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Décisions | Sommaires

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C/24570/2022

ACJC/1169/2023 du 11.09.2023 sur OSQ/19/2023 ( SQP ) , CONFIRME

Normes : LP.278; LP.17
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/24570/2022 ACJC/1169/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU LUNDI 11 SEPTEMBRE 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, recourant contre un jugement rendu par la 12ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 23 juin 2023, représenté par Me Aleksandra PETROVSKA, avocate, Sautter 29 Avocats, rue Sautter 29, case postale 244, 1211 Genève 12,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, représentée par Me Pierre GABUS, avocat, Gabus Avocats, boulevard des Tranchées 46, 1206 Genève.

 


EN FAIT

A. Par jugement OSQ/19/2023 du 23 juin 2023, reçu par les parties le 27 juin 2023, le Tribunal de première instance a déclaré recevable l’opposition formée le 20 janvier 2023 par A______ contre l'ordonnance de séquestre rendue le 12 décembre 2022 dans la cause n° C/24570/2022 (chiffre 1 du dispositif, "à la forme"), l'a rejetée (ch. 2, "au fond"), a mis les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr. et compensés avec l'avance effectuée, à la charge de A______ (ch. 2 et 3, "au fond"), a condamné A______ à verser à B______ 2'300 fr. à titre de dépens (ch. 4, "au fond") et a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5, "au fond").

B. a. Par acte expédié le 7 juillet 2023 à la Cour de justice, A______ forme recours contre le jugement précité, dont il requiert l'annulation. Il conclut, avec suite de dépens de première instance et de recours, à ce qu'il soit ordonné à l'Office des poursuites de procéder à un nouveau calcul de son budget et de rendre un nouveau procès-verbal, lequel devra tenir compte de sa situation financière réelle.

b. Dans sa réponse du 21 juillet 2023, B______ conclut au rejet du recours, avec suite de frais.

c. Les parties ont été informées le 8 août 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour:

a. Par jugement JTPI/6088/2021 du 10 mai 2021, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a condamné A______ à payer la somme de 3'550 fr. à B______, par mois et d'avance et à compter du 1er avril 2021, à titre de contribution à son entretien (ch. 3).

Par arrêt ACJC/1340/2021 du 5 octobre 2021, la Cour de justice a modifié le chiffre 3 du dispositif du jugement précité et condamné A______ à verser à B______, par mois et d'avance, dès le 1er avril 2021, la somme de 4'300 fr. à titre de contribution à son entretien.

Le recours formé devant le Tribunal fédéral par A______ à l'encontre de cet arrêt a été déclaré irrecevable par arrêt du 13 décembre 2021.

b. Par acte déposé au Tribunal le 12 décembre 2022, B______ a formé une requête de séquestre à l'encontre de A______ portant sur une créance en capital de 90'300 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 1er avril 2021, soit les contributions à son entretien dues pour les mois d'avril 2021 à décembre 2022.

Elle a sollicité le séquestre de toute créance de salaire ou toute autre créance, sous quelque forme que ce soit, notamment bonus, indemnités, actions ou options, de A______ auprès de C______, sise chemin 4______ no. ______, [code postal] E______[GE], de D______/5______ SARL, sise route 6______ no. ______, [code postal] E______[GE], D______/7_______ SARL, sise route 6______ no. ______, [code postal] E______[GE] et D______/8______ SARL, sise route 6______ no. ______, [code postal] E______[GE], de tous les actifs, avoirs, titres, comptes ou coffres appartenant aux trois sociétés D______/5______ SARL, D______/7______ SARL et D______/8______ SARL auprès de la G______, notamment les comptes n° 1______ et 2______, de toutes les créances de loyer perçues par A______ liées à la location d'un appartement sis chemin 9______ no. ______, [code postal] I______[GE], à H______ ou à tout autre tiers, et de la part de copropriété de A______ concernant l'immeuble n° 3______ sis chemin 9______ no. ______, [code postal] I______.

c. Par ordonnance du 12 décembre 2022, le Tribunal a ordonné le séquestre requis à concurrence de 90'300 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 15 février 2022 et condamné A______ aux frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., et aux dépens, arrêtés à 2'300 fr.

d. Le procès-verbal de séquestre du 13 décembre 2022 a été adressé aux parties par pli de l'Office des poursuites du 17 janvier 2023.

Le procès-verbal a été dressé au pied de l'ordonnance, laquelle mentionne, sous la rubrique "Voies de droit", l'opposition de l'art. 278 LP et la plainte des art. 17 ss LP.

e. Par acte du 20 janvier 2023, A______, agissant en personne, a formé opposition au séquestre devant le Tribunal.

Il a fait valoir que le procès-verbal de séquestre contenait des erreurs en ce sens que son minimum vital était entamé et qu'il n'était pas tenu compte du prêt hypothécaire grevant son bien immobilier. De plus, le séquestre des comptes des sociétés précitées avait conduit à l'impossibilité de payer les salaires des employés et "les factures de frais", avec un risque de faillite.

f. Aux termes de ses déterminations du 6 mars 2023, B______ a conclu à l'irrecevabilité de l'opposition, subsidiairement à son rejet, sous suite de frais.

Elle a fait valoir que A______ contestait les actes d'exécution du séquestre par l'Office des poursuites, arguments qu'il aurait dû faire valoir par la voie de la plainte.

g. Lors de l'audience du Tribunal du 12 juin 2023, A______, par l'intermédiaire de son conseil, a déclaré qu'il concluait à la levée du séquestre portant sur les comptes bancaires de "ses trois sociétés", au motif que le blocage de ces comptes empêchait les sociétés de fonctionner. Il avait dû licencier du personnel et s'exposait à des procédures pénales compte tenu du non-paiement des cotisations sociales. Par ailleurs, le séquestre de sa part de copropriété du bien immobilier sis à I______ suffisait largement à couvrir la créance de son épouse. Enfin, son salaire auprès de C______ était également partiellement séquestré.

B______, par l'intermédiaire de son conseil, a déclaré que ni la créance ni les motifs du séquestre n'étaient contestés, de sorte que l'opposition devait être rejetée. En tout état, le bien immobilier séquestré était grevé d'une hypothèque et l'activité des comptes des sociétés et les montants bloqués n'étaient pas connus.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

h. Dans son jugement du 23 juin 2023, le premier juge a considéré que l'opposant se plaignait en substance du fait que l'exécution du séquestre avait conduit au blocage d'avoirs supérieurs à la créance, qu'elle portait atteinte à son minimum vital et que ses sociétés se trouvaient en difficulté du fait des séquestres opérés sur leurs comptes. Le Tribunal n'était pas compétent, dans la procédure d'opposition, pour statuer sur ces griefs, lesquels auraient dû être soulevés par la voie de la plainte. En conséquence, l'opposition devait être rejetée, la réalisation des conditions posées au prononcé du séquestre n'étant à juste titre pas contestée.

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement entrepris étant une décision statuant sur opposition à séquestre, seule la voie du recours est ouverte (art. 278 al. 3 LP; art. 309 let. b ch. 6 et 319 let. a CPC).

Le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 278 al. 1 LP et 321 al. 2 CPC).

Déposé dans le délai et selon les formes requis par la loi, le recours est recevable.

1.2 La cognition de la Cour est limitée à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC et 278 al. 3 LP).

2. Le recourant fait grief au Tribunal d'avoir violé l'art. 278 LP, en considérant qu'il aurait dû déposer une plainte au sens de l'art. 17 LP. Il soutient que l'ordonnance de séquestre ne mentionnait que la voie de l'opposition et que, dans la mesure où il n'était pas représenté par avocat à l'époque, il pouvait se fier à l'indication des voies de droit figurant au pied de ladite ordonnance. Il entend ainsi obtenir, par la voie de l'opposition, un "nouveau calcul de son budget" et une modification du procès-verbal de séquestre.

2.1 Selon l'art. 271 al. 1 ch. 6 LP, le créancier d'une dette échue et non garantie par gage peut requérir le séquestre des biens du débiteur en Suisse lorsqu'il possède contre celui-ci un titre de mainlevée définitive. La loi vise un titre de mainlevée définitive au sens de l'art. 80 LP (ATF 139 III 135 consid. 4.2).

Selon l'art. 272 al. 1 LP, le séquestre est autorisé par le juge du for de la poursuite ou par le juge du lieu où se trouvent les biens, à condition que le créancier rende vraisemblable que sa créance existe (ch. 1), qu'on est en présence d'un cas de séquestre (ch. 2) et qu'il existe des biens appartenant au débiteur (ch. 3).

Il n'est pas arbitraire de considérer que le créancier qui invoque le cas de séquestre de l'art. 271 al. 1 ch. 6 LP n'a pas - contrairement aux autres cas (art. 271 al. 1 ch. 1 à 5 LP, en lien avec l'art. 272 al. 1 ch. 2 LP) - à rendre vraisemblable sa créance. Celle-ci découle en effet directement du titre produit (arrêts du Tribunal fédéral 5A_824/2020 du 12 février 2021 consid. 3.4.2.2; 5A_521/2018 du 12 août 2019 consid. 3.3; 5A_953/2017 du 11 avril 2018 consid. 3.2.2.1; 5A_806/2014 du 28 avril 2015 consid. 2.3.1).

2.2 L'ordonnance de séquestre est rendue sur la base de la seule requête du créancier (art. 272 LP). Elle doit être entreprise par la voie de l'opposition (art. 278 al. 1 LP), dont le but est de permettre au juge de vérifier le bien-fondé du séquestre après avoir entendu le débiteur. De son côté, l'office des poursuites exécute l'ordonnance de séquestre (art. 275 LP). Sa décision doit être entreprise par la voie de la plainte (art. 17 LP) auprès de l'autorité de surveillance, qui contrôle la régularité formelle de l'ordonnance de séquestre ainsi que celle des mesures proprement dites d'exécution du séquestre prévues aux art. 92 à 109 LP, applicables par analogie en vertu du renvoi prévu à l'art. 275 LP. Les griefs concernant les conditions de fond du séquestre doivent donc être soulevés dans la procédure d'opposition et ceux concernant l'exécution du séquestre dans la procédure de plainte (ATF 142 III 291 consid. 2.1; 129 III 203 consid. 2.2 et 2.3).

Plus singulièrement, les compétences des offices et des autorités de poursuite portent notamment, en vertu du renvoi de l'art. 275 LP, sur les mesures proprement dites d'exécution, soit celles concernant la saisissabilité des biens (art. 92 ss LP), l'ordre de la saisie (art. 95 ss LP), la sauvegarde des biens saisis (art. 98 ss LP) et la procédure de revendication (art. 106 ss LP). Elles visent aussi le contrôle de la régularité formelle de l'ordonnance de séquestre (ATF 142 III cité consid. 2.1 et les réf.).

2.3 On déduit du principe général de la bonne foi consacré à l'art. 5 al. 3 Cst. que les parties ne doivent subir aucun préjudice en raison d'une indication inexacte des voies de droit. Seul peut toutefois bénéficier de la protection de la bonne foi celui qui ne pouvait pas constater l'inexactitude de la voie de droit indiquée, même avec la diligence qu'on pouvait attendre de lui (ATF 138 I 49 consid. 8.3.2; 134 I 199 consid. 1.3.1). Il s'agit d'un principe général, dont le champ d'application n'est pas limité aux lois le consacrant expressément (cf. not. art. 49 LTF; ATF 123 II 231 consid. 8b; 119 IV 330 consid. 1c; 118 Ia 241 consid. 3c).

Cependant, une fausse indication ne saurait créer une voie de droit inexistante (ATF 129 III 88 consid. 2.1 in fine; 119 IV 330 consid. 1c; arrêts du Tribunal fédéral 4A_671/2016 du 15 juin 2017 consid. 3.2.1; 4D_82/2012 du 30 octobre 2012 consid. 2.2; 5A_545/2012 du 21 décembre 2012 consid. 5.1).

2.4 Les indications que doit énoncer l'ordonnance de séquestre sont énumérées à l'art. 274 al. 2 LP. Le procès-verbal de séquestre est dressé au pied de l'ordonnance (art. 276 al. 1 LP), plus précisément au verso de celle-ci (STOFFEL/CHABLOZ, Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, n. 2 ad art. 276 LP).

Selon l'art. 1 de l'ordonnance du 5 juin 1996 sur les formulaires et registres à employer en matière de poursuite pour dettes et de faillite et sur la comptabilité en matière de poursuites pour dettes et de faillite (Oform), on se servira des formulaires prescrits en vue d’une application uniforme des dispositions de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite et des ordonnances correspondantes. Aux termes de l'art. 2 Oform, les formulaires établis par le Service de haute surveillance en matière de poursuite et de faillite rattaché à l’Office fédéral de la justice (OFJ) sont publiés sous forme électronique dans une collection de modèles (al. 1). Les offices de poursuites et de faillites peuvent utiliser des formulaires établis par eux-mêmes; ceux-ci doivent correspondre, pour ce qui est de leur contenu, à ceux de la collection de modèles (al. 2). Les autorités cantonales peuvent se servir d’autres formulaires (al. 3).

Dans la collection figure un formulaire 45 "Ordonnance de séquestre et procès-verbal de séquestre", dont l'utilisation est obligatoire (STOFFEL/CHABLOZ, op. cit., loc. cit.). Au bas de la première page de ce formulaire sont imprimées des observations relatives notamment aux voies de droit (GILLIERON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, 2003, n. 11 ad art. 276 LP), soit l'opposition et la plainte.

2.5 En l'espèce, contrairement à ce que soutient le recourant, le procès-verbal de séquestre, dressé au verso de l'ordonnance de séquestre du 12 décembre 2022 mentionne tant la voie de droit de l'opposition que celle de la plainte. L'Office des poursuites a fait usage du formulaire 45 "Ordonnance de séquestre et procès-verbal de séquestre" figurant dans la collection de formulaires établis par le Service de haute surveillance en matière de poursuite et de faillite rattaché à l’Office fédéral de la justice (OFJ).

Par ailleurs, le recourant ne conteste pas que les griefs qu'il soulève dans son opposition du 20 janvier 2023 relèvent de la plainte de l'art. 17 LP, puisqu'ils concernent les mesures d'exécution du séquestre.

En toute hypothèse, l'omission de l'indication de la voie de la plainte n'aurait pu créer une voie de droit inexistante, à savoir une opposition selon l'art. 278 LP dirigée contre des mesures d'exécution du séquestre.

En définitive, c'est à bon droit que le Tribunal a considéré que les moyens invoqués par le recourant devaient être soulevés dans la procédure de plainte (art. 17 LP) et non dans la procédure d'opposition au séquestre. Le premier juge a à juste titre rejeté l'opposition, dans la mesure où le recourant ne contestait pas la réalisation des conditions de fond du séquestre.

Le recours, infondé, sera donc rejeté.

3. Les frais de recours seront mis à la charge du recourant qui succombe (art. 106 CPC).

Les frais judiciaires seront arrêtés à 750 fr. (art. 48 et 61 OELP) et compensés avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 CPC).

Les dépens dus à l'intimée seront fixés à 1'000 fr., débours et TVA inclus (art. 84, 85, 88, 89 et 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 7 juillet 2023 par A______ contre le jugement OSQ/19/2023 rendu le 23 juin 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/24570/2022-12 SQP.

Au fond :

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de recours à 750 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance effectuée, laquelle demeure acquis à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ 1'000 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.