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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/1303/2022

DCSO/530/2022 du 16.12.2022 ( PLAINT ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : Frais de poursuites; acte de défaut de bien
Normes : aaLPPCI.16.al1; lp.68; oelp.41; lp.150.al1
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1303/2022-CS DCSO/530/22

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 15 DECEMBRE 2022

 

Plainte 17 LP (A/1303/2022-CS) formée en date du 26 avril 2022 par A______, comparant en personne.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

Service juridique

______

______.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Entre les mois d'avril 2017 et de janvier 2021, plusieurs actes de défaut de biens (ci-après : ADB) délivrés au profit de [l'assurance maladie] A______ (ci-après : A______ ou la créancière) - dans le cadre de différentes poursuites dirigées contre différents débiteurs - ont été soldés en mains de l'Office cantonal des poursuites de Genève (ci-après : l'Office).

A réception des fonds versés par les débiteurs, l'Office a procédé à diverses démarches pour obtenir de la créancière qu'elle lui retourne l'exemplaire original de chaque ADB soldé.

a.a S'agissant de l'ADB n  1______, soldé en janvier 2021, l'Office a effectué les démarches suivantes :

Par courrier du 28 janvier 2021, l'Office a informé A______ que le débiteur avait effectué un paiement qui "sold[ait] la procédure". Se référant aux art. 149 à 150 LP, il a invité la créancière à lui retourner l'exemplaire original de l'ADB soldé, afin qu'il puisse procéder à son annulation, étant précisé qu'une fois en possession de l'acte, il verserait à A______ le montant qui lui revenait.

Le 12 février 2021, la créancière a répondu que l'original avait été cédé au Service de l'assurance-maladie de Genève (SAM), à savoir le service chargé de contrôler l'affiliation à l'assurance-obligatoire des soins (LAMal) des personnes assujetties, d'allouer des subsides aux assurés de condition économique modeste et de prendre en charge les primes des assurés insolvables.

Par pli simple (courrier B) du 16 février 2021, l'Office a demandé à l'Administration fiscale cantonale, Service des remises d'impôts et des actes de défaut de biens (ci-après : AFC), de lui restituer l'exemplaire original de l'ADB soldé, afin qu'il puisse procéder à son annulation et verser à l'AFC le montant qui lui revenait.

N'ayant reçu aucune réponse, l'Office a adressé deux courriers de rappel à l'AFC, le premier par pli recommandé du 18 mars 2021 et le second par pli prioritaire (courrier A) du 7 avril 2021.

Le 21 avril 2021, l'AFC a répondu ce qui suit à l'Office : "notre administration n'est pas en charge de l'acte n° 1______. En effet, celui-ci ne fait pas partie de notre convention avec le Service de l'assurance-maladie SAM (primes impayées de fin 2005 à fin 2011). De ce fait, nous vous remercions de bien vouloir effectuer votre demande de restitution auprès de [A______]".

Les 10 et 11 mai 2021, l'Office a reçu deux courriers de A______ datés du 11 décembre 2020; dans le premier courrier, la créancière a précisé ne plus avoir l'ADB en sa possession, de sorte qu'elle sollicitait un duplicata de l'acte; dans le second, la créancière a indiqué que l'acte était introuvable, mais qu'elle ne l'avait pas cédé, ni vendu, ni remis à un tiers.

a.b S'agissant de l'ADB n° 23 2______, soldé en juillet 2020, l'Office a effectué les démarches suivantes :

Par pli simple du 31 juillet 2020, l'Office a informé A______ que le débiteur avait effectué un paiement qui "sold[ait] la procédure". Se référant aux art. 149 à 150 LP, il a invité la créancière à lui retourner l'exemplaire original de l'ADB soldé, afin qu'il puisse procéder à son annulation, étant précisé qu'une fois en possession de l'acte, il verserait à A______ le montant qui lui revenait.

Par pli recommandé du 31 août 2020, l'Office a adressé un courrier de rappel ("RAPPEL - acte de défaut de biens n° 2______") à A______, rédigé en ces termes :

"Nous nous référons à notre courrier du 31 juillet 2020 par lequel nous vous informions que le débiteur avait effectué un paiement qui solde la procédure mentionnée ci-dessus.

Conformément aux art. 149 à 150 LP, nous vous saurions gré de bien vouloir nous retourner l'exemplaire original de l'acte de défaut de biens afin que nous puissions procéder à son annulation.

Dès que nous serons en possession de ce document, le montant vous revenant sera viré sur votre CCP ou votre compte bancaire. Sans réponse de votre part, nous serons dans l'obligation de consigner le montant dû et de vous facturer des frais supplémentaires.

Si vous avez égaré cet acte, vous voudrez bien nous faire parvenir un courrier précisant que vous l'avez perdu et qu'il n'a donc été ni vendu, ni cédé à un tiers, ni porté en gage".

Par pli prioritaire du 21 septembre 2020, l'Office a adressé un deuxième courrier de rappel ("DERNIER RAPPEL - acte de défaut de biens n° 2______ ") à A______, rédigé en ces termes :

"Nous nous référons à notre courrier du 31 juillet 2020 par lequel nous vous informions que le débiteur avait effectué un paiement qui solde la procédure mentionnée ci-dessus, ainsi qu'à notre rappel du 31 août 2020.

Conformément aux art. 149 à 150 LP, nous vous saurions gré de bien vouloir nous retourner l'exemplaire original de l'acte de défaut de biens afin que nous puissions procéder à son annulation.

Dès que nous serons en possession de ce document, le montant vous revenant sera viré sur votre CCP ou votre compte bancaire. Sans réponse de votre part d'ici 10 jours, nous procéderons à la consignation du montant qui vous est dû et nous vous factu[re]rons des frais.

Si vous avez égaré cet acte, vous voudrez bien nous faire parvenir un courrier précisant que vous l'avez perdu et qu'il n'a donc été ni vendu, ni cédé à un tiers, ni porté en gage".

Selon les explications de l'Office, A______ a donné suite à ce deuxième rappel le 1er octobre 2020.

a.c S'agissant des ADB n° 3______ (soldé en décembre 2018), n° 4______ (soldé en janvier 2019), n° 5______ (soldé en février 2019), n° 6______ (soldé en janvier 2019), n 7______ (soldé en mars 2019), n°8______ (soldé en janvier 2019), n 9______ (soldé en février 2019), n°10______ (soldé en novembre 2019), n°11______ (soldé en février 2019), n 12______ (soldé en mars 2019), n°13______ (soldé en novembre 2019), n°14______ (soldé en décembre 2019), n°15______ (soldé en décembre 2019), n 16______ (soldé en janvier 2019), n 17______ (soldé en janvier 2021), n 18______ (soldé en janvier 2021) et n 19______ (soldé en janvier 2021), l'Office a procédé à des démarches similaires à celles effectuées en vue de récupérer l'ADB n 2______ (cf. supra let. a.b).

Pour chaque ADB, l'Office a envoyé un courrier à A______, sous pli simple, en l'informant que le débiteur avait effectué un paiement qui "sold[ait] la procédure". Se référant aux art. 149 à 150 LP, il a invité la créancière à lui retourner l'exemplaire original de l'ADB soldé, afin qu'il puisse procéder à son annulation, étant précisé qu'une fois en possession de l'acte, il verserait à A______ le montant qui lui revenait.

Par la suite, l'Office a adressé à A______ un premier courrier de rappel ("RAPPEL – acte de défaut de biens n°…"), expédié sous pli recommandé, puis un deuxième courrier de rappel ("DERNIER RAPPEL - acte de défaut de biens n°…"), expédié sous pli prioritaire, d'une teneur similaire à ceux adressés à la créancière s'agissant de l'ADB n 2______ (cf. supra let. a.b, §§ 3 et 4).

Selon les explications de l'Office, A______ a donné suite à ce deuxième rappel pour chacun des ADB concernés.

a.d S'agissant des ADB n 20______ (soldé en juillet 2018), n 21______ (soldé en juillet 2018), n 22______ (soldé en juin 2018), n 23______ (soldé en juillet 2018), n 24______ (soldé en mai 2017), n 25______ (soldé en juin 2017), n 26______ (soldé en avril 2017), n 27______ (soldé en août 2018), n 28______ (soldé en avril 2017), n 29______ (soldé en avril 2017), n 30______ (soldé en avril 2017), n 31______ (soldé en février 2018) et n 32______ (soldé en avril 2017), l'Office a procédé à des démarches similaires à celles effectuées en vue de récupérer l'ADB n° 2______ (cf. supra let. a.b).

Pour chaque ADB, l'Office a envoyé un courrier à A______, sous pli simple, en l'informant que le débiteur avait effectué un paiement qui "sold[ait] la procédure". Se référant aux art. 149 à 150 LP, il a invité la créancière à lui retourner l'exemplaire original de l'ADB soldé, afin qu'il puisse procéder à son annulation, étant précisé qu'une fois en possession de l'acte, il verserait à A______ le montant qui lui revenait.

Par la suite, l'Office a envoyé à A______ un courrier de rappel ("RAPPEL - acte de défaut de biens n°…"), expédié sous pli recommandé, d'une teneur similaire à celui adressé à A______ s'agissant de l'ADB n° 23 2______ (cf. supra let. a.b, § 3).

Selon les explications de l'Office, A______ a donné suite à ce premier rappel pour chacun des ADB concernés.

b. Le 31 mars 2022, l'Office a adressé à A______, qui l'a reçue le 8 avril 2022, une facture n° 33______ d'un montant total de 629 fr. 45, correspondant aux émoluments et débours mis à sa charge s'agissant des ADB mentionnés ci-dessus (cf. let. a.a, a.b, a.c et a.d), sous réserve d'un montant de 24 fr. facturé au titre des émoluments encourus dans les poursuites n° 34______ (rejet partiel d'une réquisition de continuer la poursuite), n° 35______ (rejet d'une réquisition de poursuite) et n° 36______ (rejet d'une réquisition de poursuite).

Pour l'ADB n° 1______ (cf. supra let. a.a), l'Office a facturé un montant de 31 fr. 15 pour les opérations suivantes : (i) "Edition et envoi d'une demande de restitution de l'ADB cédé à l'AFC" (8 fr. d'émolument + 0 fr. 85 de débours [frais de port]); (ii) "Edition et envoi d'un rappel au créancier pour obtenir l'ADB après un paiement pour solde" (8 fr. d'émoluments + 5 fr. 30 de débours), et (iii) "Edition et envoi d'un dernier rappel au créancier pour obtenir l'ADB après un paiement pour solde" (8 fr. d'émoluments + 1 fr. de débours).

Pour chacun des ADB listés sous let. a.b et a.c, l'Office a facturé un montant de 22 fr. 30 pour les opérations suivantes : (i) "Edition et envoi d'un rappel au créancier pour obtenir l'ADB après un paiement pour solde" (8 fr. + 5 fr. 30) et (ii) "Edition et envoi d'un dernier rappel au créancier pour obtenir l'ADB après un paiement pour solde" (8 fr. + 1 fr.).

Pour chacun des ADB listés sous let. a.d, l'Office a facturé un montant de 13 fr. 30 pour l'opération suivante : "Edition et envoi d'un rappel au créancier pour obtenir l'ADB après un paiement pour solde" (8 fr. + 5 fr. 30).

c. Par acte adressé le 26 avril 2022 à la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 P contre cette facture, concluant à son annulation. Elle a fait valoir que l'Office n'était pas en droit de lui réclamer des émoluments et débours en lien avec les ADB soldés au cours des années 2017 à 2021, dans la mesure où ces frais "ne figuraient pas dans ces actes", d'une part, et qu'ils concernaient des poursuites déjà clôturées, d'autre part.

d. Dans son rapport explicatif du 17 mai 2022, l'Office a conclu au rejet de la plainte. Il a notamment fourni les explications suivantes relatives aux griefs soulevés par la plaignante :

L'Office avait facturé des "frais de rappel" à A______ en lien avec les ADB qui avaient été soldés entre les mois d'avril 2017 et de janvier 2021. Il ne s'agissait pas de frais de poursuite au sens de l'art. 68 LP. En effet, à partir du moment où une procédure de poursuite se terminait par la délivrance d'un ADB, toutes les opérations ultérieures de l'Office en lien avec cet ADB étaient soit gratuites selon l'OELP, soit à la charge de la partie qui les occasionnait.

En l'occurrence, A______ était à l'origine des frais facturés par l'Office, dans la mesure où elle avait tardé à lui restituer les exemplaires originaux des ADB concernés. Si la plaignante avait donné suite à la requête de l'Office dans un délai raisonnable, soit dans les 30 jours suivant l'envoi du courrier l'invitant à retourner l'acte original, elle n'aurait pas eu à supporter les frais d'un premier rappel (8 fr. d'émolument selon l'art. 9 al. 1 let. a OELP + 5 fr. 30 de débours [frais postaux] selon l'art. 13 al. 1 OELP), voire d'un second rappel. En toute hypothèse, il n'appartenait ni au débiteur ni à l'Office de supporter les frais que la plaignante avait elle-même provoqués.

e. A______ a répliqué le 10 juin 2022, faisant valoir que les courriers de l'Office ne spécifiaient pas qu'elle s'exposait, sans réponse de sa part dans un délai de 30 jours, à se voir facturer des frais de rappel. Il était d'ailleurs difficile pour le service contentieux de A______, qui était régulièrement surchargé, de répondre sous 30 jours aux seules demandes de l'Office des poursuites de Genève, étant précisé qu'aucun autre canton ne facturait de tels frais. S'il avait constaté du retard dans le traitement de ses demandes, l'Office aurait pu se manifester auprès de A______ par téléphone, dans un premier temps, afin de limiter les coûts. Il aurait également pu expédier ses courriers de rappel sous pli A+, comme le faisaient d'autres établissements publics tels que B______.

f. L'Office a dupliqué le 23 juin 2022, exposant que "dans d'autres cas d'ADB soldés, [A______] a[vait] payé des frais liés à des rappels d'ADB depuis des années, sans s'en plaindre et sans que cela ne la pousse à réduire le temps de traitement des demandes de l'Office". La très grande majorité des créanciers retournait les actes originaux à l'Office dans les 30 jours, sachant que ceux-ci avaient tout intérêt à réagir rapidement pour pouvoir encaisser les montants dus. Le débiteur avait également intérêt à ce que le créancier retourne rapidement l'ADB à l'Office pour éviter que l'acte ne reste "dans la nature", avec le risque qu'il soit, par erreur, revendu ou cédé à un tiers alors que la créance avait été soldée.

g. Par pli du 8 juillet 2022, A______ a contesté avoir jamais accepté de prendre en charge des frais de rappel tels que ceux mentionnés dans la facture querellée. Comme l'Office le relevait lui-même, il n'existait aucune base légale l'autorisant à mettre ces frais à la charge du créancier, étant souligné qu'aucun autre office des poursuites en Suisse n'exigeait le remboursement de ce type de frais.

h. La cause a été gardée à juger le 16 août 2022, ce dont les parties ont été avisées le même jour.

EN DROIT

1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'office qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP).

A qualité pour former une plainte toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou tout au moins touchée dans ses intérêts de fait, par une décision ou une mesure de l'office (ATF 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3).

La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

1.2 En l'occurrence, la plainte, déposée selon la forme prescrite par la loi, est dirigée par une personne lésée dans ses intérêts juridiquement protégés contre une mesure de l'Office - soit une décision arrêtant les frais devant être payés par la créancière - susceptible d'être contestée par cette voie (art. 2 OELP; ATF 103 III 44 consid. 1).

Adressée le 26 avril 2022 à la Chambre de céans, contre une décision notifiée le 8 avril 2022 (date à laquelle la plaignante indique avoir reçu la facture n° 33______, ce qui n'est pas contesté par l'Office), la plainte a été formée en temps utile (art. 17 al. 2 LP cum art. 56 ch. 2 et 63 LP) et est ainsi recevable.

2. La plaignante reproche à l'Office de lui avoir facturé différents frais en lien avec une trentaine d'ADB soldés entre 2017 et 2021.

2.1.1 L'art. 16 al. 1 LP habilite le Conseil fédéral à fixer le tarif des émoluments. En vertu de cette norme de délégation, il a édicté l'ordonnance du 23 septembre 1996 sur les émoluments perçus en application de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (OELP; RS 281.35). Cette ordonnance s'applique aux émoluments et indemnités des offices, autorités et autres organes qui, en application de la LP ou d'autres actes législatifs de la Confédération, procèdent à des opérations dans le cadre d'une exécution forcée, d'une procédure concordataire ou d'un sursis (art. 1 al. 1 OELP). Il s'agit en premier lieu des émoluments des offices des poursuites et des faillites ainsi que des autorités de surveillance, puis de ceux des tribunaux dans les procédures (sommaires) de droit des poursuites (WEINGART, in Kommentar SchKG, 4ème éd. 2017, KREN KOSTKIEWICZ/VOCK [éd.], n. 1 ad art. 16 LP et les références citées).

Les frais de poursuite réglés par l'OELP sont les émoluments (c'est-à-dire la rémunération pour le recours à l'activité officielle), les indemnités pour les débours (c'est-à-dire les frais de port, de déplacement, d'annonces, de téléphone et autres frais similaires liés à l'acte officiel) et les honoraires des autorités, des tribunaux et des autres organes d'exécution forcée qui peuvent être occasionnés dans le cadre d'une des procédures régies par la LP (Emmel, in BAK SchKG I, 3ème éd. 2021, n. 8 ad art. 16 LP et n. 2 ad art. 68 LP; Eugster, in Commentaire OELP, 2009, Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse [éd.], remarques préliminaires ad art. 48 ss OELP).

Les émoluments proprement dits constituent une redevance causale, soumise aux principes constitutionnels de la proportionnalité et de l'interdiction de l'arbitraire, dont résultent les principes d'équivalence et de couverture des coûts. Selon le principe de la couverture des coûts, le produit global des redevances perçues ne doit pas dépasser, ou seulement légèrement, les coûts totaux de la branche administrative concernée (ATF 126 I 180 consid. 3a/aa; 124 I 11 consid. 6c). Selon le principe d'équivalence, un émolument ne doit pas être manifestement disproportionné par rapport à la valeur objective de la prestation fournie et doit rester dans des limites raisonnables (ATF 130 III 225 consid. 2.3) (Emmel, op. cit., n. 9 ad art. 16 LP; Eugster, op. cit., remarques préliminaires ad art. 48 ss OELP).

Dans la mesure où ni la LP ni l'OELP ne prévoient d'exceptions, tous les actes accomplis par les offices, les autorités et les autres organes de l'exécution forcée sont soumis à des émoluments (OELP 1 al. 2; ATF 131 III 136 consid. 3.1, JdT 2007 II 58). Les décisions nulles ou annulées ne donnent en revanche pas droit à des émoluments et à des indemnités (ATF 139 III 44 consid. 3.3). L'OELP détermine de manière exhaustive quels émoluments doivent être prélevés par les autorités dans le cadre d'une procédure d'exécution forcée, et comment ils doivent être calculés; il n'est pas admissible de prélever d'autres émoluments et indemnités que ceux prévus dans cette ordonnance (art. 1 al. 1 OELP; ATF 142 III 648 consid. 3.2, JdT 2018 II 379; 136 III 155 consid. 3.3).

2.1.2 Les émoluments sont calculés en fonction de la durée de l'opération effectuée par l'office, ou du nombre de pages ou encore selon le montant de la créance (cf. art. 4 à 6 OELP). Certains actes font l'objet d'une tarification spéciale, à l'instar du commandement de payer, dont l'émolument est fixé en fonction du montant de la créance (art. 16 OELP).

Un émolument général de 8 fr. par page (pour des documents jusqu'à 20 pages) est prévu à l'art. 9 al. 1 let. a OELP pour l'établissement des pièces ne faisant pas l'objet d'une tarification spéciale. Il est prélevé peu importe que les pièces soient rédigées sur des feuilles blanches, consistent en des formulaires ou soient créées au moyen de photocopies (ADAM, in Commentaire OELP, 2009, Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse [éd.], n. 1 ad art. 9 OELP).

Les débours sont les montants que l'office prend en charge afin d'effectuer une prestation nécessaire ou de remplir une mission, tels les frais administratifs, les taxes de télécommunication, les taxes postales, les honoraires des experts, les frais d'intervention de la police et les frais bancaires. Ils doivent en principe être remboursés (art. 13 al. 1 OELP).

Selon l'art. 19 al. 2 OELP, les versements effectués par l'office à la caisse des dépôts et consignations ainsi que leur retrait sont gratuits (art. 9 LP).

Selon l'art. 41 OELP, la radiation d'un acte de défaut de biens est gratuite.

2.1.3 Aux termes de l'art. 68 LP, les frais de la poursuite sont à la charge du débiteur. Le créancier en fait l'avance. L'office peut différer toute opération dont les frais n'ont pas été avancés; mais il doit en aviser le créancier (al. 1). Le créancier peut prélever les frais sur les premiers versements du débiteur (al. 2).

En règle générale, tous les frais de poursuite doivent être considérés comme causés par le débiteur, ce qui comprend tous les frais engagés dans l'intérêt d'une exécution adéquate et légale de la poursuite (EMMEL, op. cit., n. 17 ad art. 68 LP et les références citées). En revanche, les frais que le créancier aurait pu et dû éviter ne peuvent pas être imputés au débiteur. Cela vaut par exemple pour les frais de commandement de payer, lorsque le créancier a requis la poursuite à tort, par exemple pour une créance non encore exigible. Il n'y a pas non plus de frais de poursuite imputables au débiteur lorsque le créancier a poursuivi le débiteur à son ancien domicile plutôt qu'à son domicile actuel (EMMEL, op. cit., n. 18 ad art. 68 LP et les références citées).

Les actes non prescrits par la loi ou inutiles accomplis par l'office ou répétés par sa faute ne donnent pas lieu à des frais (EMMEL, op. cit., n. 20 ad art. 68 LP et les références citées; RUEDIN, in CR LP, 2005, n. 3 ad art. 68 LP).

2.2.1 A teneur de l'art. 149 LP, le créancier qui a participé à la saisie et n'a pas été désintéressé intégralement reçoit un acte de défaut de biens pour le montant impayé. Le débiteur reçoit une copie de l'acte de défaut de biens (al. 1). L'office des poursuites délivre l'acte de défaut de biens dès que le montant de la perte est établi (al. 1bis).

Selon l'art. 149a LP, le débiteur peut en tout temps s'acquitter de la créance en payant en mains de l'office des poursuites qui a délivré l'acte de défaut de biens. L'office transmet le montant au créancier ou, le cas échéant, le consigne à la caisse des dépôts et consignations (al. 2). Après paiement de la totalité de la dette, l'inscription de l'acte de défaut de biens est radiée du registre. Il est donné acte de cette radiation au débiteur qui le demande (al. 3).

En vertu de l'art. 150 al. 1 LP, le créancier intégralement désintéressé est tenu de remettre son titre acquitté à l'office des poursuites à l'intention du débiteur.

2.2.2 La créance concernée par l'acte de défaut de biens peut être éteinte en tout temps par un paiement à l'office des poursuites qui a délivré l'acte de défaut de biens, ceci même si la poursuite n'est plus en cours (SCHMID, in Kommentar SchKG, 4ème éd. 2017, KREN KOSTKIEWICZ/VOCK [éd.], n. 11 ad art. 149a LP).

L'extinction de la créance sur laquelle se fonde l'acte de défaut de biens entraîne la radiation de l'acte dans le registre des actes de défaut de biens. Cette radiation a pour effet que la mention de l'acte de défaut de biens est supprimée et qu'aucun renseignement ne peut être donné à ce sujet conformément à l'art. 8a LP. La radiation ne concerne toutefois que le registre des actes de défaut de biens - et non le registre des poursuites, où est inscrite la poursuite ayant donné lieu à l'acte de défaut de biens (SCHMID, op. cit., n. 14 et 15 ad art. 149a LP).

Si le débiteur entend "racheter" l'acte de défaut de biens et être libéré (cf. art. 12 al. 2 LP), l'office qui l'a délivré est tenu d'accepter le paiement fait en faveur du créancier contre remise de l'acte de défaut de biens avec quittance. L'office doit faire suivre le paiement au créancier. Si ce dernier reste introuvable ou refuse le paiement, l'office doit alors consigner la somme à la caisse des dépôts et consignations (art. 9 LP) (REY-MERMET, in CR LP, 2005, n. 7 et 8 ad art. 149a LP).

Le créancier dont la créance a été soldée doit en donner quittance sur le titre de créance à l'attention du débiteur et le remettre à l'office. Celui-ci le transmet ensuite au débiteur. Sans la remise du titre de créance (i.e. l'acte de défaut de biens et tout autre titre attestant de la créance), l'office ne peut pas procéder au paiement. Si le titre de créance n'existe plus, le créancier doit fournir une déclaration constatant l'annulation du titre, en conformité avec l'art. 90 al. 1 CO. Le débiteur peut demander à l'office de lui donner acte du paiement de l'entier du découvert et de la radiation de l'acte de défaut de biens. Si le créancier n'est pas en mesure de restituer l'acte de défaut de biens, le débiteur peut en outre exiger que l'office annule le titre, en application de l'art. 90 CO par analogie (HUBER/SOGO, in BAK SchKG I, 3ème éd. 2021, n. 11-12 ad art. 149a LP, n. 3 ad art. 150 LP et les références citées; REY-MERMET, op. cit., n. 9 ad art. 149a LP, n. 4 ad art. 150 LP).

2.3.1 Il résulte des principes rappelés supra que toutes les opérations effectuées par l'Office dans l'accomplissement des tâches qui lui incombent sont soumises à des émoluments, sous réserve des exceptions prévues par la LP et/ou l'OELP.

S'agissant de la radiation d'un acte de défaut de biens - induite soit par le désintéressement du créancier, soit par la prescription de l'acte de défaut de biens (cf. art. 149a al. 1 et 2 LP; PICCIRILLI, in Commentaire OELP, 2009, Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse [éd.], n. 1 ad art. 41 OELP) - l'OELP prévoit expressément que l'activité de l'Office est gratuite.

En l'occurrence, la facture litigieuse porte sur les courriers de rappel que l'Office a adressés à la plaignante afin que celle-ci lui remette les exemplaires originaux de plusieurs ADB soldés entre avril 2017 et janvier 2021. Or il s'agit de démarches utiles et raisonnables qui s'inscrivent dans le processus de radiation des ADB considérés, ceux-ci ayant été soldés après la clôture des poursuites correspondantes. Compte tenu de la gratuité prévue à l'art. 41 OELP et, partant, de l'absence de base légale permettant d'imputer ces frais à la plaignante, c'est à bon droit que celle-ci reproche à l'Office de les avoir mis à sa charge.

De surcroît, l'Office a souvent fait preuve d'un empressement peu compréhensible, puisque plusieurs courriers de rappel ont été envoyés à la plaignante - sous plis recommandés - moins de 30 jours après que celle-ci ait été invitée à retourner l'exemplaire original de l'ADB soldé à l'Office (à cet égard, il convient de tenir compte du délai de distribution d'un courrier B qui est d'environ 3 jours ouvrables), et, dans certains cas, sans tenir compte des féries d'été ou de fin d'année. Aussi, force est de constater qu'à plusieurs reprises, la plaignante n'a pas disposé d'un délai raisonnable pour donner suite aux sollicitations de l'Office. En outre, au vu du libellé peu clair de ces courriers, la créancière ne pouvait pas de bonne foi s'attendre à ce que l'Office lui facture des émoluments et des débours pour l'activité déployée à ce titre. En effet, dans son premier envoi, l'Office a simplement informé la plaignante qu'un ADB avait été soldé, tout en l'invitant à lui remettre l'acte original, mais sans lui impartir un quelconque délai pour donner suite à cette requête. De même, dans son premier courrier de rappel, l'Office n'a fixé aucun délai à la plaignante pour la restitution de l'ADB soldé. Enfin, dans ses deux courriers de rappel, l'Office s'est limité à mentionner que des "frais supplémentaires" - dont il n'a pas spécifié la nature, étant relevé que les versements opérés à la caisse des dépôts et consignations sont gratuits selon l'art. 19 al. 2 OELP - seraient facturés à la plaignante "sans réponse de [sa] part", ce qui laissait supposer qu'aucuns frais ne lui seraient facturés pour les courriers déjà envoyés.

Les mêmes remarques sont transposables aux courriers que l'Office a adressés à l'AFC s'agissant de l'ADB n 1______ (cf. supra EN FAIT let. A.a.a). A cet égard, il sera relevé que l'erreur - isolée - commise par la plaignante (celle-ci ayant indiqué avoir cédé l'ADB à un tiers, ce qui s'est avéré être inexact), certes regrettable, n'a pas généré un surcroît de travail important de la part de l'Office.

Dans ces circonstances, l'Office n'était pas fondé à mettre des frais à la charge de la plaignante en lien avec les ADB mentionnés dans la facture querellée.

2.3.2 Eu égard à ce qui précède, la facture n° 33______ doit être annulée en tant qu'elle porte sur les émoluments et débours mis à la charge de la plaignante s'agissant des ADB soldés entre avril 2017 et janvier 2021.

En revanche, il n'y a pas lieu d'annuler cette facture en tant qu'elle porte sur les émoluments encourus par la plaignante dans le cadre des poursuites n° 34______ (rejet partiel d'une réquisition de continuer la poursuite), n° 35______ (rejet d'une réquisition de poursuite) et n° 36______ (rejet d'une réquisition de poursuite) (cf. supra EN FAIT, let. A.b). En effet, la plaignante n'a formulé aucun grief motivé à ce sujet, sa plainte faisant uniquement référence aux frais facturés par l'Office en lien avec les ADB soldés.

En définitive, la plainte doit être partiellement admise.

Par souci de clarté, la facture litigieuse sera entièrement annulée et l'Office sera invité à en établir une nouvelle conforme aux considérants de la présente décision.

3. La procédure de plainte est gratuite et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 20 a LP; art. 61 al. 2 let. a et art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme
:

Déclare recevable la plainte formée le 26 avril 2022 par A______ contre la facture n° 33______ datée du 31 mars 2022.

Au fond :

L'admet partiellement.

Annule la facture susvisée et invite l'Office cantonal des poursuites à en établir une nouvelle dans le sens des considérants de la présente décision.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Ekaterine BLINOVA et
Monsieur Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

La présidente :

Nathalie RAPP

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.