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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/564/2023

ATAS/1014/2023 du 19.12.2023 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/564/2023 ATAS/1014/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 décembre 2023

Chambre 2

 

En la cause

A______

représentée par le CCSI - CENTRE DE CONTACT SUISSE-IMMIGRÉS, soit pour lui Mme Catherine LACK, mandataire

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l'assurée ou la recourante), née le ______ 1975, de nationalité colombienne, mère de trois enfants majeurs, a exercé en tant que femme de ménage et garde de personnes âgées auprès de divers employeurs dès son arrivée en Suisse, en 2012.

b. Le 7 décembre 2020, l'assurée a déposé une demande de détection précoce ainsi qu'une demande de mesures professionnelles et de rente auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI), mentionnant, à titre d'atteintes à la santé, des paragangliomes cervicaux, des cervicalgies et un anévrisme cérébral qui l'avaient rendue totalement incapable de travailler depuis mars 2018, avec une reprise à 25% dès novembre 2018 et une nouvelle incapacité totale de travailler dès le 23 novembre 2020.

B. a. À l'appui de sa demande, l'assurée a produit divers rapports médicaux, notamment :

-       Un avis de sortie du service de chirurgie cardio-vasculaire des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) du 19 avril 2018, relatant une hospitalisation du 29 mars 2018 au 19 avril 2018 pour une chirurgie élective d'excision de paragangliomes cervicaux bilatéraux.

-       Les certificats d'arrêts de travail délivrés en sa faveur, dont celui attestant de son incapacité totale de travail dès le 23 novembre 2020.

-       Une lettre du 30 avril 2018 de la docteure B______, spécialiste FMH en médecine interne générale et cheffe de clinique au service des urgences des HUG, relatant un ralentissement psychomoteur sur probable intolérance aux opiacés justifiant un sevrage à la morphine.

-       Un rapport médical du 12 novembre 2020 du docteur C______, spécialiste FMH en neurologie, indiquant que l'assurée avait bénéficié en 2012 d'une discectomie cervicale en C4-C5 et C5-C6 avec fixation par fusion cervicale et qu'elle avait progressivement développé des cervicalgies liées à l'effort au travail ne répondant plus à une médication antalgique. Un petit anévrisme asymptomatique avait aussi été découvert mais ne participait pas à la symptomatologie clinique de l'assurée. Cette dernière ne pouvait plus reprendre son travail de femme de ménage qui impliquait des positions incompatibles avec les séquelles cervicales.

b. Dans un rapport du 3 décembre 2020, la docteure D______, médecin praticien FMH et médecin généraliste de l'assurée, a relevé que les limitations fonctionnelles de cette dernière consistaient à éviter le port de charges et les efforts soutenus en raison de cervicalgies quotidiennes devenues invalidantes. Elle listait les diagnostics suivants avec effet sur la capacité de travail : status post opération HUG 2017/2018, status post discectomie cervicale, status post paragangliomes droits cervicaux (2018), anévrisme, cervicalgies et fibroadénome du sein gauche. Concernant la question de la capacité de travail de l'assurée dans une activité adaptée, la médecin a indiqué qu'elle remplissait les conditions pour demander une rente d'invalidité. La Dre D______ a annexé à son pli les documents suivants :

- Rapport de consultation du 4 septembre 2020 du service de neurologie des HUG indiquant que les douleurs de l'assurée présentaient des caractéristiques de fond à type de céphalées cervicogènes et des caractéristiques paroxystiques à type névralgiforme. Le diagnostic posé était le même que lors des précédentes consultations, soit une céphalée mixte cervicogène et une névralgie d'Arnold probablement bilatérale.

- Lettre du Dr C______ du 15 septembre 2020 mentionnant que l'assurée avait bénéficié de plusieurs consultations neurologiques attribuant ses céphalées à des céphalées de tension, mais qu'il existait peu d'éléments pour un état migraineux sous-jacent. L'hypothèse d'un syndrome douloureux chronique avait aussi été évoquée. L'examen clinique neurologique auquel il avait procédé était tout à fait rassurant.

- Compte-rendu des HUG de la « séance des tumeurs de la thyroïde et neuroendocrines » du 13 octobre 2020 proposant une surveillance et la réalisation d'une imagerie par résonnance magnétique (ci-après : IRM) cervicale à une année.

- Compte-rendu du colloque multidisciplinaire des pathologies mammaires bégnines du 20 octobre 2020 diagnostiquant un fibroadénome du sein gauche, l'assurée étant asymptomatique.

- Dossier de la prise en charge médicale au service des urgences des HUG le 24 octobre 2020 en raison de céphalées en coup de tonnerre avec vertiges, flou visuel bilatéral, hypoacousie droite et diplopie monoculaire de l'œil droit, d'origine indéterminée, le diagnostic différentiel de cervicalgies chroniques acutisées étant également évoqué. À titre de comorbidités, étaient par ailleurs, entre autres, mentionnés un syndrome dépressif de date inconnue, des céphalées mixtes chroniques sur névralgie occipitale et cervicogènes, un syndrome cervico-brachial gauche non-déficitaire avec compression radiculaire et un syndrome du tunnel carpien droit.

c. Dans un rapport du 11 décembre 2020, le Dr C______ a indiqué à l'OAI que le diagnostic affectant l'assurée avec répercussion sur sa capacité de travail était la persistance de cervicalgies chroniques. Le syndrome du tunnel carpien opéré en 2010 était sans répercussion sur la capacité de travail. L'assurée ne pouvait pas se pencher en avant, soulever des charges lourdes et était limitée dans les rotations de la nuque, de sorte qu'elle ne pouvait reprendre son activité professionnelle, dans laquelle sa capacité de travail était nulle. S'agissant de la capacité de travail dans une activité strictement adaptée aux limitations fonctionnelles, elle était de 50% en évitant le port de charges lourdes.

d. À nouveau interrogée par l'OAI, la Dre D______ a mentionné, dans son rapport du 22 décembre 2020, des limitations fonctionnelles dues aux céphalées et aux cervicalgies quotidiennes invalidantes. L'assurée était volontaire et motivée à réaliser un autre travail que celui de femme de ménage, impliquant moins d'effort. Elle ne se prononçait pas sur la capacité de travail de l'assurée dans une activité adaptée.

e. Dans un rapport du 29 janvier 2021, le docteur E______, médecin interne au service de neurologie des HUG, a attesté de ce que les diagnostics de céphalées d'origine mixte cervicogènes et névralgies occipitales se répercutaient sur la capacité de travail de l'assurée. Tel n'était pas le cas de l'anévrisme cervical. Les questions des limitations fonctionnelles et de la capacité de travail de l'assurée n'avaient pas été abordées en détail, de sorte qu'il ne pouvait se prononcer à ce sujet. Il a joint à son rapport le compte-rendu de la consultation du 15 décembre 2020 relatant que les nombreux traitements mis en place au cours des deux dernières années n'avaient amené qu'à une amélioration partielle des symptômes, de sorte, que l'assurée était adressée à la consultation de la douleur des HUG, vu la complexité de la problématique.

f. Par rapport du 27 avril 2021, le Dr C______ a listé les diagnostics suivants avec répercussion sur la capacité de travail de l'assurée : céphalées mixtes chroniques (céphalées de tension et une composante de douleurs cervicogènes), hernie discale cervicale opérée avec fusion et mise en place de cages intersomatiques C4-C5 et C5-C6, paragangliomes des bifurcations carotidiennes bilatérales avec suivi oncologique, anévrisme cérébral du segment ophtalmique de la carotide gauche non rompu et état dépressif. Les restrictions fonctionnelles étaient essentiellement les rotations de la tête et les efforts physiques intenses. L'assurée avait une capacité de travail nulle dans son activité habituelle. La capacité de travail pouvait être meilleure, de 50%, dans une activité adaptée extrêmement légère.

g. Une note d'entretien téléphonique entre l'assurée et l'OAI de fin avril 2021 rapporte que celle-ci ne bénéficiait pas d'un suivi psychothérapeutique.

h. Le 4 mai 2021, l'OAI a informé l'assurée que des mesures d'intervention précoce et de réadaptation n'étaient en l'état pas indiquées.

i. Dans un rapport du 9 mai 2021, la Dre D______ a indiqué que l'assurée l'avait consultée dans un contexte de crises de douleurs dues aux céphalées et cervicalgies et qu'elle avait chuté sans perte de connaissance. Elle joignait le rapport du 31 mars 2021 de la docteure F______, spécialiste FMH en neurologie qui avait réalisé une électroneuromyographie (ci-après : ENMG) à la recherche d'une éventuelle récidive du syndrome du tunnel carpien droit opéré en 2010. L'examen avait révélé un état séquellaire à la cure de tunnel carpien droit avec discret ralentissement de la vitesse de conduction sensitive et une neuropathie sensitivo-motrice du nerf médian gauche dans le canal carpien. L'atteinte était assez marquée en ce qui concernait les fibres sensitives et restait discrète à modérée en ce qui concernait les fibres motrices. Le traitement conservateur par port nocturne d'une attelle palmaire devait être poursuivi afin de voir si cette mesure diminuerait l'endormissement et les phénomènes de blocage de la main droite.

j. Le 13 janvier 2022, le service médical régional de l'assurance-invalidité (ci-après : SMR) a indiqué rejoindre l'appréciation du Dr C______ concernant l'incapacité totale de travail de l'assurée dans l'activité habituelle et une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée tenant compte de l'épargne du rachis et des efforts physiques intenses. Cette évaluation était valable sur le plan médico-théorique dès le 23 novembre 2020. Bien que les douleurs chroniques, notamment les céphalées, de manière isolée, ne soient pas incapacitantes, elles contribuaient à l'appréciation de la capacité de travail (valeur cumulative des comorbidités). S'agissant de l'anévrisme ophtalmique, il était actuellement stable et sans indication opératoire, et empêchait uniquement le port de charges et les efforts. Les paragangliomes ne connaissaient par ailleurs pas de récidive à l'heure actuelle. Les atteintes principales à la santé invalidantes étaient donc des troubles dégénératifs du rachis cervical avec discopathies multiples et protrusion discale C6-C7 médiane et un anévrisme ophtalmique. Les limitations fonctionnelles retenues étaient les suivantes : épargne du rachis cervical (éviter la rotation et la flexion/extension du cou répétée, soutenue et avec des grandes amplitudes), éviter le port de charges moyennes et lourdes.

k. Après avoir estimé que le statut de l'assurée était celui d'une personne active et qu'elle n'avait pas droit à des mesures d'ordre professionnel, celles-ci n'étant pas de nature à réduire le dommage compte tenu de sa capacité de travail, de ses limitations fonctionnelles, de son parcours professionnel et des gains qu'elle avait réalisés, l'OAI a procédé à une comparaison des revenus et abouti à une perte de gain de 55%. Tant le revenu sans invalidité que celui avec invalidité devaient être basés sur les données de l'Enquête suisse sur la structure des salaire (ESS, ligne « Total », pour une femme, niveau 1) compte tenu du fait que l'assurée avait des gains fluctuants, et au vu de l'écart entre les heures annoncées et les cotisations versées. Un abattement de 10% pour tenir compte de ses limitations fonctionnelles était par ailleurs accordé.

l. Le 31 mars 2022, l'OAI a rendu un projet de décision, susceptible d'observations dans les 30 jours, par lequel il informait l'assurée de son intention de lui accorder une demi-rente d'invalidité à partir du 1er novembre 2021, son degré d'invalidité étant de 55%.

m. Le 11 août 2022, a été versé au dossier de l'OAI un rapport du Dr C______ du 19 mai 2022 dans lequel il relatait que l'assurée avait déjà essayé de travailler dans une activité adaptée évitant toute charge lourde et tout mouvement sollicitant sa région cervicale, à raison de deux heures par jour, mais qu'elle avait malgré tout développé des douleurs cervicales dans ce travail extrêmement léger, de sorte qu'on pouvait en conclure que son état de santé s'était aggravé et qu'elle avait actuellement une incapacité totale de travail dans toutes activités. L'assurée n'était en particulier pas capable de rester assise ou debout durant quatre à cinq heures et il n'existait donc pas d'activité adaptée à ses limitations. Elle prenait en outre des médicaments anti-douleurs à base de dérivés de morphine régulièrement, quatre à cinq fois par mois (Sevredol). Le Dr C______ s'opposait donc à la décision de l'OAI et au rapport du SMR. Un second rapport médical a été versé au dossier de l'assurée le même jour, à savoir un courrier de la Dre D______ du 25 mai 2022 relatant, en sus des antécédents connus, un status post opération du ptérygion de l'œil droit en novembre 2021 dans un contexte de trouble de la vision, un status post opération du tunnel carpien gauche opéré en mars 2022 et un état anxio-dépressif. Depuis novembre 2021, l'assurée avait dû consulter à plusieurs reprises au cabinet en raison de sa douleur cervicale persistante, malgré le traitement antalgique. L'assurée était collaborante, fatiguée, un peu ralentie dans ses activités et dans ses réponses. Elle prenait du Gabapentin trois fois par jour et du Zolpidem une fois par jour et disposait d'autres médicaments en réserve, notamment de Sevredol à raison d'un à deux comprimés en réserve par jour. La Dre D______ a indiqué qu'elle ne pensait pas que l'assurée serait en mesure de travailler à 50% dans une activité adaptée comme estimé dans le rapport du SMR du 13 janvier 2022. Dès qu'elle avait commencé à suivre l'assurée, celle-ci travaillait déjà deux heures par jour en respectant le non-port de charges et le mouvement restreint de la tête, mais elle avait tout de même développé des cervicalgies. Ces derniers mois, elle avait bénéficié d'anti-douleurs injectables à chaque consultation et elle était un peu ralentie, avec une concentration diminuée et une certaine somnolence, probablement en lien avec le traitement antalgique. En conclusion, l'assurée, qui souffrait encore de cervicalgies chroniques et présentait d'autres comorbidités (deux opérations récentes), avait une incapacité totale de travail, même dans un poste adapté.

n. Une décision datée du 19 janvier 2023 reprenant les termes du projet de décision du 31 mars 2022 a été notifiée à l'assurée.

C. a. Par acte du 18 février 2023, sous la plume de son mandataire, l'assurée a interjeté recours à l'encontre de la décision précitée devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans), sollicitant une rente entière d'invalidité en fonction d'un degré d'invalidité de 100% à partir du 1er novembre 2021. Elle contestait l'évaluation de sa capacité résiduelle de travail, fondée sur l'avis du SMR du 13 janvier 2022, lequel avait analysé les rapports de ses médecins-traitants. Or, la Dre D______ n'avait jamais répondu à la question de sa capacité de travail dans une activité adaptée et n'avait pas été en mesure de l'évaluer, car il n'existait pas d'activité lucrative même légère sur le marché du travail primaire adaptée à son état de santé. Un travail, même léger, mais avec une position très statique ou avec des mouvements répétitifs des bras, créerait des tensions au niveau des cervicales et serait très difficilement réalisable, générant une recrudescence des douleurs. Même dans une activité très légère à un taux de 50%, elle devrait pouvoir bénéficier de pauses supplémentaires et son rendement s'en trouverait réduit, ce qui découragerait tout employeur à l'embaucher. À cause des cervicalgies, elle ne pouvait ni effectuer des travaux de force, ni des mouvements de rotation de la tête, ni même des mouvements répétitifs avec les bras. En outre, afin d'atténuer ses douleurs, elle prenait différents médicaments à base de morphine (anti-douleurs et antidépresseurs) qui généraient des effets secondaires importants au niveau de la concentration et de la somnolence, ce qui rendait illusoire un rendement suffisant permettant la reprise d'une activité adaptée.

b. Par mémoire de réponse du 4 avril 2023, l'intimé a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée. Il avait initialement suivi les indications fournies par les médecins traitants de la recourante pour déterminer sa capacité de travail. Les nouvelles pièces apportées ne permettaient pas de modifier son appréciation du cas. Les médecins traitants faisaient en effet une appréciation différente d'un même état de fait, fondée principalement sur des éléments anamnestiques et subjectifs. Au vu des limitations fonctionnelles de la recourante, indiquées par les médecins traitants, une capacité de travail dans une activité adaptée légère était exigible. Le marché du travail, en particulier le marché équilibré du travail, recouvrait en outre un large éventail d'activités simples et répétitives ne nécessitant aucune formation spécifique et adaptées aux limitations fonctionnelles de la recourante.

À l'appui de sa réponse, l'intimé a joint un avis du SMR du 31 mars 2023 se prononçant sur les rapports des Drs C______ et D______ des 19 mai et 25 mai 2022. Selon cet avis, le dernier rapport du neurologue traitant n'amenait pas de nouvel élément objectivable depuis ses précédents rapports ; le diagnostic était inchangé, les plaintes de l'assurée étaient subjectives et le traitement de morphine n'était utilisé qu'une fois par semaine. La capacité de travail de 50% dans une activité adaptée qu'il retenait préalablement était raisonnablement exigible, en l'absence de déficit sensitivo-moteur, comme le relevait l'ENMG du 31 mars 2021. Quant aux opérations récentes relevées par la Dre D______ (ptérygion et tunnel carpien), elles entraînaient des incapacités de travail limitées dans le temps. Le traitement médicamenteux de la recourante pouvait en effet entraîner une fatigue, le dosage de la gabapentine étant élevé, mais les traitements de dérivés morphiniques n'étaient utilisés qu'une fois par semaine environ et les autres traitements n'entraînaient pas de fatigabilité. Le traitement était par ailleurs semblable à celui décrit en 2021. La dernière activité de la recourante remontait à 2020, alors qu'elle exerçait en tant que femme de ménage et garde de personnes âgées. Une activité adaptée n'avait ainsi pas été tentée. Il n'y avait donc pas d'aggravation objective de l'état de santé de la recourante.

c. Par réplique du 11 mai 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions. Il n'était pas réaliste de considérer qu'elle pouvait effectuer une activité même adaptée à 50% sur le marché du travail ordinaire car son rendement était insuffisant. L'intimé n'avait pas procédé à une évaluation de sa capacité résiduelle de travail puisqu'il n'avait pas mis sur pied des mesures de réinsertion professionnelle ou d'orientation professionnelle. La capacité à exercer une activité légère en position statique assise ou debout pendant plusieurs heures ainsi que les conséquences de la fatigue et les difficultés de concentration dues à la prise de médicaments antalgiques (gabapentine et dérivés de morphine) n'avaient donc pas été testées.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).

Si un droit à la rente a pris naissance jusqu’au 31 décembre 2021, un éventuel passage au nouveau système de rentes linéaire s'effectue, selon l'âge du bénéficiaire de rente, conformément aux let. b et c des dispositions transitoires de la LAI relatives à la modification du 19 juin 2020. Selon la let. b al. 1, les bénéficiaires de rente dont le droit à la rente a pris naissance avant l'entrée en vigueur de cette modification et qui, à l'entrée en vigueur de la modification, ont certes 30 ans révolus, mais pas encore 55 ans, conservent la quotité de la rente tant que leur taux d'invalidité ne subit pas de modification au sens de l'art. 17 al. 1 LPGA (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C _499/2022 du 29 juin 2023 consid. 4.1).

En l’occurrence, la décision querellée a certes été rendue postérieurement au 1er janvier 2022. Toutefois, le litige porte sur la quotité de la rente d’invalidité, dont il n’est pas contesté que le droit est né antérieurement à cette date, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. En outre, dans la mesure où la recourante avait, au 1er janvier 2022, 30 ans révolus mais moins de 55 ans, la quotité de sa rente subsistera tant que son taux d’invalidité ne subit pas de modification au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA.

5.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

6.             Le litige porte sur la quotité de la rente d'invalidité en faveur de la recourante, singulièrement sur sa capacité de travail dans une activité adaptée, étant précisé que la date de survenance de l'invalidité, le mode de calcul du taux d'invalidité (comparaison des revenus) et l'octroi minimal d'une demi-rente ne sont pas contestés.

7.             Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

8.             En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

9.             En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA. Selon l’art. 29 al. 3 LAI, la rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance.

10.         Aux termes de l’art. 88a al. 2 RAI, si l’incapacité de gain ou la capacité d’accomplir les travaux habituels ou l’impotence ou le besoin de soins découlant de l’invalidité d’un assuré s’aggrave, il y a lieu de considérer que ce changement accroît, le cas échéant son droit aux prestations dès qu’il a duré trois mois sans interruption notable.

11.          

11.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

11.2 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).

11.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

12.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

13.         Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151 consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

14.          

14.1 En l'espèce, l'intimé a jugé que la recourante disposait d'une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée, en se fondant sur l'avis du SMR du 13 janvier 2022 qui se référait à l'appréciation du Dr C______ sur ce point, étant relevé que les rapports de la Dre D______ ne se prononçaient pas sur cette question.

Dans ses rapports des 11 décembre 2020 et 27 avril 2021, le neurologue traitant a en effet évalué que la recourante était apte à travailler à 50% dans une activité adaptée légère, de sorte qu'il ne peut être fait grief au SMR – et à l'intimé dans son projet de décision du 31 mars 2022 – d'avoir confirmé ce taux.

Néanmoins, la chambre de céans constate que l'intimé n'a procédé à aucune mesure d'instruction complémentaire après avoir reçu les rapports du Dr C______ du 19 mai 2022 et de la Dre D______ du 25 mai 2022, lesquels indiquaient tous deux que la recourante était désormais totalement incapable de travailler dans toute activité. Ce n'est finalement que dans le cadre de la procédure de recours, après la notification de la décision litigieuse, que le SMR s'est prononcé sur les rapports précités et a jugé, par avis du 31 mars 2023, que ceux-ci ne modifiaient pas l'appréciation du cas.

Certes, les derniers rapports des médecins traitants n'ont été versés au dossier qu'après l'échéance du délai de 30 jours pour formuler des observations à la suite du projet de décision du 31 mars 2022, au sens de l'art. 57a al. 3 LAI. Néanmoins, lorsque, à l’expiration du délai de 30 jours mais avant que la décision ne soit rendue, l’assuré apporte de nouveaux éléments pouvant influer sur la décision, ceux-ci doivent être pris en compte (circulaire sur la procédure dans l'assurance-invalidité [CPAI], état au 1er janvier 2022, ch. 6021). Une telle manière de procéder est par ailleurs conforme à la maxime inquisitoire applicable en matière d'assurances sociales, qui prescrit que l'assureur prend d'office les mesures d'instruction nécessaires et recueille les renseignements dont il a besoin (art. 43 LPGA).

14.2 Il sied donc d'examiner si l'avis du SMR du 31 mars 2023 se prononçant sur les nouveaux rapports des médecins traitants emporte la conviction. Le SMR retient qu'il n'y a pas d'aggravation objective de l'état de santé de la recourante, cette dernière n'ayant, selon le dossier, pas tenté d'activité réellement adaptée à ses limitations fonctionnelles puisqu'elle aurait travaillé en dernier lieu en tant que femme de ménage et garde de personnes âgées. La nouvelle appréciation du Dr C______ revoyant à la baisse la capacité de travail de la recourante dans une activité adaptée était de plus fondée sur les plaintes subjectives de celle-ci, sans que le diagnostic ne soit modifié et sans qu'un déficit sensitivo-moteur ne soit relevé. Les limitations fonctionnelles que ce médecin retenait dans ses précédents rapports tenaient compte des atteintes à la santé, à savoir de l'atteinte au rachis cervical et de l'anévrisme. Concernant le rapport de la Dre D______, il ne mettait pas en avant de modification de la médication ; le traitement de dérivés morphiniques n'était utilisé qu'une fois par semaine environ et les autres traitements n'entraînaient pas de fatigabilité. Quant aux opérations pour traiter le ptérygion et le tunnel carpien, elles entraînaient des incapacités de travail limitées dans le temps.

S'il est certes vrai que le neurologue traitant ne fait pas état, dans son rapport du 19 mai 2022, d'un nouveau diagnostic, il mentionne cependant que la recourante n'est pas capable de maintenir les positions assises et debout durant quatre à cinq heures (soit durant une demi-journée de travail), limitations qui ne ressortaient pas de ses anciens rapports et sur lesquelles le SMR ne se prononce pas. De plus, le Dr C______, ainsi que la Dre D______, soulignent que la recourante a déjà tenté une activité adaptée de seulement deux heures par journée, consistant à éviter le port de charges et les sollicitations de sa région cervicale, mais qu'elle a malgré tout développé des cervicalgies invalidantes, ce qui fait dire au premier que l'état de santé de la recourante s'est aggravé.

Au vu des éléments au dossier, il n'est pas possible de savoir quel était le travail effectué concrètement par la recourante durant deux heures par journée avant sa mise à l'arrêt complète et de vérifier s'il respectait les limitations fonctionnelles admises par l'intimé, de sorte à pouvoir juger de la crédibilité des rapports rédigés par ses médecins traitants à la suite du projet de décision du 31 mars 2022. Il ressort néanmoins de ces rapports, fondés sur des constatations cliniques, les plaintes et l'anamnèse de la recourante – non restituée intégralement au dossier – que les Drs C______ et D______ s'opposent clairement à la conclusion selon laquelle la recourante disposerait d'une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée, à tout le moins dès le mois de mai 2022.

Le fait que le rapport du Dr C______ ne contienne pas de nouveau diagnostic n'est pas un motif suffisant pour écarter, sans autre justification, sa nouvelle appréciation concernant la capacité de travail de la recourante dans une activité adaptée.

De plus, la remarque du SMR concernant le fait que l'ENMG de mars 2021 ne mettait pas en évidence de déficit sensitivo-moteur paraît peu compréhensible dans le contexte de l'appréciation du rapport du Dr C______ du 19 mai 2022. En effet, l'examen auquel la Dre F______ a procédé en mars 2021 ne portait pas sur les cervicales de la recourante, mais sur ses mains droite et gauche, alors que le rapport du 19 mai 2022 n'évoque que les douleurs cervicales de la recourante.

L'affirmation du SMR concernant l'absence de déficit sensitivo-moteur semble en outre, à défaut d'autres précisions, être en contradiction avec le rapport de la Dre F______ du 31 mars 2021 qui relevait, pour la main droite, un status post cure du tunnel carpien avec persistance d'un discret ralentissement de la vitesse de conduction sensitive, même si aucune atteinte myélinique n'était constatée, et, pour la main gauche, une neuropathie sensitivo-motrice du nerf médian dans le canal carpien essentiellement myélinique. La Dre D______ faisait également état, dans son rapport du 9 mai 2021, d'une neuropathie sensitivo-motrice du nerf médian gauche et a en outre rapporté, dans son rapport du 25 mai 2022, que la recourante avait été opérée du tunnel carpien gauche en mars 2022, soit une année après la réalisation de l'ENMG. Par ailleurs, il sied de constater que le SMR, dans son premier avis du 13 janvier 2022, ne s'était pas prononcé sur les atteintes aux mains, mais avait indiqué que l'IRM du rachis cervical du 5 mai 2021 montrait un début de myélopathie. Par conséquent, le SMR ne peut être suivi lorsqu'il mentionne, dans son rapport du 31 mars 2023, qu'aucun déficit sensitivo-moteur n'est relevé.

Le rapport précité du SMR est en outre peu précis lorsqu'il affirme que les opérations du ptérygion et du tunnel carpien entraînent des incapacités de travail limitées dans le temps, sans mentionner la durée de celles-ci, étant rappelé qu'aux termes de l’art. 88a al. 2 RAI, une atteinte ayant une influence sur la capacité de gain durant trois mois influence déjà le droit aux prestations. Il est par ailleurs muet sur l'état anxio-dépressif qui est mentionné par le Dre D______ dans son dernier rapport, sans que l'on sache à quelle période est rattachée cette atteinte et quelle incidence elle a sur la capacité de travail de la recourante, étant relevé que des atteintes à la santé psychique de la recourante ressortent déjà du dossier de prise en charge aux urgences des HUG d'octobre 2020 et du rapport du Dr C______ du 27 avril 2021.

Concernant les effets du traitement médicamenteux suivi par la recourante, le SMR indique lui-même que le dosage de la gabapentine est élevé (trois comprimés par jour selon la Dre D______), mais il semble affirmer qu'il n'entraîne pas de fatigabilité, ce qui ne correspond ni aux constatations cliniques de la médecin précitée qui note un ralentissement, une concentration diminuée et une somnolence de la recourante, ni aux effets indésirables de ce médicament selon le Compendium suisse, le pourcentage d'incidence de somnolence étant particulièrement élevé. Quant au traitement par dérivés morphiniques (Sevredol), si le Dr C______ a mentionné que la recourante en a une consommation raisonnable, d'environ quatre à cinq comprimés par mois, il ressort du rapport de la médecin traitante que celle-là bénéficie d'un ou deux comprimés par jour en réserve. On ignore ainsi quelle est la consommation réelle de ces comprimés par la recourante, dans un contexte où elle semble souffrir d'une intolérance aux opiacés (cf. lettre du 30 avril 2018 de la Dre B______).

Au surplus, l'incidence des céphalées sur la capacité de travail de la recourante n'est pas claire. D'après l'avis du SMR du 13 janvier 2022, il s'agit de douleurs chroniques qui contribuent à l'appréciation de la capacité de travail (valeur cumulative des comorbidités), mais cette atteinte n'est pas mentionnée dans la liste récapitulant celles jugées incapacitantes. Le SMR ne discute pas non plus des céphalées dans son rapport du 31 mars 2023 et les rapports des médecins traitants à cet égard ne permettent pas de savoir si elles entraînent en tant que telles des limitations fonctionnelles qui se surajoutent à celles induites par les cervicalgies ou si elles sont englobées par celles-ci.

14.3 En définitive, la chambre de céans n'est pas convaincue par l'appréciation des preuves menée par l'intimé et ne s'estime pas en mesure de statuer sur le cas, même sous l'angle de la vraisemblance prépondérante. Le rapport du SMR du 31 mars 2023 présente en particulier des lacunes et des incohérences qui ne permettent pas de lui accorder une pleine force probante, tandis que celui antérieur du 13 janvier 2022 a été rendu avant que tous les éléments pertinents pour statuer sur le cas ne soient versés au dossier, singulièrement avant que les rapports des médecins traitants contestant la conclusion selon laquelle la recourante disposerait d'une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée ne soient produits. Il sied en outre de rappeler que les médecins des HUG ont jugé le cas complexe et ont souhaité adresser la recourante à la consultation de la douleur, sans que l'on sache si elle s'y est rendue et quelles ont été les constatations de ce service.

La jurisprudence en matière d'appréciation des preuves étant stricte lorsqu'un cas est fondé uniquement sur les rapports du SMR et imposant la réalisation d'une expertise si des doutes existent quant à la fiabilité et la pertinence de ceux-ci (cf. consid. 11.2 supra), l'intimé n'ayant pas suffisamment instruit le cas d'espèce, il se justifie par conséquent de lui renvoyer le dossier afin qu'il en complète l'instruction et mette en œuvre toutes mesures utiles, en particulier une expertise.

Cette expertise médicale devra notamment porter sur la question de la capacité de la recourante à exercer une activité légère respectant les limitations fonctionnelles d'ores et déjà admises par le SMR (épargne du rachis cervical, i.e. éviter la rotation et la flexion/extension du cou répétée, soutenue et avec des grandes amplitudes, et éviter le port de charges moyennes et lourdes) et son évolution dans le temps, sur une éventuelle diminution de rendement dans une telle activité, sur le traitement exigible et sur les éventuels effets indésirables de la médication.

Il paraît judicieux que l'intimé interroge plus précisément les médecins traitants de la recourante quant aux dates d'apparition des diagnostics secondaires (atteintes aux mains, céphalées, état anxio-dépressif), leurs éventuels effets sur la capacité de travail de la recourante dans le temps, ainsi que sur la médication prise par la recourante (notamment la dose de dérivés morphiniques consommés), avant de décider s'il met uniquement en œuvre une expertise monodisciplinaire en neurologie ou si d'autres spécialités, telles que notamment la psychiatrie ou la médecine interne générale doivent être ajoutées.

Dans l'optique de l'éclaircissement du cas, il paraît par ailleurs recommandé de préciser quelles tâches concrètes la recourante réalisait à raison de deux heures par jour – que ses médecins ont jugé adaptées à ses limitations fonctionnelles – avant d'être mise en arrêt total de travail.

15.         Par conséquent, le recours sera partiellement admis et la décision du 19 janvier 2023, sera annulée en tant qu'elle refuse à la recourante une rente supérieure à une demi-rente d'invalidité. La cause sera renvoyée à l'intimé pour instruction complémentaire dans le sens des considérants et nouvelle décision sur ce point.

L'octroi d'une demi-rente n'étant pas contesté, il sera par ailleurs confirmé.

16.         La recourante obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 1'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision du 19 janvier 2023 en tant qu'elle refuse à la recourante une rente d'invalidité supérieure à une demi-rente.

4.        La confirme pour le surplus.

5.        Renvoie la cause à l'intimé pour instruction complémentaire dans le sens des considérants et nouvelle décision.

6.        Condamne l'intimé à verser à la recourante une indemnité en CHF 1'500.- à titre de dépens.

7.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

8.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le