Skip to main content

Décisions | Sommaires

1 resultats
C/6830/2023

ACJC/1162/2023 du 11.09.2023 sur JTPI/6261/2023 ( SFC ) , CONFIRME

Normes : LP.174.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6830/2023 ACJC/1162/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU LUNDI 11 SEPTEMBRE 2023

 

Entre

A______ SARL, sise ______[GE], recourante contre un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 1er juin 2023, comparant en personne,

et

FONDATION B______, ______[VD], intimée, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/6261/2023 du 1er juin 2023, reçu le 6 juin 2023 par A______ SARL, le Tribunal de première instance a déclaré cette société en état de faillite dès le ______ 2023 à 14 h 15 (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 200 fr., compensés avec l'avance effectuée par la FONDATION B______ (ch. 2) et mis à la charge de A______ SARL, condamnée à verser ce montant à la FONDATION B______, qui en avait fait l'avance (ch. 3).

B. a. Par acte déposé le 15 juin 2023 à la Cour de justice, A______ SARL a recouru contre ce jugement, dont elle a requis l'annulation. Elle a conclu au rejet de la requête de faillite formée par la FONDATION B______, en alléguant qu'elle était solvable et en établissant par deux quittances du 13 juin 2023 de l'Office des poursuites qu'elle avait soldé en capital, frais et intérêts la poursuite n° 1______ intentée à son encontre par ladite FONDATION.

b. Par décision du 22 juin 2023, la Cour a fait droit à la conclusion préalable de A______ SARL en suspension du caractère exécutoire du jugement attaqué et en suspension des effets juridiques de l'ouverture de la faillite.

c. Le même jour, la Cour a imparti à A______ SARL un délai pour déposer les pièces justifiant de sa solvabilité (comptes de l'année courante et des deux exercices précédents, contrats en cours, etc.) et pour se prononcer sur la liste des poursuites en cours et actes de défaut de biens qui lui était remise.

Celle-ci révèle l'existence de 74 poursuites inscrites depuis 2018, dont 8 (pour un montant total de plus de 45'000 fr.) sont au stade de l'ouverture de la faillite. Une poursuite a été éteinte et les autres ont été payées soit à l'Office, soit après réalisation. La liste mentionne 13 actes de défaut de biens délivrés en 2021 et 2022 à la Caisse genevoise de compensation, à la Confédération suisse, à l'Etat de Genève et à la ville de C______[GE], pour un total de 89'657 fr. 60.

d. Par acte du 3 juillet 2023, A______ SARL a allégué qu'elle avait "une entente préliminaire avec de nouveaux clients pour l'exécution de travaux d'une valeur totale de 453 499,28 CHF". De plus, elle était "en négociation" avec des débiteurs pour des créances d'environ 125'000 fr. Enfin, "l'historique des paiements montr[ait] qu'elle cherch[ait] à résoudre les obligations financières existantes".

Elle a produit trois devis des 7 mars, 10 mai et 10 juin 2023 adressés à "D______ SA" à E______[VD] (fourniture et installation de portes industrielles pour 192'664 fr. 53, fourniture et pose d'escaliers métalliques de secours pour 39'497 fr. 90 et montage de cloisons de séparation en briques ciment pour 203'356 fr. 85). Ces devis ne sont pas contresignés par leur destinataire.

Elle ne s'est pas prononcée sur la liste des poursuites en cours et n'a produit ni comptes ni contrats en cours ni extraits de ses comptes bancaires.

e. La FONDATION B______ n'a pas fait usage de son droit de répondre au recours.

f. Les parties ont été informées le 10 août 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure:

a. A______ SARL, inscrite au Registre du commerce genevois depuis le ______ 2016, a pour but ______, ainsi que tous travaux de finition.

b. Par arrêt du 14 juillet 2020, la Cour a annulé le jugement déclaratif de faillite qui avait été rendu le ______ 2020 par le Tribunal à la requête de F______ SA, en attirant l'attention de A______ SARL sur le fait qu'une nouvelle faillite la concernant, qui serait prononcée postérieurement à la réception de l'arrêt, ne serait plus rétractée, sauf si elle prouvait sa solvabilité par pièces jointes au recours.

c. Sur réquisition de la FONDATION B______, l'Office cantonal des poursuites a notifié le 13 octobre 2022 à A______ SARL un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur un total de 11'348 fr. 95, non frappé d'opposition.

d. Une commination de faillite a été notifié le 25 novembre 2022 à A______ SARL dans le cadre de la poursuite précitée.

e. Par arrêt du 2 mars 2023, la Cour a annulé le jugement déclaratif de faillite qui avait été rendu le ______ 2023 par le Tribunal sur requête de G______ SA, en attirant l'attention de A______ SARL sur le fait qu'une nouvelle faillite la concernant, qui serait prononcée postérieurement à la réception de l'arrêt, ne serait plus rétractée, sauf si elle prouvait sa solvabilité par pièces jointes au recours.

f. Par requête du 4 avril 2023, la FONDATION B______ a requis la faillite de A______ SARL.

 

g. A l'audience du Tribunal du 15 mai 2023, à laquelle la FONDATION n'était ni présente ni représentée, A______ SARL a déclaré qu'elle attendait des paiements de clients et a sollicité un délai pour solder la poursuite.

Le Tribunal lui a fixé un délai au 25 mai 2023 pour déposer une quittance pour solde de l'Office, attestant du paiement de la dette en capital, intérêts et frais, y compris les frais judiciaires.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du tribunal de la faillite selon la LP (art. 309 let. b ch. 7 CPC), seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a CPC; art. 174 LP).

Les décisions rendues en matière de faillite sont soumises à la procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).

1.2 Formé selon la forme et dans le délai prévus par la loi (art. 321 al. 1
et 2 CPC), le recours est recevable.

1.3 D'après l'art. 174 al. 1, 2ème phrase LP, les parties peuvent faire valoir devant l'instance de recours des faits nouveaux qui se sont produits avant le jugement de première instance ("pseudo nova"; Cometta, in Commentaire romand LP, 2005, n. 5 ad art. 174 LP). Le débiteur peut également présenter des faits et moyens de preuve postérieurs au jugement de faillite ("vrais nova"), pour autant qu'ils servent à établir que les conditions de l'art. 174 al. 2 LP sont remplies (Cometta,
op. cit., n. 6 ad art. 174 LP).

En l'espèce, les pièces nouvelles déposées par la recourante sont recevables dans la mesure où elles ont été produites dans le délai de recours ou dans le délai qui lui avait été imparti par la Cour, en vue d'établir que la dette avait été payée ainsi que sa solvabilité.

2. La recourante sollicite l'annulation du jugement prononçant sa faillite. Elle fait valoir qu'elle serait solvable.

2.1 En vertu de l'art. 174 al. 2 LP, l'autorité de recours peut annuler le jugement de faillite lorsque le débiteur rend vraisemblable sa solvabilité et qu'il établit par titre que l'une des conditions suivantes a été remplie, à savoir que la dette, intérêts et frais compris, a été payée (ch. 1), que la totalité du montant à rembourser a été déposée auprès de l'autorité de recours à l'intention du créancier (ch. 2) ou que le créancier a retiré sa réquisition de faillite (ch. 3). Ainsi, le débiteur ne doit pas seulement prouver le paiement de la dette à l'origine de la faillite, mais également rendre vraisemblable sa solvabilité. Ces deux conditions sont cumulatives (arrêts du Tribunal fédéral 5A_640/2011 du 4 janvier 2012 consid. 2 in fine; 5A_126/2010 du 10 juin 2010 consid. 6.2).

Le poursuivi doit rendre vraisemblable sa solvabilité, en produisant des titres immédiatement disponibles.

En principe, s'avère insolvable le débiteur qui, par exemple, laisse des comminations de faillite s'accumuler, fait systématiquement opposition et ne paie pas même des montants peu élevés. De simples difficultés passagères de paiements ne font en revanche pas apparaître insolvable le débiteur, à moins qu'il n'y ait aucun indice important permettant d'admettre une amélioration de sa situation financière et qu'il semble manquer de liquidités pour une période indéterminée. L'appréciation de la solvabilité repose sur une impression générale fondée sur les habitudes de paiement du failli (arrêts du Tribunal fédéral 5A_153/2017 du 21 mars 2017 consid. 3.1, 5A_118/2012 du 20 avril 2012 consid. 3.1, 5A_328/2011 du 11 août 2011 consid. 2, publié in SJ 2012 I p. 25). Pour rendre vraisemblable qu'il est solvable, le débiteur doit notamment établir qu'aucune requête de faillite dans une poursuite ordinaire ou dans une poursuite pour effets de change n'est pendante contre lui et qu'aucune poursuite exécutoire n'est en cours (arrêts du Tribunal fédéral 5A_118/2012 du 20 avril 2012 consid. 3.1 et 5A_640/2011 du 4 janvier 2012 consid. 3.1).

Un fait est rendu vraisemblable si le juge, en se basant sur des éléments objectifs, a l'impression que le fait invoqué s'est produit, sans pour autant devoir exclure la possibilité qu'il ait pu se dérouler autrement (ATF 132 III 715 consid. 3.1). Pour l'annulation du prononcé de faillite, cela signifie que la solvabilité du débiteur doit être plus probable que son insolvabilité. Dans ce domaine, il ne faut pas poser d'exigences trop sévères, en particulier lorsque la viabilité de l'entreprise endettée ne saurait être déniée d'emblée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_328/2011 du 11 août 2011 consid. 2, traduit et publié in SJ 2012 I 25; Message du Conseil fédéral du 8 mai 1991 concernant la révision de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, FF 1991 III p. 130 s.).

2.2 En l'espèce, il est établi que la dette faisant l'objet de la poursuite intentée par l'intimée a été acquittée, en capital, intérêts et frais. Les frais judiciaires de première et de seconde instances ont été réglés. La première condition posée par l'art. 174 LP est ainsi réalisée.

Quant à sa solvabilité, il y a lieu de relever que la recourante ne s'est pas prononcée sur la liste des poursuites en cours. Il en résulte qu'elle fait l'objet de 74 poursuites inscrites depuis 2018. Si de nombreuses poursuites ont été soldées à l'Office, 8 (pour un montant total de plus de 45'000 fr.) sont au stade de l'ouverture de la faillite. En outre, la liste mentionne 13 actes de défaut de biens délivrés en 2021 et 2022 à la Caisse genevoise de compensation, à la Confédération suisse, à l'Etat de Genève et à la ville de C______[GE], pour un total de 89'657 fr. 60.

La recourante n'allègue pas avoir les moyens de payer ses dettes et rien ne permet de penser que la situation à cet égard serait susceptible de s'améliorer à court terme. Elle n'a pas produit ses comptes et n'a donné aucune indication concernant ses éventuelles liquidités. Elle se borne à évoquer des négociations avec des débiteurs, sans fournir des éléments concrets. Par ailleurs, elle n'a produit aucun contrat en cours, se bornant à déposer trois devis de mars, mai et juin 2023, lesquels sont d'ailleurs adressés à la même société et ne sont pas contresignés par celle-ci.

2.3 En définitive, au vu de ce qui précède, la recourante n'a pas rendu vraisemblable sa solvabilité. Le recours, infondé, sera dès lors rejeté.

3. Lorsque l'effet suspensif octroyé par l'autorité de recours porte également sur la suspension des effets juridiques de l'ouverture de la faillite, et non seulement sur le caractère exécutoire du jugement de faillite, et que l'autorité rejette en fin de compte le recours contre la faillite, le moment de l'ouverture de la faillite est différé à la date du prononcé de l'arrêt de seconde instance. L'autorité doit par conséquent fixer à nouveau ce moment (arrêt du Tribunal fédéral 5A_92/2016 du 17 mars 2016 consid. 1.3.2.1).

La faillite de la recourante sera dès lors confirmée, avec effet à la date du prononcé du présent arrêt.

4. La recourante, qui succombe, sera condamnée aux frais judiciaires
(art. 106 al. 1 CPC), arrêtés à 220 fr. (art. 52 et 61 OELP) et compensés avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimée, qui n'a pas répondu au recours.

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 15 juin 2023 par A______ SARL contre le jugement JTPI/6261/2023 rendu le 1er juin 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/6830/2023-19 SFC.

Au fond :

Le rejette.

Confirme le jugement querellé, la faillite de A______ SARL prenant effet le ______ 2023 à 12h.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 220 fr., les met à la charge de A______ SARL et les compense avec l'avance de frais fournie, acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.