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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1082/2023

ATAS/923/2023 du 29.11.2023 ( AVS ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1082/2023 ATAS/923/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 novembre 2023

Chambre 4

 

En la cause

A______

 

 

recourante

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION

 

 

intimée

 


EN FAIT

A. a. Madame A______ (ci-après : l’intéressée ou la recourante) est associée-gérante, avec signature individuelle, de L’ÉCOLE B______ SÀRL (ci-après : la société), en liquidation, laquelle a été inscrite au registre du commerce le 10 septembre 2014 et est domiciliée dans le canton de Genève. Monsieur C______ en est gérant-président. La société a été dissoute par suite de faillite prononcée par jugement du Tribunal de première instance du 13 août 2020 avec effet dès ce jour et la procédure de faillite a été suspendue faute d’actifs par jugement du Tribunal de première instance du 25 mars 2021.

b. Le 27 avril 2022, la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : la caisse ou l’intimée) a adressé à l’intéressée, par courrier recommandé avec accusé de réception, une demande en réparation du dommage, en raison du fait que la suspension de la liquidation, publiée le 25 mars 2021, la laissait à découvert de CHF 48'069.90. De ce fait, la caisse subissait un dommage dont elle lui demandait réparation, en application de l’art. 52 LAVS, en la priant de lui verser dans les 30 jours CHF 46'400.55, représentant les cotisations paritaires, y compris les frais et les intérêts moratoires. Il s’agissait des sommes dues et exigibles lorsqu’elle avait pris ses fonctions et échues au cours de son mandat, dont elle était solidairement responsable avec le gérant-président.

c. Le 13 février 2023, l’intéressée, faisant suite au courrier adressé à elle par la caisse le 16 janvier 2023 à la rue D______, à Douvaine, a informé la caisse qu’elle n’habitait plus à cette adresse. Elle lui demandait d’adresser ses prochains courriers à la route E______, à Serrière en Chautagne, et que la somme qui lui était réclamée soit partagée en deux avec le gérant-président, la moitié de la responsabilité de la faillite de la société revenant à ce dernier. Elle était d’accord de payer sa part à hauteur de CHF 23'200.25.

d. Dans une décision sur opposition du 28 février 2023, la caisse a indiqué qu’en date du 13 février 2023, l’intéressée lui avait adressé un courrier en réagissant à la sommation qui lui avait été adressée le 16 janvier 2023 et que l’opposition était ainsi manifestement tardive au regard de l’art. 52 al. 1 LPGA. L’intéressée n’avait par ailleurs avancé aucun argument valable permettant de déclarer son opposition recevable par restitution de délai, ce qui était possible en raison d’un état de nécessité, d’une maladie grave la mettant dans l’impossibilité de se déterminer au regard de la décision précitée. L’opposition était par conséquent irrecevable.

À titre purement informatif, la caisse précisait que l’intéressée avait été inscrite au registre du commerce comme gérante de la société du 15 septembre 2014 jusqu’à sa faillite et qu’elle était, indiscutablement, un organe de la société faillie, de sorte que sa responsabilité pouvait être engagée au sens de l’art. 52 LAVS.

Son comportement passif relevait d’une violation des obligations de diligence et de surveillance imposées par le rôle d’administrateur et tombait sous le coup de l’art. 52 LAVS.

B. a. Le 27 mars 2023, l’intéressée a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, concluant à ce que la moitié du dommage soit mis à la charge du gérant-président et que sa responsabilité soit limitée à l’autre moitié.

b. L’intimée a conclu au rejet du son recours, précisant que le gérant-président avait aussi fait l’objet d’une décision en réparation du dommage pour le même montant que celui réclamé à la recourante et que les procédures d’encaissement étaient actuellement en cours.

c. Le 4 septembre 2023, la recourante a informé la chambre de céans qu’elle avait fait recours, car elle estimait injuste que le président de la société ne paye rien alors qu’il était coresponsable du dommage.

d. Le 19 octobre 2023, l’intimée a informé la chambre de céans ne pas avoir la preuve de la date de notification à la recourante de la décision en réparation du dommage et ne pas s’opposer à ce que la chambre entre en matière sur le fond du litige.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence ratione materiae pour juger du cas d’espèce est ainsi établie

Selon l’art. 52 al. 5 LAVS, en dérogation à l’art. 58 al. 1 LPGA, le tribunal des assurances du canton dans lequel l’employeur est domicilié est compétent pour traiter le recours. Cette disposition est également applicable lorsque la caisse recherche un organe de l’employeur en réparation du dommage, et ce quel que soit le domicile dudit organe (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 184/06 du 25 avril 2007 consid. 2.3).

La société étant domiciliée dans le canton de Genève jusqu’au jour de sa faillite, la chambre de céans est également compétente ratione loci.

2.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

En l’espèce, par décision du 27 avril 2022, l’intimée a demandé à la recourante la réparation de son dommage suite à la faillite de la société. Ce n’est que le 13 février 2023 que la recourante a formé opposition à cette décision. Elle a fait valoir qu’elle n’en avait pas eu connaissance, car elle avait déménagé. Il ressort de la procédure qu’elle en a connu l’existence par un courrier adressé à elle par l’intimée le 16 janvier 2023. Faute de preuve de la notification tant de la décision du 27 avril 2022, que du courrier de l’intimée du 16 janvier 2023, il convient d’admettre que l’opposition a été formé en temps utile, ce que l’intimée ne conteste pas.

3.             Dans la mesure où l’intimée a motivé sa décision sur opposition du 28 février 2023 sur le fond, quand bien même elle déclarait l’opposition irrecevable, il se justifie d’examiner le bien-fondé de la demande en réparation du dommage adressée le 27 avril 2022 à la recourante. Au vu de la motivation du recours de cette dernière, le litige porte seulement sur la question de savoir si seule la moitié du dommage subi par l’intimée peut être réclamée à la recourante, l’autre moitié devant ainsi être payée par le gérant-président exclusivement.

4.             Le 1er janvier 2020 est entrée en vigueur la révision du droit de la prescription de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO - RS 220), entraînant la modification de l’art. 52 al. 3 LAVS. Les dispositions légales applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 445 consid. 1). En l’occurrence, il est reproché à la recourante de ne pas avoir payé les cotisations paritaires dues pour les années 20016 à 2019, soit une période précédant le 1er janvier 2020. C’est l’art. 52 al. 3 LAVS dans sa teneur jusqu’au 31 décembre 2019, qui est applicable au cas d’espèce.

5.              

5.1 À teneur de l’art. 52 LAVS, dans sa teneur jusqu’au 31 décembre 2020 applicable au cas d’espèce, l’employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n’observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à l’assurance, est tenu à réparation (al. 1). Si l'employeur est une personne morale, les membres de l'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage (al. 2). Le droit à réparation est prescrit deux ans après que la caisse de compensation compétente a eu connaissance du dommage et, dans tous les cas, cinq ans après la survenance du dommage. Ces délais peuvent être interrompus. L’employeur peut renoncer à invoquer la prescription (al. 3).

L'obligation de payer les cotisations et de fournir les décomptes est, pour l'employeur, une tâche de droit public prescrite par la loi. À cet égard, le Tribunal fédéral a déclaré, à réitérées reprises, que la responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS est liée au statut de droit public. L'employeur qui ne s'acquitte pas de cette tâche commet une violation des prescriptions au sens de l'art. 52 LAVS, ce qui entraîne pour lui l'obligation de réparer entièrement le dommage ainsi occasionné (ATF 118 V 193 consid. 2a).

5.2 En l’espèce, vu la teneur claire de l’art. 52 al. 2 LAVS et la jurisprudence précitée, la recourante doit répondre solidairement de la totalité du dommage et elle ne peut voir son obligation de réparer le dommage réduite à la moitié de celui-ci.

6.             Infondé, le recours sera rejeté. La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le