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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/23464/2018

CAPH/154/2022 du 26.09.2022 sur JTPH/41/2022 ( OO ) , PARTIELMNT CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/23464/2018-2 CAPH/154/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU 26 septembre 2022

 

Entre

A______ SARL, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 17 février 2022 (JTPH/41/2022), comparant par Me Nicolas PERRET, avocat, route du Stand 76, case postale 2467, 1260 Nyon 2, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant par Me Ninon PULVER, avocate, rue des Alpes 15, case postale, 1211 Genève 1, en l'étude de laquelle il fait élection de domicile.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/41/2022 du 17 février 2022, reçu le lendemain par A______ SARL, le Tribunal des prud'hommes, à la forme, a déclaré recevable la demande formée le 27 février 2019 par B______ contre la société précitée (chiffre 1 du dispositif), renoncé à ordonner à celle-ci de produire les rapports ou autres documents relatifs à l’inspection du service d’hygiène dans l’établissement en juillet 2018 et à B______ de produire son dossier médical relatif à l’incapacité de travail du 24 au 25 août 2018 (ch. 2) et déclaré recevables les nouveaux allégués du 6 septembre 2021 et la pièce n° 105 de A______ SARL, ainsi que les nouveaux allégués n° 1 à 3 du 10 septembre 2021 et la nouvelle pièce 106 de celle-ci (ch. 3).

Au fond, le Tribunal a condamné A______ SARL à verser à B______ la somme brute de 6'427 fr., avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 1er novembre 2018 (ch. 4), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 5), condamné A______ SARL à verser à B______ la somme nette de 387 fr. 50 (ch. 6), condamné A______ SARL à remettre à B______ un certificat de travail complet conforme aux considérants de la décision (ch. 7), dit qu’il n’était pas perçu de frais, ni alloué de dépens (ch. 8) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 9).

B.            a. Par acte expédié le 21 mars 2022 à la Cour de justice, A______ SARL forme appel contre le jugement précité. Elle conclut, principalement, à l'annulation du jugement, au rejet de l'entier des conclusions de B______ et à la condamnation de celui-ci "en tous les dépens, lesquels contiendront une indemnité à titre de participation aux honoraires" de son conseil. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation du jugement et à l'allocation en sa faveur "d'un montant à titre de dépens de première instance et un montant à titre de dépens de seconde instance, qui comprendront une indemnité à titre de participation" aux honoraires de son conseil.

b. Dans sa réponse du 22 avril 2022, B______ conclut à la confirmation du jugement attaqué, avec suite de frais.

c. Les parties ont été informées le 30 mai 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les faits pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour.

a. A______ SARL, sise à C______ (Genève), a pour but l’exploitation d’un café-restaurant, bar et vente à l’emporter.

D______ en est l’associé gérant président et dispose de la signature individuelle. E______ et F______ en sont des associés sans signature.

b.a Par contrat à durée indéterminée signé le 12 janvier 2018, B______, ami de longue date de D______, s'est engagé à travailler au service de A______ SARL en qualité de chef de cuisine de l’établissement "G______" (actuellement "H______"), à compter du 1er février 2018, moyennant un salaire mensuel brut de 4'550 fr., comprenant 350 fr. à titre de part du treizième salaire.

La durée hebdomadaire de travail était de 45 heures par semaine et le droit aux vacances de 35 jours civils par année. L'employé avait droit à deux jours de repos dans la semaine.

b.b Les rapports de travail étaient régis par la Convention collective nationale de travail pour les hôtels, restaurants et cafés du 6 juillet 1998 (ci-après CCNT), entrée en vigueur le 1er octobre 1998.

L'employeur ne tenait pas de registre des heures et des jours de repos effectifs.

b.c B______ logeait dans une chambre que l'employeur mettait gratuitement à sa disposition dans l'immeuble où se situait le restaurant.

c. A______ SARL allègue qu'elle a licencié l'employé avec effet immédiat le 30 juillet 2018 après de multiples avertissements oraux au sujet de son comportement et de la consommation de substances illicites pendant ses heures de travail. B______ avait accepté la résiliation, mais avait demandé à rester dans la chambre le temps nécessaire pour trouver une solution de relogement, ce qu’elle avait accepté.

B______ admet qu'il a eu le 30 juillet 2018 un entretien (dont il a oublié le sujet) avec D______ et F______. Il conteste cependant la notification d'un congé à cette occasion et allègue qu'il a continué à travailler au restaurant jusqu'au 24 août 2019.

d.a Le 16 août 2018 (entre 21h55 et 22h13), B______ et D______ ont échangé par WhatsApp au sujet du bruit causé par la hotte de la cuisine durant le service. Le 21 août 2018, B______ a transmis à D______ une liste des courses et la photographie d'un fonds de veau à acheter (13h23 et 13h24), puis la présentation d'un nouveau plat ("Steak frites à la B______"; 18h56).

d.b Le 2 juillet 2018, I______ a signé avec A______ SARL un contrat de travail dont il résulte qu'elle devait travailler comme serveuse à compter du 1er juillet 2018.

Entendue comme témoin par le Tribunal, elle a déclaré qu'elle avait commencé son activité le 1er août 2018 et que B______ "n'était plus là en septembre". Elle avait travaillé avec lui "pendant un mois, voire un mois et demi". Elle a persisté à affirmer qu’elle avait travaillé tout le mois d’août 2018 avec B______ et a précisé que J______ était devenu chef de cuisine après le départ de ce dernier. Auparavant, il avait aidé B______ durant une semaine. Lorsque le conseil de A______ SARL lui a fait remarquer que son contrat de travail avait débuté le 1er juillet 2018, elle a déclaré qu'elle était "persuadée que c'était en août 2018".

d.c Selon un contrat de travail signé le 25 octobre 2018, J______ a été engagé en qualité de cuisinier par A______ SARL à compter du 1er décembre 2018.

Entendu comme témoin par le Tribunal, J______ a déclaré qu'il avait travaillé au restaurant "G______" de fin août 2018 à avril 2019. Il avait fait un essai de trois jours en août 2018, probablement dès le mardi 21 août 2018, avec B______, qui devait lui "passer le flambeau". Deux ou trois semaines avant cet essai, F______ lui avait indiqué qu'il voulait remplacer le chef cuisinier, dont il n'était pas satisfait. Le troisième jour d'essai, il s'était rendu au restaurant, mais il n'y avait personne. Il avait téléphoné à B______, qui lui avait indiqué qu'il était à l'hôpital. Il en avait informé D______ qui lui avait demandé d’assurer le service. Depuis ce jour-là, il n’avait plus quitté le restaurant jusqu’en avril 2019. Finalement, il n’avait pu faire que deux services avec B______, soit le mardi 21 août et le mercredi 22 août 2018.

d.d K______, épouse de D______, a été entendue en tant que témoin par le Tribunal le 6 septembre 2021, avec l'assistance d'un interprète thaïlandais/français. Elle a déclaré qu'elle travaillait comme cuisinière pour A______ SARL depuis quatre ou cinq ans. Elle avait travaillé avec B______ tous les dimanches. Ce dernier travaillait de 10h00 à 14h00 et de 18h00 à 22h00. Elle le remplaçait pendant ses absences. Pendant le mois d’août 2018, elle s’était retrouvée seule à travailler en cuisine car B______ n’avait pas travaillé ce mois-là, ni en septembre. En revanche, il descendait en cuisine car il vivait toujours dans sa chambre au-dessus du restaurant. Elle ne se souvenait pas quand J______ avait travaillé au restaurant. Il était arrivé souvent que B______ ne se présente pas à son travail en raison du fait qu'il était ivre, malade ou trop fatigué. Il annonçait ses absences par téléphone.

e. Le 25 août 2018, B______ a été hospitalisé à l’Hôpital de L______ (VD). Il ressort des constatations de l’hôpital que B______ a été retrouvé inconscient et amené aux urgences par des amis et qu’il aurait consommé de la cocaïne, de l’héroïne et de l’alcool sans précision quant à la dose.

Alors que B______ était encore hospitalisé, les clés de son logement ont été récupérées par F______.

B______ a quitté le logement le 27 août 2018.

f. Il a été en incapacité de travail pour cause de maladie du 27 août au 30 novembre 2018.

g. B______ allègue qu'il a été licencié avec effet immédiat oralement, lors d'un entretien téléphonique du 27 août 2019 avec D______, ce qui est contesté par l'employeur.

h. Par courrier du 18 septembre 2018 adressé à A______ SARL, B______ a contesté la résiliation de son contrat de travail, au motif que celle-ci avait eu lieu pendant qu’il était en incapacité de travail pour cause de maladie et a réclamé le paiement du salaire.

i. Par demande déposée au Tribunal le 27 février 2019 après l'échec de la tentative de conciliation, B______ a réclamé à A______ SARL la somme totale de 56'481 fr. 50, avec suite de frais et dépens, soit 13'650 fr. bruts à titre de salaire pour les mois d’août à octobre 2018, avec intérêts moratoires dès le 1er novembre 2018, 3’744 fr. bruts à titre d’indemnité pour les vacances, avec intérêts moratoires dès le 1er novembre 2018, 8’887 fr. 50 bruts, à titre de rémunération de 320 heures supplémentaires, avec intérêts moratoires dès le 1er novembre 2018, 25’200 fr. nets à titre d’indemnité pour licenciement immédiat injustifié, avec intérêts moratoires dès le 1er novembre 2018 et 5'000 fr. à titre d’indemnité pour tort moral.

Il a également conclu à la remise d’un certificat de travail de la teneur suivante:

« Nous soussignés, A______ SARL, certifions que Monsieur B______, né le ______/1978, a travaillé au sein de notre société en tant que chef de Cuisine pour une activité à 100% du 1/2/2018 au 24/8/2018.

 

Dans le cadre de ce travail, il avait les responsabilités suivantes :

- Mise en place de la cuisine

- Elaboration des menus/plats du jour

- Coordination avec le personnel de salle (réservations, événementiel)

- Maintien de l’hygiène selon les règles en vigueur dans le canton de Genève

- Plonge

- Commandes et relation fournisseurs.

Monsieur B______ a été un employé organisé, polyvalent, toujours ponctuel, disponible et loyal. Il a fait preuve d’une grande conscience professionnelle et d’esprit d’initiative et d’organisation.

Nous avons pu lui faire entièrement confiance dans la gestion des tâches confiées.

Il s’est toujours bien entendu autant avec ses collègues, ses supérieurs ainsi (sic) qu’avec les clients et ses fournisseurs.

Nous le recommandons fortement à tout nouvel employeur et formulons nos meilleurs vœux pour son avenir. » (pièce 14).

A ce sujet, il a allégué qu'il n'avait toujours pas reçu de certificat de travail (allégué 42) et qu'il demandait "la remise d'un certificat de travail selon la teneur de la pièce 14 produite" (allégué 43).

j. Dans sa réponse du 18 mars 2021, A______ SARL a conclu au rejet de toutes les conclusions de B______ et à la condamnation de celui-ci "en tous les dépens".

Elle a admis l'allégué 42 et contesté l'allégué 43 de la demande, sans autre commentaire, notamment sur la pièce 14 de sa partie adverse.

A______ SARL a allégué que dès le 31 juillet 2018, la cuisine avait été reprise par l'épouse de D______, dans l'attente de l'engagement d'un nouveau chef, et qu'un nouveau chef de cuisine avait débuté son activité dans le courant du mois d'août 2018 (allégués 89 et 92).

Elle a produit une copie de l’agenda des réservations du restaurant de février à juillet 2018 duquel il ressortait  que B______ avait été noté absent aux dates suivantes: le mardi 6 mars, le mercredi 7 mars, le samedi 7 avril, le vendredi 11 mai mais avec un point d’interrogation, le samedi 12 mai, le samedi 26 mai, le samedi 16 juin, le mardi 19 juin, le mercredi 20 juin, le mardi 24 juillet avec la mention « B______ remplacé », le samedi 28 juillet et le mardi 31 juillet 2018 (pièce 100). 

D.           Sur les points demeurés litigieux en appel, le Tribunal a considéré ce qui suit:

a. B______ alléguait qu'il avait été licencié avec effet immédiat sans justes motifs le 27 août 2018 alors qu’il était en incapacité de travail. A______ SARL soutenait avoir licencié l'employé le 30 juillet 2018 en raison de son comportement violent et de la consommation d’alcool et de stupéfiants pendant ses heures de travail. Par gain de paix et en raison de l’amitié qui liait D______ à B______, elle avait laissé ce dernier utiliser le studio et se servir dans la cuisine jusqu’à ce qu’il trouve un autre logement. Cependant, la nuit du 24 au 25 août 2018, B______ s'était retrouvé à l’hôpital en raison de sa surconsommation d’alcool, ce qui l’avait poussée à l’expulser de son logement.

A______ SARL n’apportait aucune preuve du licenciement de l'employé le 30 juillet 2018. Bien au contraire, il ressortait de la procédure que dans le courant du mois d’août 2018, B______ était présent dans l’établissement pour y travailler et non seulement pour se faire à manger. En août 2018, il avait envoyé à D______ une nouvelle présentation des plats et avait établi une liste des courses qu’il avait transmise à D______ où il expliquait quel fond de veau il devait acheter. Il y avait également eu une discussion au sujet de la hotte de laquelle il ressortait que D______ considérait B______ comme le cuisinier étant donné qu’il lui posait des questions sur le bruit de la hotte pendant le service. En outre, tous les témoins entendus avaient affirmé avoir vu l'employé travailler en cuisine pendant le mois d’août 2018. Le remplaçant de ce dernier, J______, avait même expliqué qu’il avait effectué deux jours d’essai avec B______ pendant le mois d’août 2018 et que le troisième jour, celui-ci était absent en raison de son hospitalisation, ce qui correspondait à l’évènement de la nuit du 24 au 25 août 2018. La serveuse I______ avait aussi expliqué avoir travaillé avec B______ en août 2018. Bien qu’elle se soit trompée sur le début de son entrée en fonction au restaurant, qui était le 1er juillet et non le 1er août 2018, elle avait affirmé avoir travaillé avec l'employé bien au-delà du mois de juillet 2018. A cela s’ajoutaient également les témoignages des clients de l’établissement qui avaient vu B______ travailler tout au long de l’été 2018 et l’épouse de D______ qui avait également indiqué avoir remplacé le demandeur dès septembre 2018, avant de se rétracter.

A______ SARL considérait B______ comme faisant partie de son personnel car elle l’avait noté absent le 31 juillet 2018 alors que selon sa version, il avait été licencié avec effet immédiat la veille. La même considération valait pour le 28 juillet 2018, date à laquelle avait eu lieu l’altercation entre B______ et E______. Toujours selon l’agenda produit par l'employeur, B______ était noté absent ce jour-là.

Enfin, il convenait également de relever que le 24 août 2018, alors que l'employé était censé ne plus travailler au restaurant depuis presque un mois, il était toujours en possession des clés du restaurant.

Au vu de ce qui précède, le Tribunal a considéré que les relations entre les parties avaient pris fin le 27 août 2018, soit le jour où F______ avait récupéré les affaires de l'employé pour les lui restituer.

b. S’agissant du motif du licenciement, il ressortait de la procédure que B______ avait fait l’objet de plusieurs avertissements oraux sur la qualité de son travail, sur son comportement ainsi que sur la consommation abusive d’alcool. L'employé avait reconnu avoir reçu quelques avertissements oraux. Son hospitalisation, intervenue dans la nuit du 24 au 25 août 2018, était due à son seul comportement fautif. En effet, il ressortait des constatations de l’hôpital de L______ que l’employé avait été retrouvé inconscient et amené aux urgences par des amis et qu’il aurait consommé de la cocaïne, de l’héroïne et de l’alcool.

Ainsi, il était compréhensible que pour A______ SARL, cet énième évènement ait rompu irrémédiablement le lien de confiance à l’égard de l'employé et que les relations de travail ne pouvaient plus continuer. Elle avait déjà averti l’employé à plusieurs reprises mais celui-ci avait persisté dans son comportement, lequel avait même augmenté en gravité.

A______ SARL avait en outre agi dans les temps car elle avait résilié le contrat dans les trois jours suivant l’évènement à l’origine du licenciement. Le licenciement était donc justifié.

Par conséquent, les rapports de travail avaient pris fin le 27 août 2018 et le congé immédiat était justifié.

c. B______ avait travaillé dans l’établissement de A______ SARL jusqu’au 24 août 2018 inclus. Il avait été en incapacité de travail pour cause de maladie entre les 25 et 28 août 2018.

A______ SARL avait licencié l'employé le 27 août 2018 et le licenciement immédiat étant justifié, le droit au salaire avait pris fin à cette date. L'employeur aurait dû verser 88% du salaire pour les 25, 26 et 27 août 2018, ce montant étant net.

Le salaire de B______ s’élevant à 4'550 fr., les montants dus étaient de 3'522 fr. 60 bruts (4'550 fr./31 jours x 24 jours) et de fr. 387 fr. 50 nets (4'550 fr. x 88% / 31 jours x 3 jours).

d. B______ avait allégué n’avoir pris qu’un jour de vacances pendant son activité. A______ SARL n'avait pas apporté la preuve des jours de vacances pris par l’employé. Il ressortait de sa pièce 100 que celui-ci avait été noté absent aux dates suivantes : le mardi 6 mars, le mercredi 7 mars, le samedi 7 avril, le vendredi 11 mai mais avec un point d’interrogation, le samedi 12 mai, le samedi 26 mai, le samedi 16 juin, le mardi 19 juin, le mercredi 20 juin, le mardi 24 juillet avec la mention « B______ remplacé », le samedi 28 juillet et le mardi 31 juillet 2018. En revanche, aucune mention n’avait été faite pour sa journée du 15 juillet 2018 alors que l'employé avait admis avoir pris des vacances ce jour-là. Les seules mentions manuscrites de l’absence de B______ sur l’agenda du restaurant ne suffisaient pas à prouver que celui-ci avait bénéficié de vacances ces jours-là. Par ailleurs, A______ SARL n’avait pas fourni de décompte des vacances. Il ne pouvait donc être retenu que les jours d’absence étaient des vacances.

Le droit aux vacances de B______ pour la période du 1er février au 27 août 2018 était de 20.15 jours [(6 mois x 2.92 jours) + (2.92 jours x 27 jours / 30 jours)], dont il fallait déduire un jour de vacances pris, de sorte que le solde était de 19.15 jours. Le congé immédiat étant justifié, l'employé ne pouvait prétendre au paiement d’une indemnité pour les vacances pour la période postérieure au 27 août 2018.

Le salaire mensuel brut s’élevant à 4'550 fr. versé douze fois l’an, l’indemnité pour les vacances non prises était de 2'904 fr. 40 (4'550 fr. / 30 jours x 19.15 jours).

e. Il ressortait de l’instruction que les activités énumérées sur le projet de certificat proposé par B______ avaient été réalisées par celui-ci, à l’exception du maintien de l’hygiène, car le rapport d’inspection du 28 juin 2018 pointait précisément le manque d’hygiène dans la cuisine. Le témoin J______ avait aussi confirmé qu’il avait trouvé le restaurant sale. Dès lors, ce point devait être retiré du certificat de travail.

Il ressortait également du dossier que l'employé n'entretenait pas de bonnes relations professionnelles avec ses supérieurs, à tout le moins avec trois d’entre eux. La phrase « Il s’est toujours bien entendu autant avec ses collègues, ses supérieurs ainsi qu’avec les clients et ses fournisseurs » devait être modifiée en ce sens, avec la suppression de la mention des « supérieurs ».

Enfin, la fin des rapports de travail était intervenue le 27 août 2018. La phrase « ( ) pour une activité du 1/2/2018 au 24/8/2018 » devait être modifiée en ce sens.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance, dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure, est, comme en l'espèce, supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

Formé en temps utile et selon la forme prescrite par la loi auprès de l’autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), l'appel est recevable (art., 130, 131, 142 al. 3 et 311 al. 1 CPC).

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs qui sont formulés (ATF
142 III 413 consid. 2.2.4). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par les juges de première instance et vérifie si ceux-ci pouvaient admettre les faits qu'ils ont retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_902/2020 du 25 janvier 2021 consid. 3.3).

Compte tenu de la valeur litigieuse d'espèce, supérieure à 30'000 fr., la maxime des débats s'applique (art. 55 al. 1 et 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC).

2.             L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir mal apprécié les preuves en retenant que le licenciement avec effet immédiat avait été notifié à l'intimé le 27 août 2018 et non pas le 30 juillet 2018.

2.1 Le contrat de durée indéterminée peut être résilié par chacune des parties (art. 335 al. 1 CO) moyennant le respect du délai de congé applicable (art. 335a ss CO), voire immédiatement pour de justes motifs (art. 337 al. 1 CO). La résiliation du contrat de travail est une déclaration unilatérale de volonté sujette à réception, par laquelle une partie communique à l'autre sa volonté de mettre fin au contrat; il s'agit d'un droit formateur (ATF 113 II 259). La résiliation n'est soumise à aucune forme particulière, sauf disposition contractuelle contraire. Elle doit cependant être claire et précise quant à la volonté de mettre fin au contrat; son interprétation se fait selon le principe de la confiance (art. 18 al. 1 CO; cf. ATF 126 III 59 consid. 5b, 375 consid. 2e/aa; arrêt du Tribunal fédéral 4C_155/2005 du 6 juillet 2005 consid. 2.1).

La preuve de la réception du congé incombe à son auteur (arrêt du Tribunal fédéral 4A_350/2014 du 16 septembre 2014 consid. 2.2).

2.2 En l'espèce, dans sa réponse du 1er août 2021, l'appelante a allégué qu'un nouveau chef de cuisine avait débuté son activité dans le courant du mois d'août 2018. Cette allégation a été corroborée par le témoignage du nouveau chef de cuisine, J______, qui a déclaré qu'il avait travaillé deux jours, les 21 et 22 août 2018 avec l'intimé, qu'il devait remplacer. Après ces jours de collaboration, l'intimé avait été hospitalisé et le témoin avait pris ses fonctions de chef de cuisine. La témoin I______ a confirmé qu'après avoir aidé l'intimé, J______ l'avait remplacé comme chef de cuisine. Par ailleurs, la témoin précitée a déclaré qu'elle avait travaillé avec l'intimé durant tout le mois d'août 2018. La question de savoir si les dates de début d'activité prévues dans les contrats écrits conclus par l'appelante avec les témoins I______, respectivement J______, correspondent à la date effective de la prise de fonction peut demeurer indécise, puisqu'elle n'a aucune influence sur la crédibilité des témoignages. Les déclarations des deux témoins précités sont également confirmées par les échanges WhatsApp intervenus en août 2018 entre les parties, notamment au sujet de la présentation d'un nouveau plat désigné comme "Steak frites à la B______". De plus, l'appelante a noté dans son agenda des réservations que le 31 juillet 2018 l'intimé était absent, ce qui confirme qu'à cette date elle le considérait comme faisant encore partie de son personnel. Enfin, l'appelante ne critique pas l'argumentation des premiers juges, qui ont retenu, d'une part, que les clients entendus comme témoins avaient vu l'intimé travailler tout au long de l'été 2018 et, d'autre part, que l'épouse de D______ avait indiqué qu'elle avait remplacé l'employé dès septembre 2018, avant de se rétracter. Les déclarations des associés de l'appelante ne résistent pas face aux éléments concordants qui viennent d'être exposés.

En définitive, c'est à juste titre que le Tribunal a considéré que l'employeur, auquel incombait le fardeau de la preuve, n'a pas établi qu'un congé avait été signifié à l'intimé le 30 juillet 2018 et qu'il fallait ainsi retenir la date admise par ce dernier, soit le 27 août 2018, étant souligné que le caractère justifié du congé immédiat n'est pas contesté.

Les calculs effectués par le Tribunal ne sont pas critiqués par l'appelante. Le montant brut de 3'522 fr. 60 correspond au salaire dû à l'intimée pour la période du 1er au 24 août 2018 et la somme nette de 387 fr. 50 à l'indemnité due pour les 25, 26 et 27 août 2018, calculée selon les dispositions de l'art. 23 ch. 1 CCNT. Le dies a quo des intérêts n'est pas remis en question.

Le chiffre 4 en tant qu'il vise le montant brut précité, et le chiffre 6 du dispositif du jugement attaqué seront donc confirmés.

3.             L'appelante reproche au Tribunal d'avoir accordé à l'intimé une indemnité relative à 19,15 jours de vacances, alors que celle-ci devait correspondre à 12,5 jours et que l'intimé avait été absent près de 14 jours entre le 6 mars et le 28 juillet 2018.

3.1 A teneur de l’article 17 ch. 1 CCNT, le collaborateur a droit à 5 semaines de vacances par année (35 jours civils par année, 2.92 jours civils par mois). Lorsque l'année de travail est incomplète, les vacances sont calculées au prorata de la durée du travail (ch. 2).

Selon l’article 17 ch. 5 CCNT, à la fin des rapports de travail, les jours de vacances qui n’ont pas encore été pris doivent être indemnisés à raison de 1/30e du salaire mensuel brut.

La loi réglemente les vacances comme un droit contractuel du travailleur à une prestation de la part de l’employeur, et non comme une simple restriction des prestations dues par le travailleur. Il appartient dès lors au travailleur de prouver l’existence d’une obligation contractuelle de l’employeur de lui accorder des vacances, et la naissance de cette obligation du fait de la durée des rapports de travail. Il incombe en revanche à l’employeur, débiteur des vacances, de prouver que le travailleur a bénéficié des vacances auxquelles il avait droit (ATF
128 III 271 consid. 2a, trad. in JdT 2003 I p. 606 ; arrêt du Tribunal fédéral 4C_230/1999 du 15 septembre 1999 consid. 4 ; AUBERT, Commentaire romand, Code des obligations I, 2ème éd. 2012, n. 8 ad art. 329a CO, p. 2035).

Selon l'art. 21 ch. 3 CCNT, l’employeur tient un registre des heures de travail et des jours de repos effectifs (contrôle de la durée du travail). Le collaborateur peut s’informer à n’importe quel moment sur les heures de travail qu’il a effectuées ainsi que sur les jours de repos, jours fériés et vacances qui lui restent à prendre. L'art. 21 ch. 4 CCNT dispose que si l’employeur n’observe pas l’obligation d’enregistrer la durée du travail du collaborateur, l’enregistrement de la durée du travail ou le contrôle de la durée du travail réalisé par le collaborateur sera admis comme moyen de preuve en cas de litige.

3.2 En l'espèce, le Tribunal a correctement appliqué l'art. 17 ch. 1 CCNT, en retenant que l'intimé avait droit à 20.15 jours de vacances pour la période du 1er février au 27 août 2018.

Comme les premiers juges l'ont considéré à juste titre, les seules mentions manuscrites de l'absence de l'intimé dans l'agenda des réservations du restaurant ne suffisent pas à prouver que celui-ci a bénéficié de vacances ces jours-là. L'appelante ne le conteste d'ailleurs pas. Par ailleurs, cette dernière évoque le témoignage de K______. Outre qu'il s'agit de l'épouse d'un associé de l'intimé - ce qui implique que sa déclaration doit être accueillie avec une certaine circonspection -, son témoignage n'est pas suffisamment précis pour permettre de retenir les dates d'absence de l'intimé alléguées par l'employeur.

Par conséquent, c'est à juste titre que le Tribunal a considéré que l'employeur, auquel incombait le fardeau de la preuve, n'était pas parvenu à prouver que l'intimé - qui admettait avoir pris un jour de vacances - avait bénéficié de la totalité des vacances auxquelles il avait droit.

L'appelante ne conteste ni le calcul du Tribunal, ni le dies a quo des intérêts, de sorte que le chiffre 4 du dispositif du jugement attaqué sera intégralement confirmé.

4.             L'appelante fait grief au Tribunal de l'avoir condamnée à remettre à l'intimé un certificat de travail décrivant celui-ci comme un employé organisé, polyvalent, ponctuel, disponible, loyal, ayant fait preuve d’une grande conscience professionnelle, d’esprit d’initiative et d’organisation et auquel on pouvait faire confiance, alors qu'elle l'avait régulièrement averti, puis licencié avec effet immédiat.

4.1 Selon l'art. 330a al. 1er CO, le travailleur peut demandeur en tout temps à l'employeur un certificat de travail portant sur la nature et la durée des rapports de travail, ainsi que sur la qualité de son travail et sa conduite. Ce document a pour but de faciliter l'avenir économique du travailleur. Il doit être véridique et complet (ATF 129 III 177 consid. 3.2). Le choix de la formulation appartient en principe à l'employeur; conformément au principe de la bonne foi, la liberté de rédaction reconnue à celui-ci trouve ses limites dans l'interdiction de recourir à des termes péjoratifs, peu clairs ou ambigus, voire constitutifs de fautes d'orthographe ou de grammaire. Le certificat doit contenir la description précise et détaillée des activités exercées et des fonctions occupées dans l'entreprise, les dates de début et de fin de l'engagement, l'appréciation de la qualité du travail effectué ainsi que de l'attitude du travailleur. S'il doit être établi de manière bienveillante, le certificat peut et doit contenir des faits et appréciations défavorables, pour autant que ces éléments soient pertinents et fondés (arrêts du Tribunal fédéral 4A_117 et 4A_127/2007 du 13 septembre 2007 consid. 7.1; 4C.129/2003 du 5 septembre 2003, reproduit in JAR 2004 p. 308, consid. 6.1 p. 313 s. et les références citées).

4.2 En l'espèce, selon les allégations concordantes des parties, l'appelante n'a remis aucun certificat de travail à l'intimé. Par ailleurs, en première instance, l'appelante n'a proposé aucun texte de certificat de travail, se limitant à conclure au déboutement de l'intimé.

Cela étant, le Tribunal a retenu que l'employé avait fait l'objet de plusieurs avertissements oraux sur la qualité de son travail, sur son comportement ainsi que sur sa consommation abusive d'alcool, que l'hospitalisation de l'intimé avait été rendue nécessaire par son seul comportement, que cet énième événement avait rompu irrémédiablement le lien de confiance de l'employeur à son égard et que l'appelante avait déjà averti à plusieurs reprise l'intimé, qui avait néanmoins persisté dans son comportement, lequel avait même augmenté en gravité. Sur cette base, le Tribunal a considéré que l'appelante disposait de justes motifs pour résilier le contrat avec effet immédiat. L'intimé n'a pas formé appel contre le jugement du 17 février 2022; il admet donc le caractère justifié de son licenciement immédiat.

Dans ces conditions, il ne peut être imposé à l'employeur de faire figurer dans le certificat de travail une appréciation de la qualité du travail telle que formulée dans le projet de l'intimé. Il n'appartient pas à la Cour de trouver une formulation adéquate, étant relevé que l'employeur ne conclut pas à ce que le certificat de travail contienne des faits et appréciations défavorables.

En définitive, l'appelante sera condamnée à remettre à l'intimé un certificat de travail de la teneur suivante :

« Nous soussignés, A______ SARL, certifions que Monsieur B______, né le ______/1978, a travaillé au sein de notre société en tant que chef de Cuisine pour une activité à 100% du 1/2/2018 au 27/8/2018.

 

Dans le cadre de ce travail, il avait les responsabilités suivantes :

- Mise en place de la cuisine

- Elaboration des menus/plats du jour

- Coordination avec le personnel de salle (réservations, événementiel)

- Plonge

- Commandes et relation fournisseurs.

Monsieur B______ s’est toujours bien entendu avec ses collègues, avec les clients et avec les fournisseurs.

Nous formulons nos meilleurs vœux pour son avenir. »

Le chiffre 7 du dispositif du jugement attaqué sera modifié en conséquence.

5.             Il n'y a pas lieu de fixer un émolument forfaitaire de décision (art. 71 RTFMC).

Il n'est pas alloué de dépens ni d'indemnité pour la représentation en justice dans les causes soumises à la juridiction des prud'hommes (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 2 :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel interjeté le 21 mars 2022 par A______ SARL contre le jugement JTPH/41/2022 rendu le 17 février 2022 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/ 23464/2018-2.

Au fond :

Annule le chiffre 7 du dispositif du jugement attaqué et, statuant à nouveau sur ce point:

Condamne A______ SARL à remettre à B______ un certificat de travail de la teneur figurant au considérant 4.2 du présent arrêt.

Confirme le jugement attaqué pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Dit que la procédure est gratuite.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Monsieur Vincent CANONICA, juge employeur, Monsieur Kasum VELII, juge salarié; Madame Chloé RAMAT, greffière.

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.