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Décisions | Chambre civile

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C/5488/2022

ACJC/916/2023 du 04.07.2023 sur JTPI/1032/2023 ( SDF ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5488/2022 ACJC/916/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 4 JUILLET 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié c/o B______, ______, appelant d'un jugement rendu par la 13ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 20 janvier 2023, comparant par Me Laura SANTONINO, avocate, rue du Conseil-Général 4, case postale 412, 1211 Genève 4, en l'Étude de laquelle il fait élection de domicile,

et

Madame C______, domiciliée ______, intimée, comparant par Me Matthieu GISIN, avocat, boulevard des Philosophes 15, 1205 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/1032/2023 du 20 janvier 2023, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a autorisé C______ et A______ à vivre séparés (chiffre 1 du dispositif), attribué à la première la jouissance exclusive du domicile conjugal sis no. ______, chemin 1______, [code postal] Genève ainsi que du mobilier le garnissant (ch. 2) et la garde de l'enfant D______ (ch. 3), réservé au second un droit de visite sur D______, devant s'exercer, à défaut d'accord contraire des parties, jusqu'au 30 juin 2023, un week-end sur deux, le samedi de 14h00 à 19h00 et le dimanche de 14h00 à 17h00 puis, dès le 1er juillet 2023, un week-end sur deux, du samedi 10h00 au dimanche 15h00 (ch. 4), dit que l'entretien mensuel convenable de D______ s'élevait à 825 fr., allocations familiales déduites (ch. 5), donné acte à A______ de son engagement à payer à C______, par mois et d'avance, du 1er juin 2022 au 30 juin 2023, allocations familiales non comprises, 50 fr. à titre de contribution à l'entretien de D______, l'y a condamné en tant que de besoin (ch. 6), condamné A______ à payer à C______, par mois et d'avance, dès le 1er juillet 2023, allocations familiales non comprises, 825 fr. à titre de contribution à l'entretien de D______ (ch. 7), dit que les allocations familiales pour celle-ci revenaient à C______ (ch. 8), condamné A______ à payer à C______, par mois et d'avance, dès le 1er juillet 2023, 275 fr. à titre de contribution à son entretien (ch. 9), prononcé ces mesures pour une durée indéterminée (ch. 10), arrêté les frais judiciaires à 1'000 fr., les a répartis à raison de la moitié à la charge de chacune des parties et les a laissés à la charge de l'Etat, étant donné qu'elles étaient au bénéfice de l'assistance juridique, dit que celles-ci pourraient être tenues au remboursement des frais judiciaires dans les limites de l'art. 123 CPC (ch. 11), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 12) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 13).

B.            a. Par acte expédié le 2 février 2023 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a appelé de ce jugement, qu'il avait reçu le 23 janvier 2023. Il a conclu à l'annulation des chiffres 6, 7 et 9 de son dispositif et, cela fait, à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement à payer à C______, par mois et d'avance, dès le 1er juin 2022, allocations familiales non comprises, 50 fr. à titre de contribution à l'entretien de D______ et à ce qu'il soit dit qu'il n'y avait pas lieu d'allouer de contribution d'entretien à C______.

Il a produit des pièces nouvelles.

b. Dans sa réponse du 17 février 2023, C______ a conclu au rejet de l'appel, sous suite de frais.

Elle a produit une nouvelle pièce.

c. Dans sa réplique spontanée du 3 mars 2023, A______ a persisté dans ses conclusions. Il a produit des pièces nouvelles.

d. C______ a spontanément dupliqué le 17 mars 2023, persisté dans ses conclusions et produit une pièce nouvelle.

e. Le 29 mars 2023, A______ a encore fait parvenir à la Cour des déterminations et produit une pièce nouvelle.

f. Les parties ont été informées par plis du greffe de la Cour du 19 avril 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les éléments pertinents suivants résultent de la procédure :

a. C______, née le ______ 1996, et A______, né le ______ 1993, se sont mariés le ______ 2018 à Genève.

Ils sont les parents de D______, née le ______ 2020.

A______ est également le père de E______, née le ______ 2011 d'une précédente union. Il allègue exercer sur celle-ci un droit de visite d'un week-end sur deux, du vendredi au dimanche, et de la moitié des vacances scolaires.

Les époux vivent séparés depuis février 2022, à la suite d'une mesure d'éloignement administrative prononcée à l'encontre de A______ en raison de violences conjugales.

b.a Le 23 mars 2022, C______ a formé devant le Tribunal une requête de mesures protectrices de l'union conjugale.

Elle a sollicité qu'un revenu hypothétique soit imputé à son époux pour une activité à 100% dans un délai de deux mois dès le dépôt de sa requête.

b.b Le 6 mai 2022, le Tribunal, statuant sur le siège, sur mesures provisionnelles et d'entente entre les parties, a autorisé celles-ci à vivre séparées, attribué à C______ la jouissance exclusive du domicile conjugal et la garde sur D______, réservé à A______ un droit de visite sur celle-ci, lequel s'exercerait, à défaut d'entente entre les parties, deux demi-journées par semaine, donné acte à celui-ci - l'y condamnant en tant que de besoin - de son engagement à verser, par mois et d'avance, dès le 1er juin 2022, allocations familiales non comprises, 50 fr. à titre de contribution à l'entretien de D______ et dit que les allocations familiales reviendraient à C______.

b.c En dernier lieu, le 16 janvier 2023, pour ce qui est des points litigieux en seconde instance, C______ a conclu à ce que le Tribunal fixe l'entretien convenable de D______ à 962 fr. par mois, hors allocations familiales, et condamne A______ à lui verser, par mois et d'avance, dans un délai de six mois à compter du prononcé du jugement, les sommes de 962 fr., allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de D______ et de 1'200 fr. à titre de contribution à son entretien. Subsidiairement, elle a sollicité du Tribunal qu'il fixe "le déficit" mensuel de D______ à 962 fr. et le sien à 2'000 fr.

A______ a conclu à ce que le Tribunal dise qu'il n'est pas en mesure de contribuer à l'entretien de D______ et lui donne acte de son engagement à verser en mains de C______, par mois et d'avance, 50 fr. à ce titre.

D. La situation personnelle et financière des parties ainsi que de leur enfant est la suivante :

a.a Au moment de la conception de D______, née en ______ 2020, C______, âgée de vingt-trois ans, n'exerçait aucune activité lucrative.

En août 2020, elle a confirmé à un responsable de formation au sein des HUG (Hôpitaux universitaires de Genève) sa décision de renoncer, en raison de la future venue au monde de son enfant, à entreprendre en septembre 2020 son apprentissage prévu au sein de cet établissement pour obtenir un CFC (Certificat fédéral de capacité) comme assistante en soins et santé communautaire.

Elle a débuté cet apprentissage en septembre 2022 et réalisé à ce titre, durant l'année scolaire 2022/2023, un revenu de 735 fr. nets par mois sur douze mois (740 fr. bruts par mois versés treize fois). Durant l'année scolaire 2023/2024, elle percevra 954 fr. nets par mois sur douze mois (960 fr. bruts par mois versés treize fois) et ce salaire augmentera encore dès septembre 2024 pour l'année scolaire 2024/2025 (1'550 fr. bruts par mois versés treize fois).

a.b Le 15 août 2022, en application de la loi genevoise sur les bourses et prêts d'études (LBPE; RS/GE C 1 20), le Service des bourses et prêts d'études de l'Etat de Genève a octroyé à C______ une bourse de 16'000 fr. pour l'année scolaire 2022/2023.

En seconde instance, A______ allègue que cette bourse devrait se monter à 20'000 fr., conformément à la LBPE, dans la mesure où C______ a un enfant à charge. Au surplus, celle-ci aurait droit à cette bourse, selon lui, tout au long de son apprentissage, ce qui est contesté.

C______ est pour le surplus dépendante de l'aide sociale.

a.c Le Tribunal, sans être critiqué, a arrêté le minimum vital du droit des poursuites de C______ à 2'483 fr. par mois, comprenant sa part de loyer de l'appartement conjugal (950 fr. [80% de 1'188 fr.]), ses primes d'assurance maladie obligatoire (113 fr., subside déduit), son montant de base selon les normes OP (1'350 fr.) et ses frais de transport (70 fr.).

b.a A______ a commencé un apprentissage d'agent de propreté, qu'il n'a pas terminé. Dès 2016, il a occupé divers emplois, notamment dans ce domaine.

Il a effectué des stages durant trois ans comme animateur et, de février à novembre 2021, entrepris une formation de deux-cent-cinquante heures auprès de F______ d'animateur et accompagnateur de personnes âgées. Il a obtenu le diplôme découlant de cette formation le 15 mars 2022.

Le 30 mars 2022, il a conclu un accord de collaboration avec une agence de placement et effectué depuis lors des recherches d'emploi comme animateur ainsi que dans le domaine du nettoyage.

Selon le Tribunal, le 14 novembre 2022, il a signé un contrat avec G______, valable jusqu'au 30 juin 2023, en qualité "d'aspirant suppléant". Son temps d'essai était de trois mois et son taux d'activité de 23%. Il réalisait à ce titre un salaire mensuel net d'environ 1'180 fr.

Le premier juge a relevé que A______ alléguait qu'après le temps d'essai, il ne parviendrait pas à obtenir un taux d'activité de plus de 50% au sein du G______. En revanche, selon ses déclarations en audience le 16 janvier 2023, il avait "bon espoir" de trouver un autre emploi, "d'ici l'été", de sorte à travailler à temps plein.

Sur une période de quinze mois, allant de janvier 2022 à mars 2023 inclus, A______ a effectué vingt-et-une postulations dans le domaine de la santé et du social, pour des emplois d'assistant socio-éducatif, d'éducateur ou d'animateur auprès des enfants ou des personnes âgées ou en situation de handicap et deux postulations dans le domaine du nettoyage, à savoir 1,5 recherches d'emploi par mois en moyenne.

b.b A______ est pour le surplus dépendant de l'aide sociale depuis novembre 2018.

b.c A______ loge dans une résidence destinée à des bénéficiaires de l'Hospice général. Il occupe gratuitement une grande chambre, dans laquelle il peut mettre un lit d'appoint lorsque ses enfants viennent lui rendre visite.

Le Tribunal, sans être critiqué, a arrêté le minimum vital du droit des poursuites de A______ à 1'487 fr. par mois, comprenant les primes d'assurance maladie obligatoire (217 fr., subside déduit), le montant de base selon les normes OP (1'200 fr.) et les frais de transport (70 fr.).

Dès le 1er juillet 2023, il se montera, selon le premier juge, à 2'687 fr. par mois, dans la mesure où il conviendra d'ajouter un loyer hypothétique de 1'200 fr. En effet, A______ devrait avoir trouvé un emploi dès cette date, de sorte qu'il ne se verrait plus mettre gratuitement à disposition une chambre par l'Hospice général.

c. Le Tribunal, sans être critiqué, a fixé l'entretien convenable de D______ à hauteur de son minimum vital du droit des poursuites, soit, après déduction des allocations familiales de 300 fr. par mois, au montant arrondi de 825 fr. par mois, comprenant sa participation au loyer de sa mère (238 fr. [20% de 1'188 fr.]), ses frais de garde dans une crèche qui était fermée durant un mois par année (439 fr. [479 fr. x 11 / 12]), ses primes d'assurance maladie obligatoire (46 fr., subside déduit) et son montant de base selon les normes OP (400 fr.).

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte, au titre des revenus de C______, des versements du Service des bourses et prêts d'études, car il s'agissait de prestations d'aide sociale.

A______ était jeune, en bonne santé et au bénéfice d'une formation d'animateur et accompagnateur auprès des personnes âgées. Son employeur actuel, G______, ne pourrait pas lui proposer d'augmenter son taux d'activité dans l'immédiat et, en tout état, pas au-delà de 50%. Cela étant, le précité avait déclaré "avoir bon espoir" de pouvoir travailler à 100% "d'ici l'été". En continuant à faire tous les efforts que l'on pouvait attendre de lui, il pourrait travailler à temps complet "d'ici l'été". Partant, il se justifiait de lui imputer, à compter du 1er juillet 2023, un revenu hypothétique de 3'850 fr. nets par mois après déduction des charges sociales de 15%, selon les statistiques de l'observatoire genevois du marché du travail pour un emploi d'animateur, sans expérience et sans formation, étant relevé qu'il n'était pas titulaire d'un CFC.

Avant le 1er juillet 2023, le déficit de A______ se montait à 307 fr. par mois (1'180 fr. - 1'487 fr.), de sorte qu'il n'était pas en mesure de contribuer à l'entretien de D______ et de son épouse. Il lui serait cependant donné acte de son engagement, le 6 mai 2022 devant le Tribunal, à verser, en mains de son épouse, 50 fr. par mois à titre de contribution à l'entretien de D______ à compter du 1er juin 2022.

Dès le 1er juillet 2023, après paiement de ses charges, A______ disposerait de 1'163 fr. arrondis à 1'100 fr. par mois (3'850 fr. - 2'687 fr.). Par conséquent, dès cette date, il serait en mesure de couvrir l'entretien convenable de D______ (825 fr. par mois, allocations familiales non comprises), ce qui lui laisserait un disponible de 275 fr. par mois, qu'il devrait verser à son épouse.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices de l'union conjugale, considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC (ATF 137 III 475 consid. 4.1), dans les causes dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

En l'espèce, le litige porte sur les contributions à l'entretien de l'enfant et de l'épouse qui, capitalisées selon l'art. 92 al. 2 CPC, conduisent à une valeur litigieuse supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Interjeté dans le délai (art. 142 al. 1, 271 lit. a et 314 al. 1 CPC) et selon la forme prescrits par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

Sont également recevables la réponse de l'intimée déposée dans le délai légal (art. 312 al. 1 et 314 al. 1 CPC) et les écritures spontanées subséquentes des parties (sur le droit à la réplique spontanée : cf. ATF 146 III 97 consid. 3.4.1).

2.             La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

Les mesures protectrices étant soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. d CPC), la cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (ATF 138 III 636 consid. 4.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_792/2016 du 23 janvier 2017 consid. 4.1).

Les maximes d'office et inquisitoire illimitée sont applicables aux questions concernant les enfants mineurs (art. 55 al. 2, 58 al. 2 et 296 CPC), de sorte que la Cour n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 296 al. 3 CPC).

La présente procédure est en revanche soumise aux maximes inquisitoire simple (art. 272 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC) s'agissant de la contribution due à l'entretien de l'épouse.

3.             Les parties ont allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles.

3.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération devant la Cour que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) ou s'ils ne pouvaient l'être devant la première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

Lorsque la cause concerne des enfants mineurs et que le procès est soumis à la maxime inquisitoire illimitée, les parties peuvent présenter des nova en appel même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC ne sont pas réunies (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

3.2 En l'espèce, les pièces produites concernent la situation financière des parties, laquelle est susceptible d'influencer la contribution d'entretien de l'enfant mineure. Elles sont donc recevables, de même que les faits s'y rapportant.

4.             L'appelant remet en cause les contributions d'entretien fixées en faveur de l'intimée et de l'enfant des parties.

4.1.1 En vertu de l'art. 176 al. 3 CC, relatif à l'organisation de la vie séparée, lorsque les époux ont des enfants mineurs, le juge ordonne les mesures nécessaires d'après les dispositions sur les effets de la filiation (cf. art. 273 ss CC).

Selon l'art. 276 CC, l'entretien de l'enfant est assuré par les soins, l'éducation et des prestations pécuniaires (al. 1). Les parents contribuent ensemble, chacun selon ses facultés, à l'entretien convenable de l'enfant et assument en particulier les frais de sa prise en charge, de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger (al. 2).

Le parent qui ne prend pas en charge l'enfant ou qui ne s'en occupe que partiellement doit en principe subvenir à son entretien financier (arrêt du Tribunal fédéral 5A_450/2020 du 4 janvier 2021 consid. 5.3).

La contribution d'entretien doit correspondre aux besoins de l'enfant ainsi qu'à la situation et aux ressources des père et mère (art. 285 al. 1 CC).

4.1.2 Selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, lorsque le juge constate que la suspension de la vie commune est fondée, il fixe la contribution pécuniaire à verser par un époux à l'autre.

Le principe et le montant de la contribution d'entretien se déterminent en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux (ATF 121 I 97 consid. 3b; 118 II 376 consid. 20b; 115 II 424 consid. 3). Tant que l'union conjugale n'est pas dissoute, les époux conservent, même après leur séparation, un droit égal au maintien de leur train de vie antérieur, en application des art. 163 et 164 CC. Quand il n'est pas possible de conserver ce niveau de vie, les conjoints ont droit à un train de vie semblable. Le train de vie mené jusqu'à la cessation de la vie commune constitue la limite supérieure du droit à l'entretien (ATF 147 III 293 consid. 4.4; arrêts du Tribunal 5A_935/2021 du 19 décembre 2022
consid. 3.1; 5A_409/2021 du 4 mars 2022 consid. 3.5.1).

4.1.3 Le Tribunal fédéral a posé, pour toute la Suisse, une méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille – soit la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent, dite en deux étapes (ATF 147 III 265, in SJ 2021 I 316; ATF 147 III 293 et ATF 147 III 301).

Selon cette méthode, on examine les ressources – en prenant en considération tous les revenus du travail, de la fortune et les prestations de prévoyance, ainsi que le revenu hypothétique éventuel – et besoins des personnes intéressées, puis les ressources sont réparties entre les membres de la famille concernés de manière à couvrir, dans un certain ordre, le minimum vital du droit des poursuites ou, si les ressources sont suffisantes, le minimum vital élargi du droit de la famille, puis l'excédent éventuel (ATF 147 III 265 consid. 7).

Les besoins sont calculés en prenant pour point de départ les lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP, en y dérogeant s'agissant du loyer (participation de l'enfant au logement du parent gardien). Pour les enfants, les frais médicaux spécifiques et les frais scolaires doivent être ajoutés aux besoins de base. Lorsque les moyens financiers le permettent, l'entretien convenable doit être étendu au minimum vital du droit de la famille. Pour les parents, les postes suivants entrent généralement dans l'entretien convenable (minimum vital du droit de la famille) : les impôts, les forfaits de télécommunication, les assurances, les frais de formation continue indispensable, les frais de logement correspondant à la situation (plutôt que fondés sur le minimum d'existence), les frais d'exercice du droit de visite, un montant adapté pour l'amortissement des dettes, et, en cas de circonstances favorables, les primes d'assurance-maladie complémentaires, ainsi que les dépenses de prévoyance privée des travailleurs indépendants. Chez l'enfant, le minimum vital du droit de la famille comprend une part des impôts, une part au logement du parent gardien et les primes d'assurance complémentaire (ATF 147 III 265 consid. 7.2).

4.1.4 S'agissant de l'obligation d'entretien d'un enfant mineur, les exigences à l'égard des père et mère sont plus élevées, en particulier lorsque la situation financière est modeste, en sorte que les parents doivent réellement épuiser leur capacité maximale de travail et ne peuvent pas librement choisir de modifier leurs conditions de vie si cela a une influence sur leur capacité à subvenir aux besoins de l'enfant mineur (ATF 147 III 265 consid. 7.4; 137 III 118 consid. 3.1). Il s'ensuit que, lorsque l'un des parents, ou les deux, ne fournissent pas tous les efforts que l'on peut attendre d'eux pour assumer leur obligation d'entretien, le juge peut s'écarter du revenu effectif des parties pour fixer la contribution d'entretien, et imputer un revenu hypothétique supérieur, tant au débiteur de l'entretien qu'au parent gardien. Il s'agit ainsi d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et dont on peut raisonnablement exiger d'elle qu'elle l'obtienne afin de remplir ses obligations à l'égard du mineur (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; 128 III 4 consid. 4a; arrêt du Tribunal fédéral 5A_679/2019 du 5 juillet 2021 consid. 14.2).

Lorsque le juge entend tenir compte d'un revenu hypothétique, il doit examiner successivement deux conditions. Il doit d'abord déterminer si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé. Le juge doit ensuite établir si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_645/2020 du 19 mai 2021 consid. 5.2.1).

En droit de la famille, lorsque l'entretien d'un enfant mineur est en jeu et que l'on est en présence de situations financières modestes, le débirentier peut notamment se voir imputer un revenu basé sur une profession qu'il n'aurait pas eu à accepter selon les règles prévalant en matière d'assurances sociales (ATF 137 III 118 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_764/2017 du 7 mars 2018 consid. 3.2).

Si le juge entend exiger d'un conjoint la prise ou la reprise d'une activité lucrative, ou encore l'extension de celle-ci, lui imposant ainsi un changement de ses conditions de vie, il doit généralement lui accorder un délai approprié pour s'adapter à sa nouvelle situation; ce délai doit être fixé en fonction des circonstances du cas particulier (ATF 129 III 417 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_554/2017 du 20 septembre 2017 consid. 3.2). Il faut notamment examiner si les changements étaient prévisibles pour la partie concernée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_184/2015 du 22 janvier 2016 consid. 3.2).

4.1.5 Un subside perçu par l'enfant qui est subsidiaire à l'obligation d'entretien découlant du droit de la famille n'a pas à être pris en considération, au contraire d'une bourse d'étude allouée indépendamment des revenus des parents (ACJC/492/2007 du 20 avril 2007 consid. 5.4). On retranche ainsi du coût de l'enfant les prestations sociales ou de tiers versées pour lui, en particulier les allocations d'études (arrêt du Tribunal fédéral 5C.127/2003 du 15 octobre 2003 consid. 4.1.2), mais pas les prestations qui sont subsidiaires à la contribution des parents ou sujettes à remboursement (tels une bourse ou les montants fournis par l'aide sociale; ATF 123 III 161 consid. 4a; TC VS du 16.12.04, RVJ 2005 p. 50; Bastons Bulletti, L'entretien après divorce: méthodes de calcul, montant durée et limites, in SJ 2007 p. 77 ss, p. 103 et note 152).

Le plus souvent, les bourses (à la différence des prêts) sont liées au revenu du groupe familial et peuvent être refusées si les parents sont à même d'intervenir selon l'art. 277 al. 2 CC (Meier/Stettler, Droit de la filiation, 2019, p. 1044 note de bas de page n. 3719).

La loi genevoise sur les bourses et prêts d'études (LBPE; RS/GE C 1 20) règle l'octroi d'aides financières aux personnes en formation (art. 1 al. 1 LBPE). Le financement de la formation incombe aux parents et aux tiers qui y sont légalement tenus (art. 1 al. 2 let. a LBPE), ainsi qu'aux personnes en formation elles-mêmes (art. 1 al. 2 let. b LBPE). Les aides financières sont accordées à titre subsidiaire (art. 1 al. 3 LBPE). Si les revenus de la personne en formation, de ses parents (père et mère), de son conjoint ou partenaire enregistré et des autres personnes qui sont tenus légalement au financement de la formation, ainsi que les prestations fournies par des tiers ne suffisent pas à couvrir les frais de formation, le canton finance, sur demande, les besoins reconnus par le biais de bourses ou de prêts (art. 18 al. 1 LBPE).

4.1.6 Le loyer mensuel moyen pour l'ensemble des logements loués à Genève en 2022 à un nouveau locataire selon l'Office cantonal de la statistique du canton de Genève se monte à 1'125 fr. pour un deux pièces et à 1'433 fr. pour un trois pièces (https://statistique.ge.ch/domaines/05/05_04/tableaux.asp#5; T 05.04.2.02), auxquels peuvent être ajoutées des charges estimées à 150 fr.

4.2.1 En l'espèce, l'appelant soutient que son revenu mensuel net actuel se monterait à 615 fr. et non à 1'180 fr., comme constaté par le Tribunal. Point n'est besoin d'entrer en matière sur ce grief, faute d'incidence sur l'issue du litige. En effet, le Tribunal a conclu que le précité n'était en tout état pas en mesure de contribuer à l'entretien de son épouse et de l'enfant des parties jusqu'au 1er juillet 2023, date à compter de laquelle il lui a imputé un revenu hypothétique à hauteur de 3'850 fr. nets par mois.

Par ailleurs, l'appelant reproche au Tribunal de lui avoir imputé ce revenu hypothétique. Selon lui, il avait déployé les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour trouver un emploi à 100%. A titre subsidiaire, il fait grief au Tribunal de lui avoir accordé un délai trop court de cinq mois, soit au 1er juillet 2023, pour ce faire. Il postulait depuis mars 2022, tant dans son domaine de formation que dans d'autres domaines, et avait réussi à obtenir son emploi actuel après dix mois de recherches. Les possibilités de recrutement dans son domaine de formation étaient en effet limitées. Aucun revenu hypothétique ne devait donc lui être imputé sur mesures protectrices.

Ce grief n'est pas fondé. L'appelant sait, depuis qu'il a pris connaissance de la requête de mesures protectrices de mars 2022, qu'il risque de se voir imputer un revenu hypothétique en raison de son obligation de contribuer à l'entretien de son enfant mineure D______ et de son épouse. Or, depuis cette date, il a effectué moins de deux recherches d'emploi par mois en moyenne, au surplus uniquement dans son domaine de formation, à l'exception de deux dans le domaine du nettoyage. L'effort déployé, tant du point de vue du nombre de postulations que du type d'emplois visé, est ainsi largement insuffisant. L'appelant échoue en conséquence à convaincre du fait qu'il ne serait pas en mesure de réaliser dans le délai imparti le revenu qui lui a été imputé par le Tribunal s'il déployait les efforts que l'on peut raisonnablement attendre de lui.

4.2.2 L'appelant fait grief au Tribunal d'avoir comptabilisé dans ses charges retenues sous l'angle du minimum vital du droit des poursuites à compter du 1er juillet 2023 un loyer mensuel hypothétique de 1'200 fr. Selon lui, le marché de l'immobilier à Genève est tendu et les loyers élevés. Un montant de 1'800 fr. par mois serait nécessaire pour un appartement de trois pièces qui lui permettrait d'accueillir ses deux filles.

Ce grief n'est pas fondé non plus. Les parties sont toutes deux dépendantes de l'aide sociale et l'appelant s'est vu imputer un revenu hypothétique peu élevé. Quant aux besoins des parties et de leur enfant, ils ont été retenus sous l'angle du minimum vital selon l'art. 93 LP, ce qui n'est pas remis en cause. Par ailleurs, l'appelant bénéficie d'un droit de visite peu étendu sur ces deux filles et il loge actuellement gratuitement dans une grande chambre, dans laquelle il parvient à les accueillir. Au surplus, l'on ignore s'il va dans le futur effectivement s'acquitter d'un loyer et, le cas échéant, le montant de celui-ci. Enfin, le loyer du logement conjugal occupé par l'intimée et l'enfant des parties s'élève à 1'188 fr. par mois. Au vu de ces éléments, la décision du Tribunal de retenir pour l'appelant un loyer estimé à 1'200 fr. par mois, ce qui correspond en substance au montant dont font état les statistiques cantonales de 2022 pour un logement de deux pièces, apparaît adéquat.

4.2.3 L'appelant reproche en vain au Tribunal de ne pas avoir pris en considération les augmentations de salaire dont bénéficiera l'intimée en deuxième, puis en troisième année d'apprentissage. Ces augmentations n'ont aucune incidence sur l'issue du litige. Le déficit mensuel de l'intimée retenu par le Tribunal s'élève à 1'748 fr. (735 fr. de revenus en première année d'apprentissage - 2'483 fr. de minimum vital). Cela étant, la contribution à l'entretien de l'intimée a dû être limitée au montant disponible de l'appelant, arrêté à 275 fr. par mois (3'850 fr. de revenu hypothétique - 2'687 fr. de minimum vital de l'appelant - 825 fr. de minimum vital de D______). En deuxième année d'apprentissage, le déficit mensuel de l'intimée sera certes moins élevé (1'529 fr. [954 fr. - 2'483 fr.]), mais il continuera d'être supérieur à 275 fr. par mois. Il ne se justifie dès lors pas de réduire la contribution d'entretien précitée durant cette deuxième année, malgré l'augmentation des revenus de l'intimée. La même conclusion s'impose enfin pour ce qui est de la troisième année d'apprentissage.

L'appelant fait par ailleurs à tort grief au Tribunal de ne pas avoir tenu compte de la bourse perçue par l'intimée au titre des revenus de celle-ci. Cette bourse a été accordée en application de la LBPE, à savoir à titre subsidiaire, les bourses d'études n'ayant pas vocation, selon cette loi, à se substituer aux obligations d'entretien découlant du droit de la famille.

L'appelant reproche enfin au premier juge de lui faire supporter les "choix de carrière" de son épouse. Il n'avait pas à contribuer à l'entretien de celle-ci pour qu'elle puisse effectuer sa formation, alors qu'elle pourrait travailler dans le domaine du nettoyage ou de la vente, sans formation, et gagner davantage. Ce dernier grief n'est pas fondé non plus. Durant la vie commune, l'intimée prévoyait déjà d'entreprendre un apprentissage aux HUG à la rentrée scolaire de septembre 2020. Elle a dû y renoncer en raison de la future venue au monde de l'enfant des parties en ______ 2020. Cette formation a pu être reportée et a débuté en septembre 2022, soit après la séparation des parties intervenue en février 2022. L'intimée ne suit donc pas cette formation dans le but de se soustraire à son obligation de déployer les efforts nécessaires pour subvenir par ses propres moyens à son entretien. L'acquisition d'une formation constitue au contraire une démarche adéquate susceptible d'augmenter ses chances de trouver un emploi lorsque cette formation sera achevée, étant relevé que l'appelant a, quant à lui, pu mener à bien sa formation durant la vie commune.

4.3 L'ensemble des griefs de l'appelant étant infondé, les chiffres 6, 7 et 9 du dispositif du jugement entrepris seront confirmés.

5. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 800 fr. (art. 31 et 37 RTFMC) et mis à la charge de l'appelant qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Celui-ci étant, tout comme l'intimée, au bénéfice de l'assistance juridique, les frais judiciaires seront provisoirement supportés par l'Etat de Genève, qui pourra en réclamer le remboursement ultérieurement aux conditions fixées par la loi (art. 122 et 123 al. 1 CPC; art. 19 du Règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale [RAJ; E 2 05.04]).

Pour le surplus, au vu de la nature familiale du litige, chaque partie supportera ses propres dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 2 février 2023 par A______ contre les chiffres 6, 7 et 9 du dispositif du jugement JTPI/1032/2023 rendu le 20 janvier 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/5488/2022.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr. et les met à la charge de A______.

Dit qu'ils sont provisoirement supportés par l'Etat de Genève.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile, dans les limites des art. 93 et 98 LTF.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.