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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/16441/2020

ACJC/132/2022 du 31.01.2022 sur JTBL/664/2021 ( OBL ) , IRRECEVABLE

Normes : CPC.311.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16441/2020 ACJC/132/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 31 JANVIER 2022

 

Entre

Madame A______ et Monsieur B______, domiciliés route ______[GE], appelants d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 4 août 2021, représentés tous deux par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6, en les bureaux de laquelle ils font élection de domicile,

et

Madame C______, domiciliée ______[GE], intimée, comparant par Me Stéphanie NUNEZ, avocate, esplanade de Pont-Rouge 4, case postale, 1212 Genève 26, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/664/2021 du 4 août 2021, le Tribunal des baux et loyers a condamné A______, D______ et B______ à évacuer immédiatement de leur personne et de leurs biens ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec eux l'appartement de 4,5 pièces situé dans l'immeuble sis route 1______ à E______ [GE] (ch. 1 du dispositif), a indiqué transmettre la cause, à l'expiration du délai d'appel, à la 7ème Chambre du Tribunal des baux et loyers, siégeant dans la composition prévue à l'art. 30 LaCC, pour statuer sur les mesures d'exécution sollicitées (ch. 2) et a condamné A______, D______ et B______ à verser à C______ la somme de 9'675 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er avril 2021 (date moyenne), sous déduction d'un montant de 5'375 fr. (ch. 3). Les parties ont été déboutées de toutes autres conclusions (ch. 4) et il a été dit que la procédure était gratuite (ch. 5).

Le jugement a été notifié à A______ et B______ le 19 août 2021.

Le Tribunal a en substance retenu que A______, D______ et B______ ne contestaient pas, avec raison, le principe de l'évacuation et que le versement à C______ d'indemnités pour occupation illicite se justifiait. Il a par ailleurs rappelé que la 7ème Chambre du Tribunal des baux et loyers, à laquelle la cause était renvoyée pour statuer sur l'exécution de l'évacuation, pouvait, conformément à l'art. 30 al. 4 LaCC, surseoir, pour des motifs humanitaires, à l'exécution dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire, après audition des représentants du département chargé du logement, des représentants des services sociaux et des parties.

B. a. Par acte déposé le 20 septembre 2021 au greffe de la Cour de justice, A______ et B______ ont déposé un appel à l'encontre du jugement précité, uniquement dirigé contre C______. Ils ont conclu à l'annulation des chiffres 1 à 3 de son dispositif et, cela fait, à ce que leur condamnation à évacuer l'appartement de E______ ne prenne effet que douze mois après l'entrée en force du nouveau jugement, C______ devant être déboutée de ses autres conclusions.

Ils reprochent en substance à l'autorité précédente d'avoir violé l'art. 30 LaCC ainsi que le principe de proportionnalité en ne sursoyant pas à leur évacuation pour motifs humanitaires et de ne pas avoir tenu compte que le père de B______ s'était mensuellement acquitté, pour le compte de ce dernier, de la moitié de l'indemnité pour occupation illicite due, de sorte que le paiement de l'arriéré incombait à D______ (A______ ayant quitté le logement litigieux).

b. Dans son mémoire de réponse expédié le 25 octobre 2021 au greffe de la Cour de justice,C______, après s'en être rapportée à justice s'agissant de la recevabilité de l'appel formé, a acquiescé à la conclusion en annulation du chiffre 3 du dispositif du jugement entrepris, les arriérés d'indemnités pour occupation illicite ayant été acquittés, et a conclu pour le surplus à la confirmation du jugement entrepris. A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour statuerait sur les mesures d'exécution de l'évacuation, elle a conclu à être autorisée, dès l'entrée en force des décisions de justice, à requérir l'évacuation par la force publique de A______, D______ et B______ de l'appartement à E______ et à la confirmation du jugement entrepris pour le surplus.

c. A______ et B______ n'ont pas répliqué.

d. Par courrier recommandé du 29 octobre 2021, C______ a sollicité que l'acte d'appel soit notifié à D______ pour détermination malgré son absence de mention en qualité de partie intimée afin d'éviter un éventuel incident procédural de nature à prolonger la procédure.

e. Par courrier du 2 novembre 2021, le greffe de la Cour de justice a informé C______ que l'acte d'appel formé par A______ et B______ la mentionnait comme seule partie intimée, qu'il n'appartenait pas à la Cour de rectifier un acte d'appel et que les conséquences de l'absence de mention de D______ en qualité de partie intimée seraient examinées dans l'arrêt à rendre.

f. Par plis séparés du 22 novembre 2021, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les éléments de fait pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Par contrat de bail conclu le 16 décembre 2018, C______ a, en qualité de bailleresse, remis en location à A______, en tant que locataire, un appartement de 4,5 pièces sis route 1______ à E______, comprenant une place de parking dépendante de l'appartement.

La durée du contrat a été fixée à une année, non renouvelable, du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2020, en raison du projet de C______ d'emménager avec ses enfants dans l'appartement remis à bail avant la rentrée scolaire 2020.

Le loyer mensuel net de l'appartement a été fixé à 1'900 fr., celui du parking à 150 fr., et la provision pour charge à 100 fr.

b. Le 31 décembre 2019, l'appartement n'a pas été restitué à C______.

c. A______ a quitté l'appartement à la fin du mois de juin 2020. Ses deux frères, D______ et B______, qu'elle hébergeait, sont en revanche demeurés sur place.

Le Tribunal des baux et loyers a retenu, sans être contredit, que D______ et B______ étaient liés à A______ par un rapport de sous-location.

d. B______ émarge à l'Hospice général. Il ne dispose d'aucune formation et fait l'objet de plusieurs poursuites.

D______, qui perçoit également des prestations de l'Hospice général, effectue un apprentissage de peintre en bâtiment. Il bénéficie d'une curatelle de représentation et de gestion instaurée le 16 avril 2019 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

e. Par acte déposé le 18 août 2020, déclaré non concilié le 5 novembre 2020 et introduit le même jour par-devant le Tribunal des baux et loyers, C______ a formé une requête en évacuation à l'encontre de A______, D______ et B______. Dans le cadre de cette procédure, elle a notamment conclu à la condamnation de A______, D______ et B______ à évacuer l'appartement ainsi qu'à être autorisée à requérir l'évacuation par la force publique dès l'entrée en force du jugement. Elle a en outre sollicité le versement des arriérés d'indemnités pour occupation illicite.

f. A______, D______ et B______ ont sollicité l'octroi d'un sursis humanitaire au 30 juin 2022.

g. La cause a été gardée à juger par le Tribunal le 8 juin 2021.

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement entrepris prononce l'évacuation des occupants de l'appartement dont l'intimée est propriétaire, les condamne à s'acquitter d'arriérés d'indemnités pour occupation illicite et renvoie à un jugement ultérieur le prononcé des mesures d'exécution.

Ce jugement, de nature pécuniaire (cf. notamment arrêt du Tribunal fédéral 4A_578/2021 du 26 novembre 2021 consid. 1.1; 4A_625/2017 du 12 mars 2018 consid. 1), est susceptible de faire l'objet d'un appel auprès de la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice (art. 122 let. a LOJ) dans un délai de 30 jours dès sa notification (art. 311 al. 1 CPC) si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité de première instance atteint 10'000 fr. (art. 308
al. 2 CPC).

1.2 Selon l'art. 311 al. 1 CPC, l'appel doit être écrit et motivé. Cette disposition ne régit pas expressément le contenu de l'acte. Il faut cependant admettre qu'il s'agit d'une forme de demande adressée au juge et qu'il faut donc appliquer par analogie les art. 221 et 244 CPC. Il peut en conséquence en être déduit que l'acte d'appel doit contenir la désignation des parties (art. 221 al. 1 let. a et 244 al. 1 let. a CPC; ATF 138 III 213 consid. 2.3).

Il n'y a en soi aucun formalisme excessif à exiger d'un demandeur ou recourant qu'il indique avec précision l'identité des personnes qu'il met en cause (cf. déjà : ATF 80 III 7). Cette mention est nécessaire pour que l'autorité puisse envoyer aux parties une copie de l'acte, les éventuelles convocations, puis le jugement rendu. En désignant ses parties adverses, le demandeur ou recourant détermine ainsi à l'égard de quelle personne il pourrait être, le cas échéant, condamné à payer des dépens. L'exigence de la désignation des parties dans l'acte répond donc à un intérêt légitime. Celui qui dirige mal sa démarche procédurale ne peut qu'être débouté, afin de respecter les droits des personnes qui, sous l'angle matériel, sont les titulaires actifs ou passifs de la prétention en cause (arrêt du Tribunal fédéral 4A_527/2011 du 5 mars 2012 consid. 2.5 n.p in ATF 138 III 213).

1.3 En l'espèce, il résulte de l'intitulé de l'acte d'appel que les parties appelantes ont dirigé leur appel uniquement à l'encontre de l'intimée sans mettre en cause D______, pourtant partie à la procédure de première instance. Or, dans la mesure où elles sollicitent l'annulation de mesures prononcées également à l'encontre de D______, elles ne pouvaient s'abstenir d'attraire ce dernier à la procédure d'appel, afin de lui permettre d'exercer son droit d'être entendu et de faire valoir ses droits. Il n'est ainsi pas envisageable de statuer sur l'appel sans porter atteinte aux droits de D______, directement concerné par la procédure, étant précisé qu'il n'appartient pas à la Cour de corriger un appel mal dirigé, respectivement de désigner elle-même les parties adverses.

L'appel sera en conséquence déclaré irrecevable, faute de désigner l'ensemble des parties à la procédure.

En tout état, même à supposer que l'appel soit recevable, la solution retenue par l'autorité précédente n'apparaissait pas critiquable pour les motifs qui suivent.

2. 2.1 Les arriérés d'indemnités pour occupation illicite fixés en faveur de l'intimée ayant été acquittés, seule la question de l'octroi éventuel aux parties appelantes d'un sursis humanitaire à l'évacuation au sens de l'art. 30 al. 4 LaCC demeure litigieuse.

2.2 Selon l'art. 30 al. 3 LaCC, lorsque le Tribunal des baux et loyers est appelé à statuer sur l'exécution d'un jugement d'évacuation d'un logement, il siège en présence des représentants du département chargé du logement et des représentants des services sociaux.

Après l'audition de ces représentants et l'audition des parties, le Tribunal des baux et loyers peut, pour des motifs humanitaires, surseoir à l'exécution du jugement d'évacuation dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire (art. 30 al. 4 LaCC).

2.3 Pour simplifier le procès, le Tribunal des baux et loyers peut limiter la procédure à des questions ou des conclusions déterminées (art. 125 let. a CPC).

2.4 En l'espèce, il résulte de la teneur des dispositions qui précèdent que la question de l'octroi d'un sursis humanitaire lors d'une procédure en évacuation d'un logement est examinée au stade du prononcé des mesures d'exécution. Or, l'autorité précédente a uniquement statué sur le principe de l'évacuation en précisant expressément que la cause serait transmise à l'expiration du délai d'appel à la 7ème Chambre du Tribunal des baux et loyers pour décision sur l'exécution de l'évacuation. Elle n'avait en conséquence pas, à ce stade de la procédure, à examiner si l'octroi d'un sursis humanitaire se justifiait, cet examen devant être effectué lors de la fixation des mesures d'exécution.

Par ailleurs, la décision de l'autorité précédente de renvoyer le prononcé des mesures d'exécution à une décision ultérieure n'apparaît pas critiquable compte tenu de la teneur de l'art. 125 CPC et des exigences relatives à la composition du Tribunal posées par l'art. 30 al. 3 LaCC.

3. Il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (art. 22 al. 1 LaCC; ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

Déclare irrecevable l'appel interjeté le 20 septembre 2021 par A______ et B______ contre le jugement JTBL/664/2021 rendu le 4 août 2021 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/16441/2020-4.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Zoé SEILER et Monsieur Nicolas DAUDIN, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.