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Décisions | Sommaires

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C/16398/2022

ACJC/692/2023 du 26.05.2023 sur JTPI/251/2023 ( SML ) , IRRECEVABLE

Normes : CPC.148
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16398/2022 ACJC/692/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 26 MAI 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______[GE], recourant contre un jugement rendu par la 25ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 janvier 2023, comparant par Me Sabrina KHOSHBEEN, avocate, c/o Etude de
Me Olivier WASMER, Grand'Rue 8, case postale 221, 1211 Genève 28, en l'Étude de laquelle il fait élection de domicile,

et

B______ AG, sise ______ [ZH], intimée, comparant par
Me Valentin SCHUMACHER, avocat, boulevard des Pérolles 21, case postale 656, 1701 Fribourg, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement du 3 janvier 2023, reçu par l'épouse de A______ le 2 février 2023, le Tribunal de première instance a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, à concurrence des montants visés aux postes 1 et 3 de celui-ci (ch. 1 du dispositif), mis les frais judiciaires, arrêtés à 400 fr., à la charge de A______ (ch. 2) et condamné celui-ci à verser à B______ AG la somme de 890 fr. TTC à titre de dépens (ch. 3).

B. a. Par acte expédié le 21 février 2023 à la Cour de justice, A______ a formé recours contre ce jugement. Il a conclu, à la forme, à ce qu'il soit déclaré recevable et, au fond, à l'annulation du jugement attaqué, avec suite de frais.

Il a sollicité, dans le cadre de ses explications sur la recevabilité de son recours, la restitution du délai pour former recours.

b. B______ AG a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, le tout avec suite de frais.

c. Les parties ont été informées le 20 avril 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure.

a. Le 13 juillet 2022, l'Office des poursuites a notifié à A______, sur requête de B______ AG, un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur les montants de 20'858 fr. 45 avec intérêts à 9% dès le 28 mai 2022, à titre de créance résultant d'un contrat de leasing n° 2______ pour des arriérés dus pour la période de mars à mai 2022 ainsi que juin 2022 à février 2024 à la suite de la résiliation du 13 mai 2022, de 3'601 fr. 50 avec intérêts à 9% dès le 28 mai 2022 à titre de dommages-intérêts suite à la non-restitution de l'objet du leasing et de 40 fr. avec intérêts à 9% dès le 28 mai 2022 à titre de frais de rappel.

A______ y a formé opposition.

b. Le 18 août 2022, B______ AG a requis du Tribunal la mainlevée de cette opposition pour le montant de 20'898 fr. 45 avec intérêts à 9% dès le 28 mai 2022, les frais de poursuite, de justice et les dépens étant mis à la charge de A______.

Elle a produit avec sa requête un contrat de leasing n° 2______ du 20 février 2020 conclu entre C______ Sàrl, soit pour elle A______, et B______ AG, portant sur l'installation et la configuration d'un logiciel et qui fixe les mensualités dues à 867 fr. 95, TVA comprise. Ce contrat porte par ailleurs la mention selon laquelle A______ déclare avoir un intérêt matériel immédiat à la conclusion du contrat et s'engager à assumer personnellement et solidairement avec C______ Sàrl la responsabilité pour toutes créances découlant du contrat.

Elle a également produit une publication de la Feuille officielle suisse du commerce du 3 mars 2022 faisant état de la dissolution par suite de faillite de C______ Sàrl, un dernier rappel du 11 avril 2022 pour le paiement des mensualités des mois de mars et avril 2022, un courrier de résiliation du contrat de leasing avec effet immédiat du 13 mai 2022 et une demande de versement d'un montant de 20'858 fr. 45 comprenant les mensualités des mois de mars à mai 2022, ainsi que celles pour la période de juin 2022 à février 2024, un courrier adressé à A______ le 13 mai 2022 lui réclamant le paiement du montant précité en sa qualité de codébiteur solidaire ainsi que la production de sa créance dans la faillite de C______ Sàrl d'une créance de 20'858 fr. 45 ainsi que 40 fr. de frais de rappel et 300 fr. d'honoraires de son avocat.

c. Lors de l'audience devant le Tribunal du 2 décembre 2022, B______ AG n'était ni présente ni représentée.

A______ s'est opposé à la requête au motif que le contrat avait été conclu pour le compte de la société C______ Sàrl, laquelle avait été déclarée en faillite.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

d. Dans son jugement du 3 janvier 2022, le Tribunal a considéré que le contrat de leasing valait titre de mainlevée et que A______ s'était coobligé aux côtés de C______ Sàrl de par sa déclaration d'engagement solidaire résultant du contrat.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC).

Le recours, écrit et motivé, doit être déposé dans un délai de dix jours (art 321 al. 1 et 2 CPC), la procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

1.2 Sans prendre de conclusion formelle à cet égard, le recourant sollicite la restitution du délai de recours qui venait à échéance le 13 février 2023. Il expose à cet égard que son épouse a retiré le pli recommandé contenant le jugement attaqué le 2 février 2023, mais qu'il n'en avait pris connaissance que le 20 février 2023. En effet, il venait d'une région turque qui avait été dévastée par le tremblement de terre du 6 février 2023 et il avait dû faire face au deuil d'un nombre important de membres de sa famille. Il s'était par ailleurs mobilisé dès le 7 février 2023 pour organiser l'aide d'urgence à envoyer en Turquie. Ainsi, s'il avait pris connaissance du pli retiré par son épouse, il n'aurait pas été en mesure de recourir dans le délai de dix jours. Ce n'était que le 21 février 2023, à la sortie d'une audience du Tribunal des prud'hommes à laquelle il avait été cité comme témoin, que son avocate avait été informée du jugement du 3 janvier 2023.

1.2.1 Selon l'art. 147 CPC, une partie est défaillante lorsqu'elle omet d'accomplir un acte de procédure dans le délai prescrit ou ne se présente pas lorsqu'elle est citée à comparaître. La procédure suit son cours sans qu'il soit tenu compte du défaut, à moins que la loi n'en dispose autrement (al. 2). Le tribunal rend les parties attentives aux conséquences du défaut (al. 3).

Aux termes de l'art. 148 CPC, le tribunal peut accorder un délai supplémentaire ou citer les parties à une nouvelle audience lorsque la partie défaillante en fait la requête et rend vraisemblable que le défaut ne lui est pas imputable ou n'est imputable qu'à une faute légère. La requête est présentée dans les dix jours qui suivent celui où la cause du défaut a disparu (al. 1). Si une décision a été communiquée, la restitution ne peut être requise que dans les six mois qui suivent l'entrée en force de la décision (al. 3).

La faute légère vise tout comportement ou manquement qui, sans être acceptable ou excusable, n'est pas particulièrement répréhensible, tandis que la faute grave suppose la violation de règles de prudence élémentaires qui s'imposent impérieusement à toute personne raisonnable (arrêts du Tribunal fédéral 5A_927/2015du 22 décembre 2015 consid. 5.1; 4A_163/2015 du 12 octobre 2015 consid. 4.1).

Il suffit que les conditions (matérielles) d'application de l'art. 148 CPC soient rendues vraisemblables par le requérant, qui supporte le fardeau de la preuve. La requête de restitution doit ainsi être motivée, c'est-à-dire indiquer l'empêchement, et accompagnée des moyens de preuve disponibles (arrêt du Tribunal fédéral 5A_927/2015 du 22 décembre 2015 consid. 5.1 et les références).

A été jugée non fautive l'inobservation d'un délai due à un accident ou une maladie subite, qui a empêché la partie ou son mandataire d'agir le dernier jour, mais non l'empêchement qui n'avait pas duré jusqu'à l'échéance ou n'empêchait pas l'intéressé de prendre les dispositions nécessaires (Tappy, CR CPC, 2ème éd., 2019, n. 11, 13-14 ad art. 148 CPC).

1.2.2 En l'espèce, le recourant ne conteste pas, à juste titre, que le jugement attaqué lui a valablement été notifié le 2 février 2023, étant que rappelé que selon l'art. 138 al. 2 CPC, un acte est réputé notifié lorsqu’il a notamment été remis à une personne de seize ans au moins vivant dans le même ménage que le destinataire.

Le recourant soutient cependant qu'il n'a eu connaissance du jugement attaqué que le 20 février 2023. Le motif invoqué à l'appui de la demande de restitution, à savoir la survenance d'un séisme en Turquie, s'est cependant produit le 6 février 2023, soit plusieurs jours après la notification, sans que le recourant explique pourquoi il n'a pas été en mesure d'apprendre la notification dudit jugement de la part de son épouse dans ce laps de temps.

En outre, le recourant n'explique pas comment et dans quelles circonstances il aurait appris l'existence du jugement de mainlevée lors d'une audience devant le Tribunal des prud'hommes, dans une procédure a priori sans rapport avec la présente procédure, lors de laquelle il avait comparu comme témoin. En l'absence d'explication à cet égard, il ne peut être retenu que ce n'est effectivement que le 20 février 2023 que le recourant a eu connaissance du jugement attaqué.

Enfin, aussi dramatique que puisse être le séisme survenu en Turquie et ses conséquences, celui-ci ne constituait pas en lui-même et en tant que tel un empêchement d'agir dans le délai légal dont disposait le recourant. Les explications fournies par ce dernier, à savoir qu'il a perdu des membres de sa famille et qu'il s'est impliqué dans l'aide d'urgence, ne permettent par ailleurs pas de rendre vraisemblable qu'il n'a pas été en mesure de former recours dans le délai imparti ou de mandater un avocat pour ce faire, la nature et l'intensité de sa participation à l'aide apportée aux victimes n'étant en particulier aucunement précisée.

Au vu de ce qui précède, faute d'explication permettant de retenir le contraire, la faute du recourant ne peut être considérée comme légère, de sorte que la demande de restitution de délai sera rejetée.

Déposé après l'échéance du délai légal de 10 jours, le recours est dès lors irrecevable.

2. Pour le surplus, il sera simplement relevé, quant au fond de la cause, que, contrairement à ce que soutient le recourant, la faillite de C______ Sàrl n'a pas automatiquement mis fin au contrat de leasing à laquelle celle-ci était partie (cf. Bürgi, KUKO SchKG, 2ème éd., 2014, n. 8 ad art. 211a LP). En outre, conformément à l'art. 211a al. 2 LP a contrario, les créances du cocontractant découlant du contrat de durée qui sont nées après l'ouverture de la faillite, mais avant la déclaration d'entrée en vigueur du contrat par l'administration de la faillite (art. 211 al. 2 LP), ne constituent pas des dettes de la masse, mais des créances ordinaires de la faillite (Bürgi, op. cit., n. 27 ad art. 211a LP).

Dès lors, les créances résultant du contrat de leasing – qui constitue un titre de mainlevée – sont valablement nées après l'ouverture de la faillite et le recourant, qui s'est engagé à assumer personnellement et solidairement avec C______ Sàrl la responsabilité pour toutes créances découlant du contrat précité, pouvait être recherché personnellement par voie de poursuite par l'intimée pour les montants réclamés.

3. Les frais judiciaires de recours seront arrêtés à 600 fr (art. 48 et 61 OELP), mis à la charge du recourant qui succombe (art. 106 al. 1 CPC) et compensés avec l'avance de 1'100 fr. fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève à due concurrence, le solde lui étant restitué.

Le recourant sera par ailleurs condamné à verser une somme de 800 fr. à l'intimée à titre de dépens de recours, débours et TVA inclus (art. 20 et 23 LaCC; art. 85, 89 et 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


Préalablement :

Rejette la requête de restitution de délai de recours formée par A______ dans la cause C/16398/2022-25 SML.

A la forme :

Déclare irrecevable le recours interjeté par A______ contre le jugement JTPI/251/2023 rendu le 3 janvier 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/16398/2022-25 SML.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 600 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont compensés avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève à due concurrence.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer la somme de 500 fr. à A______.

Condamne A______ à verser la somme de 800 fr. à B______ AG à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.