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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4108/2020

ATAS/556/2023 du 06.07.2023 ( LAA )

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4108/2020 ATAS/556/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Ordonnance d’expertise du 6 juillet 2023

Chambre 4

 

En la cause

 

A______

représenté par ASSUAS Association suisse des assurés, mandataire

 

 

recourant

contre

 

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS

 

 

 

intimée

 


 

EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant) est né le ______ 1967, marié et père de quatre enfants dont le dernier est né le ______ 2002. Il a travaillé pour B______ Sàrl (ci-après :  l’employeuse) comme peintre en bâtiment depuis le 21 mars 2019.

b. Il a subi un accident le 16 mai 2019, sur un chantier. Selon l’annonce d’accident, il avait glissé d’une échelle et s’était cogné une épaule et le dos en tombant, ce qui lui avait causé des tuméfactions.

c. Le 29 mai 2019, la SUVA caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : la SUVA ou l’intimée) a informé l’assuré qu’elle lui allouait ses prestations pour les suites de l’accident du 16 mai 2019 et qu’elle lui versait l’indemnité journalière dès le 19 mai 2019.

d. Dans un rapport médical initial LAA du 27 août 2019, la doctoresse C______, médecine générale, a indiqué que l’assuré l’avait consultée le 16 mai 2019 pour des douleurs au niveau de la colonne CD lombaire et aux épaules depuis le 15 mai 2019, suite à un accident par glissement d’une échelle, avec faux mouvement avec le tronc et coup au dos, épaules et fesse gauche. Il se plaignait également de maux de tête et de vertiges. Les diagnostics étaient des cervico-dorso-lombalgies aigües sur entorse, des contusions de la colonne CD lombaire et de la fesse gauche, une tendinite post-traumatique à l’épaule gauche et un état d’angoisse post-traumatique.

e. Selon un rapport établi le 10 janvier 2020 par le docteur D______, chef de clinique du service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil moteur des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : les HUG), le diagnostic était « épaule gauche : rupture SE ». Il était proposé une arthroscopie pour suture SE et ténodèse LCB le 18 février 2020.

f. Selon un rapport établi le 30 janvier 2020 par le Dr D______ et le docteur E______, l’IRM mettait en évidence une lésion au niveau du sous-épineux, une arthropathie acromio-claviculaire et une possible lésion à l’insertion du long chef du biceps. Devant les douleurs diffuses, la limitation fonctionnelle et les douleurs à la palpation de l’acromio-claviculaire, il avait été proposé à l’assuré une prise en charge chirurgicale par arthroscopie de l’épaule droite avec opération du sus-épineux, ténodèse du long chef du biceps, acromioplastie et resection du centimètre externe. L’intervention chirurgicale était programmée pour le 18 février 2020.

g. L’assuré a demandé les prestations de l’assurance-invalidité le 10 février 2020.

h. Il a été opéré le 18 février 2020 selon un compte rendu opératoire établi le 18 février 2020 par le Dr D______.

i. Le 13 juillet 2020, le Dr D______ et le docteur F______ ont indiqué avoir revu le jour-même l’assuré à plus de quatre mois post arthroscopie de son épaule gauche. Ils rapportaient une évolution lentement favorable, avec toutefois la persistance d’amplitudes articulaires actives en-dessous de la moyenne attendue et des douleurs au repos ainsi qu’à l’activité. L’assuré cotait ses douleurs jusqu’à 8/10. Il était toujours sous traitement antalgique par Tramal. Il n’y avait pas de nouveau traumatisme et il était en arrêt de travail à 100% de son métier de peintre en bâtiment. L’IRM réalisée le 27 mai précédent montrait un status post réinsertion du sous-scapulaire, sans nouvelle lésion transfixiante ou rétraction apparente. On notait une stabilité de tendinopathie fissuraire du supra-épineux. Les médecins adressaient l’assuré à leurs collègues de la rééducation pour intensifier et adapter le traitement de physiothérapie. L’assuré serait revu à six mois post opératoires pour juger de l’évolution.

j. Le 5 octobre 2020, le docteur G______, spécialiste chirurgie orthopédique, du service médical de la SUVA, a établi un rapport complémentaire suite à son examen du 2 juillet 2020. Selon lui, l’intervention du 18 février 2020 n’était pas en relation de causalité pour le moins probable avec l’accident du 16 mai 2019. Il n’y avait aucune information concernant un suivi immédiat qui pouvait faire penser que l’événement annoncé était à l’origine de la symptomatologie annoncée par la suite. Sur l’IRM du 8 janvier 2020, l’ensemble des constatations était de nature maladive. La présence d’une fissuration du tiers moyen du supra-épineux d’allure transfixiante ne faisait qu’accompagner l’ensemble des anomalies dégénératives observées sur l’IRM. Dans son rapport, le chirurgien avait noté qu’il s’agissait de maladie et non d’accident. En conclusion, les troubles que l’assuré présentait et son incapacité de travail n’étaient pas en relation de causalité pour le moins probable avec l’événement du 16 mai 2019.

k. Par décision du 27 octobre 2020, la SUVA a considéré qu’il n’y avait pas de lien de causalité certain ou du moins vraisemblable entre l’événement du 16 mai 2019 et les troubles de l’assuré à l’épaule gauche qui avaient nécessité l’opération du 18 février 2020. En conséquence, elle mettait fin au versement à ses prestations au 17 février 2020.

l. Le 28 octobre 2020, l’assuré a formé opposition à la décision de la SUVA, au motif qu’avant son accident, il n’avait jamais eu mal à son épaule gauche.

m. Par décision sur opposition du 4 novembre 2020, la SUVA a rejeté l’opposition de l’assuré, sur la base de l’avis établi le 5 octobre 2020 par le Dr G______, qu’il y avait lieu de suivre, en l’absence d’éléments contraires au dossier. Par ailleurs, selon la jurisprudence, une simple contusion à l’épaule ne pouvait pas entraîner de lésion au niveau de la coiffe des rotateurs.

n. Le 9 novembre 2020, le Dr D______ a indiqué à la SUVA que depuis son accident, l’assuré avait présenté des douleurs qui n’étaient pas présentes auparavant. L’arthroscopie avait mis en évidence une rupture de la partie haute du sous-scapulaire et des fissurations du long chef du biceps. Ces lésions pouvaient tout à fait être le résultat du traumatisme subi par l’assuré. La tendinopathie fissuraire transfixiante du supra-épineux qui ressortait de l’IRM du 8 janvier 2020 selon la SUVA n’avait pas été retrouvée lors de l’arthroscopie. Par ailleurs, si un complexe de Buford, des kystes paralabraux et des œdèmes osseux de la glène postérieure au niveau de cette épaule étaient présents auparavant, ils ne créaient pas la symptomatologie de l’assuré, laquelle avait été déclenchée par le traumatisme, ce qui s’expliquait par la déchirure du sous-scapulaire et du long chef du biceps. L’intervention chirurgicale avait donc été bien faite en raison du traumatisme subi par l’assuré. L’arthroscopie qui avait été effectuée après l’IRM du 8 janvier 2020 avait une valeur diagnostique supérieure à cet examen. La SUVA était dès lors invitée à reconsidérer à poursuivre la prise en charge de l’assuré.

o. Le 13 novembre 2020, le Dr G______ a rendu une nouvelle appréciation du cas. Il retenait une pathologie dégénérative, ce qui était confirmé par le fait que, selon le rapport opératoire du Dr D______, celui-ci avait réalisé des gestes qui avaient comme visée le traitement d’un problème dégénératif. La fissuration du tiers moyen du supra-épineux qu’il avait décrite dans son appréciation précédente n’était pas à retenir, car l’arthroscopie ne l’avait pas confirmée. Toutefois, il y avait des anomalies au niveau du sous-scapulaire et des fissurations le long du chef du biceps. Le Dr G______ acceptait donc la demande du chirurgien. Les éléments qu’il apportait dans son analyse permettaient d’adhérer à une étiologie traumatique, mais il signalait la présence d’anomalies de type dégénératif. Compte tenu de la mauvaise évolution et de l’absence de reprise d’activité professionnelle à plus de 18 mois de l’événement annoncé, il lui semblait nécessaire de proposer une modification définitive de l’activité professionnelle de l’assuré comme peintre en bâtiment.

B. a. Le 4 décembre 2020, l’assuré, représenté par ASSUAS, a formé recours contre la décision du 4 novembre 2020 auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la CJCAS), concluant à son annulation et à ce qu’il soit dit qu’il avait droit aux prestations de l’assurance-accidents, avec suite de frais et dépens.

b. L’assuré a refusé de se présenter à un nouvel examen du Dr G______, fixé le 4 janvier 2021 afin de pouvoir faire la part des choses entre la part maladie et la part accident qui avaient justifié l’opération de février 2020.

c. Le 8 mars 2021, le Dr G______ a effectué une nouvelle appréciation du cas, après réception de nouveaux documents médicaux. Compte tenu de la mauvaise évolution et de l’absence de reprise d’activité professionnelle à plus de 18 mois de l’événement annoncé, un examen avait été proposé à l’assuré, qui avait refusé de s’y soumettre. Dans ces circonstances, le Dr G______ ne pouvait que confirmer son avis préalable concernant les troubles que l’assuré présentait et son incapacité de travail. Dans un contexte de maladie avec des informations médicales claires et objectives sur un état pathologique antérieur déstabilisé d’une façon déterminante par le sinistre annoncé, l’intervention proposée et réalisée aux HUG le 18 février 2020 n’était pas en relation de causalité pour le moins probable avec l’accident du 16 mai 2019.

d. Le 9 mars 2021, l’intimée a conclu au rejet du recours. Le Dr G______, qui avait examiné personnellement le recourant en 2020, avait été en mesure de se prononcer sur la base du dossier, après l’apport du dernier rapport médical, sans le revoir. Sa dernière détermination, comme toutes les précédentes, remplissait les réquisits jurisprudentiels de la valeur probante.

e. Lors d’une audience devant la chambre de céans du 1er décembre 2021, l’intimée a accepté que le recourant soit convoqué à nouveau pour un examen par le Dr G______.

Le recourant a accepté de se soumettre à un nouvel examen par le Dr G______ et requis que le dossier de l’assurance-invalidité soit transmis à ce dernier.

f. Le 18 mai 2022, l’intimée a informé la chambre de céans que le Dr G______ avait examiné le recourant, avec le docteur H______, également médecin-conseil de l’intimée, pour rendre une appréciation médicale. Ils avaient conclu dans leur rapport du 6 avril 2022 que l’opération du 18 février 2020 n’était pas en relation de causalité pour le moins probable avec l’accident du 16 mai 2019.

g. Dans un rapport du 6 avril 2022, le Dr G______ a résumé les pièces du dossier et indiqué, s’agissant du dossier de l’assurance-invalidité (21 janvier 2022) qu’il contenait 578 pages et que parmi les documents concernant la situation actuelle, il retenait le rapport du service médical régional de l’assurance-invalidité (SMR) du 10 mars 2021 et une expertise réalisée par les Drs I______ et J______. Il avait demandé un rapport d’IRM du 27 mai 2020 qui manquait à la procédure. Il a rapporté les déclarations de l’assuré lors de leur entretien du 14 février 2022 et ses constatations. Il a posé le diagnostic de status après traitement chirurgical pour une problématique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche. Le Dr G______ a constaté après avoir relu ses appréciations des 2 juillet et 13 novembre 2020, qu’il s’était rendu coupable d’imprécisions dans l’anamnèse surtout dans l’examen du 2 juillet 2020. L’erreur était humaine, mais la persévérance dans l’erreur à exclure. Pour se prononcer à nouveau, il avait jugé adapté de demander un consilium au Dr H______, pour diminuer toute source d’erreur de jugement. L’absence d’une limitation immédiate justifiant une prise en charge par orthopédiste chez un assuré qui connaissait bien les douleurs de la rupture aiguë de tendons de la coiffe des rotateurs, ayant des antécédents chargés à l’épaule droite, ne permettait pas d’adhérer à une lésion susceptible d’être à l’origine d’une rupture aiguë du tendon sous scapulaire lors du sinistre annoncé en mai 2019. Cette évolution faisait plutôt penser à une lésion chronique dégénérative et pas accidentelle. Selon un article cité de la Haute Autorité de santé française, les ruptures aiguës sur tendons entièrement sains étaient rares.

h. Le tendon supra-épineux et le tendon du biceps ne présentaient pas de rupture ni de cicatrisation après plusieurs mois d’évaluation entre la première IRM de janvier 2020 et celle de mai 2020. Si la lésion du supra-épineux avait été traumatique, on aurait pu s’attendre à une modification progressive, soit avec rupture définitive soit avec amélioration de la lésion cicatricielle, ce que les IRM ne montraient pas. Cela permettait de conclure que l’atteinte du tendon du supra-épineux était de type dégénératif. Le 31 août 2022, le recourant a demandé à la chambre de céans de faire procéder à une expertise médicale orthopédique, ou de procéder à l’audition du docteur K______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, des HUG.

i. Le 21 septembre 2022, l’intimée s’en est rapportée à justice quant à la pertinence d’une expertise judiciaire.

j. Le 30 septembre 2022, le recourant a informé la CJCAS que le Dr D______ avait quitté les HUG et que le dossier avait été transféré au Dr L______, qui était sous la responsabilité du Dr K______.

k. Par courrier du 24 mai 2023, la chambre de céans a informé les parties de son intention de mettre en œuvre une expertise psychiatrique et leur a communiqué le nom de l’expert pressenti, le professeur M______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, ainsi que les questions qu’elle avait l’intention de lui poser, en leur impartissant un délai pour faire valoir une éventuelle cause de récusation et se déterminer sur les questions posées.

l. Le recourant a indiqué qu’il n’avait pas de motif de récusation à faire valoir à l’encontre de l’expert, ni de questions complémentaires à lui poser.

m. L’intimée a remis en cause l’impartialité du Prof. M______, en raison du fait qu’il était l’ancien président de la société Swiss orthopedics, dont le groupe d’experts de la chirurgie de l’épaule et du coude défendait, dans un rapport du 1er octobre 2020, l’idée qu’une lésion de la coiffe des rotateurs pouvait survenir en cas de choc direct sur l’épaule sans que le bras soit en extension, opinion que le Tribunal fédéral avait considéré ni justifiée ni scientifiquement prouvée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_446/2019 du 22 octobre 2019). L’intimée proposait en conséquence le nom de trois autres experts.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le droit du recourant aux prestations de l’intimée au-delà du 17 février 2020.

4.              

4.1  

4.1.1 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA; ATF 129 V 402 consid. 2.1, ATF 122 V 230 consid. 1 et les références).

4.1.2 La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1; ATF 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé: il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1, ATF 119 V 335 consid. 1 et ATF 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement «post hoc, ergo propter hoc»; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb; RAMA 1999 n° U 341 p. 408, consid. 3b). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

4.1.3 En vertu de l'art. 36 al. 1 LAA, les prestations pour soins, les remboursements de frais ainsi que les indemnités journalières et les allocations pour impotent ne sont pas réduits lorsque l'atteinte à la santé n'est que partiellement imputable à l'accident. Lorsqu'un état maladif préexistant est aggravé ou, de manière générale, apparaît consécutivement à un accident, le devoir de l'assurance-accidents d'allouer des prestations cesse si l'accident ne constitue pas la cause naturelle (et adéquate) du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui existerait même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine). A contrario, aussi longtemps que le statu quo sine vel ante n'est pas rétabli, l'assureur-accidents doit prendre à sa charge le traitement de l'état maladif préexistant, dans la mesure où il s'est manifesté à l'occasion de l'accident ou a été aggravé par ce dernier (ATF 146 V 51 consid. 5.1 et les références). En principe, on examinera si l'atteinte à la santé est encore imputable à l'accident ou ne l'est plus (statu quo ante ou statu quo sine) sur le critère de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine des assurances sociales (ATF 129 V 177 consid. 3.1 et les références), étant précisé que le fardeau de la preuve de la disparition du lien de causalité appartient à la partie qui invoque la suppression du droit (ATF 146 V 51 précité consid. 5.1 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 8C_606/2021 du 5 juillet 2022 consid. 3.2).

4.1.4 Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2 et ATF 125 V 456 consid. 5a et les références). En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur-accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a et ATF 117 V 359 consid. 5d/bb; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 351/04 du 14 février 2006 consid. 3.2).

4.2  

4.2.1 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

4.2.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

4.2.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Lorsqu'un cas d'assurance est réglé sans avoir recours à une expertise dans une procédure au sens de l'art. 44 LPGA, l'appréciation des preuves est soumise à des exigences sévères: s'il existe un doute même minime sur la fiabilité et la validité des constatations d'un médecin de l'assurance, il y a lieu de procéder à des investigations complémentaires (ATF 145 V 97 consid. 8.5 et les références; ATF 142 V 58 consid. 5.1 et les références; ATF 139 V 225 consid. 5.2 et les références; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références). En effet, si la jurisprudence a reconnu la valeur probante des rapports médicaux des médecins-conseils, elle a souligné qu'ils n'avaient pas la même force probante qu'une expertise judiciaire ou une expertise mise en œuvre par un assureur social dans une procédure selon l'art. 44 LPGA (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références).

Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes même faibles quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 139 V 225 consid. 5.2 et les références; ATF 135 V 465 consid. 4). 

4.2.4 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

5.             En l’espèce, les dernières conclusions du Dr G______, annoncées comme étant faites de façon consensuelle avec le Dr H______, n’ont pas été contresignées ni complétées par une appréciation de celui-ci. Le rapport du Dr G______ ne mentionne même pas la spécialisation du Dr H______, ni en quoi son apport était nécessaire et utile.

Les explications justifiant le changement d’avis du Dr G______ depuis son rapport du 13 novembre 2020 sont en outre peu convaincantes et à tout le moins suffisamment remises en cause par l’appréciation du Dr D______, qui a considéré dans son rapport du 9 novembre 2020 que l’arthroscopie avait mis en évidence une rupture de la partie haute du sous-scapulaire et des fissurations du long chef du biceps, qui pouvaient tout à fait être le résultat du traumatisme subi par le recourant, précisant que l’arthroscopie avait une valeur diagnostique supérieure à l’IRM.

Il se justifie en conséquence de faire procéder à une expertise par un chirurgien orthopédique indépendant.

6.              

6.1 L’intimée demande la récusation du Prof. M______ en raison de ses liens avec la société Swiss orthopedics, qui défend l’idée qu’une lésion de la coiffe des rotateurs peut également survenir en cas de choc direct sur l’épaule, sans que le bras soit en extension, opinion que le Tribunal fédéral a considérée non probante.

6.2 Selon la jurisprudence, les parties à une procédure ont le droit d'exiger la récusation d'un expert dont la situation ou le comportement sont de nature à faire naître un doute sur son impartialité. Cette garantie tend notamment à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition interne de l'expert ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale. Seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (cf. ATF 134 I 20 consid. 4.2 p. 21 et les arrêts cités).

Un expert passe pour prévenu lorsqu’il existe des circonstances propres à faire naître un doute sur son impartialité. Dans ce domaine, il s’agit toutefois d’un état intérieur dont la preuve est difficile à rapporter. C’est pourquoi il n’est pas nécessaire de prouver que la prévention est effective pour récuser un expert. Il suffit que les circonstances donnent l’apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale de l’expert. L’appréciation des circonstances ne peut pas reposer sur les seules impressions de l’expertisé, la méfiance à l’égard de l’expert devant au contraire apparaître comme fondée sur des éléments objectifs. Seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération (ATF 127 I 198 consid. 2b, ATF 125 V 351 consid. 3b/ee, 123 V 175 consid. 3d ; RAMA 1999 n° U 332 p. 193, U 212/97, consid. 2a/bb et les références). Dans ce domaine, la jurisprudence exige des faits qui justifient objectivement la méfiance. Celle-ci ne saurait reposer sur le seul sentiment subjectif d'une partie; un tel sentiment ne peut être pris en considération que s'il est fondé sur des faits concrets et si ces derniers sont, en eux-mêmes, propres à justifier objectivement et raisonnablement un tel sentiment chez une personne réagissant normalement (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 127/06 du 6 février 2007).

Un expert donne l'apparence de prévention, et peut donc être récusé, s'il a déjà été impliqué, à quelque titre que ce soit (conseiller ou expert privé, témoin, membre d'une autorité), dans la procédure, pour autant qu'il ait pris position au sujet de certaines questions de manière telle qu'il ne semble plus exempt de préjugés (ATF 126 I 68 consid. 3c p. 73, ATF 125 II 541 consid. 4 p. 544).

6.3 En l’occurrence, le fait que le Prof. M______ ait été président de la société Swiss orthopedics et qu’une opinion de cette dernière ait été jugée non probante ne suffit pas à remettre en cause l’impartialité de cet expert. En effet, le Tribunal fédéral a ainsi apprécié juridiquement un avis médical, qui n’était de plus pas signé par l’expert désigné. Ce dernier ne donne aucune apparence de prévention et les craintes de l’intimée ne reposent sur aucun élément objectif. La demande de récusation formée par l’intimée sera en conséquence rejetée.

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Préparatoirement :

I.                   Ordonne une expertise orthopédique du recourant.

II.                La confie au professeur M______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, à Chêne-Bougeries.

III.             Dit que la mission d’expertise sera la suivante :

A. Prendre connaissance du dossier de la cause.

B. Si nécessaire prendre tous renseignements auprès des médecins ayant traité la personne expertisée.

C. Examiner la personne expertisée et, si nécessaire, ordonner d'autres examens.

D. Établir un rapport comprenant les éléments et les réponses aux questions suivants :

1. Anamnèse détaillée

2. Plaintes de la personne expertisée

3. Status et constatations objectives

4. Diagnostics

4.1 Avec répercussion sur la capacité de travail

4.1.1 Dates d'apparition

4.2 Sans répercussion sur la capacité de travail

4.2.2 Dates d'apparition

4.3 L’état de santé de la personne expertisée est-il stabilisé ?

4.3.1 Si oui, depuis quelle date ?

4.4. Les atteintes et les plaintes de la personne expertisée correspondent-elles à un substrat organique objectivable ?

5. Causalité

5.1 Les atteintes constatées sont-elles dans un rapport de causalité avec l’accident ? Plus précisément ce lien de causalité est-il seulement possible (probabilité de moins de 50 %), probable (probabilité de plus de 50 %) ou certain (probabilité de 100 %) ?

5.1.1 Veuillez motiver votre réponse pour chaque diagnostic posé.

5.1.2 À partir de quel moment le statu quo ante a-t-il été atteint (moment où l’état de santé de la personne expertisée est similaire à celui qui existait immédiatement avant l’accident) ?

5.1.3 Veuillez indiquer la date du statu quo ante pour chaque diagnostic posé.

5.2 L’accident a-t-il décompensé un état maladif préexistant ?

5.2.1 Si oui, à partir de quel moment le statu quo sine a-t-il été atteint (moment où l’état de santé de la personne expertisée est similaire à celui qui serait survenu tôt ou tard, même sans l’accident par suite d’un développement ordinaire) ?

6. Limitations fonctionnelles

6.1. Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic.

6.1.1 Dates d'apparition

7. Capacité de travail

7.1 Quelle est la capacité de travail de la personne expertisée dans son activité habituelle, compte tenu des seules atteintes en rapport de causalité (au moins probable - probabilité de plus de 50 %) avec l’accident et comment cette capacité de travail a-t-elle évolué depuis l’accident ?

7.1.1 Si la capacité de travail est seulement partielle, quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ? Depuis quelle date sont-elles présentes ?

7.2 Quelle est la capacité de travail de la personne expertisée dans une activité adaptée, compte tenu des seules atteintes en rapport de causalité (au moins probable - probabilité de plus de 50 %) avec l’accident ?

7.2.1 Si cette capacité de travail est seulement partielle, quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ? Depuis quelle date sont-elles présentes ?

8. Traitement

8.1 Examen du traitement suivi par la personne expertisée et analyse de son adéquation.

8.2 Propositions thérapeutiques et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée.

8.3 Peut-on attendre de la poursuite du traitement médical une notable amélioration de l’état de santé de la personne expertisée ?

8.4 Si non, à partir de quel moment ne peut-on plus attendre de la continuation du traitement médical une notable amélioration de l’état de santé de la personne expertisée (état final atteint) ?

9. Appréciation d'avis médicaux du dossier

9.1 Êtes-vous d'accord avec l'avis du Dr G______ du 6 avril 2022 s’agissant du lien de causalité entre l’accident du 16 mai 2019 et l’atteinte à l’épaule de l’assuré ayant conduit à son opération du 18 février 2020 ? pour quels motifs ?

9.2 Êtes-vous d'accord avec les conclusions du Dr D______ du 9 novembre 2020 à ce sujet ?

10. Faire toutes autres observations ou suggestions utiles.

E. Invite l’expert à déposer son rapport en trois exemplaires dans les meilleurs délais auprès de la chambre de céans.

F. Réserve le fond ainsi que le sort des frais jusqu’à droit jugé au fond.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme de la présente ordonnance est notifiée aux parties par le greffe le