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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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PS/49/2024

AARP/242/2024 du 17.07.2024 ( RECUSE ) , REJETE

Normes : CPP.56.letf
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/49/2024 AARP/242/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 17 juillet 2024

 

 

Entre

A______, domicilié ______ [GE],

requérant,

et

B______, p.a. Chambre pénale de recours, case postale 3108, 1211 Genève 3,

C______, p.a. Chambre pénale de recours, case postale 3108, 1211 Genève 3,

D______, p.a. Chambre pénale de recours, case postale 3108, 1211 Genève 3,

E______, p.a. Chambre pénale de recours, case postale 3108, 1211 Genève 3,

cités.


EN FAIT :

A.           À teneur de trois courriers des 1er et 6 juillet 2024 adressés à la Chambre pénale de recours (CPR), qui les a reçus les 2 et 9 juillet 2024, et transmis à la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) pour raison de compétence, A______ sollicite la récusation des juges B______, C______, E______ et D______, juges de la CPR, "et de la CPR", dans les procédures P/1______/2024, P/2______/2024 et P/3______/2023, dans le cadre desquelles il a recouru contre des ordonnances de non-entrée en matière rendues par le Ministère public à la suite de plaintes pénales déposées par ses soins à l'encontre de F______, alors ______ du Grand Conseil genevois, respectivement de G______, juge au Tribunal pénal et de Me H______, avocate.

Le greffe de la CPAR a enregistré ces trois requêtes sous numéro de procédure PS/49/2024.

B. a. Dans les trois courriers précités, tous intitulés "Demande d'assistance judiciaire (art. 136 CPP) et d'exonération des frais de sûreté", A______ conteste devoir verser des sûretés de CHF 1'000.-, exigées par courriers des 25 juin 2024 (P/1______/2024) et 3 juillet 2024 (P/2______/2024 et P/3______/2023), pour que la CPR entre en matière sur le recours déposé par ses soins contre l'ordonnance rendue par le MP, arguant être indigent. Il qualifie en outre les juges de la CPR d'"anonymes" et de "dissimulés", ajoutant que les "magistrats influents de la direction de la procédure CPR" sont tous visés par des "plaintes pénales et administratives", de sorte que B______, C______, E______ et D______ "pourraient être tentés de ne pas traiter de façon, à tout le moins objective, [s]on recours en respect de l'art. 12 LOJ".

b. Dans son courrier du 1er juillet 2024 rédigé dans le cadre de la procédure P/1______/2024, A______ indique également déposer une "nouvelle" plainte pénale contre les quatre magistrats prénommés de la CPR, en particulier pour "abus de pouvoir (art. 312 CP)", entrave à l'action pénale, menace, chantage et contrainte. A cet égard, outre les reproches précités, il soutient que B______, ______ du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et I______, Procureur, "impliqués dans moult plaintes dont celle du 18.04.2024, contrôlent toutes les strates de la justice dont la CPR". Il en découle, selon lui, que ces deux magistrats "et leur sous-fifres magistrates ne craignent plus la Loi" et "méprisent la Justice qu'ils violent systématiquement et outrageusement". Tous ces magistrats "criminels" étaient, en substance, des "traitres à la Patrie".

c. A l'exception d'une décision le concernant annexée au courrier du 1er juillet 2024 et émanant de la Caisse genevoise de compensation – Service des rentes –, datée du 13 juillet 2021 et mentionnant un droit à une rente simple AVS de CHF 568.-, A______ n'a produit aucune pièce à l'appui de ses demandes de récusation.

C. Il ressort des ordonnances de non-entrée en matière rendues par le Ministère public dans les trois procédures pour lesquelles A______ sollicite la récusation des magistrats de la CPR, les éléments suivants :

a. Dans la procédure P/1______/2024, A______ a en substance déposé plainte pénale à l'encontre de F______, en lui reprochant de lui avoir, en sa qualité de ______ du Grand Conseil, retourné un courrier adressé au bureau du Grand Conseil en qualifiant les termes de ce dernier d'inadmissibles, comportement qu'il qualifiait d'abus d'autorité (art. 312 CP). Dans sa décision du 27 mai 2024, le Ministère public a retenu que les éléments constitutifs de cette infraction n'étaient manifestement pas réunis.

b. Dans la procédure P/2______/2024, il a déposé plainte pénale à l'encontre de G______, lui reprochant d'avoir violé ses droits dans la procédure P/4______/2020, comportement qu'il qualifiait d'abus d'autorité (art. 312 CP). Le Ministère public a considéré, dans sa décision du 11 juin 2024, qu'il n'existait aucun indice de commission d'une infraction pénale. Il ressort de cette décision que A______ avait sollicité la récusation de la magistrate précitée, demande déclarée irrecevable par la CPR le 25 août 2023 (PS/5______/2023).

c. Dans la procédure P/3______/2023, il a déposé plainte pénale à l'encontre de Me H______, lui reprochant des faits qualifiés d'escroquerie (art. 146 CP), de contrainte (art. 181 CP) et d'extorsion et chantage (art. 156 CP), notamment. Dans sa décision du 13 juin 2024, le Ministère public a, d'une part, considéré que A______ ne revêtait pas la qualité de partie plaignante en lien avec les faits dénoncés et, d'autre part, retenu qu'il n'existait en tout état aucun indice de commission d'une infraction pénale. A______ avait également sollicité la récusation de I______, lequel était en charge de ladite procédure, demande rejetée par la CPR le 7 mai 2024 (PS/6______/2023).

D. Aucune détermination n'a été requise.

EN DROIT :

1. 1.1. Aux termes de l'art. 59 al. 1 let. c CPP, lorsqu'un motif de récusation au sens de l'art. 56 let. a ou f CPP est invoqué ou qu'une personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale s'oppose à la demande de récusation d'une partie qui se fonde sur l'un des motifs énumérés à l'art. 56 let. b à e CPP, le litige est tranché sans administration supplémentaire de preuves et définitivement par la juridiction d'appel lorsque l'autorité de recours et des membres de la juridiction d'appel sont concernés.

À Genève, l'autorité de recours au sens de l'art. 59 al. 1 let. c CPP est la chambre pénale de recours (CPR ; art. 127 et 128 LOJ) et la juridiction d'appel est la chambre la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR ; art. 129 et 130 LOJ).

1.2. Conformément à l'art. 58 al. 1 CPP, la demande de récusation doit être présentée sans délai dès que la partie a connaissance du motif de récusation, c'est-à-dire dans les jours qui suivent la connaissance de la cause de récusation, sous peine de déchéance. De jurisprudence constante, les réquisits temporels de cette disposition sont satisfaits lorsque la demande de récusation est déposée dans les six à sept jours qui suivent la connaissance de la cause de récusation (arrêt du Tribunal fédéral 1B_367/2021 du 29 novembre 2021 consid. 2.1).

1.3. En l'occurrence, les juges B______, C______, E______ et D______ font partie de la CPR, de sorte que la CPAR est la juridiction compétente pour statuer sur la demande de récusation formulée à leur encontre.

Les demandes de récusation ayant été formulées moins de six jours après la réception des courriers des 25 juin 2024 et 3 juillet 2024, par lesquels la CPR a sollicité la fourniture de sûretés, celles-ci sont recevables à la forme.

2. 2.1. À teneur de l'art. 56 let. f CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale est tenue de se récuser lorsque d'autres motifs que ceux évoqués aux lettres a à e de cette disposition, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à la rendre suspecte de prévention.

Cette disposition a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres précédentes. Elle correspond à la garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 30 al. 1 Cst. et
6 par. 1 CEDH (ATF 143 IV 69 consid. 3.2), respectivement concrétise les droits déduits de l'art. 29 al. 1 Cst. lorsque d'autres autorités ou organes (cf. en particulier art. 12 CPP) que des tribunaux (cf. art. 13 CPP) sont concernés (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.2). Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du magistrat est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Seules les circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération. Les impressions purement individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_98/2019 du 25 avril 2019 consid. 3).

L'impartialité subjective d'un magistrat se présume jusqu'à preuve du contraire (CourEDH Lindon, § 76 ; ATF 136 III 605 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_621/2011 du 19 décembre 2011 ; N. SCHMID, Schweizerische Strafprozessordnung, 2009, n. 14 ad art. 56).

2.2. Comme le prévoit le texte de l'art. 58 al. 1 in fine, la partie qui demande la récusation doit rendre plausibles les faits sur lesquels elle fonde sa demande.

Les faits concrets doivent être exposés, de simples affirmations ou opinions, de même que des motifs vagues et globaux, sont insuffisants. Bien que la simple vraisemblance suffise, elle doit résulter d'une impression objective. L'autorité doit ensuite instruire les faits d'office (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Basler Kommentar StPO/JStPO, 3ème éd., Bâle 2023, n. 4 ad art. 58 et les références citées). Il s'agit d'une double tâche qui incombe au requérant : 1° présenter des faits précis en lien avec la procédure déterminée ; 2° les rendre vraisemblables : le contexte présenté doit rendre plausibles les faits décrits (en lien avec la récusation selon la LTF : F. AUBRY GIRARDIN / Y. DONZALLAZ / C. DENYS / G. BOVEY / J.-M. FRÉSARD, Commentaire de la LTF, 3ème éd., Berne 2022, n. 16 ad art. 36).

La récusation n'a pas pour finalité de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction et de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises par la direction de la procédure. En effet, il appartient aux juridictions de recours normalement compétentes de constater et de redresser les erreurs éventuellement commises dans ce cadre (ATF 143 IV 69 consid. 3.2).

Il est exclu que la partie suscite un motif de récusation par son propre comportement notamment en provoquant le juge ou en le dénonçant pénalement ou disciplinairement (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), op. cit.,
n. 41 ad art. 56 et les références citées). La jurisprudence n'admet que restrictivement un cas de récusation lorsqu'un magistrat est pris à partie, pénalement ou non. Dans de telles circonstances, le défaut d'impartialité du magistrat ne devrait être envisagé que si celui-ci répondait à la dénonciation formée contre lui en déposant une plainte pénale assortie de conclusions civiles en réparation du tort moral ou réagissait d'une autre manière propre à établir qu'il n'est plus en mesure de prendre la distance nécessaire par rapport à la plainte (arrêts du Tribunal fédéral 1B_368/2021 du
22 septembre 2021 consid. 2.1 ; 1B_137/2021 du 15 avril 2021 consid. 2.2 et les arrêts cités ; voir aussi ATF 134 I 20 consid. 4.3.2).

2.3. En l'occurrence, le requérant critique, dans ses trois demandes, le fait que la CPR a exigé la fourniture de sûretés pour entrer en matière sur le recours déposé par ses soins contre une ordonnance de non-entrée en matière rendue par le Ministère public.

Or, comme il le relève lui-même, la CPR n'a, ce faisant, fait qu'appliquer l'art. 383 al. 1 CPP, disposition prévoyant expressément la possibilité d'astreindre la partie plaignante à la fourniture de sûretés, en usant de la marge de manœuvre qui lui est conférée par la loi. Cette demande pouvait être contestée par les voies de droit à sa disposition. Le requérant l'a du reste très bien compris puisque, dans ses courriers, il sollicite également l'application de l'art. 136 CPP, le bénéfice de l'assistance judiciaire comprenant l'exonération d'avances de frais et de sûretés.

Dès lors, l'on ne saurait voir dans le comportement consistant à solliciter le versement de sûretés une quelconque apparence de prévention des magistrats de la CPR.

Pour le surplus, dans son courrier adressé à la CPR dans le cadre de la procédure P/1______/2024, le requérant, au-delà de la simple émission de critiques, très vives, à l'égard des magistrats de la CPR – et du Procureur –, n'étaye et ne documente aucunement ses allégations. En particulier, s'agissant des "plaintes pénales et administratives" auxquelles il fait référence, dont il n'a fourni aucune copie, il ne rend nullement vraisemblable qu'elles auraient débouché sur une condamnation, respectivement une sanction administrative, à l'égard des magistrats visés dans ses demandes de récusation.

Il en découle qu'aucune prévention des magistrats cités n'est rendue plausible.

Ainsi, la requête de récusation doit être rejetée, dans la mesure de sa recevabilité.

3. Le requérant, qui succombe, supportera les frais de la procédure envers l'Etat (art. 59 al. 4 CPP et 14 al. 1 let. b du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale du 22 décembre 2010 [RTFMP - E 4 10.03]).

 

*****

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, la demande de récusation formée par A______ à l'encontre de B______, C______, E______, D______ et de la CPR.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure, comprenant un émolument de CHF 500.-.

Notifie le présent arrêt aux parties.

 

La greffière :

Linda TAGHARIST

 

Le président :

Christian ALBRECHT

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

20.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

595.00