ch. 3), prononcé les mesures pour une durée indéterminée (ch. 4), réparti les frais judiciaires – arrêtés à 200 fr. – à raison de la moitié à la charge de B______ et la moitié à la charge de l'État, sous réserve d'une décision de l'assistance judiciaire (ch. 5 et 7), compensé la part de B______ avec l'avance qu'il avait fournie (ch. 6), ordonné aux Services financiers du Pouvoir judiciaire la restitution à B______ du montant de 100 fr. (ch. 8), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 9), condamné les époux B______ et A______ à respecter et à exécuter les dispositions du jugement (ch. 10) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 11).

B.            a. Par acte déposé le 6 juillet 2023 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ appelle de ce jugement, dont elle sollicite l'annulation du chiffre 3 du dispositif, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Cela fait, elle conclut à ce que la Cour condamne B______ à verser au titre de contribution à son entretien, par mois et d'avance, 3'000 fr. à compter du 2 septembre 2022.

b. Dans sa réponse, B______ conclut à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et dépens.

c. A______ n'ayant pas fait usage de son droit de réplique, les parties ont été informées par plis du greffe de la Cour du 21 août 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les éléments de faits pertinents suivant résultent du dossier :

a. B______, né le ______ 1975 à D______ (République de Macédoine du Nord), originaire de la République de Macédoine du Nord, et A______, née A______ [nom de jeune fille] le ______ 1974 à E______ (République de Macédoine du Nord), de nationalité suisse, ont contracté mariage le ______ 2004 à Genève.

b. Deux enfants, aujourd'hui majeurs, sont issus de cette union, soit F______, né le ______ 2001, et G______, né le ______ 2005.

c. Les époux vivent séparés depuis le 2 septembre 2022, date à laquelle B______ a quitté le domicile conjugal.

d. Le 20 octobre 2021, B______ a déposé une première requête de mesures protectrices de l'union conjugale au Tribunal qu'il a retirée, d'un commun accord avec son épouse, le 7 février 2022 (procédure n° C/2______/2021).

e. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 18 octobre 2022, B______ a requis le prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale, concluant notamment à ce que le Tribunal lui donne acte de son engagement à verser à A______ 500 fr. par mois au titre de contribution à son entretien et 165 fr. par mois au titre de contribution à l'entretien de son fils G______.

f. Lors de l'audience de comparution personnelle des parties du 18 janvier 2023, A______ a déclaré qu'elle n'était pas d'accord avec le montant proposé pour sa contribution d'entretien et pour celle de son fils.

g. Lors de l'audience de plaidoiries finales du 22 mars 2023, A______ a notamment conclu à ce que le Tribunal condamne B______ à lui verser 3'000 fr. par mois et d'avance, au titre de contribution d'entretien en sa faveur et 700 fr. par mois et d'avance, allocations familiales en sus, au titre de contribution d'entretien en faveur de G______. B______ a persisté dans ses conclusions.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

h. Interpellé par le Tribunal à la suite de son accession à la majorité, G______ a, par pli du 9 juin 2023, adhéré aux conclusions prises par sa mère.

i. La situation financière de A______ se présente de la manière suivante :

i.a A______ ne dispose d'aucune formation et n'exerce aucune activité professionnelle. Elle perçoit l'aide de l'Hospice général pour elle-même et les deux enfants.

Elle a exposé qu'avant son mariage, elle travaillait comme couturière dans une boutique située en République de Macédoine du Nord. Elle n'avait jamais exercé cette activité en Suisse. Elle ne travaillait pas quand elle a rencontré son époux. Par la suite, elle avait exercé durant six mois en qualité de patrouilleuse scolaire, une fonction qu'elle n'était plus en mesure d'assumer. Elle avait également travaillé durant deux mois dans le domaine du nettoyage.

A______ a également exposé souffrir d'un problème psychologique pour lequel elle était suivie et prenait des médicaments. Le droit à des prestations de l'assurance-invalidité lui avait été refusé.

Elle vit avec ses deux fils lesquels sont étudiants et n'ont pas de revenus. Le cadet habite avec elle à plein temps, tandis que l'aîné étudie à H______ [VD] et ne retourne à l'ancien domicile conjugal que le week-end.

i.b Ses charges mensuelles, telles que retenues par le premier juge et non contestées par les parties, s'élèvent à 3'062 fr. et comprennent 1'350 fr. de montant de base OP (compte tenu de la cohabitation avec son fils cadet, bien que celui-ci soit majeur), 1'519 fr. de loyer, allocation de logement déduite, et 193 fr. de prime d'assurance maladie, subside déduit.

j. La situation financière de B______ se présente de la manière suivante :

j.a Il est l'unique associé-gérant de I______ SARL, société active dans les travaux de plâtrerie, peinture, pose et entretien de faux plafonds et de cloisons.

A teneur de l'avis de taxation ICC 2019, B______ a perçu un revenu net de 52'460 fr. en 2019, soit 4'371 fr. 65 par mois.

Il a déclaré, lors de l'audience de comparution personnelle s'étant tenue le 8 décembre 2021 dans le cadre de la première procédure de mesures protectrices de l'union conjugale (C/2______/2021), qu'il avait perçu 76'691 fr. en 2019, soit 6'416 fr. par mois. Il a produit dans ce cadre un bilan de sa société pour l'année 2020 que A______ a versé à la présente procédure.

Selon le certificat de salaire 2020, les fiches de salaires 2021 et les avis de taxation 2020 et 2021, B______ a réalisé un revenu mensuel net de 1'764 fr. 35 en 2020 et 2021.

Il ressort du bilan de I______ SARL au 31 décembre 2020 produit par B______ une rubrique "caisse" affichant un montant de 87'953 fr. 64 qui n'existe plus au 31 décembre 2021. Selon le bilan de cette même société, produit par A______, au 31 décembre 2020, la rubrique "caisse" ne fait état d'aucun montant. En revanche, dans les passifs, figure une rubrique "compte privé" affichant "- 87'953 fr. 64". Selon J______, comptable de B______ et de I______ SARL, entendu en qualité de témoin, si le montant de 87'000 fr. en 2020 n'apparaissait plus en 2021, c'était en raison d'un réajustement dû à une erreur informatique, ce qui expliquait cette différence. Il était probable que le bilan produit par A______ était plus proche de la vérité.

Il ressort également du bilan produit par B______ qu'au 31 décembre 2021, la rubrique "compte privé" affiche "-72'551 fr. 21", que le salaire du précité est passé de 42'000 fr. en 2020 à 24'000 fr. en 2021 et que les charges de véhicules sont passées de 6'697 fr. 91 en 2020 à 22'794 fr. 78 en 2021. Le témoin J______ a déclaré qu'il n'avait pas d'explications à donner sur la baisse de salaire entre 2020 et 2021 puisqu'il fondait sa comptabilité sur les explications que B______ lui donnait. Quant aux charges de véhicules, l'augmentation pouvait s'expliquer en raison de l'achat d'un véhicule ou de travaux sur les véhicules existants. Enfin, si un montant de -72'000 fr. apparaissait à la rubrique "compte privé" c'était que B______ avait prêté ce montant à la société, étant rappelé que cela correspondait à la période du COVID-19.

Il ressort encore du bilan précité produit par B______ que le total des passifs s'élevait, au 31 décembre 2020, à 118'781 fr. 15 pour un bénéfice de 8'709 fr. 46 tandis que, dans le bilan produit par A______, le total des passifs s'élevait à cette même date à 30'827 fr. 51 pour un bénéfice de 5'840 fr. 12.

Depuis janvier 2022, selon les fiches de salaire de B______, son revenu mensuel net est de 3'660 fr. 05.

j.b Ses charges mensuelles, telles que retenues par le premier juge et non contestées par les parties, s'élèvent à 2'675 fr. 25 et comprennent 1'200 fr. de montant de base OP, 1'290 fr. de loyer et 185 fr. 25 de prime d'assurance-maladie, subside déduit.

D.           Dans le jugement entrepris, le Tribunal a arrêté le revenu de B______ à 3'660 fr. 05, correspondant à son salaire perçu depuis le 1er janvier 2022. Il n'a pas tenu compte des revenus perçus en 2020 et 2021 dans la mesure où ces années avaient été marquées par un confinement et de nombreuses mesures destinées à lutter contre la pandémie de COVID-19, cette situation ayant considérablement affecté la capacité de gain des indépendants dont faisait partie l'époux. Après déduction de ses propres charges de 2'675 fr. 25, il ne lui restait qu'un solde disponible arrondi de 985 fr. par mois, montant qui devait servir à couvrir le déficit de A______, lequel s'élevait au montant de ses charges, soit 3'062 fr. par mois, aucun revenu hypothétique ne pouvant lui être imputé. Seule une petite partie du minimum vital du droit des poursuites de l'épouse ayant pu être couvert, B______ ne pouvait pas être condamné au versement d'une contribution à l'entretien de G______, devenu majeur.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices de l'union conjugale, qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC, indépendamment de la valeur litigieuse (art. 308 al. 1 let. b et al. 2 CPC).

En l'espèce, le litige porte sur la contribution d'entretien entre époux, soit une affaire de nature pécuniaire, dont la valeur litigieuse requise est atteinte (art. 91 al. 2 et 92 CPC), de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Interjeté dans le délai (art. 142 al. 1 et 314 al. 1 CPC) et selon la forme prescrits par la loi (art. 130 et 131 CPC), l'appel est recevable. Il en va de même de la réponse, déposée dans le délai légal (art. 312 al. 2 cum 314 al. 1 CPC).

1.3 La cause présente un élément d'extranéité du fait de la nationalité étrangère de l'intimé. Les parties ne contestent pas, à juste titre, la compétence des autorités judiciaires genevoises (art. 46 LDIP) et l'application du droit suisse (art. 48 et 49 LDIP; art. 4 de la Convention de La Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable aux obligations alimentaires).

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC).

Les mesures protectrices de l'union conjugale étant soumises à la procédure sommaire (art. 271 let. a CPC), l'autorité peut se limiter à la vraisemblance des faits et à l'examen sommaire du droit, en se fondant sur les moyens de preuve immédiatement disponibles, tout en ayant l'obligation de peser les intérêts respectifs des parties (ATF 139 III 86 consid. 4.2; 131 III 473 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_916/2019 du 12 mars 2020 consid. 3.4).

En tant qu'elle porte sur la question de la contribution à l'entretien de l'épouse, la cause est soumise à la maxime de disposition (art. 58 al. 1 CPC) et à la maxime inquisitoire limitée (art. 55 al. 2 et 272 CPC). L'obligation du juge d'établir les faits d'office ne dispense cependant pas les parties de collaborer activement à la procédure. Il leur incombe de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 130 III 102 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_855/2017 du 11 avril 2018 consid. 4.3.2).

2. L'appelante critique le montant de la contribution d'entretien fixée en sa faveur. Elle reproche au Tribunal d'avoir sous-estimé les revenus de l'intimé, lesquels auraient dû être arrêtés à 6'000 fr. nets par mois. Cas échéant, un revenu hypothétique équivalant à ce montant devrait lui être imputé.

2.1.1 Le juge des mesures protectrices de l'union conjugale fixe la contribution d'entretien due entre conjoints (art. 176 al. 1 ch. 1 CC).

Le Tribunal fédéral a posé, pour toute la Suisse, une méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille (ATF 147 III 265; 147 III 293; 147 III 301). Cette méthode implique de calculer dans un premier temps les moyens financiers à disposition, en prenant en considération tous les revenus du travail, de la fortune et les prestations de prévoyance, ainsi que le revenu hypothétique éventuel. Il s'agit ensuite de déterminer les besoins, en prenant pour point de départ les lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP. Les ressources à disposition sont réparties entre les différents membres de la famille, dans un ordre déterminé : il faut tout d'abord couvrir le minimum vital du droit des poursuites puis, si les moyens le permettent, le minimum vital du droit de la famille de chaque partie (ATF 147 III 265 consid. 7.1).

Le minimum vital du débiteur doit en tout état être préservé (ATF 135 III 66).

2.1.2 Pour déterminer la capacité contributive d'un époux, il faut prendre en considération le revenu effectif (ATF 143 III 233 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_665/2020 du 8 juillet 2021 consid. 3.1.3).

2.1.3 Le revenu d'un indépendant est constitué par son bénéfice net, à savoir la différence entre les produits et les charges. En cas de revenus fluctuants, pour obtenir un résultat fiable, il convient de tenir compte, en général, du bénéfice net moyen réalisé durant plusieurs années (dans la règle, les trois dernières). Plus les fluctuations de revenus sont importantes et les données fournies par l'intéressé incertaines, plus la période de comparaison doit être longue. Dans certaines circonstances, il peut être fait abstraction des bilans présentant des situations comptables exceptionnelles, à savoir des bilans attestant de résultats particulièrement bons ou spécialement mauvais. Par ailleurs, lorsque les revenus diminuent ou augmentent de manière constante, le gain de l'année précédente est considéré comme le revenu décisif, qu'il convient de corriger en prenant en considération les amortissements extraordinaires, les réserves injustifiées et les achats privés (ATF 143 III 617 consid. 5.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_987/2020 du 24 février 2022 consid. 4.1; 5A_20/2020 du 28 août 2020 consid. 3.3; 5A_676/2019 du 12 mars 2020 consid. 3.2). Ce n'est que lorsque les allégations sur le montant des revenus ne sont pas vraisemblables et que les pièces produites ne sont pas convaincantes – comme par exemple lorsque les comptes de résultat manquent –, qu'il convient de se fonder sur le niveau de vie des époux durant la vie commune. Les prélèvements privés constituent alors un indice permettant de déterminer ce train de vie, cet élément pouvant servir de référence pour fixer la contribution due (arrêts du Tribunal fédéral 5A_676/2019 du 12 mars 2020 consid. 3.2; 5A_246/2009 du 22 mars 2010 consid. 3.1, publié in FamPra.ch 2010 p. 678). La détermination du revenu d'un indépendant peut en conséquence se faire en référence soit au bénéfice net, soit aux prélèvements privés, ces deux critères étant toutefois exclusifs l'un de l'autre : l'on ne peut ainsi conclure que le revenu d'un indépendant est constitué de son bénéfice net, additionné à ses prélèvements privés (arrêts du Tribunal fédéral 5A_20/2020 du 28 août 2020 consid. 3.3; 5A_396/2013 du 26 février 2014 consid. 3.2.3; 5A_259/2012 du 14 novembre 2012 consid. 4.3, publié in SJ 2013 I 451).

2.1.4 Si l'une des parties refuse de collaborer à l'établissement des faits et à l'administration des preuves sans motif valable, l'art. 164 CPC prévoit que le tribunal en tient compte lors de l'appréciation des preuves. Cette dernière disposition ne donne toutefois aucune instruction s'agissant des conséquences que le tribunal doit tirer du refus de collaborer dans l'appréciation des preuves. Il n'est en particulier pas prescrit que le tribunal doit automatiquement conclure à la véracité de l'état de fait présenté par la partie adverse ; il s'agit bien plus de traiter le refus injustifié de collaborer comme un élément parmi d'autres à prendre en compte dans la libre appréciation des preuves (art. 157 CPC; ATF 140 III 264 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_651/2014 du 27 janvier 2015 consid. 2.1).

Lorsqu'un époux manque à son devoir de collaboration, en renseignant avec peine le juge sur sa situation économique, celui-ci peut sans arbitraire se limiter à une estimation du revenu tiré de l'activité constatée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_81/2011 du 23 septembre 2011 consid. 6.1.3). Pour arrêter le montant du salaire, le juge peut éventuellement se baser sur l'enquête suisse sur la structure des salaires, réalisée par l'Office fédéral de la statistique, ou sur d'autres sources comme les conventions collectives de travail (ATF 137 III 118 consid. 3.2).

2.2 En l'espèce, seuls les revenus de l'intimé sont contestés. L'appelante considère la situation financière de l'intimé confuse. Elle relève les erreurs dans les bilans de la société de l'intimé, lesquelles ont été confirmées par le témoin entendu. Ce dernier avait également relevé que la comptabilité de la société se fondait sur les explications de l'intimé, lesquelles étaient "nébuleuses" selon l'appelante, de sorte que les chiffres présentés ne seraient pas fiables, ce d'autant plus que les pièces produites étaient contradictoires.

2.2.1 L'intimé exploite sa propre entreprise, la société I______ SARL, dont il est l'unique associé-gérant. L'on ne saurait se fonder sur les seules fiches de salaire produites, dans la mesure où il est salarié de sa propre entreprise et détermine en conséquence librement son salaire en fonction des résultats de la société. Il convient donc de déterminer ses revenus sur la base des bilans et comptes d'exploitation de son entreprise sur ces dernières années. S'agissant des années 2020 et 2021, le témoin J______ a confirmé que des erreurs s'étaient glissées dans les bilans, ce qui expliquait les contradictions qui ont été relevées par l'appelante. Les bilans ne peuvent ainsi raisonnablement pas être pris en compte pour arrêter le montant des revenus de l'intimé.

Par ailleurs, dans la mesure où les décomptes bancaires n'ont été produits ni pour l'intimé ni pour sa société et que leur production n'a pas été requise, les revenus de l'intimé ne peuvent être déterminés sur la base des prélèvements opérés par l'intimé sur les comptes bancaires de la société.

Enfin, à l'instar de ce qu'a retenu le premier juge, les années 2020 et 2021 ont été particulières pour l'ensemble de la population, puisque des mesures de lutte contre la pandémie de COVID-19 ont été mises en place, ce qui a affecté les activités des indépendants et donc leurs revenus, de sorte que, même si les bilans avaient été correctement établis, ils ne sauraient constituer une base suffisante pour déterminer la capacité de gain de l'intimé. A cela s'ajoute que l'intimé n'a pas produit ses bilans 2019 et 2022, de sorte qu'une moyenne de ses revenus ne peut en tout état pas être effectuée.

Il convient, dans ces circonstances, de procéder à une estimation globale des revenus de l'intimé au regard des éléments figurant au dossier.

Lors de l'audience tenue le 8 décembre 2021 dans le cadre de la première procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, l'intimé a déclaré percevoir un montant de plus de 6'400 fr. par mois, ce qui correspond à un montant net de l'ordre de 5'600 fr. L'avis de taxation ICC fait état d'un revenu net de 52'460 fr. en 2019, correspondant à un revenu mensuel net de près de 4'400 fr. par mois. Sur la base de ces éléments, la Cour retiendra les revenus mensuels nets de l'intimé à hauteur de 5'000 fr., étant relevé que l'intéressé pourrait percevoir dans le cadre d'une activité salariée selon le calculateur de salaire disponible en ligne (https://entsendung.admin.ch/Lohnrechner/home), un revenu de l'ordre de 6'300 fr. bruts par mois, correspondant à environ 5'600 fr. nets par mois.

2.2.2 Les charges incompressibles mensuelles de l'intimé n'étant pas remises en cause, son solde disponible s'élève à 2'325 fr. par mois (5'000 fr. – 2'675 fr. 25), qui n'est pas suffisant pour couvrir l'intégralité du déficit de l'appelante, qui est de 3'062 fr. Afin de ne pas entamer le minimum vital de l'intimé, sa contribution à l'entretien de l'appelante sera fixée à 2'300 fr. par mois. Enfin, vu que le déficit de l'épouse n'est pas intégralement couvert par le disponible de l'intimé, ce dernier n'est pas en mesure de contribuer à l'entretien de son fils cadet devenu majeur, ce que le Tribunal a retenu et qui n'est pas remis en cause par les parties.

Les parties n'ayant pas critiqué le dies a quo de cette obligation d'entretien fixée par le Tribunal au 2 septembre 2022, l'intimé sera condamné au versement d'une contribution de 2'300 fr. à l'entretien de l'appelante à compter de cette date.

Le chiffre 3 du dispositif du jugement entrepris sera par conséquent réformé dans le sens qui précède.

3. 3.1 Si l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC).

Les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie succombante (art. 95 et 106 1ère phrase CPC). Lorsqu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (art. 106 al. 2 CPC). La Cour peut s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation, notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC).

Les modifications du jugement attaqué ne nécessitent pas de revoir le montant ou la répartition des frais de première instance arrêtés par le Tribunal conformément aux règles légales (art. 95, 96, 104 al. 1, 107 al. 1 let. c CPC; art. 5, 15 et 31 du Règlement fixant le tarif des frais en matière civile (RTFMC), RSGE E 1 05.10).

3.2 Les frais judiciaires d'appel seront fixés à 800 fr. (art. 31 et 35 RTFMC).

Pour des motifs d'équité liés à la nature et à l'issue du litige, ils seront répartis à parts égales entre les parties (art. 95, 104 al. 1, 105, 106 al. 1 et 107 al. 1 let. c CPC).

L'appelante étant au bénéfice de l'assistance juridique, sa part des frais sera provisoirement laissée à la charge de l'Etat de Genève qui pourra en demander le remboursement ultérieurement (art. 122 al. 1 let. b et 123 al. 1 CPC; art. 19 du Règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale (RAJ), RSGE E 2 05.04).

L'intimé sera, quant à lui, condamné à verser 400 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui, les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Pour des motifs d'équité liés à la nature et à l'issue du litige, chaque partie supportera ses propres dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c. CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 6 juillet 2023 par A______ contre le jugement JTPI/7308/2023 rendu le 21 juin 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/20228/2022.

Au fond :

Annule le chiffre 3 du dispositif du jugement entrepris et, statuant à nouveau sur ce point :

Condamne B______ à verser en mains de A______, par mois et d'avance, 2'300 fr. à compter du 2 septembre 2022 au titre de contribution à son entretien.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr., les répartit à raison de la moitié à la charge de B______ et de l'autre moitié à la charge de A______.

Dit que la part de A______ est provisoirement laissée à la charge de l'Etat de Genève.

Condamne B______ à verser 400 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Monsieur Ivo BUETTI, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.