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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/14475/2021

CAPH/35/2023 du 28.03.2023 sur JTPH/272/2022 ( OS ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14475/2021-5 CAPH/35/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud’hommes

DU MARDI 28 MARS 2023

 

Entre

A______ SA, sise ______, appelante d’un jugement rendu par le Tribunal des prud’hommes le 29 août 2022 (JTPH/272/2022), comparant par Me Hervé CRAUSAZ, avocat, Chabrier Avocats SA, rue du Rhône 40, case postale 1363, 1211 Genève 1, en l’Étude duquel elle fait élection de domicile,

 

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, comparant par le syndicat C______, ______, auprès duquel elle fait élection de domicile.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/272/2022 du 29 août 2022, notifié aux parties le lendemain, le Tribunal des prud’hommes (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure simplifiée, a déclaré recevable la demande formée le 27 octobre 2021 par B______ contre A______ SA (ch. 1 du dispositif), condamné A______ SA à verser à B______ la somme brute de 11’427 fr. 50 (onze mille quatre cent vingt-sept francs et cinquante centimes), plus intérêts moratoires à 5% l’an dès le 1er octobre 2020 (ch. 2), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 3), dit que la procédure était gratuite et qu’il n’était pas alloué de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 5).

B.            a. Par acte expédié le 29 septembre 2022 à la Cour de justice, A______ SA a formé appel contre ce jugement, dont elle a sollicité l’annulation des chiffres 2 et 3 du dispositif. Cela fait, elle a conclu au déboutement de B______ de toutes ses prétentions ainsi qu’à celui de tout opposant de toutes autres ou contraires conclusions.

b. Dans sa réponse du 31 octobre 2022, B______ conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la partie adverse à tous les frais judiciaires.

C.           Les éléments pertinents suivants ressortent de la procédure:

a. A______ SA est une société anonyme de droit suisse dont le but est de fournir des prestations de service de type « family office » comprenant notamment ______ et ______, ______, ______, ______ ou ______ ; son siège est à Genève.

b. B______ a été engagée par A______ SA, en qualité de femme de ménage à partir du 26 novembre 2018.

Elle a déclaré devant le Tribunal que A______ SA l’avait engagée pour faire le ménage dans un appartement que celle-ci louait en vieille-ville, lequel était occupé par différents locataires. Les instructions et les horaires de travail étaient donnés par A______ SA qui s’occupait également de sa rémunération. Elle n’avait pas reçu de contrat de travail, mais en avait demandé un ultérieurement pour pouvoir renouveler son permis de séjour.

A______ SA a exposé que B______ était au bénéfice d’un contrat de travail sur appel et était rémunérée à l’heure d’activité. Un contrat écrit lui avait été remis au début des rapports de travail, mais celle-ci ne l’avait jamais retourné signé. Elle en avait conclu que celle-ci refusait de le signer.

Figure au dossier un contrat de travail non signé, qui prévoit que l’employée est engagée pour une durée indéterminée dès le 26 novembre 2018 en qualité de femme de ménage à temps partiel, sur appel et au taux horaire (art. 1) et que la durée effective du travail hebdomadaire sera fixée à hauteur des besoins de l’entreprise et sur appel. L’employée exercera son activité au taux horaire à hauteur de 26 fr. 70 brut, incluant une indemnité pour vacances à hauteur de 8,33%, soit un salaire de 24 fr. 60 par heure de travail, plus 2 fr. 10 à titre de vacances (art. 4).

c. Dans un message WhatsApp du 27 novembre 2018 à B______, la représentante de A______ SA, D______, a écrit : « Bonjour B______, merci de m’envoyer par email le contrat de travail, la fiche de salaire et vos coordonnées bancaires ».

Le 5 décembre 2018, D______ a adressé un message WhatsApp à B______ à la teneur suivante : « Bonjour B______, [ ]. Pour préparer le contrat avec vous j’ai besoin le bonnes copies de votre :

-          carte AVS

-          passeport

-          permi de séjours

-          adresse de votre domicile. Merci de les envoyer par e-mail au E______@gmail.com »

Le 7 janvier 2019, B______ a écrit à D______, toujours via la messagerie WhatsApp: « désolé de déranger mais j’ai oublié de demander à ne pas signer le contrat ».

Dans un message du 17 janvier 2020, B______ a écrit à D______ : « Je n’ai pas de contrat de travail? ».

Le 20 janvier 2020, B______ a écrit à D______ : «  [ ] j’ai besoin de savoir quoi te dire car je n’ai pas de contrat de travail ».

B______ soutient qu’il ressort de cet échange qu’elle devait travailler à hauteur de quinze heures par semaine dans l’appartement situé en vieille-ville et qu’elle avait réclamé l’établissement d’un contrat de travail au mois de janvier 2020.

d. Les heures de travail de B______ ont fortement diminué durant le printemps 2019, en lien avec la pandémie de COVID-19.

B______ a déclaré devant le Tribunal qu’en raison du Covid-19, les locataires étaient partis de l’appartement et son temps de travail avait été réduit à cinq heures par mois. Elle avait réclamé le maintien de la moyenne de ses heures de travail, sans succès, et avait ensuite été licenciée.

A______ SA a exposé que dans la mesure où B______ ne voulait pas travailler uniquement cinq heures par semaine, elle avait décidé de la licencier. Lors de son licenciement, tout son dossier lui avait été restitué, dont son contrat de travail non signé.

e. Devant le Tribunal, A______ SA a expliqué que B______ remplissait les conditions légales pour pouvoir bénéficier des RHT pour les mois d’avril à juin 2020, mais pas pour la suite. La demande RHT avait été refusée. Elle avait essayé de trouver un autre employeur chez qui B______ aurait pu travailler, mais cela ne s’était pas très bien passé.

B______ a précisé qu’elle avait refusé de travailler pour la personne présentée par A______ SA car celle-là ne voulait pas la déclarer.

f. Selon un tableau intitulé « indemnisation RHT juin 2020 » établi par A______ SA, B______ devait normalement effectuer 94.33 heures de travail en mai 2020; elle avait perdu 89.15 heures de travail durant cette période.

Par décision du 7 décembre 2020, l’Office cantonal de l’emploi a refusé le versement de RHT en raison d’une part de l’envoi tardif de la demande et d’autre part de l’absence d’une perte de travail, établie. 

g. Selon les décomptes et certificats de salaire produits, B______ a perçu, à titre de salaire pour la période du 26 novembre au 31 décembre 2018, la somme totale de 1’918 fr. brut, ayant travaillé douze heures du 26 au 30 novembre 2018, et soixante heures du 1er au 31 décembre 2018.

Pour l’année 2019, B______ a touché la somme totale de 22’759 fr. brut.

Elle a travaillé septante-et-une heures en janvier, soixante heures en février, soixante-huit heures en mai, quarante-neuf heures en août, septante-neuf heures en septembre, quatre-vingt-neuf heures en octobre, cent cinq heures en novembre et quatre-vingt-deux heures en décembre.

En 2020, B______ a gagné la somme totale de 13’843 fr. 05 brut.

Elle a travaillé cent douze heures en janvier, nonante-deux heures en février, septante-neuf heures en mars, trente-trois heures en avril, cinq heures en mai, cinq heures en juillet, cinq heures en août, douze heures en septembre, quatorze heures en octobre, quatre heures en novembre et quatre heures en décembre.

Son salaire du 1er juillet au 31 décembre 2020 s'est élevé , au total, à 1’172 fr. 60 brut (133 fr. 25 + 133 fr. 25 + 319 fr. 80 + 373 fr. 10 + 106 fr. 60 + 106 fr. 60).

h. Par courrier du 16 octobre 2020, A______ SA a résilié le contrat de travail de B______ pour le 31 décembre 2020. Le courrier précisait qu’elle serait occupée et rémunérée normalement jusqu’à cette date.

i. Par requête déposée en vue de conciliation le 5 juillet 2021, déclarée non conciliée le 29 septembre 2021 et introduite sous la forme d'une demande simplifiée motivée au greffe du Tribunal des prud’hommes le 27 octobre 2021, B______ a assigné A______ SA en paiement de la somme totale de 12’037 fr. 60, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 1er juillet 2020, à titre de solde de salaire pour les mois de juillet à décembre 2020.

A l’appui de ses conclusions, elle a en substance allégué que le nombre de ses heures de travail avait drastiquement baissé en raison du Covid-19, durant l’année 2020, par rapport à sa moyenne qui était de quatre-vingt-neuf heures et demi par mois. Elle a précisé qu’un contrat de travail lui avait été remis uniquement lors de son licenciement. En sus du paiement des heures de travail effectivement réalisées, elle avait perçu des indemnités en cas de réduction de l’horaire de travail (ci-après : RHT) pour la période d’avril à juin 2020, mais n’avait rien perçu de plus pour la période de juillet à décembre 2020. Elle réclamait ainsi la différence entre le salaire perçu et un salaire basé sur la moyenne de ses heures de travail.

j. Par mémoire de réponse du 28 janvier 2022, A______ SA a conclu au déboutement de B______.

Elle a notamment allégué que celle-ci était au bénéfice d’un contrat de travail sur appel et était rémunérée en fonction de ses heures de travail, lesquelles avaient toujours été très irrégulières. B______ ne s’était jamais plainte de cette situation, dans la mesure où elle travaillait également pour d’autres employeurs.

A______ SA a expliqué que les heures de travail avaient fortement diminué en raison de l’absence de locataires dans les appartements loués par elle durant la période du Covid-19. Enfin, elle a précisé que la caisse de chômage avait accepté de verser les indemnités RHT durant la période correspondant au confinement, soit d’avril à juin 2020, mais avait refusé de le faire pour la période postérieure car elle ne remplissait plus les conditions d’octroi.

k. Le 29 mars 2022, B______ a répliqué qu’elle était au bénéfice d’un contrat de travail fixe à durée indéterminée et non sur appel, car elle avait toujours réalisé un grand nombre d’heures. Elle a précisé qu’elle avait reçu, en juin 2021 les indemnités RHT pour les mois d’avril à juin 2020, ce versement démontrant qu’une réduction de son horaire de travail était avérée.

l. A l’audience de débats du 8 juin 2022 le Tribunal a procédé à l’audition des parties. Leurs déclarations ont été reprises ci-dessus dans la mesure utile. A l’issue de l’audience, les parties ont persisté dans leurs conclusions et la cause a été gardée à juger.

D.           Dans le jugement attaqué, le Tribunal a retenu que le contrat-type de travail genevois pour les travailleurs de l’économique domestique à temps complet et à temps partiel était applicable aux relations de travail entre les parties, étant donné que B______ était employée de maison. Il a considéré qu’aucun contrat de travail écrit n’ayant été remis à B______ durant les rapports de travail, le contenu de celui-ci ne pouvait être établi sur cette base. Au vu des fiches de salaire produites, le contrat conclu par les parties devait être qualifié de contrat de travail sur appel, ce que le CTT-Edom n’interdisait pas. Cela étant, B______ pouvait penser de bonne foi qu’un revenu moyen lui était assuré. Les premiers juges ont ainsi condamné A______ SA à verser à B______ un montant brut de 11’427 fr. 50 avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 1er octobre 2020, correspondant à la différence entre le salaire perçu et un salaire basé sur la moyenne de ses heures de travail.

EN DROIT

1.             1.1 L’appel est recevable contre les décisions finales et incidentes de première instance lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10’000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

En l’espèce la valeur litigieuse est supérieure à 10’000 fr., de sorte que la voie de l’appel est ouverte.

1.2 Déposé dans le délai utile de trente jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 145 al. 1 let. b et 311 al. 1 CPC), l’appel est recevable.

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d’examen en fait et en droit (art. 310 CPC).

Dans la mesure où la valeur litigieuse n’excède pas 30’000 fr., la maxime inquisitoire sociale (art. 55 al. 2 et 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC) et la maxime de disposition (art. 58 al. 1 CPC) s’appliquent.

2.             L’appelante reproche au Tribunal d’avoir mal apprécié les faits en retenant qu’elle n’avait pas remis de contrat de travail à l’intimée prévoyant que celle-ci était employée à l’heure et sur appel. Les premiers juges avaient faussement considéré qu’un certain nombre d’heures de travail avait été garanti à l’intimée.

2.1.1 Le contrat individuel de travail est un contrat par lequel le travailleur s’engage, pour une durée déterminée ou indéterminée, à travailler au service de l’employeur, moyennant une rémunération (art. 319 CO).

Selon l’art. 322 al. 1 CO, l’employeur paie au travailleur le salaire convenu, usuel ou fixé par un contrat-type de travail ou par une convention collective.

En droit suisse, la rémunération du travailleur obéit au principe de la liberté contractuelle: le salaire fait foi (Wyler/Heinzer, Droit du travail, 4e éd. 2019, p. 183). Il n’en va toutefois pas ainsi quand les parties sont soumises, de quelque manière que ce soit, à une convention collective de travail prévoyant un salaire supérieur à celui qu’elles ont arrêté; dans ce cas, le salaire supérieur remplace le salaire convenu (art. 322 al.1 et 357 al. 2 CO) (ATF 129 III 618 consid. 5.1;
122 III 110 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 4C.369/2006 du 16 janvier 2007 consid. 3.2).

Selon l’article 10 alinéa 3 CTT-EDom (RSGe J.1.50.03, version 2018.2019), le salaire horaire minimal d’un employé non qualifié est de 23 fr. 27 de l’heure.

2.1.2 Le travail sur appel est une forme d’activité irrégulière où le travailleur prend l’engagement d’exercer l’activité requise chaque fois que l’employeur fait appel à lui (Brunner et al., Commentaire du contrat de travail, 2010, p. 409 et 410; Aubert, Commentaire romand, Code des obligations I, 2e éd. 2012, n. 4 ad art. 324 CO).

En soi, le travail sur appel n’est pas interdit par la loi. Il n’en demeure pas moins que cette forme de travail doit respecter les dispositions légales impératives (art.  361 et 362 CO) et qu’elle peut, le cas échéant, être incompatible avec les clauses normatives d’une convention collective de travail (ATF 125 III 65 consid. 3b; 124 III 249 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_434/2017 du 27 août 2018 consid. 4.1).

L’une des limites au travail sur appel se rencontre en cas de diminution brutale du volume mensuel de travail, laquelle peut notamment vider de sa substance la protection impérative liée au délai de congé fixé à l’art. 335c CO. En effet, même si, par définition, le volume du travail sur appel varie selon les circonstances, l’employeur - qui supporte le risque d’entreprise selon la règle impérative de l’art. 324 al. 1 CO - ne peut pas refuser d’un jour à l’autre les services du travailleur et le priver subitement de toute rémunération (cf. art. 326 CO; ATF 125 III 65 consid. 4b et 5; arrêt du Tribunal fédéral 4A_534/2017 du 27 août 2018 consid. 4.1). Cette règle est impérative, si bien que le travailleur ne peut pas valablement renoncer à son bénéfice pendant la durée du contrat et durant le mois qui suit la fin de celui-ci (art. 362 et 341 al. 1 CO ; ATF 125 III 65, consid. 5).

Si les appels par l’employeur s’écartent brusquement du taux moyen d’occupation du travailleur, ce dernier peut mettre l’employeur en demeure de l’occuper et, en cas de refus, exiger son salaire (Brunner/Bühler/Waeber/Bruchez, op. cit., p. p. 410 ; Aubert, op. cit., n. 4 ad art. 324 CO). Pour que l’employeur soit en demeure, il faut toutefois que le travailleur ait valablement offert de fournir sa prestation de travail, concrètement et sans équivoque. L’offre de fournir du travail n’est soumise à aucune forme. Il faut toutefois que l’employeur puisse comprendre clairement que le travailleur se tient à sa disposition (Caruzzo, Le contrat individuel de travail, 2009, p. 180).

Ainsi, le travailleur confronté à une telle diminution peut réclamer son salaire moyen jusqu’à l’échéance du délai de congé; ce salaire est calculé sur la base de la rémunération moyenne perçue pendant une période déterminée équitablement (Wyler/Heinzer, op. cit., p. 352 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_534/2017 du 27 août 2018 consid. 4.1, ATF 125 III 65).

2.1.3 Sauf disposition contraire de la loi, le contrat individuel de travail n’est soumis à aucune forme spéciale (art. 320 al. 1 CO).

Il est recommandé d’établir le contrat de travail par écrit avant l’entrée en fonction. Le travailleur peut exiger la confirmation écrite du contrat de travail (art. 330b CO) (art. 10bis CTT-Edom).

Il appartient à celui qui entend déduire un droit d’une circonstance de fait d’alléguer et de fournir la preuve de ce fait. Il incombe donc au travailleur, respectivement à l’employeur, de prouver l’existence d’un contrat de travail à par des déclarations explicites des parties ou par les circonstances de fait – de même que le montant du salaire convenu ou usuel ou toute autre obligation convenue dans le contrat (wyler, Droit du travail, 2019, p. 73).

A teneur de l'art. 18 al. 1 CO, pour apprécier la forme et les clauses d'un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention.

Le juge doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices; si elle aboutit, cette démarche conduit à une constatation de fait. S'il ne parvient pas à déterminer cette volonté, ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté manifestée par l'autre - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves -, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective). Le juge doit rechercher, par l'interprétation selon la théorie de la confiance, quel sens les parties pouvaient ou devaient donner, de bonne foi, à leurs manifestations de volonté réciproques (principe de la confiance); il s'agit d'une question de droit. Le principe de la confiance permet ainsi d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même s'il ne correspond pas à sa volonté intime (ATF
142 III 671 consid. 3.3; 140 III 134 consid. 3.2; 136 III 186 consid. 3.2.1;
135 III 295 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_290/2017 du 12 mars 2018 consid. 5.1).

2.2
2.2.1 C’est à bon droit que le Tribunal a retenu que les parties n’étaient pas liées par un contrat revêtant la forme écrite, l’appelante n’ayant pas démontré sa remise à l’intimée ni a fortiori son acception par celle-ci.

En effet, les messages échangés entre les parties révèlent que la rédaction d’un projet de contrat était en cours à partir du mois de novembre 2018, soit le début de leur relation contractuelle. En décembre 2018, l’appelante réclamait d’ailleurs encore plusieurs documents à l’intimée, pour finaliser le contrat de travail qui ne l’était pas encore. Cela étant, il ne ressort pas desdits échanges que le contrat ait été finalisé et transmis à l’intimée pour signature, puisqu’en janvier 2020 cette dernière a indiqué à plusieurs reprises ne pas avoir de contrat de travail. Enfin, l’appelante a admis que ça n’était qu’au moment du licenciement de l’intimée qu’elle lui avait remis l’ensemble de son dossier, lequel comprenait un contrat de travail non signé.

2.2.2 Reste à examiner si le Tribunal a retenu à bon droit que l’intimée devait bénéficier d’un revenu minimum après la diminution brutale de son volume mensuel de travail et que, par conséquent, elle pouvait prétendre au paiement d’un revenu moyen jusqu’à l’échéance de son délai de congé.

Il résulte du dossier, en particulier des décomptes et certificats de salaire, que l’intimée a travaillé pour l'appelante plusieurs jours par semaine, de 2018 à mars 2020 plusieurs jours par semaine, à raison 19.7h en moyenne par semaine, soit 78.8h par mois Ainsi, même si l’activité de l’intimée pour l’appelante était irrégulière, elle lui assurait néanmoins un volume d’heures d’une certaine constance qui lui a procuré un salaire mensuel moyen brut de 1’896 fr. en 2019.

La demande d'indemnisation RHT établie par l'appelante fait également état d'un nombre "normal" d'heures à effectuer en mai 2020 de 94h33, soit une moyenne de 23h par semaine.

Ces éléments permettent de considérer que les parties étaient convenues, quand bien même l'intimée travaillait sur appel, d'un minimum d'heures par semaine, ou en tous les cas que l'intimée pouvait de bonne foi comprendre qu'un tel minimum lui était garanti, lui procurant un revenu minimum.

Contrairement à ce que tente de soutenir l’appelante, ce revenu moyen était dû pendant toute la durée du contrat, et non uniquement durant le délai de congé. Ainsi, malgré la diminution effective brutale de son taux d’activité en avril 2020 et jusqu’à l’échéance du délai de congé, le 31 décembre 2020, l’intimée pouvait prétendre au paiement de son salaire mensuel moyen basé sur son activité moyenne avant le mois d’avril 2020.

S’agissant des montants réclamés par l’intimée à ce titre, la Cour renvoie au calcul précis du Tribunal, non contesté en tant que tel, étant relevé que l'intimée s'est limitée à réclamer paiement du salaire dû pour la période de juillet 2020 à décembre 2020

Par conséquent, l’appel, infondé, sera rejeté et le jugement entièrement confirmé.

3.             Il n’est pas perçu de frais (art. 114 let. c et 116 al. 1 CPC; art. 19 al. 3 LaCC, art. 71 RTFMC), ni alloué de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud’hommes, groupe 5 :


A la forme
:

Déclare recevable l’appel formé par A______ SA contre le jugement JTPH/272/2022 rendu le 29 août 2020 par le Tribunal des prud’hommes dans la cause C/14475/2021 – 5.

Au fond :

Confirme le jugement attaqué.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Dit qu’il n’est pas perçu de frais ni alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Anne-Christine GERMANIER, juge employeur; Madame Shirin HATAM, juge salarié; Monsieur Javier BARBEITO, greffier.

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l’expédition complète de l’arrêt attaqué.
L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15’000 fr.