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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1431/2023

ATAS/64/2024 du 30.01.2024 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1431/2023 ATAS/64/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 janvier 2024

Chambre 2

 

En la cause

A______

représentée par Me Francesco LA SPADA, avocat

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Le 5 juillet 2021, le docteur B______, médecin praticien et médecin généraliste traitant de Madame A______ (ci-après : l’assurée, l’intéressée ou la recourante), née en 1974, mariée et mère de deux enfants nés en 2004 et 2009, de profession habituelle nettoyeuse/femme de chambre (au taux de 50% auprès d’hôtels de juin 2016 à fin février 2021) et licenciée en février 2021, a rempli pour sa patiente le formulaire de détection précoce de l’assurance-invalidité (ci-après : AI) pour adultes, à la suite d’une incapacité totale de travail depuis décembre 2019 en raison de : « lombosciatalgies / fibromyalgies / cervicalgies / hernie discale ».

Etaient joints des rapports du Dr B______ des 8 septembre 2020 et 25 mai 2021, de même que des certificats de ce médecin et du docteur C______, gynécologue, relatifs à la capacité de travail de l’intéressée, plus des rapports du docteur D______, spécialiste FMH en médecine interne et maladies rhumatismales, des 3 février 2009 et 21 janvier 2011.

b. Le 12 juillet 2021, l’assurée a déposé elle-même une demande de prestations de l'AI pour adultes, mesures professionnelles et/ou rente, en raison de « douleurs au niveau du dos, qui remontent vers les cervicales », « douleurs aux genoux », « mains et genoux qui gonflent lorsque la position assise ou debout est maintenue trop longtemps », « pieds et jambes partiellement engourdis régulièrement », « les douleurs [ayant] commencé du côté gauche en 2011 et la problématique de santé [s’étant] fortement dégradée en généralisée en janvier 2019 ». Son incapacité de travail totale dans le secteur du nettoyage ou de l’intendance avait commencé le 28 février 2021 et durait encore.

c. L'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: l'OAI, l'office ou l'intimé) a instruit le cas.

À la suite d’une « IRM colonne totale », le docteur E______, radiologue FMH, avait établi le 20 novembre 2019 un rapport.

L’intéressée avait, sur mandat de l’office cantonal de l’emploi (OCE), effectué un stage de quatre semaines, du 15 mars au 9 avril 2021, auprès des Etablissements publics pour l’intégration (ci-après : EPI), qui ont établi un rapport.

Le 8 octobre 2021, le médecin généraliste traitant a rédigé un résumé de la situation de sa patiente.

Par courriel – motivé – 15 décembre 2021, l’Oeuvre suisse d’entraide ouvrière (ci-après : OSEO) a transmis à l’OAI un rapport du 2 septembre 2021 relatif à un stage de technologue en emballage (employée de production/conditionnement) du 20 au 22 juillet 2021 ainsi qu’un rapport du 14 décembre 2021 afférent à un stage également de technologue en emballage du 4 octobre au 23 décembre 2021 (au taux de 40%).

Dans un questionnaire AI reçu le 16 mars 2022 par l’office, le Dr B______, après un rapport du 12 mars 2022 posant les diagnostics de lombalgies, fibromyalgies et cervicalgies et mentionnant un « état anxiodépressif, fatigue », a fait état d’une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle et de 50% dans une activité adaptée.

Le 17 mars 2022, l’OAI a retenu un statut de personne active à 100%.

Le 23 mai 2022, le Dr E______ a établi des rapports afférents à une « IRM colonne lombaire » de même qu’à une « IRM colonne cervicale ».

Le 2 juin 2022, le médecin généraliste traitant a établi un rapport allant dans le même sens que ses rapports précédents et mentionnant au surplus des « problèmes d’angoisse ».

Dans un questionnaire AI rempli le 13 juillet 2022, la doctoresse F______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie et psychiatre traitante, a posé les diagnostics de « facteurs psychologiques ou comportementaux, associés à des maladies ou à des troubles classés ailleurs » (CIM-10 F54), troubles somatoformes (F45) et personnalité histrionique (F60.4), la patiente étant en incapacité totale de travail depuis février 2021 et de 50% « dans les années à venir ».

À la fin de la mesure professionnelle ordonnée par l’OAI (division réadaptation professionnelle) sous forme d’examen professionnel suivie par l’intéressée du 28 février au 29 mai 2022, les EPI ont, dans leur rapport du 13 juillet 2022, conclu que les rendements qu’ils avaient mesurés dans les activités pratiques (sérielles, de façonnage et de conditionnement) étaient de 75% sur un temps complet.

Questionné par l’office, G______, groupe actif dans les prestations de service et un des derniers employeurs de l’assurée, a, le 18 août 2022, indiqué que celle-ci ne travaillait plus auprès de lui et a produit des documents relatifs au contrat de travail qui les avait liés.

d. Dans un avis du 29 août 2022, le service médical régional de l’AI (ci-après : SMR) a retenu les diagnostics de cervicalgies, lombalgies et gonalgies avec une amélioration radiologique depuis 2019, actuellement non traitées, auxquelles s’ajoutaient des « facteurs psychologiques ou comportementaux, associés à des maladies ou à des troubles classés ailleurs » (F54), troubles somatoformes (F45) et personnalité histrionique (F60.4). La capacité de travail était nulle dès le 28 février 2021 dans l’activité habituelle, mais, suivant les conclusions de la dernière mesure professionnelle auprès des EPI, de 100% avec une diminution de rendement de 25%, susceptible de s’améliorer depuis octobre 2021 (« période où le médecin traitant [attestait] un [capacité de travail] de 100% de ses 50% ») et « au fil du temps », dans une activité adaptée, respectant les limitations fonctionnelles suivantes : pas de position statique prolongée, pas de mouvement en porte-à-faux ni en rotation du rachis lombaire, pas de mouvements répétitifs du rachis cervical, pas de port de charges de plus de 5 kg.

Par « rapport final – MOP » et « détermination du degré d’invalidité » établis le 11 décembre 2022 par sa division réadaptation professionnelle, l’OAI a retenu une perte de gain de 16,36%.

e. Par projet de décision du 19 décembre 2022, l’office a envisagé le refus de toutes prestations AI. En effet, le degré d’invalidité de 16%, calculé sur la base d’« une baisse de rendement de 25% dans le conditionnement léger », était insuffisant pour l’octroi d’une rente d’invalidité pour laquelle le taux minimal de 40% était requis, de même que pour un reclassement, qui requérait un manque à gagner d’au moins 20%. En outre, une orientation professionnelle ne pouvait pas être accordée, étant donné qu’au vu du large éventail d’activités non qualifiées que recouvraient les secteurs de la production et des services, un nombre significatif de ces activités étaient adaptées aux empêchements de l’intéressée. En l’absence de difficultés de trouver un emploi approprié par les propres moyens de celle-ci qui seraient dues à son état de santé, il n’y avait pas non plus de droit à une aide au placement.

f. À la suite d’une demande de prolongation de délai demandée le 16 janvier 2023 et accordée par l’office, l’assurée, représentée par son conseil nouvellement constitué, s’est, par écrit du 28 février 2022, opposée à ce projet de décision.

g. Par décision du 13 mars 2023, l’OAI a persisté dans les termes dudit projet de décision.

B. a. Par acte du 30 avril 2023, l’assurée, par son avocat, a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans) contre cette décision, concluant préalablement à la mise en œuvre d’une expertise psychiatrique, au fond, à l’annulation de ladite décision et, cela fait, principalement à l’octroi d’une rente entière d’invalidité dès le 12 juillet 2022 et au renvoi de la cause à l’office pour le calcul de ladite rente, subsidiairement au renvoi de la cause à celui-ci pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

b. Par réponse du 23 mai 2023, l’intimé a conclu au rejet du recours.

c. Par réplique du 23 juin 2023 – transmise pour information à l’intimé –, la recourante a persisté dans les conclusions et explications de son recours.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI – RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'AI, à moins que la loi n'y déroge expressément.

La modification du 21 juin 2019 de la LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2021. Elle est ainsi applicable, dès lors que le recours a été interjeté postérieurement à cette date (art. 82a LPGA a contrario).

3.             Interjeté dans la forme et le délai - de trente jours et compte tenu des féries judiciaires - prévus par la loi, le recours est recevable (art. 38 al. 4 et 56 ss LPGA ainsi que 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10]).

4.             L'objet du litige porte sur le droit éventuel de la recourante à une rente d’invalidité, seule prestations de l’AI à l’octroi de laquelle elle conclut dans son recours.

De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

5.             Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l'AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l'assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

En l'absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l'application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l'examen d'une demande d'octroi de rente d'invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s'applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).

En l'occurrence, un éventuel droit à une rente d'invalidité naîtrait au plus tôt en 2022, dès lors que le délai d'attente d'une année est venu à échéance le 28 février ou 1er mars 2022 - premier jour du droit éventuel à une rente d'invalidité de l'intéressée - et que la demande de prestations a été déposée en début juillet 2022 (cf. art. 28 al. 1 let. b et 29 al. 1 LAI à teneur duquel le droit à la rente prend naissance au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations), de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur nouvelle teneur (en vigueur à partir du 1er janvier 2022).

En revanche, en référence à la modification de l’art. 26bis al. 3 RAI du 18 octobre 2023 (déduction forfaitaire ; RO 2023 635) entrée en vigueur le 1er janvier 2024, et compte tenu des principes généraux de droit intertemporel susmentionnés (cf. aussi Office fédéral des assurances sociales [OFAS], CIRAI, état au 1er janvier 2024, ch. 9201), le droit éventuel à une rente d’invalidité étant ici né antérieurement au 1er janvier 2024 (cf. art. 29 al. 1 LAI), l’art. 26bis al. 3 RAI sera applicable dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2023.

6.              

6.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1, tel qu'en vigueur dès le 1er janvier 2021). Seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain. De plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2, en vigueur dès le 1er janvier 2008).

Aux termes de l'art. 6 LPGA, est réputée incapacité de travail toute perte, totale ou partielle, de l'aptitude de l'assuré à accomplir dans sa profession ou son domaine d'activité le travail qui peut raisonnablement être exigé de lui, si cette perte résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique. En cas d'incapacité de travail de longue durée, l'activité qui peut être exigée de lui peut aussi relever d'une autre profession ou d'un autre domaine d'activité.

Conformément à l'art. 4 LAI, l'invalidité (art. 8 LPGA) peut résulter d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (al. 1). L'invalidité est réputée survenue dès qu'elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération (al. 2).

6.2 Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L'atteinte à la santé n'est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

6.3 En vertu de l'art. 28 al. 1 LAI, l’assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: sa capacité de gain ou sa capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles (let. a); il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable (let. b); au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (let. c). L'al. 1bis dudit art. 28 LAI – en vigueur depuis le 1er janvier 2022 – dispose qu'une rente au sens de l’al. 1 n’est pas octroyée tant que toutes les possibilités de réadaptation au sens de l’art. 8 al. 1bis et 1ter LAI n’ont pas été épuisées.

Selon l'art. 28b LAI - entré en vigueur le 1er janvier 2022 -, la quotité de la rente est fixée en pourcentage d'une rente entière (al. 1). Pour un taux d'invalidité compris entre 50 et 69%, la quotité de la rente correspond au taux d'invalidité (al. 2). Pour un taux d'invalidité supérieur ou égal à 70%, l'assuré a droit à une rente entière (al. 3). Pour un taux d'invalidité inférieur à 50%, la quotité de la rente est la suivante: tableau, avec un taux d'invalidité d'au minimum 40% donnant droit à une rente - la plus basse - de 25%, jusqu'à un taux d'invalidité de 49% donnant droit à une rente de 47,5% (al. 4).

6.4 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c; ATF 102 V 165 consid. 3.1; VSI 2001 p. 223 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

6.4.1 La reconnaissance de l'existence d'une atteinte à la santé psychique suppose la présence d'un diagnostic émanent d'un expert (psychiatre) et s'appuyant selon les règles de l'art sur les critères d'un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1; ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques (ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références). Cette procédure d’administration des preuves est notamment applicable à la fibromyalgie (cf. ATF 132 V 65 consid. 4.1).

L'organe chargé de l'application du droit doit, avant de procéder à l'examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d'une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l'assurance-invalidité, c'est-à-dire qui résiste aux motifs dits d'exclusion tels qu'une exagération ou d'autres manifestations d'un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

6.4.2 Ainsi, selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence).

Il y a lieu de se fonder sur une grille d'analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

-     Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),

A.  Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)

Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3).

B.  Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles; consid. 4.3.2) 

C.  Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)

-     Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement; consid. 4.4) 

Limitation uniforme du niveau d'activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l'anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).

Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).

Il est notamment relevé que même si un trouble psychique, pris séparément, n'est pas invalidant en application de la nouvelle jurisprudence, il doit être pris en considération dans l'appréciation globale de la capacité de travail, qui tient compte des effets réciproques des différentes atteintes. Ainsi, une dysthymie, prise séparément, n'est pas invalidante, mais peut l'être lorsqu'elle est accompagnée d’un trouble de la personnalité notable. Par conséquent, indépendamment de leurs diagnostics, les troubles psychiques entrent déjà en considération en tant que comorbidité importante du point de vue juridique si, dans le cas concret, on doit leur attribuer un effet limitatif sur les ressources (ATF 143 V 418 consid. 8.1).

Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d’évaluation normative et structurée si elle n’est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu’il n’existe aucun indice en faveur d’une incapacité de travail durable ou lorsque l’incapacité de travail est niée sous l’angle psychique sur la base d’un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d’éventuelles appréciations contraires n’ont pas de valeur probante du fait qu’elles proviennent de médecins n’ayant pas une qualification spécialisée ou pour d’autres raisons (arrêt du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l’absence d’un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n’a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).

6.4.3 Dans les cas où, au vu du dossier, il est vraisemblable qu'il n'y a qu'un léger trouble dépressif, qui ne peut déjà être considéré comme chronifié et qui n'est pas non plus associé à des comorbidités, aucune procédure de preuve structurée n'est généralement requise (arrêt du Tribunal fédéral 9C_14/2018 du 12 mars 2018 consid 2.1).

Le Tribunal fédéral a récemment rappelé qu’en principe, seul un trouble psychique grave peut avoir un caractère invalidant. Un trouble dépressif de degré léger à moyen, sans interférence notable avec des comorbidités psychiatriques, ne peut généralement pas être défini comme une maladie mentale grave. S'il existe en outre un potentiel thérapeutique significatif, le caractère durable de l'atteinte à la santé est notamment remis en question. Dans ce cas, il doit exister des motifs importants pour que l'on puisse néanmoins conclure à une maladie invalidante. Si, dans une telle constellation, les spécialistes en psychiatrie attestent sans explication concluante (éventuellement ensuite d'une demande) une diminution considérable de la capacité de travail malgré l'absence de trouble psychique grave, l'assurance ou le tribunal sont fondés à nier la portée juridique de l'évaluation médico-psychiatrique de l'impact (ATF 148 V 49 consid. 6.2.2 et les références).

Des traits de personnalité signifient que les symptômes constatés ne sont pas suffisants pour retenir l’existence d’un trouble spécifique de la personnalité. Ils n'ont, en principe, pas valeur de maladie psychiatrique et ne peuvent, en principe, fonder une incapacité de travail en droit des assurances au sens des art. 4 al. 1 LAI et 8 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 5.3 et les références).

6.5 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents qu'un médecin, éventuellement d'autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

6.5.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

6.5.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

6.5.3 Les constatations médicales peuvent être complétées par des renseignements d’ordre professionnel, par exemple au terme d'un stage dans un centre d'observation professionnel de l'assurance-invalidité, en vue d'établir concrètement dans quelle mesure l'assuré est à même de mettre en valeur une capacité de travail et de gain sur le marché du travail. Il appartient alors au médecin de décrire les activités que l'on peut encore raisonnablement attendre de l'assuré compte tenu de ses atteintes à la santé (influence de ces atteintes sur sa capacité à travailler en position debout et à se déplacer; nécessité d'aménager des pauses ou de réduire le temps de travail en raison d'une moindre résistance à la fatigue, par exemple), en exposant les motifs qui le conduisent à retenir telle ou telle limitation de la capacité de travail. En revanche, il revient au conseiller en réadaptation, non au médecin, d'indiquer quelles sont les activités professionnelles concrètes entrant en considération sur la base des renseignements médicaux et compte tenu des aptitudes résiduelles de l'assuré. Dans ce contexte, l'expert médical et le conseiller en matière professionnelle sont tenus d'exercer leurs tâches de manière complémentaire, en collaboration étroite et réciproque (ATF 107 V 17 consid. 2b ; SVR 2006 IV n° 10 p. 39).

En cas d'appréciation divergente entre les organes d'observation professionnelle et les données médicales, l'avis dûment motivé d'un médecin prime pour déterminer la capacité de travail raisonnablement exigible de l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral I 531/04 du 11 juillet 2005 consid. 4.2). En effet, les données médicales permettent généralement une appréciation plus objective du cas et l'emportent, en principe, sur les constatations y compris d’ordre médical qui peuvent être faites à l'occasion d'un stage d'observation professionnelle, qui sont susceptibles d’être influencées par des éléments subjectifs liés au comportement de l'assuré pendant le stage (arrêt du Tribunal fédéral 9C_87/2022 du 8 juillet 2022 consid. 6.2.1 et les références). Au regard de la collaboration, étroite, réciproque et complémentaire selon la jurisprudence, entre les médecins et les organes d'observation professionnelle (cf. ATF 107 V 17 consid. 2b), on ne saurait toutefois dénier toute valeur aux renseignements d'ordre professionnel recueillis à l'occasion d'un stage pratique pour apprécier la capacité résiduelle de travail de l'assuré en cause. Au contraire, dans les cas où l'appréciation d'observation professionnelle diverge sensiblement de l'appréciation médicale, il incombe à l'administration, respectivement au juge - conformément au principe de la libre appréciation des preuves - de confronter les deux évaluations et, au besoin de requérir un complément d'instruction (arrêts du Tribunal fédéral 9C_1035/2009 du 22 juin 2010 consid. 4.1, in SVR 2011 IV n° 6 p. 17 ; 9C_833/2007 du 4 juillet 2008, in Plädoyer 2009/1 p. 70 ; I 35/03 du 24 octobre 2003 consid. 4.3 et les références, in Plädoyer 2004/3 p. 64 ; 9C_512/2013 du 16 janvier 2014 consid. 5.2.1).

6.6 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 135 V 39 consid. 6.1 ; 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; 122 V 157 consid. 1d).

7.              

7.1 En l’espèce, dans sa décision querellée, l’intimé se fonde sur le rapport du 13 juillet 2022 des EPI suite à la mesure d’examen professionnel suivie du 28 février au 29 mai 2022 par l’intéressée, avec sérieux selon ce rapport.

À teneur des conclusions de ce rapport, la recourante est actuellement apte à rejoindre le circuit économique ordinaire. Elle maintient durablement la position assise et travaille sur des périodes de 20 à 30 minutes en position debout (statique et dynamique). En revanche, elle procède à des alternances de positions régulières (position assise privilégiée) et elle a une mobilité réduite des membres supérieurs pour les gestes en amplitude et en élévation, ainsi qu’un rythme de travail fractionné pour les changements de positions et des interruptions des activités pour marcher et/ou faire des mouvements de détente. Elle possède certaines capacités d’apprentissage, bien que l’attention/concentration soit fractionnée, qui correspondent essentiellement à des activités de type pratique et manuel. L’assurée apprend au travers de situation concrètes et de démonstrations. Au niveau des capacités d’intégration sociale, elle a les aptitudes (composante relationnelle et engagement) pour rejoindre l’économie ordinaire. Les rendements mesurés par les EPI dans les activités pratiques (sérielles, de façonnage et de conditionnement) sont de 75% sur un temps complet.

La recourante ne conteste pas les conclusions et le contenu de ce rapport des EPI en tant que tels, mais reproche à ceux-ci d’avoir omis de prendre en compte une quelconque atteinte psychologique causant une incapacité de travail.

7.2 Il sied de relever tout d’abord que lesdites constatations et conclusions des EPI ne sont pas contredites par les autres rapports émanant d’institutions actives dans les mesures d’ordre professionnel.

En particulier, le rapport des EPI relatif au stage de quatre semaines du 15 mars au 9 avril 2021, s’il a certes fait état de rendements en-dessous des standards, n’a pas précisé le pourcentage de la baisse de rendement, et ce stage, bien antérieur à celui du premier semestre 2022, date du début de la période d’incapacité de travail dans l’activité habituelle.

Le rapport du 14 décembre 2021 de l’OSEO afférent au stage de technologue en emballage du 4 octobre au 23 décembre 2021 (au taux de 40%) a quant à lui indiqué notamment ce qui suit : l’intéressée a travaillé de 8h30 à 12h00 par jour avec une pause d’une vingtaine de minutes et d’autres petites pauses (changements de postures, étirements) durant la matinée ; elle a donc effectué en moyenne 3 heures de travail effectives par jour dans un cadre totalement adapté à ses besoins et difficultés et sans rythme de production attendu. Cette indication est compatible avec la diminution de rendement de 25% retenue par les EPI dans leur rapport du 13 juillet 2022.

7.3 Dans son avis motivé du 29 août 2022 et signé par une médecin spécialiste en médecine interne générale, le SMR s’aligne sur les constatations et conclusions du rapport du 13 juillet 2022 des EPI susmentionné et retient les diagnostics de cervicalgies, lombalgies et gonalgies avec une amélioration radiologique depuis 2019, actuellement non traitée, auxquelles s’ajoutent des « facteurs psychologiques ou comportementaux, associés à des maladies ou à des troubles classés ailleurs » (F54), troubles somatoformes (F45) et personnalité histrionique (F60.4). La capacité de travail est nulle dès le 28 février 2021 dans l’activité habituelle, mais, suivant les conclusions de la dernière mesure professionnelle auprès des EPI, de 100% avec une diminution de rendement de 25%, susceptible de s’améliorer depuis octobre 2021 et « au fil du temps », dans une activité adaptée, respectant les limitations fonctionnelles suivantes : pas de position statique prolongée, pas de mouvements en porte-à-faux ni en rotation du rachis lombaire, pas de mouvements répétitifs du rachis cervical, pas de port de charges de plus de 5 kg.

L’intéressée fait grief au SMR de ne pas avoir vérifié le contenu du rapport de sa psychiatre traitante, la Dresse F______, et de s’être contenté de l’écarter sans aucune autre pièce médicale au dossier à ce sujet et sans auscultation personnelle.

Cet avis du SMR, qui a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical, n’est, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, pas dénué de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur son contenu ; il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence desdites constatations – et appréciations – effectuées par le SMR.

7.4 Au plan somatique, c’est de manière insuffisamment probante que le Dr B______ a, en mars et juin 2022, posé les diagnostics de lombalgies, fibromyalgies et cervicalgies, a fait état de « douleurs généralisées mais en particulier des cervicalgies et lombosciatalgies », et a conclu à une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle et de 50% dans une activité adaptée. En effet, ses rapports, émanant d’un médecin généraliste traitant non spécialiste et chirurgie orthopédique ou rhumatologique, sont insuffisamment motivés et ne sont pas confirmés par d’autres avis médicaux pertinents. Notamment, l’existence de douleurs n’implique pas forcément une incapacité de travail ou des limitations fonctionnelles. Pour le reste, les limitations fonctionnelles indiquées par ce médecin généraliste traitant, à savoir une absence de port d’objets lourds et de mouvements répétitifs, sont compatibles avec celles retenues par le SMR.

Par ailleurs, dans ses rapports du 23 mai 2022, le radiologue E______ a, à la suite de l’« IRM colonne lombaire », conclu à une « discarthrose modérée L4-L5 et L5-S1 avec une légère saillie discale sans conflit radiculaire », le reste de l’examen de l’IRM étant normal, et, à la suite de l’« IRM colonne cervicale », à une « minime hernie discale au niveau de C5-C6 et de plus marquée au niveau de C6-C7 avec une empreinte sur la partie antérieure du sac thécal sans compression radiculaire ». Il ne ressort de ces deux rapports pas d’éléments en faveur d’une incapacité de travail ou de limitations fonctionnelles particulières.

Pour le reste, la diminution de rendement de 25% retenue le 13 juillet 2022 par les EPI et admise par le SMR permet de tenir compte des douleurs de la recourante sur les parties du corps susmentionnées.

Les conclusions du SMR au plan somatique n’apparaissent ainsi pas critiquables.

7.5 Au plan psychique, la recourante ne se prévaut à juste pas des rapports du Dr B______, qui mentionnent un « état anxiodépressif, fatigue » (12 mars 2022) de même que des « problèmes d’angoisse » (2 juin 2022). En effet, ce médecin n’est pas spécialiste en psychiatrie et de tels problèmes d’ordre psychique ne sont pas corroborés de manière probante par d’autres éléments du dossier.

Pour ce qui est du rapport du 13 juillet 2022 de la Dresse F______, celle-ci pose les diagnostics, ayant un impact sur la capacité de travail, de « facteurs psychologiques ou comportementaux, associés à des maladies ou à des troubles classés ailleurs » (F54), troubles somatoformes (F45) et personnalité histrionique (F60.4), la patiente étant en incapacité totale de travail depuis février 2021 et de 50% « dans les années à venir ». Cette psychiatre traitante écrit notamment ce qui suit : « [L’assurée] décrit des douleurs au dos, elle prend une position antalgique, dit qu’elle travaillait beaucoup. Ces symptômes fonctionnels sont à mon avis à l’origine d’un retentissement fonctionnel important pour la patiente qui l’empêchent d’exercer son activité professionnelle ce qui explique en grande partie son incapacité totale de travail. La difficulté de la patiente est qu’elle ne comprend pas pourquoi elle n’a pas une explication claire ou adéquate à son problème et les stratégies de la prise en charge même pour le long terme, ce qui l’amène à l’errance dans le système de soins malgré cela, elle reste sans réponse et elle est insatisfaite, ce qui est stressant pour la patiente et entraîne des réactions dépressives. Il faut dire que ces troubles exprimés par la patiente face à son état douloureux intense et/ou prolongés (fatigue, insomnie, céphalées, ralentissement cognitif avec une difficulté dans la capacité à prêter attention aux choses importantes même mineures, une irritabilité évoquent à mon sens les symptômes d’un syndrome dépressif qui nécessite d’être pris en compte même si la patiente a tendance à ses focaliser sur les plaintes somatiques » (point 3 du questionnaire portant sur le « status psychiatrique détaillé »).

Cela étant, on ne voit pas en quoi des troubles somatoformes et une personnalité histrionique, concernant lesquels aucun élément ne plaide pour une gravité particulière, pourraient être dans le cas présent cause d’une incapacité de travail. De surcroît, les troubles somatoformes diagnostiqués n’apparaissent ici pas accompagné d’une comorbidité, par exemple un trouble psychiatrique (cf. à ce sujet notamment ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.3). Certes, la Dresse F______ évoque des signes en faveur d’un syndrome dépressif, mais un tel trouble n’est ni précisé ni formellement diagnostiqué par la psychiatre traitante, ce qu’elle n’aurait pas manqué de faire si ledit trouble avait été d’une gravité particulière devant être prise en considération.

L'interruption de toute thérapie médicalement indiquée sur le plan psychique et le refus de participer à des mesures de réadaptation d'ordre professionnel sont des indices importants que l’assuré ne présente pas une évolution consolidée de la douleur et que les limitations invoquées sont dues à d'autres motifs qu'à son atteinte à la santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_569/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5.5.2). La prise en compte d’options thérapeutiques, autrement dit la mesure dans laquelle les traitements sont mis à profit ou alors négligés, permet d’évaluer le poids effectif des souffrances. Tel n’est toutefois pas le cas lorsque le comportement est influencé par la procédure assécurologique en cours. Il ne faut pas conclure à l’absence de lourdes souffrances lorsque le refus ou la mauvaise acceptation du traitement recommandé est la conséquence d’une incapacité (inévitable) de l’assuré à reconnaître sa maladie (anosognosie). Les mêmes principes s’appliquent pour les mesures de réadaptation. Un comportement incohérent de l'assuré est là aussi un indice que la limitation fonctionnelle est due à d’autres raisons qu’à l'atteinte à la santé assurée (ATF 141 V 281 consid. 4.4.2).

Or, en l’espèce, dans son rapport, la Dresse F______, si elle indique deux à trois séances par semaine avec parfois « les appels téléphoniques au besoin », mentionne avoir vu la patiente très peu depuis le 17 juin 2022, ajoutant que cette dernière ne prend que le traitement prescrit par son médecin généraliste, le Rebalance avec un comprimé le matin qui la soulage contre l’anxiété. D’après la psychiatre traitante, l’intéressée « s’est tellement focalisée sur son syndrome douloureux qu’elle est inconsciente face aux symptômes dépressifs et ne voit pas la nécessité de prendre un traitement antidépresseur ». Ces circonstances sont en défaveur d’une incapacité de travail pour cause de troubles psychiques, une anosognosie au sens précisé par le Tribunal fédéral, à savoir une incapacité (inévitable) de l’assurée à reconnaître sa maladie, ne ressortant pas du rapport de la Dresse F______.

Enfin, sous l’angle notamment de la catégorie « cohérence » des indicateurs développés par le Tribunal fédéral, des troubles psychiques invalidants ne ressortent aucunement des constatations et conclusions – probantes – des EPI du 13 juillet 2022.

Déjà au regard de ce qui précède, une incapacité de travail pour cause psychique doit être écartée, de sorte qu’en application de la jurisprudence du Tribunal fédéral il est renoncé à aller plus loin dans le cadre de l’examen du cas selon la grille d’évaluation normative et structurée.

7.6 En définitive, aucun élément ne permet de remettre en cause les conclusions du SMR. Selon ce dernier, la capacité de travail est nulle dès le 28 février 2021 dans l’activité habituelle, mais, suivant les conclusions de la dernière mesure professionnelle auprès des EPI, de 100% avec une diminution de rendement de 25%, susceptible de s’améliorer depuis octobre 2021 et « au fil du temps », dans une activité adaptée, respectant les limitations fonctionnelles suivantes : pas de position statique prolongée, pas de mouvements en porte-à-faux ni en rotation du rachis lombaire, pas de mouvements répétitifs du rachis cervical, pas de port de charges de plus de 5 kg.

Il n’y a dès lors pas lieu de procéder à des investigations complémentaires, ni d’ordonner une expertise judiciaire.

La recourante présente certes réellement des souffrances et difficultés au plan somatique et/ou psychique, mais celles-ci ne sont pas suffisamment graves pour la reconnaissance d'une invalidité (cf. notamment art. 4 al. 2 LAI). L’assurée a accompli des efforts méritoires en vue d’une réinsertion professionnelle (notamment dans le cadre des stages et mesures professionnelles auprès de l’OSEO et des EPI), et il lui appartient de continuer et accroître ses efforts.

8.              

8.1 Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).

Selon la jurisprudence, il est possible de fixer la perte de gain d'un assuré directement sur la base de son incapacité de travail en faisant une comparaison en pour-cent. Cette méthode constitue une variante admissible de la comparaison des revenus basée sur des données statistiques : le revenu hypothétique réalisable sans invalidité équivaut alors à 100%, tandis que le revenu d'invalide est estimé à un pourcentage plus bas, la différence en pour-cent entre les deux valeurs exprimant le taux d'invalidité. L'application de cette méthode se justifie entre autres lorsque les salaires avant et/ou après invalidité ne peuvent pas être déterminés (arrêt du Tribunal fédéral 9C_237/2016 du 24 août 2016 consid. 2.2 et les références).

La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 135 V 297 consid. 5.2 ; ATF 134 V 322 consid. 5.2 et les références; ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération ; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3. et les références). D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).

Les limitations fonctionnelles justifiant une diminution de rendement déjà prises en compte dans l'évaluation de la capacité de travail n'ont pas à être retenues une seconde fois lors de la détermination de l'abattement (arrêt du Tribunal fédéral 9C_778/2020 du 27 août 2021 consid. 6 et la référence). En cas de baisse de rendement, l'abattement doit être appliqué à la part du salaire statistique que l’assuré est toujours susceptible de réaliser malgré sa baisse de rendement et ne saurait en aucun cas être additionné au taux de la diminution de rendement, puis il convient de déduire le résultat obtenu de ladite part salariale. La différence obtenue correspond à la perte de gain effective et donne le taux d'invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_692/2017 du 12 mars 2018 consid. 5).

8.2 En l’espèce, la recourante ne conteste pas la comparaison de ses revenus sans et avec invalidité telle qu’effectuée par l’intimé le 11 décembre 2022 dans le document « détermination du degré d’invalidité ».

Au demeurant, quand bien même on peut s’interroger sur la justification du choix de l’office d’appliquer au revenu sans invalidité (pour un plein temps) le salaire annuel brut de CHF 50'201.- résultant, après indexation, du niveau de compétence 1 (« tâches physiques ou manuelles simples ») pour les femmes dans les « activités de services admin. et de soutien » (lignes 77 à 82) selon le tableau TA1_tirage_skill_level 2020 de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS), alors que le revenu avec invalidité découlerait selon l’OAI d’un salaire annuel brut statistique (de CHF 55'983.-) plus élevé, soit le même niveau de compétence 1 pour les femmes mais dans l’« industrie manufacturière » (lignes 10 à 33), cela ne changerait rien à l’absence d’un taux de perte de gain – degré d’invalidité – insuffisant pour atteindre le degré de 40% minimal requis pour l’octroi d’une rente AI. En effet, même si les revenus sans et avec invalidité étaient identiques et qu’un abattement de 5% ou même 10% au maximum (vu le caractère relativement peu important des limitations fonctionnelles) était éventuellement appliqué, le degré de 40% minimal requis pour l’octroi d’une rente AI ne serait en tout état de cause pas atteint.

9.             Vu ce qui précède, la décision de l’OAI querellée est conforme au droit, et le recours sera dès lors rejeté.

La procédure n'étant pas gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), un émolument de CHF 200.- (montant minimal) sera perçu de la recourante, qui n’obtient pas gain de cause.

 

***


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de la recourante.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le