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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3934/2022

ATAS/540/2023 du 30.06.2023 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3934/2022 ATAS/540/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 juin 2023

Chambre 3

 

En la cause

A______

représenté par CAP Protection Juridique SA

 

 

recourant

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né en 1983, de nationalité suisse, a travaillé comme sauveteur/surveillant de bain de 2016 à 2019 et bénéficie de l'aide sociale depuis octobre 2019.

b. Le 4 octobre 2019, l'assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI) en raison d'un lymphome présent depuis juin 2019, traité par chimiothérapie depuis le 2 septembre 2019. En outre, il était porteur depuis la naissance du virus de l'immunodéficience humaine (ci-après : VIH) et souffrait d’une insuffisance rénale grave, ainsi que d’une hypertension avec fort risque d'accident vasculaire cérébral (AVC), en traitement depuis 2009, ce à quoi s'ajoutait du stress.

c. L’instruction de sa demande a permis de recueillir plusieurs pièces, dont, notamment, les rapports de ses médecins traitants, les docteurs B______, spécialiste FMH en médecine interne générale, et C______, spécialiste FMH en médecine interne et oncologie-hématologie, et ceux d'autres médecins spécialistes.

d. Le 3 décembre 2020, le Service médical régional de l’AI (ci-après : SMR) a admis une totale incapacité à exercer l'activité habituelle de sauveteur/surveillant de bain. En revanche, dans la mesure où le Dr C______ avait attesté, dans un rapport du 7 février 2020, la rémission complète du lymphome malin et une pleine capacité de travail dans une activité adaptée, le SMR a considéré que l’intéressé avait recouvré, dès le 7 février 2020, une capacité de travail entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles (activité légère, sédentaire, principalement en position assise, permettant l'alternance des positions au gré de l'assuré, limitant les manipulations de charges à 5 kg, sans position du rachis en porte-à-faux, sans usage de machines vibrantes et/ou percutantes, sans travail de nuit, à répartir harmonieusement sur cinq jours ouvrables).

e. Le service de réadaptation de l'OAI a considéré, dans un rapport du 28 janvier 2021, que des mesures professionnelles ne seraient ni simples, ni adéquates et qu'elles ne permettraient pas de réduire le dommage. Un marché équilibré du travail offrait un nombre significatif d'activités simples, légères et accessibles ne demandant aucune formation particulière.

f. Le 1er février 2021, l'OAI a adressé à l'assuré un projet de décision dont il ressortait qu'il entendait rejeter sa demande de prestations, compte tenu du fait qu’à compter du 7 février 2020, il avait recouvré une pleine capacité de travail dans une activité adaptée à son état de santé.

g. Le 2 février 2021, l’assuré a fait part de son désaccord avec ce projet et, le 2 mars 2021, il a motivé sa position en invoquant les rapports de ses médecins.

h. De nouveaux documents ont été versés à la procédure et soumis au SMR, qui, considérant la possibilité d’une atteinte de type syndrome sans pathogénèse, ni étiologie claire et sans constat de déficit organique (désormais nommé trouble somatoforme douloureux et autres troubles psychosomatiques), a préconisé une expertise pluridisciplinaire (rhumatologie, neurologie, psychiatrie et médecine interne).

i. En mai 2021, de nouveaux rapports médicaux ont encore été versés au dossier.

j. Ces rapports ont été soumis au SMR, qui, le 11 juin 2021, a estimé qu'ils n'étaient pas de nature à modifier sa position. Il convenait cependant d’ajouter à l'expertise pluridisciplinaire un volet oncologique.

k. L’expertise a été confiée au CEMEDEX, plus précisément aux docteurs D______, spécialiste en rhumatologie, E______, spécialiste en médecine interne générale, F______, spécialiste en neurologie, G______, oncologue hématologue, et H______, spécialiste en psychiatrie, lesquels ont rendu leur rapport le 14 avril 2022, sur la base du dossier, des pièces produites et d'examens cliniques réalisés les 10 et 25 février 2022.

Dans leur évaluation consensuelle, les experts ont retenu à titre de diagnostics ayant une influence sur la capacité de travail : un lymphome non hodgkinien B de haut grade associé à une maladie du VIH DLBCL, CD10 positif, CD5 négatif (C83.3), des cervicalgies sans irradiation sur hernie discale postéro-latérale et intraforaminale droite du disque C5-C6 (M51.2), un « cancer related fatigue syndrom », avec asthénie de grade 3, myalgies et arthralgies diffuses, troubles de la concentration et de la mémorisation (U51) et troubles visuels, un trouble de l'adaptation, avec réaction mixte anxieuse et dépressive en 2019, ainsi qu’une dysthymie (F34.1) depuis 2020.

Les limitations fonctionnelles en découlant étaient les suivantes : sur le plan rhumatologique, pas d'effort de soulèvement de plus de 10 kg à partir du sol, pas de porte-à-faux ou de rotation répétée du rachis cervical, port de charge proche du corps limité à 20 kg ; sur le plan oncologique, un port de charges limité à 5 kg, une limitation de l'activité physique de type marche, des changements fréquents de position, des troubles importants de la concentration et de la mémorisation, des douleurs ophtalmologiques ; sur le plan psychiatrique, une capacité de travail globalement réduite en raison de la fatigue, des troubles de la concentration, de la dysthymie et d’un état dépressif chronicisé et d'intensité légère à moyenne.

L'incapacité a été jugée totale dans l’activité habituelle dès août 2019, en raison de l’asthénie, des douleurs musculaires diffuses, des polyarthralgies, des douleurs osseuses, de la diminution de la concentration et de la mémorisation et des douleurs oculaires. Il était précisé que l'assuré se trouvait encore sous traitement d'immunothérapie et que l'incapacité de travail était essentiellement oncologique et, à moindre degré, psychiatrique. Désormais, des mesures de réinsertion professionnelles étaient envisageables à taux progressif sur six mois, en débutant à 20%, avec l'objectif d'atteindre le taux de 75% dans une activité adaptée.

Il était précisé que la conférence consensuelle avait eu lieu par mail de tous les experts le 20 mars 2022.

l. Le 10 mai 2022, le SMR a admis une totale incapacité de travail dès le 15 juin 2019 et jusqu’au 14 avril 2022, date à compter de laquelle il a considéré que l’assuré avait recouvré une capacité de travail de 100% avec baisse de rendement de 40% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles (activité simple, plus ou moins répétitive, légère, sédentaire, principalement en position assise, permettant l'alternance des positions au gré de l'assuré, sans manipulation de charges lourdes de plus de 5 kg à répétition, sans position du rachis en porte-à-faux, à répartir harmonieusement sur cinq jours ouvrables).

m. L’OAI a alors procédé à une évaluation du degré d’invalidité, qu’il a estimé à 40%. Il s'est fondé sur le même revenu statistique médian de l'enquête suisse sur la structure des salaires de l’Office fédéral de la statistique (ESS 2018 TA1_tirage_skill_level = CHF 5'417.-/mois pour un horaire de 40 h./sem. = CHF 5'647.-/mois pour un horaire de 41,7 h/sem. = CHF 67'767.- en 2018 = CHF 68'906.- en 2022), tant pour déterminer le revenu après, que celui avant invalidité, en raison du fait qu'il ressortait du compte individuel de l'assuré que celui-ci n’avait réalisé que des revenus très irréguliers auprès de nombreux employeurs. L’OAI a fait remarquer que cette méthode avantageait l'intéressé. Ainsi, le taux d'invalidité se confondait avec la baisse de rendement de 40%.

n. Par décision du 20 octobre 2022, l'OAI a reconnu à l’assuré le droit à une rente entière basée sur un degré d'invalidité de 100% dès le 1er juin 2020, réduite, à compter du 1er août 2022, à un quart de rente, basé sur un degré d'invalidité de 40%.

o. Par décision du 11 novembre 2022, l'OAI a précisé que l'assuré avait droit à une rente ordinaire mensuelle entière de CHF 1'401.- du 1er juin au 31 décembre 2020 et de CHF 1'412.- du 1er janvier au 31 juillet 2022, puis, à une rente ordinaire mensuelle à 25% de CHF 353.- du 1er août au 31 octobre 2022, ce qui correspondait au total à CHF 37'694.-, montant qui devrait être versé à l'Hospice général à titre de compensation des avances versées à l’assuré.

B. a. Le 21 novembre 2022, l'assuré a saisi la Cour de céans d'un recours contre la décision du 20 octobre 2022, en concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à l'octroi d'une rente entière d'invalidité, subsidiairement, au renvoi du dossier à l'intimé pour nouvel examen de son droit aux prestations.

À l'appui de sa position, il a produit notamment un rapport de la Dre B______ du 2 novembre 2022, attestant qu’il souffre, suite aux traitements anti-cancéreux, d’une fatigue extrême, de douleurs invalidantes des membres inférieurs, d’une perte de poids et d’une inappétence. Parallèlement, sa santé psychique s’est sérieusement dégradée, en raison notamment du fait que les traitements ont débuté quasiment en même temps que la pandémie de COVID-19, ce qui a augmenté son anxiété, son isolement social et sa précarité. Il était toujours en arrêt de travail de longue durée depuis le 1er juin 2020, en raison des différents problèmes médicaux et il n'était pas envisageable qu'il reprenne une quelconque activité professionnelle, même à temps partiel.

b. Le 6 décembre 2022, l’assuré a également interjeté recours contre la décision du 11 novembre 2022 et conclu à la jonction des causes.

c. Par ordonnance du 14 décembre 2022, la Cour de céans a ordonné la jonction des causes A/3934/2022 et A/4154/2022 sous le numéro de cause A/3934/2022.

d. Invité à se déterminer, l'intimé a conclu au rejet des recours, en se référant à un nouvel avis du SMR du 20 décembre 2022 estimant que le rapport du 2 novembre 2022 de la Dre B______ n’amenait pas de nouvel élément objectif.

e. Le 20 janvier 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il a précisé avoir fait une demande d'octroi de carte de stationnement pour personnes à mobilité réduite, qui lui avait été accordée.

f. Entendu le 16 février 2023 par la Cour de céans, le recourant a déclaré que les effets secondaires de son traitement contre le cancer persistaient, malgré une rémission complète : il dort tout le temps, souffre de douleurs chroniques cervicales et dorsales et ne sort plus de chez lui depuis quatre ans. Il aimait travailler et souhaiterait à nouveau en être capable. Malgré les pathologies présentes depuis l'enfance, il a suivi de nombreuses formations et s'est épanoui dans son dernier emploi, qui était très physique (il impliquait plus de 16 km de marche par jour et énormément de nage, ce dont il n'est désormais plus capable). Il a expliqué être très inquiet de ses inflammations inguinales, qui entravent sa motricité et l'empêchent de marcher. Il dit avoir le sentiment que quelque chose ne va pas à nouveau et n’entend pas, dans ces conditions, mettre sa vie en danger en reprenant un emploi. Le recourant s’étonne que les experts aient retenu une capacité de travail alors qu'il se trouvait encore sous traitement. Il souligne que le risque de rechute est de 86%. Il souffre d'une fatigue extrême et parvient à peine à faire ses courses, de sorte qu'il n'est pas envisageable qu'il reprenne une activité professionnelle. Il n'a pas de suivi psychiatrique et ne prend pas de traitement antidépresseur, car il craint que cela ne le prive de toute énergie.

L'intimé a rappelé que, pour tenir compte des effets secondaires et des limitations fonctionnelles en découlant, une baisse de rendement a été admise.

g. L’assuré a été engagé auprès de la Fondation Foyer–Handicap à compter du 1er juin 2023, au sein de ses ateliers protégés.

h. Les autres faits seront repris - en tant que de besoin - dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

3.1 En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est, en principe, celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

Selon les dispositions transitoires de la modification de la LAI du 19 juin 2020, pour les bénéficiaires de rente dont le droit à la rente est né avant l’entrée en vigueur de la modification et qui n’avaient pas encore 55 ans à l’entrée en vigueur de cette modification, la quotité de la rente ne change pas tant que leur taux d’invalidité ne subit pas de modification au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA (let. b al. 1). Si une modification intervient postérieurement au 31 décembre 2021 et qu'elle est égale ou supérieure à 5 points de pourcentage, l'assuré passe en principe au nouveau système de rentes (cf. disposition transitoire de la modification du 19 juin 2020, let. b al. 1 LAI ; Annexe IV de la Circulaire sur l'invalidité et les rentes dans l'assurance-invalidité publié par l'Office fédéral des assurances sociales, dans sa version valable dès le 1er janvier 2022).

3.2 En l’occurrence, les décisions querellées concernent un premier octroi de rente dont le droit est né avant le 1er janvier 2022. Cela étant, ces décisions prévoient également l'adaptation de la rente à la suite d'une modification du taux d'invalidité, qui serait intervenue postérieurement au 31 décembre 2021 et serait supérieure à 5 points de pourcentage. Or, le recourant, né le 2 juillet 1983, était âgé de 38 ans au 1er janvier 2022. Aussi les dispositions légales applicables seront-elles citées dans leur nouvelle teneur.

4.             Déposés dans les forme et délai prévus par la loi (art. 56ss LPGA), les recours sont recevables.

5.             Le litige porte sur le droit du recourant à une rente entière d'invalidité au-delà du 31 juillet 2022, singulièrement sur sa capacité à exercer une activité adaptée dès le 14 avril 2022.

6.             Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5.2 ; ATF 125 V 413 consid. 2d et les références ; VSI 2001 p. 157 consid. 2). Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'article 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 130 V 343 consid. 3.5 ; ATF 113 V 273 consid. 1a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_1006/2010 du 22 mars 2011 consid 2.2).

7.             Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable.

8.             En vertu de l’art. 28b LAI, la quotité de la rente est fixée en pourcentage d’une rente entière (al. 1). Pour un taux d’invalidité compris entre 50 et 69%, la quotité de la rente correspond au taux d’invalidité (al. 2). Pour un taux d’invalidité supérieur ou égal à 70%, l’assuré a droit à une rente entière (al. 3). Pour un taux d’invalidité inférieur à 50%, la quotité de la rente est la suivante (al. 4) :

taux d’invalidité

quotité de la rente

49%

47,5%

48%

45%

47%

42,5%

46%

40%

45%

37,5%

44%

35%

43%

32,5%

42%

30%

41%

27,5%

40%

25%

8.1 Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

8.2 Selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I.654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

9.             En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA. Selon l’art. 29 al. 3 LAI, la rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance.

10.         Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références; ATF 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

10.1 Selon le principe de la libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

10.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

10.2.1 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

10.2.2 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 du règlement sur l'assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201] ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

10.2.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

11.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

12.         De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 130 V 130 consid. 2.1).

13.         En l'espèce, l'intimé reconnaît une incapacité de travail totale dans toute activité depuis le 15 juin 2019 (début du délai d'attente), mais considère qu’à compter du 14 avril 2022, l’assuré a recouvré une capacité de 100% avec baisse de rendement de 40% dans une activité adaptée. La décision entreprise repose sur l'avis du 10 mai 2022 du SMR, lequel se réfère à l'expertise pluridisciplinaire du 14 avril 2022.

Le recourant conteste cette position. Il soutient qu'en raison de ses différentes atteintes, il est encore totalement incapable de reprendre une activité professionnelle.

Il y a donc lieu d’examiner la valeur probante de l’expertise réalisée par le CEMEDEX.

13.1 Le rapport d'expertise comprend une évaluation consensuelle et une expertise individuelle par spécialité (rhumatologique, médecine interne, neurologique, oncologique et psychiatrique).

Il ressort en particulier de l'évaluation consensuelle ce qui suit.

Les experts ont établi l'historique médical suivant :

-          Le recourant est atteint du VIH depuis la naissance (transmission par sa mère) et grandit dans des conditions familiales difficiles, avec un père qui décède tôt d'un arrêt cardiaque, une mère toxicomane et un frère qui décède d'une overdose. En 2012, on lui diagnostique également une hypertension artérielle et une néphropathie. En 2019, il présente une douleur inguinale, qui a débuté à la suite d'un effort de traction sur un catamaran pour le sortir du lac et le tirer sur la plage. Après plusieurs examens, une adénopathie du pli inguinal gauche est découverte et le diagnostic de lymphome non hodgkinien B est posé. Celui-ci est traité par chimiothérapie. La chimiothérapie est poursuivie par un traitement par Mabthera. Le 8 juin 2020, un examen neurologique met en évidence une hypoesthésie globale de l'hémicorps gauche. Une électroneuromyographie montre une discrète neuropathie bilatérale du nerf médian dans le canal carpien prédominant à droite. Aux membres inférieurs, la neurographie expose un début de polyneuropathie sensitive, longueur dépendante mais pas d'atteinte motrice. Il n'y a pas d'argument en faveur d'un trouble de la jonction neuromusculaire, ni en faveur d'une pathologie musculaire. Les douleurs se poursuivent en se généralisant et le 8 juillet 2020, il est vu par un rhumatologue qui réalise une IRM lombaire ne mettant en évidence aucun conflit radiculaire pouvant expliquer la douleur dans le pli inguinal gauche. L'IRM du bassin ne met pas non plus en évidence d'atteinte de la hanche gauche. Il n'y a aucun phénomène inflammatoire ou mécanique au niveau de l'articulation, pas d'ostéonécrose secondaire ni d'adénopathie. Le bilan biologique et métabolique est normal et on ne peut pas poser de diagnostic de rhumatisme inflammatoire. Le 7 janvier 2021, une IRM du rachis cervical montre une volumineuse hernie discale postéro-latérale et intraforaminale droite du disque C5-C6 contraignant l'émergence foraminale de la racine C8 droite. Il n'y a pas de signe de myélomalacie, ni sténose foraminale disco-ostéophytaire dégénérative C4-C5 droite. Une solution chirurgicale n'est pas préconisée étant donné l'absence d'atteinte déficitaire.

-          Désormais, l'hypertension artérielle est bien maîtrisée par un traitement avec Votum 40 mg/jour. La néphropathie est suivie uniquement sur le plan clinique et laboratoire et ne nécessite pas de suivi spécialisé. À la suite de la découverte du lymphome en 2019 et de son traitement, le recourant présente en plus une fatigue très importante, ainsi que des douleurs multiples. Grâce à la trithérapie, le VIH congénital est contrôlé et reste sans influence sur la capacité de travail. Concernant l'hypertension artérielle, la néphropathie et le VIH, le pronostic est bon. Après le diagnostic du lymphome non hodgkinien de type DLBCL diagnostiqué en 2019 (36 ans), le traitement agressif par chimiothérapie et immunothérapie a été suivi de façon tout à fait correcte par le recourant et conformément aux recommandations internationales (ESMO et ASCO). Ce diagnostic a été précédé d'une perte de poids importante de 10 kg, d'une asthénie et de sudations. Le recourant collabore très bien avec ses médecins traitants, les Drs C______ et B______. La collaboration a également été excellente lors de l'expertise. Il a témoigné d'une grande émotivité avec de fréquentes larmes. Les traitements sont suivis encore actuellement, le dernier Rituximab devant être donné au mois de mars 2022. Au moment de l'examen, le recourant est en rémission complète. Il n'y a donc pas lieu d'envisager d'autres traitements. Sur le plan psychiatrique, le recourant n'a jamais eu de suivi, car il a toujours pu trouver des solutions pour aller de l'avant. Il a vu brièvement un psychiatre à la suite du suicide de son meilleur ami en 2009 (il conduisait et son ami a sauté de la voiture et s'est tué, cela a fait suite à de nombreuses investigations criminelles et il a dû d'ailleurs payer une amende de CHF 14'000.- qu'il vient de finir de rembourser). Le suivi a duré deux mois (trois séances de thérapie en 2009), il n'a pas eu de traitement psychotrope et a été déclaré « sain ». Il se sent très malchanceux, car il était sur le bon chemin, avait trouvé un travail qui lui plaisait, et ce lymphome a tout remis en question. Désormais, il n'a pas de suivi particulier et ne prend pas de traitement psychotrope. Il n'a jamais été hospitalisé en milieu psychiatrique.

Les experts ont retenu plusieurs diagnostics ayant une influence sur la capacité de travail, à savoir, un lymphome non hodgkinien, des cervicalgies sans irradiation sur hernie discale, un « Cancer related fatigue syndrom » avec asthénie de grade III, myalgies et arthralgies diffuses, douleurs osseuses diffuses, troubles de la concentration et de la mémorisation et troubles visuels, un trouble de l'adaptation, réaction mixte anxieuse et dépressive en 2019 et une dysthymie depuis 2020.

Ils ont également mentionné, en précisant qu’ils étaient sans influence sur la capacité de travail : un syndrome douloureux chronique sans origine rhumatologique, une hypertension artérielle traitée, une séropositivité pour le VIH, une glomérulopathie, une polyneuropathie sensitive très discrète sans déficit neurologique clinique, ni trouble de la sensibilité superficielle ou profonde, ni limitation motrice locale, ainsi qu’une hernie discale C5-C6 droite avec signe d'une contrainte sur la racine C8 droite, sans argument clinique pour un déficit moteur ou sensitif aux membres supérieurs.

Les limitations fonctionnelles consécutives aux atteintes rhumatologiques, oncologiques et psychiatriques sont les suivantes : pas de porte-à-faux ou de rotation répétée du rachis cervical, un port de charges limité à 5 kg, une limitation de la marche, des changements fréquents de position, des troubles importants de la concentration et de la mémorisation, des douleurs ophtalmiques et de la fatigue, de la dysthymie et un état dépressif chronicisé et d'intensité légère à moyenne entraînant globalement une diminution de rendement.

Les experts ont estimé que le recourant dispose de ressources internes (désir de reprendre une activité professionnelle, permis de conduire, formation de diamantaire et de maître sauveteur, exercice durant plusieurs années de diverses professions avec satisfaction, maîtrise du français et de l'anglais, capacités d'adaptation aux règles, de planification et de structuration de tâches, bon contact avec les autres) et externes (médecins traitants, frère et quelques amis). En revanche, il existe des limitations non uniformes dans tous les domaines de la vie (problèmes physiques et fonctionnels du type asthénie de grade III, myalgies diffuses, souvent à type de crampes, arthralgies au niveau des poignets, des coudes, des épaules, des hanches et des chevilles entraînant une boiterie, une limitation à la marche, incapacité à effectuer un travail de sauveteur ou un travail physique ou l'entretien et la sécurité dans les piscines, immunosuppression liée au lymphome en soi, ainsi que dans le contexte personnel de maladie néo-natale au VIH).

Selon les experts, l’incapacité de travail se justifie essentiellement par l’atteinte oncologique. Ils soulignent également que, d'un point de vue psychiatrique, la capacité de travail est de 60% (100% avec baisse de rendement de 40%). Dans l'activité habituelle de sauveteur/surveillant de bain, ils ont reconnu une incapacité de travail totale depuis août 2019, en raison de l’asthénie, des douleurs musculaires diffuses, des polyarthralgies, des douleurs osseuses, de la diminution de la concentration et de la mémorisation et des douleurs oculaires. Ils ont précisé que le recourant était encore sous traitement d'immunothérapie. Dans une activité adaptée, ils ont considéré que des mesures de réinsertion professionnelle étaient désormais envisageables, en débutant à 20% et avec l'objectif d'atteindre progressivement le taux de 75% sur six mois, étant précisé que l'injection de Rituximab (traitement oncologique prévu en mars 2022) était susceptible d'entraîner un arrêt de travail de brève durée.

S'agissant des mesures médicales et thérapies ayant une incidence sur la capacité de travail, les experts ont estimé que, sur le plan de la médecine interne générale, le recourant nécessite un suivi régulier de sa tension artérielle, de la maladie VIH avec surtout surveillance de la charge virale, ainsi que la glomérulonéphrite, dont la fonction rénale devrait être contrôlée régulièrement. Du point de vue oncologique, ils ont retenu qu'il faudrait réaliser des tests neuropsychologiques pour se prononcer sur l'activité adaptée, que le dernier traitement d'immunothérapie est prévu au début de mars 2022, que les mesures et thérapies médicales pour le cas de progression ou rechute du lymphome associée au VIH existent et font l'objet de consensus au cas par cas et que la capacité de travail peut être améliorée par des mesures intensives de reconditionnement, physiothérapie, entretien, exercices de mémorisation, exercices de concentration. Sur le plan psychiatrique, partant d'un constat d'asthénie de grade III, de troubles importants de la concentration et de la mémorisation, de douleurs oculaires et d'un état dépressif réactionnel, les experts ont relevé qu'il existe des paramètres mesurables fiables pour estimer la faisabilité et l'amélioration dans un travail adapté et qu'une psychothérapie pourrait être instaurée au besoin, avec une médication psychotrope antidépresseur non sérotoninergique, mais qu’en raison de la polymédication, les interactions médicamenteuses devraient être examinées.

Les experts ont noté des différences de comportement du recourant en fonction des expertises, qui, selon eux, pourraient être dues au fait qu'il a réalisé les cinq expertises en deux jours (trois expertises le 10 mars et deux le 25 mars). Les experts en médecine interne et en rhumatologie ont estimé qu'il y avait quelques incohérences entre leurs examens cliniques et les plaintes du recourant. En revanche, les souffrances et les effets des traitements rapportés ont été considérés comme cohérents et en rapport à la littérature par l'experte oncologue. De même, selon l'experte psychiatre, il n'y a pas d'incohérence.

13.2 Si, sur le plan formel, le rapport répond à plusieurs réquisits jurisprudentiels en matière de valeur probante (résumé du dossier, anamnèse, indications subjectives de l’assuré, observations cliniques), il comporte quelques incohérences et imprécisions.

Ainsi, la partie évaluation consensuelle du rapport n'est pas toujours très claire, les experts s'étant régulièrement contentés de reprendre les extraits de leurs expertises individuelles, sans faire de réelle synthèse entre les différentes spécialités. Par ailleurs, on a de la peine à comprendre comment l'expert rhumatologue peut arriver à la conclusion qu'il existe un diagnostic rhumatologique ayant une influence sur la capacité de travail (cervicalgies sans irradiation sur hernie discale postéro-latérale et intraforaminale droite du disque C5-C6) et des limitations fonctionnelles en lien avec ce diagnostic, sans admettre aucune incapacité de travail sur le plan rhumatologique, pas même dans l'activité habituelle de sauveteur/surveillant de bain. Par ailleurs, l'experte psychiatre a indiqué ne pas suspecter de trouble douloureux somatoforme, sans donner d'autre précision, ni discuter cette question, alors que les experts rhumatologue et neurologue ont, dans leur expertise respective, relevé des douleurs diffuses, musculo-squelettiques et neurologiques ne trouvant pas d'explication dans les sphères rhumatologique ou neurologique.

En revanche, il ressort clairement de l'avis de tous les experts que l'origine de l'incapacité de travail est essentiellement d'ordre oncologique. Or, au moment de l'examen, le recourant, qui était alors encore en traitement d'immunothérapie, et ce jusqu’en mars 2022, était encore totalement incapable d’exercer une activité adaptée. L'experte oncologue a estimé qu'une reprise à 20% dans une activité adaptée pourrait être possible dès avril 2022, tout en préconisant une réévaluation et une augmentation progressive jusqu'à 75% sur une période de six mois. Cette activité adaptée devait permettre de limiter le port de charges à 5kg et la marche, d’autoriser les changements fréquents de position, de tenir compte des troubles importants de la concentration et de la mémorisation et des douleurs ophtalmologiques. Cette experte, au demeurant la seule à s'être entretenue avec les médecins traitants (généraliste et oncologue) du recourant et à avoir bien documenté ses résultats, est parvenue à des conclusions bien motivées et convaincantes.

Certes, l'expertise du CEMEDEX laisse à désirer sur certains points. Cela étant, force est de constater que son volet oncologique peut se voir reconnaître pleine valeur probante. Or, dans la mesure où les experts estiment tous que l'incapacité de travail du recourant est essentiellement motivée par les atteintes oncologiques, il convient de se référer aux conclusions de l'experte oncologue, qui retient une incapacité de travail totale dans toute activité depuis août 2019 et une capacité de travail de 20% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles dès avril 2022.

Cela étant, si elle indique également que ce taux pourrait être augmenté progressivement, l’experte a également souligné la nécessité d’une réévaluation, de sorte que la Cour de céans ne saurait retenir, telle quelle, la progression envisagée, d’autant moins que, selon l’experte, des tests neuropsychologiques seraient nécessaires pour déterminer quelle activité serait réellement adaptée. Aussi, sans réévaluation médicale subséquente permettant de savoir si la capacité de travail du recourant a réellement évolué et dans quelle mesure, il n'est pas possible de se déterminer sur la capacité de travail au-delà d'avril 2022.

13.3 Force est de constater que le SMR n'a pas correctement retranscrit les conclusions de cette expertise, en particulier sur la capacité de travail dans une activité adaptée, puisqu'il n’a repris, en réalité, que les résultats de l'expertise psychiatrique, sans tenir compte du volet oncologique, lequel justifie pourtant principalement l'incapacité de travail. Partant, c'est à tort que le SMR a retenu une capacité de travail entière avec diminution de rendement de 40% dès le 14 avril 2022 et que l'intimé s'est fondé sur cet avis pour diminuer le droit à la rente du recourant dès le 1er août 2022.

13.4 Les médecins traitants du recourant, les Drs B______ et C______, ainsi que la docteure I______, spécialiste FMH en rhumatologie et médecine interne, ne remettent pas expressément en cause le rapport d'expertise, mais considèrent qu'en raison de toutes les comorbidités (lymphome, polyneuropathie, problèmes dégénératifs squelettiques, fatigue et asthénie post-chimiothérapie, problème de tension artérielle, état dépressif réactionnel), le recourant n'est pas apte à reprendre une activité adaptée (cf. rapports du 13 juillet et du 2 novembre 2022 de la Dre B______, du 14 juillet 2022 du Dr C______ et du 22 juillet 2022 de la Dre I______).

13.5 Dans la mesure où la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée était en réalité seulement de 20% en avril 2022, qu'il ressort du dossier qu'aucune réévaluation n'a eu lieu entre l'expertise du CEMEDEX et les décisions litigieuses - en dépit des recommandations de l'experte oncologue - et que les médecins traitants du recourant persistent à dire que leur patient n’est pas apte à reprendre une activité adaptée, il n'est pas possible de se déterminer clairement sur l'évolution de la capacité de travail au-delà d'avril 2022.

Dans ces circonstances, la Cour de céans ne saurait confirmer, sur la base de l'expertise du CEMEDEX, la décision de diminuer la rente du recourant dès le 1er août 2022. Il convient dès lors de renvoyer la cause à l'intimé afin qu'il instruise la question de l'évolution de la capacité de travail du recourant au-delà d'avril 2022, en prenant en compte, notamment, la durée des effets du traitement oncologique, malgré la fin dudit traitement, et, au besoin, en mettant en œuvre un bilan neuropsychologique.

14.         La période postérieure au 20 octobre 2022 sort du cadre du présent litige, de sorte que le fait que le recourant ait été engagé le 1er juin 2023 en atelier protégé ne sera pas pris en compte.

15.         Au vu de ce qui précède, le recours est partiellement admis et les décisions des 20 octobre et 11 novembre 2022 partiellement annulées, la cause renvoyée à l'intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision dans le sens des considérants.

Le recourant obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 2'500.- lui est accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Au vu du sort du recours, il y a par ailleurs lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement au sens des considérants.

3.        Annule partiellement les décisions du 20 octobre et du 11 novembre 2022, en tant qu'elles réduisent la rente du recourant dès le 1er août 2022.

4.        Renvoie la cause pour instruction complémentaire concernant la période postérieure à avril 2022 et nouvelle décision.

5.        Condamne l’intimé à verser CHF 2'500.- au recourant, à titre de dépens.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le