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Décisions | Chambre pénale de recours

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PS/75/2022

ACPR/801/2022 du 14.11.2022 ( PSPECI ) , REJETE

Recours TF déposé le 09.12.2022, rendu le 26.05.2023, IRRECEVABLE, 6B_1457/2022
Descripteurs : EXÉCUTION DES PEINES ET DES MESURES;RISQUE DE RÉCIDIVE
Normes : CP.77.letb; CP.79.leta

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/75/2022 ACPR/801/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 14 novembre 2022

 

Entre

 

A______, domicilié ______[VD], comparant par Me Emmanuel HOFFMANN, avocat, avenue Alfred-Cortot 1, 1260 Nyon,

recourant,

 

contre la décision rendue le 21 septembre 2022 par le Service de l'application des peines et mesures,

 

et

 

LE SERVICE DE L'APPLICATION DES PEINES ET MESURES, case postale 1629, 1211 Genève 26,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 3 octobre 2022, A______ recourt contre la décision du 21 septembre 2022, communiquée par courrier A+, par laquelle le Service de l'application des peines et mesures (ci-après: SAPEM) a ordonné l'exécution, sous la forme de la semi-détention, de sa peine privative de liberté.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision entreprise et à ce qu'il soit autorisé à exécuter sa peine sous la forme de la surveillance électronique.

b. Par ordonnance OCPR/51/2022 du 5 octobre 2022, l'effet suspensif a été accordé au recours et un délai imparti au SAPEM pour s'exprimer.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______, ressortissant portugais né en 1988, a été condamné par ordonnance pénale du Ministère public du 31 décembre 2021 (P/1______/2021) à une peine privative de liberté de 60 jours, sous déduction de deux jours de détention avant jugement, pour conduite sous retrait, refus ou interdiction d'utilisation du permis de conduire (art. 95 al. 1 let. b de la Loi fédérale sur la circulation routière,
ci-après: LCR).

Cette décision est exécutoire.

b. Cette décision a fait l'objet, le 31 janvier 2022, d'une injonction d'exécution par le Ministère public.

c. Par courriel du 20 février 2022, A______ a manifesté le souhait d'exécuter sa peine sous la forme de la surveillance électronique.

d. Le 7 mars 2022, le SAPEM a délégué l'exécution de la peine sous la forme de la surveillance électronique à l'Office d'exécution des peines (ci-après: OPEP) du canton de Vaud, dès lors que l'intéressé y était domicilié.

e. Par courriel du 29 avril 2022, l'OPEP a retourné au SAPEM ladite délégation au motif que A______ ne remplissait pas toutes les conditions d'octroi du régime de la surveillance électronique. En effet, le prénommé avait déjà été autorisé à exécuter deux peines sous ce régime, ce qui ne l'avait pas empêché de récidiver. En outre, l'extrait du casier judiciaire mentionnait six condamnations pour conduite d'un véhicule automobile malgré un refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis. Il était donc à craindre qu'il commette de nouvelles infractions.

f. Par courriel du 23 juin 2022, le SAPEM a transmis le dossier au Service de probation et d'insertion (ci-après: SPI) pour préavis s'agissant de l'exécution de la peine sous la forme de la semi-détention, compte tenu de la réponse de l'OPEP.

g. Le 20 septembre 2022, le SPI a rendu un préavis favorable car A______ remplissait les conditions d'octroi (activité agréée en tant que jardinier, autorisation d'établissement en Suisse et documents d'identité valables, assurance maladie et accident).

A______ avait remis les documents nécessaires à son évaluation et pris connaissance des conditions d'exécution des courtes peines privatives sous forme alternative à la détention ordinaire. Le 12 août 2022, il s'était engagé, par sa signature, à respecter les règles de conduite standards inhérentes à cette modalité d'exécution de peine. Il reconnaissait avoir commis un délit, qu'il considérait comme étant une "bêtise". A______ souhaitait pouvoir débuter "dès que possible", l'exécution de sa peine sous la forme de la semi-détention.

h. À teneur de l'extrait du casier judiciaire suisse, A______ a été condamné à six autres reprises:

- le 28 octobre 2013 pour conduite d'un véhicule malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis (art. 95 al. 1 let. b LCR);

- le 16 janvier 2015 pour vol d'usage d'un véhicule automobile (art. 94 al. 1 let. a LCR), conduite d'un véhicule malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis (art. 95 al. 1 let. b LCR) et contravention à la LStup;

- le 27 mars 2015 pour vol d'usage d'un véhicule automobile (art. 94 al. 1 let. a LCR) et conduite d'un véhicule malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis (art. 95 al. 1 let. b LCR);

- le 14 août 2015 pour vol d'usage d'un véhicule automobile (art. 94 al. 1 let. a LCR) et conduite d'un véhicule malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis (art. 95 al. 1 let. b LCR);

- le 18 novembre 2016 pour vol (art. 139 CP) et contravention à la LStup;

- le 20 novembre 2020 pour violation des règles sur la circulation routière (art. 90
al. 1 LCR) et conduite d'un véhicule malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis (art. 95 al. 1 let. b LCR), infractions commises le 3 octobre précédent;

C. Dans la décision querellée, le SAPEM a autorisé l'exécution de la peine sous la forme de la semi-détention. Le casier judiciaire de A______ faisait mention de six antécédents, principalement en matière de LCR. Le risque de commission de nouvelles infractions pouvait toutefois être considéré comme contenu dans le cadre de la semi-détention. A______ était convoqué le 3 novembre 2022 à l'établissement ouvert de B______ pour y exécuter sa peine.

D. a. Dans son recours, A______ expose tout d'abord avoir demandé l'exécution de sa peine sous la forme de la surveillance électronique. Rien ne justifiait dès lors que le SAPEM se prononce en faveur de la semi-détention, ce d'autant plus que ce mode d'exécution lui serait préjudiciable ainsi qu'à sa famille. En effet, il était père de cinq enfants dont trois avaient des "problèmes" de développement. Son épouse ne pouvait donc s'en occuper seule, étant précisé qu'elle avait quitté son emploi fin juillet pour être plus disponible.

Comme jugé dans l'ACPR/545/2022, la surveillance électronique devait avoir la préférence sur la semi-détention, ce d'autant qu'il en remplissait les conditions.

b. Le SAPEM conclut au rejet du recours. A______ avait déjà exécuté des peines privatives de liberté sous le régime de la surveillance électronique à deux reprises, soit du 14 mars au 1er septembre 2017 et du 5 août au 6 octobre 2020 (cf. courriel de l'OPEP du 7 octobre 2020, produit à l'appui des observations), sans que cela ne l'empêche de récidiver. Au vu de la nouvelle infraction commise, rien n'indiquait qu'il saurait davantage mettre à profit cette forme alternative d'exécution de peine. Sa situation personnelle demeurait d'ailleurs inchangée dans la mesure où il était déjà parent durant ces périodes. Il convenait dès lors de privilégier le régime de la semi-détention à la détention ordinaire, lequel offrait un cadre plus contenant que la surveillance électronique et tenait suffisamment compte de sa situation personnelle et professionnelle.

c. Dans sa réplique, A______ expose avoir pris conscience de l'erreur commise et qu'il n'existe aucun risque de récidive, dès lors qu'il "sa[va]it" désormais que cela "pourrait" le conduire à une semi détention "cette fois certaine" et l'éloigner de sa famille à laquelle il était très attaché. De plus, ses enfants avaient besoin de lui au quotidien et les circonstances de vie étaient différentes. En effet, les bilans d'ergothérapie de deux de ses enfants, réalisés en avril 2022, révélaient des troubles de la concentration, de l'agitation et des difficultés motrices. Les suspicions d'autisme d'un autre de ses enfants avaient été confirmées en septembre 2022. Ces éléments rendaient le risque de récidive insignifiant.

 

 

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) – les formalités de notification (art. 85 al. 2 CPP) n'ayant pas été observées –, concerner une décision rendue par le SAPEM, dans une matière pour laquelle il est compétent (art. 40 al. 1 et art. 5 al. 2 let. e de la Loi d'application du code pénal suisse du 27 août 2009 [LaCP; E 4 10]), sujette à recours auprès de la Chambre de céans, les art. 379 à 397 CPP s'appliquant par analogie, et émaner du condamné visé par la décision querellée, qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de la décision entreprise (art. 382 CPP).

1.2. La décision querellée, ayant autorisé l'exécution de la peine privative de liberté sous la forme de la semi-détention, alors que le recourant avait requis une surveillance électronique, contient un refus implicite de cette forme d'exécution de peine, contre lequel le recours est également recevable (art. 52 al. 2 du Règlement sur les formes alternatives d'exécution des peines du 13 décembre 2017 [RFAEP; E 4 55.13]).

2.             Le recourant reproche au SAPEM d'avoir ordonné l'exécution de la peine en semi-détention, en lieu et place d'une surveillance électronique.

2.1. Selon l'art. 77b al. 1 CP, une peine privative de liberté de douze mois au plus ou un solde de peine de six mois au plus après imputation de la détention subie avant le jugement peuvent, à la demande du condamné, être exécutés sous la forme de la semi-détention, s'il n'y a pas lieu de craindre que le condamné s'enfuie ou commette d'autres infractions (let. a) et si le condamné exerce une activité régulière, qu'il s'agisse d'un travail, d'une formation ou d'une occupation, pendant au moins 20 heures par semaine (let. b).

Le risque de fuite ou de récidive visé par l'art. 77b CP doit être d'une certaine importance et les nouvelles infractions d'une certaine gravité. Pour poser un pronostic quant au comportement futur du condamné, l'autorité d'exécution des peines doit tenir compte, notamment, de ses antécédents judiciaires, de sa personnalité, de son comportement en général et au travail, ainsi que des conditions dans lesquelles il vivra (ATF 145 IV 10 consid. 2.2.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_872/2021 du 28 juin 2022 consid. 2.1).

2.2. Conformément à l'art. 79b al. 1 let. a CP, à la demande du condamné, l'autorité d'exécution peut ordonner l'utilisation d'un appareil électronique fixé au condamné (surveillance électronique), au titre de l'exécution d'une peine privative de liberté de 20 jours à 12 mois.

Selon l'al. 2, l'autorité ne peut ordonner la surveillance électronique que s'il n'y a pas lieu de craindre que le condamné s'enfuie ou commette d'autres infractions (let. a) ; s'il dispose d'un logement (let. b) ; s'il exerce une activité régulière qu'il s'agisse d'un travail, d'une formation ou d'une occupation, pendant au moins 20 heures par semaine, ou s'il est possible de l'y assigner (let. c); si les personnes adultes faisant ménage commun avec lui y consentent (let. d) ; et s'il approuve le plan d'exécution établi à son intention (let. e).

Si les conditions prévues à l’al. 2, let. a, b ou c, ne sont plus remplies ou si le condamné enfreint les obligations fixées dans le plan d’exécution, l’autorité d’exécution peut mettre fin à l’exécution sous la forme de la surveillance électronique et ordonner l’exécution de la peine privative de liberté sous la forme ordinaire ou sous celle de la semi-détention ou limiter le temps libre accordé au condamné (al. 3).

2.3. Si on en croit la structure de la loi, il faut considérer que la surveillance électronique doit avoir la préférence sur la semi-détention, dès lors que ce second mode d'exécution de la peine peut intervenir en cas d'échec du premier, comme le prévoit l'art. 79b al. 3 CP. On peut y déceler une hiérarchisation des modes d'exécution de la peine privative de liberté, allant de la surveillance électronique au mode d'exécution ordinaire, en passant par la semi-détention (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS, op. cit., n. 9 ad art. 79b CP).

2.4. La condition de l'absence de risque de récidive posée par l'art. 79b al. 2 let. a CP, étant identique à celle posée par l'art. 77b al. 1 let. a CP, doit être appliquée de la même manière (arrêt du Tribunal fédéral 6B_872/2021 précité, consid. 2.2 et la référence citée).

Contrairement au sursis et à la libération conditionnelle, toutes les infractions sont envisagées dans le risque de récidive mentionné à l'art. 79b al. 2 let. a CP, et pas seulement les délits et crimes (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS, op. cit., n. 13 ad art. 79b CP note 44).

L'existence d'un risque de récidive fait à lui seul obstacle à l'octroi du régime de la semi-détention ou de la surveillance électronique, sans qu'il n'y ait lieu de tenir compte de la situation familiale du condamné, de ses activités professionnelles, de son intégration, etc. (arrêt du Tribunal fédéral 6B_872/2021 précité, consid. 3.2.4).

2.5. En l'espèce, le recourant est condamné pour la sixième fois pour violation de l'art. 95 al. 1 let. b LCR. Il n'a pas hésité à récidiver alors même qu'il exécutait sa précédente peine sous le régime de la surveillance électronique.

Un comportement aussi désinvolte ne permet pas de poser un pronostic favorable quant au risque de récidive, qui doit être considéré comme concret. Partant, le recourant ne remplit pas au moins l’une des conditions inhérentes au régime de la surveillance électronique (art. 79b al 2 let. a CP) et à l'octroi de la semi-détention (art. 77b CP) – soit l'absence de risque de récidive –, ce qui suffirait à exclure qu’il en bénéficie.

Cela étant, le SAPEM considère que la semi-détention offrirait un environnement cadrant pouvant permettre de palier audit risque de récidive et que cette solution tiendrait suffisamment compte de sa situation personnelle et professionnelle.

En effet, compte tenu de l'échec des surveillances électroniques antérieures et au vu de la hiérarchisation des modes d'exécution de peine, l'appréciation du SAPEM peut être suivie. La présence d'un cadre soutenant apparait en effet nécessaire pour pallier le risque de récidive retenu ci-dessus et permet de laisser encore une chance au recourant avant l'exécution d'une peine privative de liberté sous la forme ordinaire.

Il apparait ainsi que le SAPEM a tenu compte de la situation personnelle du recourant, en lui permettant tout de même d'exécuter sa peine sous une forme alternative, et ce malgré l'existence d'un risque de récidive.

Enfin, le recourant mentionne avoir pris conscience de ses erreurs et des conséquences de celles-ci sur sa vie et celle de sa famille. Son amendement est toutefois insuffisant pour remettre en cause les conclusions qui précèdent.

Compte tenu de l'ensemble de ce qui précède, la décision du SAPEM ne prête pas le flanc à la critique.

3.             Justifiée, la décision querellée sera donc confirmée.

4.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Service de l'application des peines et mesures.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Daniela CHIABUDINI et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PS/75/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

20.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

805.00

-

CHF

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

900.00