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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2127/2023

ATAS/1030/2023 du 20.12.2023 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2127/2023 ATAS/1030/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 décembre 2023

Chambre 5

 

En la cause

A______

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né en ______ 1954, est bénéficiaire de prestations complémentaires versées par le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé).

b. Afin d’entreprendre une révision périodique du dossier de l’assuré, le SPC lui a demandé, par courrier du 4 novembre 2022, de lui transmettre diverses pièces avec un délai au 4 décembre 2022, en avertissant l’assuré, dans un texte en caractères gras, que sans nouvelles de sa part dans le délai imparti le SPC serait « dans l’obligation de supprimer/refuser le droit aux prestations complémentaires ».

B.            a. Par décision notifiée par courrier recommandé du 2 février 2023, le SPC a constaté n’avoir pas reçu les justificatifs nécessaires pour la mise à jour du dossier et ceci en dépit du dernier rappel et du fait que l’assuré avait été rendu attentif aux conséquences éventuelles de ses manquements, soit la suppression du versement des prestations complémentaires. Dès lors que l’assuré n’avait pas réagi, le SPC l’informait de la suppression du versement de ses prestations complémentaires, dès le 28 février 2023.

b. Par courrier du 8 février 2023, l’assuré a transmis différents documents au SPC, tout en mentionnant qu’il était désolé pour le retard, mais qu’il avait dû aller en Bosnie-Herzégovine chercher les documents demandés, puis les faire traduire.

c. Par courrier du 1er mars 2023, le SPC a demandé de nouvelles pièces qui devaient lui être transmises à la fin du mois. Par courrier de rappel du 3 avril 2023, le SPC a demandé à nouveau la transmission de ces pièces. Par courrier du 4 avril 2023, l’assuré a répondu et a transmis différents relevés concernant des comptes bancaires ouverts auprès d’une banque de Sarajevo, en Bosnie-Herzégovine.

d. Par courrier du 26 avril 2023, l’assuré a fait opposition à la décision de suppression de ses prestations complémentaires du 2 février 2023, en indiquant qu’il avait, chaque fois, fait le nécessaire pour transmettre les documents demandés et qu’il avait dû aller en Bosnie-Herzégovine pour les chercher et que de surcroît, il avait dû recourir à l’aide de sa fille, car lui-même ne maîtrisait pas le français.

e. Par courrier du 12 juin 2023, le service juridique du SPC a rendu une décision sur opposition, déclarant irrecevable l’opposition à la décision du 2 février 2023 pour tardiveté, cette dernière n’ayant pas été déposée dans le délai de 30 jours. Par ailleurs, il était précisé que le dossier de l’assuré était transmis au secteur compétent, pour qu’il examine les pièces reçues postérieurement à la décision du 2 février 2023 et se détermine sur le maintien de la suppression ou sur la reprise du versement des prestations et rende, le cas échéant, une nouvelle décision de prestations.

C. a. Par acte posté en date du 24 juin 2023, l’assuré a recouru contre la décision sur opposition du SPC, du 12 juin 2023, auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci‑après : la chambre de céans). Il s’est déterminé sur le fond, exposant, en substance, qu’il ne comprenait pas la raison pour laquelle on lui supprimait ses prestations, car il lui était déjà arrivé, auparavant, de tarder dans l’envoi des documents, ce qui n’avait jamais entraîné une décision de suppression.

b. Par réponse du 25 juillet 2023, le SPC s’est déterminé, en exposant que la présente procédure portait uniquement sur l’irrecevabilité de l’opposition formée par courrier du 26 avril 2023, posté le 27 avril 2023, contre la décision du 2 février 2023. Il était constaté que le recourant n’amenait aucun élément justifiant une autre appréciation de la situation dès lors qu’il se contentait de contester la suppression du versement desdites prestations.

c. Par courrier du 28 juillet 2023, la chambre de céans a invité le recourant à répliquer et, en particulier, à lui communiquer les éventuels justes motifs pouvant justifier le retard avec lequel il avait contesté la décision du SPC du 2 février 2023.

d. Par courrier du 10 août 2023, la fille du recourant, agissant en son nom, a exposé que son père avait eu une attaque cardiaque « à l’heure de ses vacances d’été » puis avait dû être opéré. Par ailleurs, il avait dû aller plusieurs fois en Bosnie-Herzégovine pour chercher des documents et faire la traduction, ce qui évidemment avait pris du temps. Elle expliquait, par ailleurs, qu’il lui arrivait de ne pas s’occuper tout de suite du courrier du SPC, car ses enfants avaient été plusieurs fois malades cet hiver et qu’elle avait eu, elle-même, des soucis de santé ces derniers temps.

e. Par courrier du 15 août 2023, la chambre de céans a invité l’intimé à dupliquer, notamment, en se déterminant sur les documents qui avaient été transmis avec le courrier du 8 février 2023 afin d’examiner si ces derniers ne valaient pas opposition à la décision du 2 février 2023.

f. Par courrier du 5 septembre 2023, le SPC a pris note des explications données par la fille du recourant, agissant au nom de ce dernier, et a considéré qu’il n’y avait pas de motifs justifiant un empêchement non fautif ne pas avoir agi dans le délai d’opposition de 30 jours. En ce qui concernait les documents transmis avec le courrier du 8 février 2023, il n’y avait aucune référence explicite à la suppression du versement des prestations, ni demande de reprise de versement et ledit courrier ne comportait pas les attributs d’une opposition.

g. Par observations spontanées du 21 septembre 2023, le recourant a insisté sur le fait que toutes les raisons qu’il avait citées pour expliquer son retard étaient valables, de même que celles qui avaient été mentionnées par sa fille, dans son courrier précédent.

h. Les parties ont été convoquées à une audience de comparution personnelle qui s’est déroulée le 23 novembre 2023. Lors de cette dernière, le recourant et sa fille ont expliqué les démarches qu’ils avaient dû effectuer auprès de la banque sise à Sarajevo pour obtenir les relevés bancaires réclamés par le SPC. Ils ont également expliqué qu’ils bénéficiaient d’une baisse de loyer depuis 2021, leur loyer s’élevant à CHF 1'700.- par mois.

i. Interpellée sur la raison pour laquelle la décision du 2 février 2023 n’avait pas été notifiée par courrier recommandé, la représentante du SPC a, dans un premier temps, exposé qu’il s’agissait de la pratique du SPC, puis après avoir mieux examiné la décision, s’est ravisée et a envisagé que cette dernière avait peut-être été notifiée par courrier recommandé ; elle a demandé un délai au 8 décembre 2023 pour faire parvenir à la chambre de céans l’éventuel document démontrant la notification par recommandé. Un délai au 30 novembre 2023 a été fixé à la fille du recourant de manière à obtenir des informations plus précises sur le montant de son bail à loyer.

j. Par acte déposé au greffe de la chambre de céans, en date du 24 novembre 2023, la fille du recourant ainsi que son époux ont autorisé la chambre de céans à obtenir des informations concernant le bail à loyer de l’appartement en location. L’autorisation a été envoyée au bailleur par courrier de la chambre de céans du 28 novembre 2023.

k. Par courrier du 30 novembre 2023, le SPC a confirmé à la chambre de céans que la décision du 2 février 2023 avait bien été envoyée par courrier recommandé, le 3 février et distribuée au guichet le 9 février 2023. Était joint, en annexe, un extrait de La Poste confirmant la distribution du courrier recommandé au guichet, en date du 9 février 2023. Compte tenu de cet élément, le SPC confirmait que l’opposition formée par courrier du 26 avril 2023 était tardive et que c’était à juste titre qu’elle avait été déclarée irrecevable dans la décision sur opposition du 12 juin 2023, objet de la présente procédure. Il était ajouté que l’audience de comparution personnelle des parties avait permis de clarifier le dossier et de faire le point sur les documents qui manquaient, selon le courrier de maintien de la suppression du 11 juillet 2023. Dès réception des informations concernant le bail à loyer et suite aux clarifications obtenues lors de l’audience, concernant les comptes bancaires, le SPC disposerait des documents nécessaires au calcul des prestations, sans pouvoir être en mesure de se prononcer sur la date de reprise du versement des prestations complémentaires.

l. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

m. Les autres faits seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC ‑ RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur la décision d’irrecevabilité de l’opposition de l’assuré, en raison de son caractère tardif.

Pour ce motif, les griefs du recourant formulés devant la chambre de céans, sur des questions de fond, ne seront pas examinés.

4.             Aux termes de l'art. 52 LPGA, les décisions peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d’opposition auprès de l’assureur qui les a rendues, à l’exception des décisions d’ordonnancement de la procédure. À cet égard, l'art. 10 al. 1 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11) prévoit que l'opposition doit contenir des conclusions et être motivée. L'opposition écrite doit être signée par l'opposant ou par son représentant légal ; en cas d'opposition orale, l'assureur consigne l'opposition dans un procès-verbal signé par l'opposant ou son représentant légal (art. 10 al. 4 OPGA).

L'art. 38 al. 1 LPGA, dispose que si le délai, compté par jours ou par mois, doit être communiqué aux parties, il commence à courir le lendemain de la communication.

En vertu de l'art. 39 al. 1 LPGA, les écrits doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai à l'assureur ou, à son adresse, à La Poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (al. 1). Lorsqu'une partie s'adresse en temps utile à un assureur incompétent, le délai est réputé observé (al. 2).

5.             À teneur de l'art. 41 LPGA, si le requérant ou son mandataire a été empêché, sans sa faute, d'agir dans le délai fixé, celui-ci est restitué pour autant que, dans les trente jours à compter de celui où l'empêchement a cessé, le requérant ou son mandataire ait déposé une demande motivée de restitution et ait accompli l'acte omis.

D'après la jurisprudence, une restitution de délai ne peut être accordée qu'en l'absence claire de faute du requérant ou de son mandataire, ce qui n'est pas le cas même d'une légère négligence ou d'une erreur en raison d'une inattention (arrêt du Tribunal fédéral 9C_821/2016 du 2 février 2017 consid. 2.2). Par « empêchement non fautif », il faut entendre non seulement l'impossibilité objective, comme le cas de force majeure - par exemple un événement naturel imprévisible (Anne-Sylvie DUPONT, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 7 ad art. 41 LPGA) -, mais également l'impossibilité due à des circonstances personnelles ou à une erreur excusables (arrêts du Tribunal fédéral 8C_743/2019 du 20 décembre 2019 consid. 4.3 ; I 854/06 du 5 décembre 2006 consid. 2.1), à savoir lorsque, pour des motifs indépendants de leur volonté, il leur est impossible d'effectuer l'acte requis dans le délai initial ou d'instruire un tiers en ce sens (Anne-Sylvie DUPONT, op. cit., n. 7 ad art. 41 LPGA). Ces circonstances doivent toutefois être appréciées objectivement : est non fautive toute circonstance qui aurait empêché un plaideur - respectivement un mandataire - consciencieux d'agir dans le délai fixé (arrêt du Tribunal fédéral I 854/06 du 5 décembre 2006 consid. 2.1).

Le caractère strict des conditions de restitution du délai, en cas d’opposition tardive, a été récemment rappelé par le Tribunal fédéral, dans un arrêt du 28 juin 2022 (arrêt du Tribunal fédéral 8C_660/2021).

6.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

7.             En l’espèce, il est établi que la décision du SPC du 2 février 2023 a été notifiée en date du 9 février 2023 à l’assuré, par distribution au guichet de La Poste.

L’opposition de l’assuré, postée le 27 avril 2023 est incontestablement tardive.

7.1 Le recourant n’a fourni aucun motif valable qui aurait pu justifier une restitution du délai. Il a, certes, mentionné des ennuis de santé, mais qui selon ses propres termes sont arrivés « à l’heure des vacances d’été » et ne concernent donc pas la période des mois de février et mars 2023.

S’ajoute à cela qu’aucun document médical n’a été fourni par le recourant pouvant confirmer l’existence de troubles de la santé qui auraient pu justifier un empêchement tardif d’agir dans le délai de 30 jours.

7.2 S’agissant des documents transmis en annexe du courrier du 8 février 2023, il s’avère, comme l’expose l’intimé, qu’il s’agissait d’une partie des documents qui avaient été préalablement demandés au recourant, avant que la décision de suppression de ses prestations ne soit prise, par courrier recommandé du 2 février 2023.

Il est par ailleurs inenvisageable que le recourant ait pu s’opposer, par courrier du 8 février 2023, à une décision qui ne lui a été notifiée qu’en date du 9 février 2023. Comme l’a expliqué la représentante du service juridique du SPC, lors de l’audience du 23 novembre 2023 et dans son courrier ultérieur, lesdits documents ont été transmis à la section qui s’occupe de vérifier que l’intégralité des documents a été reçue, avant d’examiner l’éventuel droit aux prestations. Il ne peut donc s’agir de documents à l’attention du service juridique, dans le cadre de la procédure d’opposition à la décision du 2 février 2023.

Dès lors, la décision d’irrecevabilité rendue par le SPC, en date du 12 juin 2023, ne prête pas le flanc à la critique.

8.             Compte tenu de ce qui précède, la chambre de céans n’a d’autre choix que de rejeter le recours.

9.             Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le