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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4179/2022

ATAS/671/2023 du 06.09.2023 ( AI ) , REJETE

Recours TF déposé le 24.10.2023, 8C_661/2023
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4179/2022 ATAS/671/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 septembre 2023

Chambre 4

 

En la cause

A______

représentée par Me Andres PEREZ, avocat

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née le ______ 1991, est au bénéfice d’un diplôme d’études de commerce, d’un diplôme de Fitness Training Instructor ainsi que d’un diplôme et d’un certificat attestant d’une formation dans le domaine de l’immobilier.

b. Elle a demandé les prestations de l’assurance-invalidité le 23 avril 2020 en raison des conséquences d’une endométriose dont elle souffrait depuis l’âge de 13 ans.

c. Dans un avis du 19 avril 2021, le service médical régional pour la Suisse romande de l’assurance-invalidité (ci-après : le SMR) a considéré qu’au vu du dossier médical de l’assurée, il n’y avait pas d’atteinte à la santé durablement incapacitante.

d. Par projet de décision du 25 janvier 2021, l’office de l’assurance invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI ou l’intimé) a en conséquence rejeté la demande de l’assurée.

e. Cette dernière a formé opposition à ce projet, faisant valoir qu’il ressortait en particulier des derniers rapports médicaux de 2020 et 2021 qu’elle était dans l’incapacité d’assumer une activité professionnelle à plein temps en raison de sa lourde symptomatologie actuelle (crises de violentes douleurs pelviennes et abdominales récurrentes, hémorragies et atteintes urinaires notamment, qui engendraient fréquemment des consultations en urgence avec hospitalisation). Une activité professionnelle à temps partiel ne pouvait être envisagée que si elle était adaptée à sa maladie avec des horaires flexibles lui permettant de poursuivre ses traitements et de s’absenter lors des épisodes douloureux. Une activité de télétravail lui permettrait de gérer sa maladie et de travailler dans de bonnes conditions. Elle demandait la reconsidération de son dossier.

f. Suite à une instruction complémentaire, le SMR a, le 5 mai 2021, conclu qu’il était raisonnablement exigible de retenir une capacité de travail d’au moins 50% de l’assurée dans une activité adaptée dès décembre 2019. Les limitations fonctionnelles étaient : pas de port de charges, ni de déplacement de longue durée, possibilité d’alterner différentes positions et d’accéder facilement à des toilettes, et flexibilité des horaires. Il se fondait en particulier sur un rapport établit le 26 avril 2021 par la docteure B______, spécialiste FMH en médecine interne générale, qui retenait une capacité de travail de 8 heures par jour en dehors des crises d’endométriose, précisant que l’assurée devait s’absenter environ une semaine par mois de son travail en raison de ses crises de douleurs et qu’elle suivait également des thérapies nécessaires pour soulager ses douleurs. Une capacité de travail de 4 heures par jour était plus adaptée en tenant compte des absences inéluctables. Dans ce contexte, la recherche d’un emploi lui offrant la flexibilité de suivre ses thérapies et de s’absenter lors des épisodes douloureux était quasi impossible.

g. L’assurée a fait un stage à 50% auprès des Établissements publics pour l'intégration (ci-après : les ÉPI) du 20 septembre au 19 décembre 2021.

h. Dans le rapport établi par les ÉPI le 3 mars 2022, il est indiqué que l’objectif de la mesure était d’évaluer les compétences, le rythme et l’endurance de l’assurée sur la durée. L’assurée avait effectué un stage de trois mois au back office des ÉPI, en tant qu’assistante administrative, avec un poste qui respectait toutes ses limitations fonctionnelles, hormis la flexibilité des horaires dont elle avait besoin, mais qui était impossible à réaliser dans l’économie ordinaire.

L’assurée avait été informée au début du stage que la flexibilité des horaires sur la semaine n’était pas possible pour des raisons d’organisation des tâches de chacun. Ainsi, durant les deux premières semaines, les horaires seraient un peu irréguliers. À partir de la troisième semaine, elle pourrait occuper un poste à mi-temps, soit le matin soit l’après-midi, c’était la seule flexibilité qui pouvait lui être proposée dans le poste. L’assurée avait répondu que la flexibilité des horaires sur la semaine n’était pas pertinente dans sa situation, car lorsqu’elles survenaient, ses crises de douleurs pouvaient durer entre cinq et dix jours, pendant lesquels elle était incapable de sortir de chez elle et finissait souvent aux urgences. Son cycle était très perturbé et elle ne pouvait pas savoir à l’avance à quel moment du mois elle devrait s’absenter.

Il avait été constaté sur les treize semaines de stage, que l’assurée n’avait réussi à faire qu’une seule semaine entière. Toutes les autres semaines avaient été perturbées par des arrêts maladie ou des rendez-vous médicaux.

Le rendement observé était très bon, supérieur à la norme, et l’engagement excellent. Le résultat du stage était bon. Toutes les tâches avaient été exécutées à la perfection. L’assurée avait effectué des tâches très diverses avec aisance et rapidité. Son rythme, la continuité dans la tâche ainsi que sa résistance étaient dans la norme. Ses capacités cognitives étaient très bonnes, de même que ses capacités sociales et sa capacité d’adaptation. Le seul frein avait été le grand nombre d’absences, mais pour le reste, le résultat était excellent.

i. La division de réadaptation professionnelle a proposé, le 14 mars 2022, de retenir un taux d’invalidité de 55% pour l’assurée, en tenant compte d’un temps de travail raisonnablement exigible de 50% et d’un abattement de 10%, en raison du taux d’occupation. Les limitations fonctionnelles avaient été prises en compte dans la détermination du taux d’activité. Le stage avait confirmé les absences régulières pour maladie, lesquelles ne permettaient pas à l’assurée de respecter des délais quotidiens ou d’assumer une régularité dans les tâches d’un cahier des charges ne lui permettant pas d’adapter ses horaires. La mesure avait toutefois démontré que l’assurée avait les capacités nécessaires pour exercer avec compétence et professionnalisme une activité dans le domaine administratif (secrétariat).

j. Le 9 juin 2022, une conseillère en réadaptation professionnelle a précisé que pendant le stage aucune difficulté n’avait été observée sur le plan physique et que l’assurée n’avait pas formulé de plaintes. Ses absences étaient liées à son atteinte à la santé. Celui-ci influait l’horaire de travail et la nature des tâches, qui ne devaient pas être demandées dans des délais courts et urgents. Sur un marché du travail équilibré, l’assurée pourrait occuper un poste à 50% dans le domaine administratif en organisant son horaire sur le mois. Elle avait de très bonnes capacités d’adaptation sur des tâches complexes, une grande polyvalence et était rapidement autonome.

k. Par décision du 3 novembre 2022, l'OAI a octroyé à l'assurée une demi-rente d'un taux de 55% dès le 1er décembre 2020, sous réserve des indemnités journalières déjà versées.

L'OAI lui reconnaissait une incapacité de travail totale dans son activité habituelle de coordinatrice polyvalente dès le mois de décembre 2019 (début du délai d'attente d'un an) et une capacité de 50% dans une activité adaptée dès la même date.

À l'échéance du délai d'attente, soit en décembre 2020, il convenait d'évaluer le taux d'invalidité dans la sphère professionnelle en procédant à une comparaison du revenu que l'assurée pourrait obtenir de son activité lucrative si elle n'était pas atteinte dans sa santé avec celui qu'elle pourrait réaliser malgré cette atteinte.

Le revenu sans invalidité était de CHF 60'938.- et le revenu avec invalidité de CHF 27'364.-, soit un taux d'invalidité de 55%. L'assurée avait bénéficié de mesures professionnelles sur la forme d'une orientation professionnelle, selon l'art. 15 de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - 831.20), du 20 septembre au 19 décembre 2021. Lors desdites mesures, elle avait bénéficié d'indemnités journalières AI.

B. a. Le 9 décembre 2022, l'assurée a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) concluant à l'annulation de la décision de l'OAI du 3 novembre 2022 et à l'octroi d'une rente entière d'invalidité dès le 1er décembre 2020. Subsidiairement, elle concluait au retour du dossier à l'OAI pour instruction complémentaire et nouvelle décision, et dans tous les cas, avec suite de frais et dépens.

b. Le 13 décembre 2022, l’assurée a été mise au bénéfice de l’assistance juridique avec effet au 25 novembre 2022, limitant cet octroi à 12 heures d’activité d’avocat, et commis Me Andres PEREZ à ces fins.

C. a. Par décision du 9 janvier 2021, l’OAI a informé l’assurée des montants auxquels elle avait droit à titre de rente d’invalidité dès le 1er décembre 2020.

b. Le 14 février 2023, l’assurée a formé un nouveau recours contre cette décision auprès de la chambre des assurances sociales pour sauvegarder ses droits, lequel a été enregistré sous la procédure A/536/2023.

c. Le 27 février 2023, l'intimé a invité la chambre de céans à joindre les causes, les deux décisions litigieuses étant principalement dues à une différence de calcul par la caisse compétente.

L'intimé a conclu au rejet du recours.

d. La recourante a persisté dans ses conclusions.

e. Par ordonnance du 7 juillet 2023, la chambre de céans a ordonné la jonction des deux causes sous la première procédure ouverte.

f. Les parties ont été entendues par la chambre de céans le 23 août 2023.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le droit de la recourante a une rente entière d’invalidité.

4.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI – RS 831.201; RO 2021 706).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

En l’occurrence, la décision querellée concerne un premier octroi de rente dont le droit est né avant le 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

 

5.              

5.1  

5.1.1 La recourante ne conteste pas la capacité de travail résiduelle de 50% dans une activité adaptée.

Elle soutient en revanche que compte tenu de ses limitations fonctionnelles, l'exercice d’une activité professionnelle est irréaliste pour elle dans l'économie normale. Son emploi auprès de la société privée de gérance (SPG) respectait la quasi-totalité des limitations fonctionnelles, mais la flexibilité des horaires requise par son état de santé n'était en revanche pas possible, raison pour laquelle elle avait été licenciée. Son curriculum vitae démontrait également que des aménagements d'horaires n'étaient pas réalisables dans des emplois différents, puisqu'à chaque fois, elle s'était fait licencier en raison de son absentéisme. Elle avait pourtant travaillé dans des postes aussi variés qu'assistante administrative, collaboratrice technique et assistante des ventes.

Lors de son stage aux ÉPI, il avait été constaté qu’il lui était impossible de travailler dans l'économie ordinaire.

Nonobstant les conclusions des experts, le service de réadaptation avait estimé que la capacité de travail de 50% était réalisable dans l'économie normale dans une activité de services administratifs et de soutien.

Le service de réadaptation n'avait pas donné le moindre exemple quant aux postes administratifs qui pouvaient respecter la flexibilité requise par l'état de santé de l'assurée.

5.1.2 L'intimé a relevé que la contestation de la décision attaquée s'appuyait en grande partie sur le rapport des ÉPI, qui donnait suite à un stage réalisé dans l'établissement. Il ne pouvait suivre la position de la recourante. Lors du dépôt de la demande de prestations en avril 2020, celle-ci décrivait des situations de crises de douleurs intenses, nécessitant parfois des hospitalisations.

Le SMR avait suivi la position de la Dre B______ et retenu une capacité de travail de 50%. Force était de constater que les absences pendant le stage d'observation étaient beaucoup plus fréquentes que celles précédemment avancées par l'assurée et ses médecins, soit une incapacité de travail d'une semaine par mois et la nécessité de suivre des traitements. Dans un tel contexte, l'évaluation des ÉPI portait sur une situation qui était sensiblement différente de l'historique médical décrit et attesté, de sorte qu'elle ne constituait pas une base suffisante pour remettre en cause l'évaluation médicale, qui n'était pas contestée.

Ainsi, l'OAI considérait, avec le service de réadaptation, que les absences avaient un impact plus limité que celui observé par les ÉPI et qu'un emploi dans une activité administrative de facturation, de saisie ou autre était possible en organisant son horaire présentiel sur le mois, étant donné un travail à mi-temps.

5.2  

Lorsqu'il s'agit d'examiner dans quelle mesure un assuré peut encore exploiter économiquement sa capacité de gain résiduelle sur le marché du travail entrant en considération pour lui (art. 16 LPGA), on ne saurait subordonner la concrétisation des possibilités de travail et des perspectives de gain à des exigences excessives. Il s'ensuit que pour évaluer l'invalidité, il n'y a pas lieu d'examiner la question de savoir si un invalide peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s'il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail lorsque les places de travail disponibles correspondent à l'offre de la main d'oeuvre (VSI 1998 p. 293). On ne saurait toutefois se fonder sur des possibilités de travail irréalistes. Il est certes possible de s'écarter de la notion de marché équilibré du travail lorsque, notamment l'activité exigible au sens de l'art. 16 LPGA, ne peut être exercée que sous une forme tellement restreinte qu'elle n'existe quasiment pas sur le marché général du travail ou que son exercice impliquerait de l'employeur des concessions irréalistes et que, de ce fait, il semble exclu de trouver un emploi correspondant (cf. RCC 1991 p. 329; RCC 1989 p. 328; arrêts du Tribunal fédéral 9C_286/2015 du 12 janvier 2016 consid. 4.2 et 9C_659/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.3.2). Le caractère irréaliste des possibilités de travail doit alors découler de l'atteinte à la santé – puisqu'une telle atteinte est indispensable à la reconnaissance d'une invalidité (cf. art. 7 et 8 LPGA) – et non de facteurs psychosociaux ou socioculturels qui sont étrangers à la définition juridique de l’invalidité (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_175/2017 du 30 octobre 2017 consid. 4.2).

La possibilité pour une personne assurée d'utiliser la capacité restante sur le marché du travail équilibré dépend des circonstances concrètes du cas particulier. Selon la jurisprudence, les éléments déterminants sont le type et la nature de l'atteinte à la santé et ses conséquences, l'effort d'adaptation prévisible et, dans ce contexte, également la structure de la personnalité, les talents et compétences existants, la formation, la carrière professionnelle ou l'applicabilité de l'expérience professionnelle de l’activité habituelle (arrêt 9C_650/2015 du 11 août 2016 consid. 5.3 et les références).

La notion de marché du travail équilibré est théorique et abstraite. Elle sert de critère de distinction entre les cas tombant sous le coup de l’assurance-chômage et ceux qui relèvent de l’assurance-invalidité. Elle présuppose un équilibre entre l’offre et la demande de main-d’œuvre, d’une part, et un marché du travail structuré (permettant d’offrir un éventail d’emplois diversifiés, au regard des sollicitations tant intellectuelles que physiques), d’autre part. D’après la jurisprudence, il n’y a pas lieu de poser des exigences excessives à la concrétisation des possibilités de travail et des perspectives de gain, au regard en particulier des postes permettant l’exécution de travaux peu exigeants du point de vue physique et sous l’angle des qualifications ou connaissances professionnelles requises. Restent ainsi exigibles une activité ou un poste de travail qui requièrent une certaine obligeance de la part de l’employeur, le marché du travail équilibré comprenant aussi de telles places de travail, dites « de niche ». La jurisprudence a par ailleurs admis que les possibilités de travail sur un marché du travail équilibré sont suffisamment concrétisées, dans la mesure où entrent en considération, comme exemples d’activités exigibles, des travaux simples de surveillance ou de contrôle, l’utilisation et la surveillance de machines (semi-) automatiques ou d’unités de production, ainsi que l’activité de surveillant de musée ou de parking. Il est certes possible de s’écarter de la notion de marché du travail équilibré lorsque, notamment, l’activité exigible au sens de l’art. 16 LPGA ne peut être exercée que sous une forme tellement restreinte qu’elle n’existe quasiment pas sur le marché général du travail ou que son exercice impliquerait de l’employeur des concessions irréalistes et que, de ce fait, il semble exclu de trouver un emploi correspondant. Cependant, là encore, le caractère irréaliste des possibilités de travail doit découler de l’atteinte à la santé – puisqu’une telle atteinte est indispensable à la reconnaissance d’une invalidité (cf. art. 7 et 8 LPGA) – et non de facteurs étrangers à l’invalidité, par exemple de facteurs psychosociaux ou socioculturels (arrêt du Tribunal fédéral 8C_772/2020 du 9 juillet 2021 consid. 3.3 et les références).

D'après ces critères, il y a lieu de déterminer dans chaque cas et de manière individuelle si l'assuré est encore en mesure d'exploiter une capacité de travail résiduelle sur le plan économique et de réaliser un salaire suffisant pour exclure une rente. Ni sous l'angle de l'obligation de diminuer le dommage, ni sous celui des possibilités qu'offre un marché du travail équilibré aux assurés pour mettre en valeur leur capacité de travail résiduelle, on ne saurait exiger d'eux qu'ils prennent des mesures incompatibles avec l'ensemble des circonstances objectives et subjectives (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1066/2009 du 22 septembre 2010 consid. 4.1 et la référence).

Le Tribunal fédéral a considéré qu'il y avait suffisamment d'opportunités réalistes sur un marché du travail équilibré pour les personnes qui ne pouvaient exercer que des travaux légers de type mono-manuel, à l'instar de simples activités de surveillance, d'essais et d'inspection, ainsi que du fonctionnement et de la surveillance de machines (semi-) automatiques ou d'unités de production qui ne nécessitent pas l'utilisation des deux bras et des deux mains. De tels emplois existent également dans les entreprises liées à la production, raison pour laquelle il a jugé qu'une restriction du marché du travail à considérer ne s'imposait pas au secteur des services (arrêt du Tribunal fédéral 8C_100/2012 du 29 mars 2012 consid. 3.4 et les références).

S’agissant d’un assuré souffrant d’un rhumatisme psoriasique, qui compte tenu de la fluctuation de son taux de capacité de travail (0% en cas de crises et 70% hors des périodes de crises) s’était vu reconnaître une capacité de travail résiduelle moyenne de 50%, dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, le Tribunal fédéral a considéré qu’il existait des possibilités réelles d'insertion sur le marché équilibré de l'emploi, tant au regard du taux d'incapacité de travail qu'au regard des limitations fonctionnelles, compte tenu de l'éventail d'emplois diversifiés disponibles sur le marché équilibré du travail (arrêt du 9C_248/2018 du 19 septembre 2018).

Dans un arrêt 9C_15/2020 du 10 décembre 2020, le Tribunal fédéral a considéré qu’une exigibilité pouvait être retenue pour une personne qui avait une capacité de travail résiduelle de 80% dans une activité qui devait être exercée en grande partie en home office, car le marché équilibré du travail (théorique), offrait – surtout dans le secteur commercial – divers emplois qui pouvaient aussi être exercée de cette façon.

5.3 Les constatations médicales peuvent être complétées par des renseignements d’ordre professionnel, par exemple au terme d'un stage dans un centre d'observation professionnel de l'assurance-invalidité, en vue d'établir concrètement dans quelle mesure l'assuré est à même de mettre en valeur une capacité de travail et de gain sur le marché du travail. Il appartient alors au médecin de décrire les activités que l'on peut encore raisonnablement attendre de l'assuré compte tenu de ses atteintes à la santé (influence de ces atteintes sur sa capacité à travailler en position debout et à se déplacer; nécessité d'aménager des pauses ou de réduire le temps de travail en raison d'une moindre résistance à la fatigue, par exemple), en exposant les motifs qui le conduisent à retenir telle ou telle limitation de la capacité de travail. En revanche, il revient au conseiller en réadaptation, non au médecin, d'indiquer quelles sont les activités professionnelles concrètes entrant en considération sur la base des renseignements médicaux et compte tenu des aptitudes résiduelles de l'assuré. Dans ce contexte, l'expert médical et le conseiller en matière professionnelle sont tenus d'exercer leurs tâches de manière complémentaire, en collaboration étroite et réciproque (ATF 107 V 17 consid. 2b; SVR 2006 IV n° 10 p. 39).

5.4 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références; cf. ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

6.             En l’espèce, au vu de la jurisprudence précitée, il convient d’admettre que la recourante peut utiliser sa capacité de travail résiduelle sur le marché du travail équilibré et qu’il existe suffisamment d'opportunités réalistes sur un marché du travail équilibré pour des personnes capables de travailler à 50%, avec des absences irrégulières, dans un travail de type administratif pouvant être réalisé sur un mois sans échéance rapide.

Le rapport des ÉPI, en tant qu’il indique qu’il était impossible de trouver dans l’économie ordinaire une activité professionnelle correspondant à la flexibilité des horaires dont avait besoin la recourante, n’emporte pas la conviction de la chambre céans, au vu de la jurisprudence restrictive en la matière et étant relevé que le rôle des ÉPI n’était pas d’examiner l’exigibilité d’une activité professionnelle à 50% pour la recourante en tenant compte d’un marché équilibré, mais d’évaluer ses compétences, son rythme de travail ainsi que son endurance sur la durée. Par ailleurs, le fait que les ÉPI n’aient pas pu lui proposer une activité avec des horaires flexibles au sein de leurs services n’apparaît pas déterminant, car ils devaient évaluer ses compétences, ce qui supposait la présence de la recourante avec des collaborateurs de l’institution.

La conclusion du service de réadaptation professionnelle du 9 juin 2022 – selon laquelle la recourante pouvait occuper un poste à 50% dans le domaine administratif en organisant son horaire sur le mois et en travaillant sur des mandats ne nécessitant pas des échéances courtes – est davantage convaincante, dès lors que cette appréciation relève de la compétence de ce service et qu’elle se réfère au marché du travail équilibré ainsi qu’aux très bonnes prestations de travail de la recourante constatées durant le stage.

C’est donc à juste titre que l’intimé a considéré qu’il était possible de retenir que les limitations fonctionnelles de la recourante lui permettaient de travailler à 50% dans un marché du travail équilibré.

7.              

7.1  

7.1.1 La recourante conteste également l'abattement de 10% accordé, faisant valoir que seules les absences pour raison de santé avaient été prises en considération dans la capacité de travail, mais pas la flexibilité d'horaires. Même si par impossible le Tribunal venait à considérer qu'un tel emploi existait sur le marché ordinaire, la limitation constituait un énorme frein à l'engagement, qui justifiait un abattement de 25%.

7.1.2 Selon l’intimé, la capacité de travail de 50% tenait déjà compte des absences de la recourante et de la nécessité d'adapter les horaires et on ne pouvait pas en tenir compte à nouveau avec un abattement supplémentaire.

7.1.3 Selon l’ATF 126 V 75, la mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation). Un abattement est effectué seulement lorsqu'il existe des indices qu'en raison d'un ou de plusieurs facteurs, l'intéressé ne peut mettre en valeur sa capacité résiduelle de travail sur le marché du travail (ATF 134 V 64 consid. 4.2.1) qu'avec un résultat économique inférieur à la moyenne (ATF 135 V 297 consid. 5.2).

La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 135 V 297 consid. 5.2 ; ATF 134 V 322 consid. 5.2 et les références; ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération ; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3. et les références). D'éventuelles limitations liées à la santé, déjà comprises dans l'évaluation médicale de la capacité de travail, ne doivent pas être prises en compte une seconde fois dans l’appréciation de l’abattement, conduisant sinon à une double prise en compte du même facteur (cf. ATF 146 V 16 consid. 4.1 et ss. et les références). L'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d'appréciation (ATF 132 V 393 consid. 3.3).

Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de constater que le travail à plein temps n'est pas nécessairement mieux rémunéré que le travail à temps partiel. Dans certains domaines d'activités, les emplois à temps partiel sont en effet répandus et répondent à un besoin de la part des employeurs, qui sont prêts à les rémunérer en conséquence (ATF 126 V 75 consid. 5a/cc; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 8C_49/2018 du 8 novembre 2018 consid. 6.2.2.2). Cela étant, si selon les statistiques, les femmes exerçant une activité à temps partiel ne perçoivent souvent pas un revenu moins élevé proportionnellement à celles qui sont occupées à plein temps (cf., p. ex., arrêt du Tribunal fédéral 9C_751/2011 du 30 avril 2012 consid. 4.2.2), la situation se présente différemment pour les hommes; le travail à temps partiel peut en effet être synonyme d'une perte de salaire pour les travailleurs à temps partiel de sexe masculin (arrêt du Tribunal fédéral 8C_805/2016 du 22 mars 2017 consid. 3.2).

7.1.4 L’évaluation de l’abattement appartient en premier lieu à l'administration, qui dispose pour cela d'un large pouvoir d'appréciation. Le juge doit faire preuve de retenue lorsqu'il est amené à vérifier le bien-fondé d'une telle appréciation. L'examen porte alors sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans le cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Pour autant, le juge ne peut, sans motif pertinent, substituer son appréciation à celle de l'administration; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 126 V 75 consid. 6 ; 123 V 150 consid. 2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_337/2009 du 18 février 2010 consid. 7.5).

7.2 En l’espèce, la nécessité de la flexibilité des horaires a été prise en compte dans les limitations fonctionnelles par le SMR, dans son avis du 5 mai 2021, sur la base desquelles il a retenu une capacité de travail de 50%. Cela étant, il faut constater que le rapport de la Dre B______ du 26 avril 2021, sur lequel l’avis du SMR se fondait, ne fixait pas la capacité de travail à 50%, en raison de la nécessité des horaires flexibles, mais en raison des absences pour maladie de la recourante. La Dre B______ a certes évoqué la nécessité des horaires flexibles, mais pour soutenir qu’il serait quasiment impossible à la recourante de trouver un emploi lui offrant la flexibilité nécessaire pour suivre ses thérapies et s’absenter lors des épisodes douloureux.

La nécessité des horaires flexibles est de nature à avoir une incidence négative sur le salaire et cela pourrait justifier éventuellement un abattement de 15%, en tenant compte du fait que l’intimé a déjà pris en compte un abattement de 10% pour tenir compte du taux d’occupation, ce qui est déjà favorable à la recourante, car ce critère ne justifie en principe pas un abattement pour les femmes, selon la jurisprudence.

Cette question peut rester ouverte, dès lors qu’en reprenant le calcul du taux d’invalidité effectué par l’intimé le 14 mars 2022 avec un abattement de 15%, on obtient un taux d’invalidité de 57.59%, arrondi à 58%, ce qui n’ouvre pas à la recourante un droit à une rente plus importante que la demi-rente que lui octroie la décision querellée.

Les conditions pour retenir un abattement de plus de 15% ne sont manifestement pas réalisées.

8.             Infondé, le recours contre la décision de l’intimé du 3 novembre 2022 sera rejeté.

9.             Il y a également lieu de rejeter recours interjeté contre la décision du 9 janvier 2023, puisque cette décision est fondée sur celle du 3 novembre 2022, qui est confirmée.

10.         Il sera renoncé à la perception d’un émolument, la recourante étant au bénéfice de l’assistance juridique.

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare les recours recevables.

Au fond :

2.        Les rejette.

3.        Dit qu’il n’est pas perçu d’émolument.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le