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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2656/2022

ATAS/1056/2023 du 22.12.2023 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2656/2022 ATAS/1056/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 décembre 2023

Chambre 9

 

En la cause

A______,

représenté par Me Jean-Pierre WAVRE

 

 

recourant

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1966, d'origine macédonienne, est arrivé en Suisse en 1991.

Par la suite, il a obtenu la nationalité suisse.

Il est marié et père de quatre enfants mineurs.

B. a. Le 21 avril 1997, il a déposé une première demande auprès de l'office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après : l'OAI), en raison d'atteintes oculaires bilatérales causées par les poussières de laine au contact desquelles il se trouvait dans le cadre de son activité professionnelle de poseur de faux-plafonds. Son assurance-accidents l'avait déclaré inapte à exercer toute activité au contact desdites poussières de laine. L'assuré sollicitait donc de l'OAI la prise en charge d'un reclassement dans une nouvelle profession.

b. Par décision du 6 avril 1998, l'OAI a rejeté cette demande, au motif que rien n'empêchait une reprise de travail dans une activité adaptée où il pourrait faire valoir ses connaissances professionnelles sans besoin de nouvelle formation, avec un salaire suffisamment élevé pour exclure le droit à une rente.

c. Le 29 novembre 2006, l'assuré a déposé une demande de prise en charge d'appareils acoustiques, en raison d'une atteinte auditive (surdité), auprès de l'OAI, lequel l'a acceptée par décision du 29 mai 2007.

d. Le 8 février 2013, alors que l'assuré travaillait comme agent de sécurité, un formulaire de détection précoce a été communiqué à l'OAI en raison de troubles psychiques causant une incapacité de travail depuis le 30 août 2012. L'intéressé a finalement recouvert sa capacité de travail en avril 2013 et aucune demande de prestations n'a été déposée auprès de l'OAI.

C. a. Le 17 février 2014, l'assuré a commencé à travailler comme aide-monteur storiste.

b. Dès le mois de décembre 2016, il a présenté des troubles aux coudes, qui se sont avérés être une épicondylite médiale bilatérale, prédominante à droite.

c. En raison de ces troubles, il a subi plusieurs périodes d'arrêt de travail, durant lesquelles il a perçu des indemnités journalières perte de gain maladie, puis s'est retrouvé à nouveau en arrêt à 100% dès le 3 décembre 2018.

d. Le 23 janvier 2019, il a été opéré une première fois au coude droit par le docteur B______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur.

e. Le 21 novembre 2019, l'assuré a été opéré une deuxième fois au coude droit par le Dr B______.

f. Le 25 septembre 2020, il a été licencié de son poste d'aide-monteur storiste.

g. En octobre 2020, il s'est annoncé au chômage et au printemps 2021, l'assuré a débuté un stage auprès d'une entreprise de voiture mais a dû l'interrompre après un mois en raison d'une nouvelle aggravation de l'état de son coude.

h. Le 2 juin 2021, il a, à nouveau, subi une intervention chirurgicale au coude droit.

D. a. Le 15 février 2019, l'assuré a déposé une demande de prestations auprès de l'OAI, motivée par ses atteintes aux coudes.

b. Dans le cadre de l'instruction du dossier, l'OAI a recueilli divers documents, dont les rapports suivants du Dr B______ :

                            i.      Un rapport transmis le 22 mars 2019, attestant qu'à la suite de l'intervention chirurgicale du 23 janvier 2019, l'assuré présentait de très fortes douleurs post-opératoires au coude droit et une incapacité de travail à 100%.

                          ii.      Un rapport du 10 décembre 2019, indiquant que l'épicondylite du coude droit s'était aggravée, que l'assuré avait dû être réopéré le 19 novembre 2019 et qu'il était alors en voie de récupération post-opératoire.

                        iii.      Un rapport du 9 juin 2020, selon lequel, à la suite de l'intervention chirurgicale du 21 novembre 2019, il y avait une nette amélioration mais que l'assuré présentait toujours une gêne à l'effort, avec des limitations fonctionnelles du type impossibilité de port de charges lourdes et de travaux manuels intenses. Selon le Dr B______, l'assuré ne pouvait plus exercer le métier de storiste et devait suivre une formation professionnelle.

c. Ces documents ont été soumis au service médical régional de l'assurance-invalidité (ci-après : SMR), lequel a retenu, par avis du 19 novembre 2020, que la capacité de travail de l'assuré était nulle dans son activité habituelle d'aide-monteur storiste. Pour comprendre l'évolution post-chirurgicale et se déterminer sur la capacité de travail dans une activité adaptée, il était nécessaire d'interroger le Dr B______.

d. Sur questions du SMR, le Dr B______ a déclaré le 15 décembre 2020 que l'assuré était apte au travail à 100% depuis le 17 octobre 2020, sans port de charges lourdes.

e. Le 24 avril 2021, le SMR a retenu, sur la base des pièces au dossier, que l'assuré présentait, principalement, des atteintes au coude droit, à savoir une épicondylite avec exostose épicondylienne opérée le 23 janvier 2019, ainsi qu'une épicondylite fissuraire opérée le 21 novembre 2019. L'incapacité de travail était de 100% dans toute activité dès le 5 décembre 2018 et, à partir du 17 octobre 2020, la capacité de travail était entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles du type port de charges lourdes et surdité à droite.

f. Par projet de décision du 3 mai 2021, l'OAI a informé l'assuré qu'il envisageait de lui octroyer une rente d'invalidité entière limitée à la période du 1er décembre 2019 au 31 décembre 2020, sur la base d'un degré d'invalidité de 100%. Il estimait qu'à l'échéance du délai d'attente d'un an, le 5 décembre 2019, l'incapacité de gain était entière, de sorte que le droit à une rente entière était ouvert dès cette date. En revanche, il retenait une amélioration de l'état de santé dès le 17 octobre 2020 et une capacité de travail de 100% exigible dans une activité adaptée. Ainsi, il se justifiait d'opérer une comparaison du revenu de valide avec le revenu d'invalide, soit celui qu'il pourrait réaliser malgré son invalidité en exerçant une activité raisonnablement exigible, ce qui mettait en évidence une perte de gain équivalent à 7%, soit un taux d'invalidité insuffisant pour maintenir le droit à une rente. Aussi, la rente devait être supprimée dès le 31 décembre 2020, soit trois mois après l'amélioration constatée. Par ailleurs, l'OAI estimait que dans la situation de l'assuré, des mesures professionnelles n'étaient pas indiquées. En effet, au vu du large éventail d'activités non qualifiées que recouvraient les secteurs de la production et des services, un nombre significatif de ces activités étaient adaptées aux limitations fonctionnelles liées à son état de santé, ne nécessitant pas d'intervention du type orientation professionnelle. En outre, le taux d'invalidité, inférieur à 20%, n'ouvrait pas de droit à un reclassement professionnel. Enfin, l'assuré ne présentait pas de limitation spécifique compromettant la recherche d'emploi, de sorte qu'une aide au placement ne se justifiait pas.

g. Le 9 juin 2021, l'OAI a reçu un nouveau rapport du Dr B______, établi le 7 juin 2021, selon lequel l'assuré présentait depuis quelques mois une aggravation de son épicondylite droite ayant nécessité une nouvelle intervention chirurgicale réalisée le 2 juin 2021 et que, pour cette raison, il se trouvait en incapacité de travail totale pour une période minimale de trois mois. Il précisait que l'incapacité de travail de l'assuré était de 100% jusqu'au 26 novembre 2020, et non pas seulement jusqu'au 17 octobre 2020, puisqu'en raison de l'aggravation, elle était à nouveau de 100% à partir du 19 avril 2021.

h. Par courriel du 21 septembre 2021, le docteur C______, spécialiste FMH en psychiatre et psychothérapie d'enfants et d'adolescents, a informé l'OAI que l'assuré, qu'il suivait, avait développé des troubles psychiques avec un risque vital engagé. Le psychiatre allait lui communiquer un rapport détaillé.

i. L'OAI a encore reçu les deux rapports médicaux suivants :

-          Un rapport du 30 septembre 2021 du Dr B______, lequel confirmait l'incapacité de travail totale dans l'activité habituelle et indiquait que si l'état psychologique le permettait, sur le plan orthopédique, la capacité de travail était de 100% dès le 1er octobre 2021 dans une activité adaptée n'utilisant pas le coude droit.

-          Un rapport du 1er novembre 2021 du Dr C______, lequel retenait les diagnostics d'épisode dépressif sévère avec symptômes psychotiques (F32.3), d'anxiété généralisée (F41.1) et de troubles de l'adaptation (F43.2). Le risque vital était engagé. L'assuré avait développé un trouble d'ordre cognitif, affectif et sociale et ne pouvait actuellement pas mobiliser de ressources. Il suivait un traitement par psychothérapie une à deux fois par semaine et il y avait eu une amélioration avec la médication. La capacité fonctionnelle et de travail dans toute activité était nulle.

j. Par rapport du 29 décembre 2021, le Dr C______ a indiqué qu'il suivait l'assuré depuis janvier 2021, que celui-ci présentait un risque d'hospitalisation étant donné son état de santé psychique et le risque suicidaire. Il avait perdu son emploi et son rôle au sein de sa famille, vivait très mal son incapacité physique et présentait un état dépressif avec des épisodes de paranoïa et des idées noires dans un contexte familial très inquiétant. Le pronostic psychiatrique était réservé. Il fallait qu'il s'insère dans une formation qui respecte ses limitations fonctionnelles et le valorise mais actuellement, il ne pouvait pas mobiliser de ressources et n'était pas capable de suivre de formation. L'incapacité de travail était totale.

k. Ce rapport a été soumis au SMR, lequel a émis un avis du 11 février 2022, proposant la mise en œuvre d'une expertise psychiatrique.

l. L'OAI a confié cette expertise au docteur D______, spécialise FMH en psychiatrie et psychothérapie, lequel a vu l'assuré le 30 mars 2022 et rendu son rapport le 7 avril 2022.

Dans son rapport, l'expert a retenu, à titre de diagnostic ayant des effets sur la capacité de travail, un épisode dépressif de degré moyen avec syndrome somatique (F32.11). Cet épisode dépressif actuel, qui avait peut-être été de degré sévère en septembre 2021, était passé à un degré moyen mais n'était pas encore complètement achevé et semblait avoir une bonne évolution grâce à l'adhésion au suivi psychiatrique et à plusieurs changements au niveau du traitement antidépresseur. Pour cette raison, d'ici à trois mois, ledit épisode serait complètement résolu, surtout si un processus de réentrainement progressif à l'endurance était initié, cela ayant sans doute un impact positif sur le processus de rétablissement de l'assuré. L'état dépressif de l'assuré justifiait une incapacité de travail psychiatrique de 100% rétroactivement à partir de septembre 2021 jusqu'à la date de l'expertise mais cette dernière devait être encore prolongée pour les trois prochains mois, le temps de permettre à ses médecins traitants d'adapter la thérapie pharmacologique et – en parallèle – d'entamer un processus de reconditionnement professionnel.

m. Par avis du 19 avril 2022, le SMR a retenu, sur la base du dossier médical et de cette expertise, que l'assuré présentait un état dépressif de gravité moyenne, en évolution depuis septembre 2021, et une épicondylite du coude droit avec une dernière intervention chirurgicale le 2 juin 2021. L'incapacité de travail était de 100% depuis octobre 2021 à avril 2022. Les activités de storiste et d'agent à la sécurité n'étaient plus exigibles depuis le 5 décembre 2018 mais dans une activité adaptée, une reprise à 100% était exigible après trois mois de réentrainement au travail de manière progressive. Les limitations fonctionnelles retenues étaient le port de charges lourdes, les gestes répétitifs au niveau des coudes, la surdité à l'oreille droite et l'irritabilité.

n. Par décision du 24 juin 2022, l'OAI a octroyé à l'assuré une rente d'invalidité limitée et refusé des mesures professionnelles. Durant les périodes du 1er décembre 2019 au 31 décembre 2020 et du 1er janvier au 30 juin 2022, il considérait que l'assuré avait droit à une rente entière d'invalidité sur la base d'un degré d'invalidité de 100%. Après nouvelle analyse, la capacité de travail était nulle dans l'activité de storiste depuis le 5 décembre 2018 mais, dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles, il retenait une capacité de travail entière dès le 17 octobre 2020. Une aggravation de l'état de santé était reconnue dès le mois d'octobre 2021 avec une incapacité de travail de 100% dans toute activité, de sorte que le degré d'invalidité était de 100% et après une période de trois mois d'aggravation constatée, soit dès le 1er janvier 2022, la rente devait être modifiée. Dès le mois d'avril 2022, il estimait que l'état de santé s'était amélioré avec une capacité de travail entière dans une activité adaptée, de sorte que trois mois après cette amélioration notable et sans interruption, à savoir dès le 30 juin 2022, la rente devait être supprimée. Au surplus, des mesures professionnelles n'étaient toujours pas indiquées dans la situation de l'assuré.

E. a. Par acte du 23 août 2022, l'assuré a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la CJCAS) d'un recours contre cette décision, concluant principalement, sous suite de dépens, à son annulation, à la réévaluation de son cas et à l'octroi d'une rente entière, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'intimé pour nouvelle décision dans le sens des considérants. À titre préalable, il a requis la comparution personnelle des parties et se réservait de requérir une expertise judiciaire et l'audition de témoins. En outre, il sollicitait un délai pour compléter son recours.

b. Invité à se déterminer, l'intimé a, par mémoire-réponse du 28 septembre 2022, indiqué modifier sa position, dans le sens où, après réexamen des pièces au dossier, il estimait que le recourant se trouvait en incapacité de travail totale durant toute la période du 5 décembre 2018 au 30 avril 2022, de sorte qu’il doit se voir octroyer une rente du 5 décembre 2019 au 30 juin 2022. Pour le surplus, il concluait au maintien de sa décision.

c. Le 14 mars 2023, le recourant a complété son écriture du 23 août 2022, concluant, préalablement, à la mise en œuvre d'une expertise bidisciplinaire psychiatrique et orthopédique, à l'interrogatoire des parties et à l'audition des Drs C______ et B______.

Il contestait les conclusions de l'expertise psychiatrique du Dr D______, estimant que l'expert ne donnait aucun motif pour retenir une capacité de travail de 100% trois mois après l'expertise.

À l'appui de sa position, il a produit les documents suivants :

-          Un courriel du 14 février 2023 du Dr C______, motivant sa précédente appréciation. Le recourant présentait une disruption psychique, liée à l'échec de sa vie professionnelle (succession d'échecs professionnels traumatiques corrélés à ses tentatives de reprise de travail) et contribuant à une situation affective et familiale catastrophique. Il présentait un tableau psychotique en raison de sa séparation et de l'absence de vie sexuelle, ce qui n'avait pas été diagnostiqué lors de l'expertise, avec crise dissociative du type psychotique et paranoïa, dépersonnalisation et déréalisation dans un contexte de crise majeure à travers des évènements vécus présentant un certain degré de violence et un risque de tragédie personnelle et familiale, risque qui existait encore. Il présentait également une inadaptation au travail. Par ailleurs, la médication actuelle n'était pas conforme avec une performance au travail, de sorte qu'il serait licencié. Les handicaps physique et psychique avaient toujours été considérés comme transitoires et guéris mais l'historique (échec traumatique, chirurgies et psychothérapies) attestait du contraire. Selon l'expertise, le recourant présentait un profil limité à rester dans un état de carence psycho-sociale, désocialisé, sans pouvoir soutenir un travail en continu, avec un risque de décompensation psychique et un risque vital engagé. Cette expertise n'avait pas été réalisée dans un cadre multidisciplinaire ou bidisciplinaire, ne prenant ainsi pas en compte ses difficultés physiques. Par ailleurs, au vu de son état clinique, le recourant était actuellement en train d'être hospitalisé.

-          Un certificat du 4 octobre 2022 du Dr B______, selon lequel le recourant présentait une capacité de travail de 20%, à condition de porter des charges légères, et de 100% s'il ne portait pas de charges.

d. Par écriture du 13 avril 2023, l'intimé a maintenu ses conclusions, se fondant sur un avis du 6 avril 2023 du SMR, produit en annexe. Selon cet avis, les derniers éléments médicaux produits par le recourant ne permettaient pas de revoir sa position. Par ailleurs, si le recourant était effectivement en train de se faire hospitaliser, une aggravation n'était pas exclue mais elle était postérieure à la décision litigieuse.

e. Le 8 août 2023, le conseil du recourant a informé la chambre de céans du fait que son client avait fait une tentative de suicide et se trouvait actuellement dans un état psychologique très dégradé, de sorte qu'il n'avait pas pu le consulter. Il était désormais suivi par le docteur E______, au centre ambulatoire de psychiatrie et de psychothérapie intégré (CAPPI) de la Servette.

f. Par écriture du 18 août 2023, le recourant, sous la plume de son avocat, a persisté dans ses conclusions. L'expert psychiatre s'était totalement mépris dans les chances de succès d'une rémission complète de son état de santé dans un délai de trois mois. En outre, sur le plan somatique, contrairement à ce qu'estimait l'intimé, il ne pouvait toujours pas travailler dans une activité adaptée. Il avait commencé un stage en 2021 et avait finalement dû y mettre un terme en raison de vives douleurs, ce qui démontrait que même dans une activité où son membre supérieur droit n'était pas sollicité, il ressentait d'importantes douleurs et ne parvenait pas à maintenir l'activité sur le long terme. Au vu de ces éléments, l'intimé aurait dû diligenter une expertise orthopédique, ce qu'il n'avait pas fait, de sorte qu'il réitérait sa demande d'expertise bi-disciplinaire psychiatrique et orthopédique. Par ailleurs, si par impossible il devait être retenu que le recourant avait recouvré sa capacité de travail dans une activité adaptée, il devrait alors pouvoir bénéficier de mesures de réinsertion. Il contestait le calcul du degré d'invalidité opéré par l'intimé, en particulier le revenu d'invalide qui était retenu. Il n'avait aucune formation, était né en Macédoine en 1966 et était venu en Suisse en 1988, ne maîtrisait pas les outils informatiques et ne parlait que le français, de sorte que s'il devait retrouver un emploi, celui-ci serait non qualifié, sans aucune responsabilité et ne lui permettrait de percevoir au maximum que le salaire minimum retenu à Genève, soit CHF 49'920.- brut par année. En tenant compte de ce revenu et après comparaison avec le revenu de valide, la perte de gain équivaudrait à 24,6%, à arrondir à 25%, de sorte qu'il aurait droit à des mesures de reclassement professionnel, sous la forme d'une formation informatique et bureautique.

À l'appui de ses griefs, il produisait encore les documents suivants :

-          Un rapport du 28 avril 2023 du Dr B______, selon lequel, malgré la physiothérapie, l'amélioration clinique n'avait été que très discrète et temporaire et en octobre 2022, il présentait encore une gêne importante au coude droit, ne lui permettant pas de faire de gestes répétitifs ou de force, même d'un kilo, avec une douleur importante à la pression des épicondyliens. La situation était actuellement identique et il n'avait pas été possible de reprendre le travail. Il présentait donc encore une aggravation par rapport à mai 2021 avec une épicondylite chronique. En outre, à la suite d'une chute, il présentait une entorse trapézo-métacarpienne gauche en mars 2023, avec déchirure ligamentaire en traitement orthopédique par une attelle de la colonne du pouce dont le résultat ne pouvait pas encore être évalué.

-          Un rapport du 23 mars 2023 d'IRM du pouce gauche, établi par la docteure F______, radiologue.

-          Une attestation du 17 août 2023 du Dr E______, dont il ressortait que le recourant était suivi au CAPPI, dans un encadrement de crise pluridisciplinaire (rendez-vous médicaux, infirmiers et groupaux pluriquotidiens, ainsi qu'un traitement antidépresseur et neuroleptique d'augmentation à dose efficace), pour un épisode dépressif sévère. L'épisode dépressif évoluait depuis mai 2023 et avait nécessité une hospitalisation du 15 au 30 mai 2023. Une aggravation importante était notée depuis juin 2023 suite à de graves conflits de couple. Après deux mois de traitement, le recourant demeurait extrêmement fragile avec un risque auto-agressif non négligeable et des troubles mnésiques et attentionnels sévères, rendant toute activité professionnelle impossible.

g. Le 14 septembre 2023, le recourant a produit un rapport du 13 septembre 2023 du Dr C______. Selon ce rapport, le recourant, qui présentait une importante symptomatologie psychique, avait été mis sous contrôle judiciaire, avec mesure d'éloignement du domicile familial et obligation de soins, dans le cadre de violences domestiques et de risque suicidaire.

h. Par observation du 7 novembre 2023, l'intimé a maintenu sa position. Il avait soumis les derniers éléments médicaux au SMR, lequel a émis un avis le 3 novembre 2023. Selon cet avis, le SMR retenait sur la base des derniers documents médicaux produits par le recourant, une aggravation de son état de santé tant sur le plan somatique de psychiatrique mais que ces aggravations étaient postérieures à la décision de l'intimé du 24 juin 2022, de sorte que son dernier avis demeurait valable.

i. La chambre de céans a transmis cette écriture à l’assuré.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément. 

1.3 Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b LPA), le recours est recevable.

1.4 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

1.4.1 En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).

Si un droit à la rente a pris naissance jusqu’au 31 décembre 2021, un éventuel passage au nouveau système de rentes linéaire s'effectue, selon l'âge du bénéficiaire de rente, conformément aux let. b et c des dispositions transitoires de la LAI relatives à la modification du 19 juin 2020. Selon la let. c, pour les bénéficiaires de rente dont le droit à la rente a pris naissance avant l'entrée en vigueur de cette modification et qui, à l'entrée en vigueur de la modification, avaient au moins 55 ans, l’ancien droit reste applicable (arrêt du Tribunal fédéral 8C_561/2022 du 4 août 2023 consid. 3.1 et la référence).

1.4.2 En l’occurrence, la décision querellée a certes été rendue postérieurement au 1er janvier 2022. Toutefois, le litige porte sur la suppression de la rente d’invalidité, dont il n’est pas contesté que le droit est né avant cette date, de sorte que les dispositions en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021 sont applicables. En outre, dans la mesure où le recourant avait, au 1er janvier 2022, 55 ans déjà, l’ancien droit restera applicable jusqu’à l’extinction ou la suppression de son droit à la rente.

2.             L'objet de la présente procédure – circonscrit par la décision litigieuse – est le droit du recourant à une rente d'invalidité entière, subsidiairement à des mesures professionnelles. Est en particulier litigieuse la question de la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée.

À titre liminaire, il sied de relever que, dans sa réponse, l'intimé a conclu à l’admission partielle du recours et à l’octroi d’une rente entière d’invalidité durant toute la période du 5 décembre 2019 au 30 juin 2022. Cette position est fondée sur le rapport médical du 7 juin 2021 du Dr B______, faisant état d'une nouvelle aggravation de l'état de santé du recourant ayant nécessité une troisième intervention chirurgicale au coude droit le 2 juin 2021. Dans la mesure où les deux parties convergent sur ce point, il convient de l'admettre.

Aussi, demeure principalement litigieuse la question du droit à la rente au-delà du 30 juin 2022, en particulier, de savoir si c’est à juste titre que l’intimé a retenu que le recourant était pleinement capable de travailler dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles à partir du mois d'avril 2022.

3.              

3.1 L'art. 17 al. 1 LPGA dispose que si le taux d'invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d'office ou sur demande, révisée pour l'avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée.

Selon la jurisprudence, l'art. 17 LPGA sur la révision d'une rente en cours s'applique également à la décision par laquelle une rente échelonnée dans le temps est accordée avec effet rétroactif, la date de la modification étant déterminée conformément à l'art. 88a du règlement sur l'assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201 ; ATF 131 V 164 consid. 2.2 p. 165 ; 125 V 413 consid. 2d ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_134/2015 consid. 4.1 et les références). Aux termes de l'art. 88a RAI, si la capacité de gain d'un assuré s'améliore, il y a lieu de considérer que ce changement supprime, le cas échéant, tout ou partie de son droit aux prestations dès que l'on peut s'attendre à ce que l'amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période ; il en va de même lorsqu'un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu'une complication prochaine soit à craindre (al. 1). Si la capacité de gain de l'assuré ou sa capacité d'accomplir les travaux habituels se dégrade, ou si son impotence ou encore le besoin de soins ou le besoin d'aide découlant de son invalidité s'aggrave, ce changement est déterminant pour l'accroissement du droit aux prestations dès qu'il a duré trois mois sans interruption notable ; l'art. 29bis RAI est applicable par analogie (al. 2). Selon l'art. 29bis RAI, si la rente a été supprimée du fait de l'abaissement du degré d'invalidité et que l'assuré, dans les trois ans qui suivent, présente à nouveau un degré d'invalidité ouvrant le droit à une rente en raison d'une incapacité de travail de même origine, on déduira de la période d'attente que lui imposerait l'art. 28 al. 1, let. b LAI, celle qui a précédé le premier octroi.

3.2 Tout changement important des circonstances, propre à influencer le degré d'invalidité et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'art.  7 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 134 V 131 consid. 3 ; 130 V 343 consid. 3.5). Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à une accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_622/2015 consid. 4.1). Il n'y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; 112 V 371 consid. 2b ; 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 559/02 du 31 janvier 2003 consid. 3.2 et les références). La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 406/05 du 13 juillet 2006 consid. 4.1). Un changement de jurisprudence n'est pas un motif de révision (ATF 129 V 200 consid. 1.2).

Si les conditions de la révision sont données, les prestations sont, conformément à l'art. 17 al. 1 LPGA, modifiées pour l'avenir dans le sens exigé par le nouveau degré d'invalidité. Chaque loi spéciale peut fixer le point de départ de la modification ou encore exclure une révision en s'écartant de la LPGA (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 806/04 du 15 mars 2005 consid. 2.2.).

Dans le domaine de l'AI, le point de départ d'une modification du droit aux prestations est fixé avec précision. En cas de modification de la capacité de gain, la rente doit être supprimée ou réduite avec effet immédiat si la modification paraît durable et par conséquent stable (phr. 1 de l'art. 88a al. 1 RAI) ; on attendra en revanche trois mois au cas où le caractère évolutif de l'atteinte à la santé, notamment la possibilité d'une aggravation, ne permettrait pas un jugement immédiat (phr. 2 de la disposition ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 666/81 du 30 mars 1983 consid. 3, in RCC 1984 p. 137 s.). En règle générale, pour examiner s'il y a lieu de réduire ou de supprimer la rente immédiatement ou après trois mois, il faut examiner pour le futur si l'amélioration de la capacité de gain peut être considérée comme durable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_32/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1). L'OAI doit réduire ou supprimer la rente avec effet à la fin du mois au cours duquel le délai de trois mois a expiré (voir arrêt du Tribunal fédéral 9C_900/2013 du 8 avril 2014 consid. 6.5 dans le même sens).

3.3 Le fardeau de la preuve quant à cette amélioration de la capacité de travail incombe à l'office AI (arrêt du Tribunal fédéral 8C_510/2020 du 15 avril 2021 consid. 2.2, et les références). 

4.              

4.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain. De plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2).

4.2 En vertu de l'art. 28 al. 2 LAI, l'assuré a droit à une rente entière s'il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L'atteinte à la santé n'est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

5.              

5.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. Le fait qu’une personne souffre d’un trouble à la santé de nature psychique ne signifie cependant pas qu’elle soit totalement incapable de travailler dans tous les domaines ; son incapacité de gain doit donc être examinée concrètement, comme pour les autres troubles à la santé (ATF 143 V 409 consid. 4.2.1 ; ATF 142 V 106 consid. 4.3).

5.2 La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un psychiatre et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel la CIM ou le DSM-IV (ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1; ATF 130 V 396 consid. 6.3).

Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (procédure d’évaluation structurée normative de la capacité de travail) (ATF 141 V 281 consid. 7.1 et 7.2). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques (ATF 143 V 418 consid. 4.3 et 4.4 ; voir également : ATF 145 V 215 consid. 5.3.3). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 141 V 281 consid. 4.3 et 4.4, avec la modification prévue à l’ATF 143 V 418 consid. 8.1).

5.3 Si un expert retient l’existence d’un ou plusieurs troubles médicaux de nature psychiatrique, il doit ainsi procéder à une évaluation de la capacité de travail du recourant en application de la procédure structurée normative.

En principe, seul un trouble psychique grave est susceptible d’entrainer une incapacité de gain ; le cas échéant, il reviendra donc à l’expert de motiver de manière détaillée en quoi il existe des éléments qui permettent de conclure à une incapacité de travail de l’assuré en présence d’un trouble psychique de gravité moyenne ou légère (ATF 148 V49 consid. 6.2.2 ; ATF 143 V 40 consid. 4.5.2).

Les indicateurs de la procédure structurée normative sont classés comme suit :

I. Catégorie « degré de gravité fonctionnelle »

Les indicateurs relevant de cette catégorie représentent l’instrument de base de l’analyse. Les déductions qui en sont tirées devront, dans un second temps, résister à un examen de la cohérence.

A. Axe « atteinte à la santé »

1. Caractère prononcé des éléments et des symptômes pertinents pour le diagnostic

Les constatations relatives aux manifestations concrètes de l’atteinte à la santé diagnostiquée permettent de distinguer les limitations fonctionnelles causées par cette atteinte de celles dues à des facteurs non assurés. Le point de départ est le degré de gravité minimal inhérent au diagnostic. Il doit être rendu vraisemblable compte tenu de l’étiologie et de la pathogenèse de la pathologie déterminante pour ce diagnostic (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.1).

2. Succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à ces derniers

Le déroulement et l'issue d'un traitement médical sont en règle générale aussi d'importants indicateurs concernant le degré de gravité du trouble psychique évalué. Il en va de même du déroulement et de l'issue d'une mesure de réadaptation professionnelle. Ainsi, l'échec définitif d'une thérapie médicalement indiquée et réalisée selon les règles de l'art de même que l'échec d'une mesure de réadaptation - malgré une coopération optimale de l'assuré - sont en principe considérés comme des indices sérieux d'une atteinte invalidante à la santé. À l'inverse, le défaut de coopération optimale conduit plutôt à nier le caractère invalidant du trouble en question (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.2 : arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2.1.3). Dans ce cadre, une coopération de l'assuré en vue de son intégration sur le marché du travail malgré son trouble est un indicateur important du caractère invalidant ou non dudit trouble: un échec de son intégration malgré sa coopération optimale est un indice important du caractère invalidant de l'atteinte à la santé de l'assuré, alors qu'une absence de coopération est un indice fort d'absence d'incapacité de gain (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.2).

3. Comorbidités

Il est nécessaire de procéder à une approche globale de l’influence du trouble avec l’ensemble des pathologies concomitantes. Toute atteinte psychique à la santé différente de celle faisant l’objet de la procédure d’évaluation structurée de la capacité de travail et ayant un impact sur les ressources/capacités de l’assuré doit être prise en compte, y compris lorsqu’elle n’est pas invalidante en tant que telle (ATF 143 V 418 consid. 4.3.1.3 [réformant sur ce point l’ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.3] ; voir également : arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 consid. 5.2.3).

B. Axe « personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles)

Le « complexe personnalité » englobe, à côté des formes classiques du diagnostic de la personnalité qui vise à saisir la structure et les troubles de la personnalité, le concept de ce qu’on appelle les « fonctions complexes du moi » qui désignent des capacités inhérentes à la personnalité, permettant des déductions sur la gravité de l’atteinte à la santé et de la capacité de travail (par exemple : auto-perception et perception d’autrui, contrôle de la réalité et formation du jugement, contrôle des affects et des impulsions, intentionnalité et motivation) (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2). Étant donné que l’évaluation de la personnalité est davantage dépendante de la perception du médecin examinateur que l’analyse d’autres indicateurs, les exigences de motivation sont plus élevées (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2).

C. Axe « contexte social »

Si des difficultés sociales ont directement des conséquences fonctionnelles négatives, elles continuent à ne pas être prises en considération. En revanche, le contexte de vie de l’assuré peut lui procurer des ressources mobilisables, par exemple par le biais de son réseau social ; il faut cependant toujours veiller ne pas indemniser par ce biais une situation sans lien avec l'impact de l'atteinte à la santé (ATF 141 V 281 consid. 4.3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_717/2019 du 30 septembre 2020 consid. 6.2.5.3). À l’inverse, des ressources préservées ne sauraient être inférées de relations maintenues avec certains membres de la famille dont la personne assurée est dépendante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2020 du 22 octobre 2020 consid. 5.2).

II. Catégorie « cohérence »

Il convient ensuite d’examiner si les conséquences qui sont tirées de l’analyse des indicateurs de la catégorie « degré de gravité fonctionnel » résistent à l’examen sous l’angle de la catégorie « cohérence ». Cette seconde catégorie comprend les indicateurs liés au comportement de l’assuré. Dans ce contexte, un comportement incohérent est un indice que les limitations évoquées seraient dues à d’autres raisons qu’une atteinte à la santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 consid. 5.2.4).

A. Limitation uniforme du niveau des activités dans tous les domaines comparables de la vie

Il s’agit ici de se demander si l’atteinte à la santé limite l’assuré de manière semblable dans son activité professionnelle ou dans l’exécution de ses travaux habituels et dans les autres activités (par exemple, les loisirs). Le critère du retrait social utilisé jusqu’ici doit désormais être interprété de telle sorte qu’il se réfère non seulement aux limitations mais également aux ressources de l’assuré et à sa capacité à les mobiliser. Dans la mesure du possible, il convient de comparer le niveau d’activité sociale de l’assuré avant et après la survenance de l’atteinte à la santé (ATF 141 V 281 consid. 4.4.1).

B. Poids de la souffrance révélé par l’anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation

La mesure dans laquelle les traitements sont mis à profit ou alors négligés par l’assuré, permet d’évaluer le poids effectif des souffrances (ATF 141 V 281 consid. 4.4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_569/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5.5.2). Tel n’est toutefois pas le cas lorsque le comportement est influencé par la procédure assécurologique en cours, en ce sens qu’il ne faut pas conclure à l’absence de lourdes souffrances lorsque le refus ou la mauvaise acceptation du traitement recommandé est la conséquence d’une incapacité (inévitable) de l’assuré à reconnaître sa maladie (anosognosie) (ATF 141 V 281 consid. 4.4.2). Les mêmes principes s’appliquent pour les mesures de réadaptation ; un comportement incohérent de l'assuré est là aussi un indice que la limitation fonctionnelle est due à d’autres raisons qu’à l'atteinte à la santé assurée (ATF 141 V 281 consid. 4.4.2).

6.              

6.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références; ATF 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références). 

6.2 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 135 V 39 consid. 6.1; ATF 126 V 353 consid. 5b et les références; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue. Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent normalement faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 121 V 366 consid. 1b et les références). Les faits survenus postérieurement doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont étroitement liés à l'objet du litige et de nature à influencer l'appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue (ATF 99 V 102 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral des assurances 8C_441/2007 du 6 mai 2008 consid. 4.2 et I 321/04 du 18 juillet 2005 consid. 5). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

7.             En l'espèce, l'intimé reconnaît une incapacité de travail totale dans toute activité depuis le 5 décembre 2018 (début du délai d'attente), mais considère qu’à compter du mois d'avril 2022, le recourant a recouvré une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée. Il se réfère à l'avis du 19 avril 2022 du SMR, lequel se rapporte à l’appréciation du 30 septembre 2021 du Dr B______ sur le plan orthopédique et à l'expertise du 7 avril 2022 du Dr D______ sur le plan psychiatrique.

Le recourant conteste cette position. Il soutient qu'il est encore totalement incapable de reprendre une quelconque activité professionnelle. Se référant à l'avis de son psychiatre traitant, il remet en cause l'expertise psychiatrique, estimant que les conclusions de l'expert, pour retenir une capacité de travail entière trois mois après l'expertise, ne sont justifiées par aucun motif. Sur le plan somatique, il fait valoir qu'il n'était pas non plus apte à reprendre une activité adaptée en raison des vives douleurs au membre supérieur droit.

7.1 Il convient donc d’examiner d'abord la valeur probante du rapport d'expertise psychiatrique du 7 avril 2022.

Sur le plan formel, la chambre de céans observe que ce rapport répond aux réquisits jurisprudentiels en matière de valeur probante. Il comprend en effet un résumé du dossier, une anamnèse détaillée, les indications subjectives du recourant, les observations cliniques lors de l'entretien du 30 mars 2022 et une description du traitement suivi.

Sur le fond, l'expert a retenu le diagnostic incapacitant d'épisode dépressif moyen, avec syndrome somatique (F 32.11 CIM-10) et estimé que, sur le plan psychiatrique, la capacité de travail du recourant était nulle dans toute activité depuis septembre 2021 et qu'avec des mesures adéquates, elle pourrait être à nouveau de 100% trois mois après la date de l'expertise. Selon l'expert, cet épisode dépressif était peut-être de degré sévère en septembre 2021 mais était actuellement passé à un degré moyen et n'était pas encore complètement achevé.

L'expert a expliqué que cet épisode dépressif avait été provoqué par le fait que le recourant, après s'être inscrit au chômage, avait démarré une nouvelle activité professionnelle dans une entreprise de voiture en 2021 et qu'à seulement un mois du début de l'activité, il avait dû l'arrêter en raison d'une aggravation de ses atteintes au coude et être à nouveau opéré. Il a relevé que cet épisode semblait avoir une bonne évolution grâce à l'adhésion au suivi psychiatrique et à plusieurs changements au niveau du traitement antidépresseur, raison pour laquelle il estimait qu'il serait complétement résolu d'ici à trois mois, surtout si un processus de réentrainement progressif à l'endurance était initié sans délai. L'expert a motivé son diagnostic et exposé pourquoi il excluait, au jour de son expertise, le diagnostic d'anxiété généralisée retenu par le Dr C______.

Il a reconnu la présence de limitations fonctionnelles du type, idées suicidaires passives, irritabilité, besoin de se reposer après n'importe quelle activité, difficulté à planifier ses journées et manque d'envie à faire les choses, mais également manque de résilience, hypersensibilité au stress et manque de confiance en soi.

Il ressort en outre du rapport que l'expert a effectué une analyse des indicateurs jurisprudentiels pertinents.

S'agissant du traitement, il a relevé que l'épisode dépressif actuel semblait avoir une bonne évolution grâce à l'adhésion au suivi psychiatrique et à plusieurs changements au niveau du traitement antidépresseur, raison pour laquelle il estimait que l'épisode serait résolu d'ici à trois mois, surtout si un processus de réentrainement progressif à l'endurance était initié. Il a précisé, à propos des mesures adéquates, qu'il s'agissait d'une adaptation du traitement par une médication adaptée et une prise en charge par l'intimé d'une réadaptation professionnelle en fonction des limitations physiques.

S'agissant des ressources, l'expert a retenu que le recourant pouvait se déplacer en voiture, s'occuper de son chien et de son jardin, qu'il restait soigné de sa personne, que son réseau social demeurait suffisant, qu'il disait garder une activité dans son foyer et qu'il collaborait à l'investigation, qu'il pouvait donner une histoire personnelle cohérente respectant la chronologie et savait défendre son dossier et moduler ses stratégies.

Concernant le contexte social, l'expert a indiqué que le recourant, à qui aucune mesure de réorientation professionnelle n'avait été proposée, se sentait perdu, sans savoir si suite à ses blessures somatiques, il avait des compétences pour travailler dans une activité non physique. En outre, il a relevé que le fait que le recourant soit sans emploi lui était fortement reproché par son épouse, laquelle refusait désormais un quelconque partage intime. Selon l'expert, toute cette situation créait une décompensation sur le mode anxieux-dépressif et le recourant se trouvait notamment en proie à une importante irritabilité, ce qui provoquait le rejet de la part de ses enfants et avait pour conséquence une perte de sa place en tant qu'homme, citoyen, père et mari. L'expert a estimé que le recourant avait ainsi perdu le contrôle de son corps et de sa famille et n'avait plus de moyen de réagir, car ses ancrages s'étaient effondrés et il ne savait pas comment sortir de sa situation. Selon lui, à ce jour, seuls les anxiolytiques et les somnifères lui permettaient d'amoindrir le stress et le recourant avait besoin de retrouver un sens à sa vie et d'avoir des objectifs dans la perspective de se réinsérer professionnellement.

Sous l'angle de la cohérence, l'expert a estimé que le recourant présentait un discours crédible.

Concernant enfin les comorbidités, sur le plan psychiatrique, il a exclu la présence d'un autre trouble, exposant les raisons pour lesquelles, contrairement au psychiatre traitant, il n'avait pas retenu de trouble de l'adaptation, ni de trouble anxieux généralisé.

Au vu de ce qui précède, l'expertise psychiatrique a été établie conformément à la jurisprudence applicable et il convient d'en reconnaitre la valeur probante, en tant qu'elle conclut, de manière cohérente et motivée, qu'au jour de l'expertise, la capacité de travail du recourant était nulle dans toute activité.

En revanche, il sied d'émettre une réserve quant au pronostic de l'expert, selon lequel après un réentrainement et une adaptation de son traitement, le recourant pourrait recouvrir une capacité de travail entière dans une activité adaptée trois mois après son examen, soit à partir de juillet 2022. En effet, ce faisant, l'expert a procédé à une évaluation prospective de l'évolution de la capacité de travail, qu'il a, au demeurant, conditionné à la mise en œuvre de mesures adéquates. En outre, il a retenu ce pronostic en partant d'une incapacité de travail totale encore constatée lors de son examen.

Or, il ressort du courriel du 14 février 2023 du Dr C______, lequel avait continué à suivre le recourant, que ce dernier continuait de présenter une symptomatologie importante et totalement incapacitante, sans évolution favorable, voire une aggravation. Certes, ce courriel est postérieur à la décision litigieuse du 24 juin 2022. Cela étant, il fait état notamment de la situation antérieure à cette date, de sorte que l'on ne saurait l'écarter. Ainsi, les indications du psychiatre traitant font clairement douter de la réalisation du pronostic de l'expert.

Dans ce contexte, l'appréciation de la capacité de travail future du recourant par l'expert ne permet pas de prouver, au degré de la vraisemblance prépondérante, qu'une telle amélioration soit réellement intervenue, ni d'ailleurs que les mesures adéquates aient été entreprises, et l'intimé ne pouvait reprendre telle quelle cette appréciation, sans en vérifier la réalisation (en ce qui concerne le pronostic, voir également, en matière d'assurances complémentaires, les arrêts du Tribunal fédéral 4A_544/2017 du 30 avril 2018 consid. 5.2 et 4A_66/2017 du 14 juillet 2017 consid. 5.1). À cet égard, il sied de rappeler que s'agissant de l'amélioration de la capacité de travail, le fardeau de la preuve incombe à l'office AI (cf. supra consid. 3). L'intimé aurait dès lors dû instruire davantage la question d’une éventuelle amélioration de l’état de santé du recourant après le processus de réentrainement progressif à l’endurance et l’adaptation de la thérapie pharmacologique préconisés par l’expert et, cas échéant, d’une réévaluation de la capacité de travail du recourant. À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’art. 21 al. 4 LPGA, les prestations peuvent être réduites ou refusées temporairement ou définitivement si l'assuré se soustrait ou s'oppose, ou encore ne participe pas spontanément, dans les limites de ce qui peut être exigé de lui, à un traitement ou à une mesure de réinsertion professionnelle raisonnablement exigible et susceptible d'améliorer notablement sa capacité de travail ou d'offrir une nouvelle possibilité de gain. Une mise en demeure écrite l'avertissant des conséquences juridiques et lui impartissant un délai de réflexion convenable doit lui avoir été adressée. Les traitements et les mesures de réadaptation qui présentent un danger pour la vie ou pour la santé ne peuvent être exigés.

La décision entreprise était donc prématurée sur ce point.

7.2 Par ailleurs, force est de constater que l'intimé n'a pas repris correctement les conclusions de l'expert. En effet, si le SMR, en se rapportant à l'expertise, a retenu dans son avis du 19 avril 2022 que le recourant pourrait bénéficier d'un entrainement à l'endurance dès avril 2022 et qu'après une période de trois mois, une reprise à 100% serait possible dans une activité adaptée (sans port de charges lourdes ni de geste répétitif au niveau des coudes et tenant compte de sa surdité à l'oreille droite et de son irritabilité), l'intimé a retenu d'emblée une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée en avril 2022. Ainsi, quand bien même le pronostic de l'expert quant à l'évolution de la capacité de travail s'était concrétisé, il aurait fallu encore tenir compte d'un délai de trois mois supplémentaire avant de pouvoir retenir un caractère durable et stable à l'éventuelle modification de l'état de santé du recourant (cf. art. 88a al. 1 RAI), de sorte que le droit à la rente entière s'étendrait jusqu'au 30 septembre 2022. Dès lors où elle supprime le droit à la rente du recourant au 30 juin 2022, la décision litigieuse n'est pas conforme au droit.

Pour ces raisons également, il convient d'annuler la décision litigieuse.

La chambre de céans relèvera que si les dernières pièces produites par le recourant en cours de procédure font état d'éléments médicaux postérieurs à la décision litigieuse, le SMR a d'ores et déjà reconnu, sur la base de ceux-ci, une aggravation de l'état de santé du recourant, tant sur le plan somatique que psychiatrique, ce qui laisse d'ailleurs douter d'une réelle amélioration stable et notable de la capacité de gain du recourant.

8.             Dans la mesure de ce qui précède, le recours sera admis, la décision du 24 juin 2022 sera annulée et il sera dit que le recourant a droit à une rente entière depuis le 1er décembre 2019.

Il incombera à l’intimé d’examiner, au vu du rapport d’expertise, si le changement de thérapie pharmacologique et le processus de reconditionnement professionnel préconisés par l’expert sont exigibles du recourant, au sens de l’art. 21 al. 4 LPGA et, cas échéant, de procéder selon cette disposition.

Le recourant ayant gain de cause par l’intermédiaire d’un mandataire professionnel, une indemnité de CHF 2'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émolument et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA – E 5 10.03]).

Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision de l'intimé du 24 juin 2022.

4.        Dit que le recourant a droit à une rente entière d'invalidité dès le 1er décembre 2019.

5.        Alloue une indemnité de CHF 2'500.- à la charge de l'intimé.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie CARDINAUX

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le