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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/682/2022

ATAS/554/2023 du 06.07.2023 ( LAA )

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

A/682/2022 ATAS/554/2023

 

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Ordonnance d’expertise du 6 juillet 2023

Chambre 8

 

En la cause

A______
représenté par Maître Sara GIARDINA

 

recourant

 

contre

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS

représentée par Maître Jeanne-Marie MONNEY

 

 

intimée

 


 

EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______ 1972, était employé en qualité de décorateur auprès de B______ SA, une société liée à C______ SA, depuis le 1er septembre 1997. À ce titre, il était assuré auprès de la Caisse nationale suisse en cas d’accidents (ci-après : la SUVA).

b. Le 6 octobre 2018, l’assuré s’est blessé à l’aine en déplaçant un panneau en plexiglas. Dans son courriel du 12 décembre 2018 à la SUVA, il a précisé qu’il était accroupi, lorsque l’objet qui pesait environ 45 kilos avait glissé et lui était tombé sur l’aine. Pensant que la douleur ressentie dans l’aine était passagère, il avait continué à travailler. Cependant, le soir, la douleur s’était aggravée et il s’était rendu chez un ostéopathe. Le docteur D______, spécialiste FMH en médecine interne générale, l’avait néanmoins considéré apte au travail, de sorte qu’il avait continué à travailler à 100%. Après une semaine, la douleur persistait et s’intensifiait, si bien qu’il avait dû se rendre aux urgences de la Clinique des Grangettes le 2 novembre 2018.

c. Dans son rapport du 5 novembre 2018, la docteure E______, spécialiste FMH en médecine interne, de la consultation des urgences de la Clinique des Grangettes, a posé les diagnostics de contusion du pli inguinal gauche sans complication.

d. Le 15 novembre 2018, l’assuré a repris le travail.

e. Une imagerie par résonance magnétique (ci-après : IRM) lombaire du 16 avril 2019 a conclu à un pincement discal et dessiccation avec fissurations de l’anneau postérieur L4-L5, sans conflit disco-radiculaire, ni rétrécissement canalaire significatif. Il y avait aussi des signes de surcharge interapophysaire postérieure à ce même étage et un hypersignal du ligament interépineux.

f. À partir du 6 mai 2019, l’assuré a été de nouveau mis en arrêt de travail.

g. Une IRM du 9 mai 2019 a conclu à l’absence d’anomalie osseuse du sacrum et des branches ilio- ou ischio-pubienne. Il n’y avait pas de signe d’une fracture à ce niveau, ni lésion dégénérative au niveau des hanches des deux côtés, ni kyste arthro- ou ténosynovial antérieur de la hanche gauche, ni tendinopathie de la cuisse proximale, ni amyotrophie fessière intra-pelvienne ou proximale des deux cuisses, ni œdème évoquant une pathologie musculaire. Toutefois, le rapport relatif à cet examen a indiqué que, si les douleurs devaient persister, une arthro-IRM de la hanche gauche pourrait être nécessaire afin d’exclure une pathologie du labrum.

h. Dans son rapport du 10 mai 2019, le docteur F______, spécialiste FMH en neurologie, a constaté que l’assuré présentait des douleurs irradiantes sacrées en relation avec la pression inguinale. Il n’y avait pas d’arguments pour une atteinte de type radiculaire, mais une étonnante corrélation avec la douleur inguinale gauche et l’irradiation sacrée. Il n’y avait pas d’explication à l’heure actuelle pour ces douleurs, mais celles-ci étaient clairement en relation avec le traumatisme.

i. Le 13 juin 2019, le Dr D______ a posé les diagnostics de diastasis de la symphyse pubienne traumatique.

j. Du 30 septembre au 2 octobre 2019, l’assuré a séjourné à la Clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR). Dans leur rapport du 7 octobre 2019, les médecins de cette clinique ont posé le diagnostic de diastasis de la symphyse avec douleurs de la région inguinale gauche depuis le 6 octobre 2018. Ils font état de la réception d'un panneau pesant entre 20-30 kg dans la région de l'aine gauche. L’assuré avait repris son travail depuis le 9 septembre 2019 à 50% dans un poste adapté (dispense de voyages et montage des vitrines auprès des clients). Le pronostic de retour au travail était bon, le diastasis de symphyse post-traumatique était en cours de cicatrisation, en se fondant sur la symptomatologie douloureuse au décours et l’examen clinique rassurant, même si l’assuré s’autolimitait passablement. L’assuré a estimé la récupération entre 60 et 70% depuis le début de l’accident.

k. Dans son rapport du 19 novembre 2019, le docteur S______ de l’Institut chiropratique a posé le diagnostic de diastasis symphysaire post-traumatique en progrès constant avec un bon pronostic.

l. À partir du 13 décembre 2019, une incapacité de travail à 100% est attestée.

m. Dans son rapport du 24 janvier 2020, le docteur G______, neurochirurgien FMH, a fait état de ce que l'assuré a reçu un panneau sur le haut de la cuisse gauche tout proche de l'aine avec des douleurs consécutives au niveau du bassin, de la fesse gauche et la racine du membre inférieur. L'IRM ne montrait aucune compression claire des structures neurologiques. Un bilan par un électromyogramme (EMG) des membres inférieurs était nécessaire.

n. Selon le rapport du 4 février 2020 du docteur H______, spécialiste FMH en neurologie, un bilan neurologique et électroneuromyographique a été réalisé en raison de douleurs au niveau du pli inguinal et de la fesse gauche dans les suites immédiates du traumatisme du 6 octobre 2018. Cet examen neurologique n’a pas montré de syndrome lombaire aigu, ni amyotrophie, ni fasciculation. Les réflexes ostéotendineux étaient présents et il n’y avait pas de signe pyramidal.

o. Du 10 juin au 29 juillet 2020, l’assuré a de nouveau séjourné à la CRR. Dans leur rapport du 30 juillet 2020, les médecins de cette clinique ont maintenu le diagnostic de contusion de l’aine gauche et du pubis lors de l'accident avec un diastasis de la symphyse pubienne accompagnées de douleurs de la région inguinale gauche. La capacité de travail était de 50% à partir du 30 juillet 2020.

p. Selon le certificat du docteur I______ de la CRR, les limitations provisoires du rachis concernaient le port de charge lourde de manière répétitive, les activités répétitives ou maintenues avec le tronc en position fléchie et les positions prolongées assise et debout statique. Afin de permettre une reprise du travail à 100% dans l’activité habituelle, l'assuré pourrait bénéficier de l’aide d’une table réglable en hauteur et d’un tabouret semi-assis.

q. Selon l’IRM lombo-sacrée et sacro-iliaques du 14 septembre 2020, il y avait une légère progression des remaniements dégénératifs par rapport à l’IRM du 16 avril 2019 avec une légère progression d’une petite hernie discale L4-L5 sur rupture de l’anneau fibreux, au contact de l’émergence des racines L5 des deux côtés au niveau récessal.

r. Dans son rapport du 26 octobre 2020, le Dr S______ a mentionné que cinq semaines après son retour de la CRR, l’assuré avait subi une forte rechute avec des douleurs localisées principalement sur l’aspect dorsal du sacrum au niveau des épines iliaques supérieures et sur le joint lombosacré. Depuis lors, il se déplaçait avec des cannes et le périmètre n’excédait pas 100 m. Il a été obligé de remettre deux ceintures de contention pelviennes et de reprendre de la morphine en plus des anti-inflammatoires. La rechute était probablement due au traitement par ondes sonores entre novembre 2019 et janvier 2020 et l’abandon durant le séjour à la CRR des ceintures de contention de la ceinture pelvienne qui était toujours instable.

s. Dans son expertise du 15 juin 2021, le docteur J______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, a posé les diagnostics de discopathies L4-L5 et L5-S1 avec une inégalité de longueur des membres inférieurs en défaveur du côté gauche. Cette pathologie n’était pas en rapport avec l’accident, ni la symptomatologie douloureuse permanente en zone symphysaire et inguinale gauche, sans explication anatomopathologique caractérisée. En rapport avec les séquelles de l’accident, il n’y avait aucune limitation et la capacité de travail était totale à partir du 9 mai 2019.

t. Par courrier du 7 juillet 2021, le Dr D______ a contesté les conclusions de l’expertise, tout en reconnaissant qu’aucune imagerie n’avait mis en évidence de lésion ligamentaire, osseuse ou articulaire. Il a également reconnu que les lésions du bassin étaient la plupart du temps induites par des accidents à haute ou très haute énergie. Toutefois, il y avait peu de connaissances sur les lésions du bassin induites sur un point précis avec une certaine énergie. Il n’y avait pas non plus d’explication sur le fait que la contention de l’anneau pelvien avait pu, dès les premiers essais, amender quasiment complètement les douleurs et que celles-ci étaient réapparues après le retrait de cette contention. Ce médecin restait convaincu qu’une instabilité de l’anneau pelvien était la cause des douleurs persistantes, lesquelles étaient secondaires à l’accident.

u. Dans un rapport du 17 août 2021, le docteur K______, médecin-conseil de la SUVA, a relevé que la disjonction symphyse pubienne n’avait jamais été objectivée à l’imagerie. Les bilans étaient exhaustifs et n’avaient pas permis de mettre en évidence un élément diagnostique organique. L’admission d’un statu quo sine à six mois de l’évènement était pertinente du fait de l’atteinte préexistante mise en évidence lors des différentes imageries. Quant aux explications du Dr D______, elles étaient de l’ordre du trouble somatoforme.

v. Par décision du 2 septembre 2021, la SUVA a mis fin aux prestations d’assurance (indemnités journalières et frais de traitement) au 5 septembre 2021, en considérant que le statu quo sine avait été atteint six mois au plus tard après l’accident.

B. a. L’assuré a formé opposition à cette décision en date du 1er octobre 2021.

b. Dans son appréciation médicale du 15 octobre 2021, le Dr K______ s’est rallié aux conclusions de l’expert. Il a par ailleurs rappelé que l’assuré avait pu reprendre son travail en janvier 2019 et que, lorsqu’il a consulté en urgence le 15 avril 2019 en raison de lombalgies aigues, il y avait une description précise du rachis et de la région lombaire, mais non une description du pli de l’aine gauche. En fait, cette consultation était demandée pour un autre problème, une lombalgie aigue sur discarthrose. En ce qui concerne la symphyse pubienne, une instabilité n’était pas objectivée, les images montrant un écart symphysien strictement identique.

c. Par décision du 28 janvier 2022, la SUVA a rejeté l’opposition, en se fondant sur l’expertise et les appréciations de son médecin d’arrondissement.

C. a. Par acte du 28 février 2022, l’assuré a interjeté recours contre cette décision en concluant à son annulation et à l’octroi des prestations au-delà du 5 septembre 2021. Il a fait valoir que s’il était vrai qu’il avait pu reprendre rapidement le travail après l’accident, les douleurs n’avaient jamais cessé et que, du fait d’un diagnostic initial erroné, les douleurs s’étaient exacerbées par une physiothérapie non adaptée. Aucun examen n’avait été par ailleurs pratiqué pour déceler éventuellement les séquelles d’hématomes en zone inguinal. Par ailleurs, l’expertise était contestable, notamment en ce qui concerne la mobilité de la symphyse. Au demeurant, l’expert n’était pas en mesure d’expliquer l’origine de la symptomatologie douloureuse. Il n’avait jamais été tenu compte au demeurant de la lésion du labrum et aucune arthro-IRM de la hanche gauche n’avait été effectuée. Enfin, selon le recourant, l’accident devait être qualifié de traumatisme à haute énergie (réception d’un objet sur un point donné du corps à une vitesse de 92 km/h).

b. Selon une arthro-IRM du 2 mars 2022, une lésion du labrum supérolatéral et antérieur avec une petite structure kystique à proximité du labrum antéro-inférieur était mise en évidence. Il y avait par ailleurs une discrète tendinopathie insertionnelle de la lame latérale du moyen fessier.

c. Dans son appréciation médicale du 11 mai 2022, le docteur L______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie, médecin-conseil à la SUVA, a indiqué que la lésion du labrum mise en évidence sur l’IRM du 2 mars 2022 n’était pas, au degré de la vraisemblance prépondérante, en lien avec l’évènement accidentel, dès lors que cette lésion ne se situait pas au même endroit que l’aine. Au demeurant, en cas d’atteinte du labrum, on aurait trouvé des dégâts cutanés viscéraux vasculonerveux musculaires et osseux sur la tête fémorale, ce qui n’était pas le cas. La lésion du labrum était ainsi dégénérative.

d. Dans sa réponse datée du 2 juin 2022, l’intimée a conclu au rejet du recours, par l’intermédiaire de son conseil, sous suite de dépens. Ce faisant, elle s’est fondée sur l’expertise et la dernière appréciation médicale de son médecin-conseil. En ce qui concerne l’éventuel trouble somatoforme douloureux sans substrat organique, elle en a nié le lien de causalité adéquate avec l'accident.

e. Dans sa réplique du 30 août 2022, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il a reproché à l’intimée d’avoir fait fi des résultats de l’arthro-IRM du 2 mars 2022. Au demeurant, le Dr D______ avait admis l’erreur de diagnostic initial. Depuis l’accident, le recourant avait toujours ressenti des douleurs, même s’il avait pu reprendre le travail. Cela a été confirmé par le rapport du 15 avril 2019 du docteur M______, spécialiste FMH en médecine interne générale. Les séances de physiothérapie n’avaient ainsi pas permis de diminuer les douleurs. Le recourant a également contesté qu’une lésion du labrum ne pouvait être provoquée par l’accident tel que décrit.

f. Dans sa duplique du 28 novembre 2022, l’intimée a maintenu ses conclusions, en se fondant sur l’expertise et l’appréciation de son médecin d’arrondissement. Il ressortait par ailleurs du rapport du 3 mai 2022 du docteur N______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, que ce médecin évoquait des conditions dégénératives au niveau du labrum et du cartilage. Le recourant n’avait enfin corroboré ces allégués par aucun avis médical.

D. a. Le 6 juin 2023, la Cour de céans a informé les parties qu'elle avait l'intention de mettre en œuvre une expertise orthopédique judiciaire et de la confier au professeur O______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie. Elle leur a également transmis la mission de l'expert.

b. Par écriture du 28 juin 2023, l’intimée s'est opposée à ce que le Prof. O______ soit désigné comme expert, dès lors qu'il n'était pas spécialiste en chirurgie du rachis ou de la hanche. Par ailleurs, le recourant avait consulté divers médecins genevois dont certains avaient travaillé aux HUG, comme les docteurs P______ et T______, et peut-être sous la direction du Prof. O______. L’intimée a dès lors suggéré de mandater un expert en dehors du canton de Genève et un expert certifié par Swiss Insurance Medicine (SIM), par exemple le docteur R______ ou un médecin à l'unité hanche et bassin du Centre universitaire du canton de Vaud (CHUV). Elle a également complété la liste des questions à poser à l'expert.

c. Par écriture du 28 juin 2023, le recourant a accepté l'expert proposé par la Cour de céans et sa mission.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Dans un arrêt de principe, le Tribunal fédéral a modifié sa jurisprudence en ce sens que lorsque les instances cantonales de recours constatent qu'une instruction est nécessaire parce que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise, elles sont en principe tenues de diligenter une expertise judiciaire si les expertises médicales ordonnées par l'OAI ne se révèlent pas probantes (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3). Cela étant, un renvoi à l'administration pour mise en œuvre d'une nouvelle expertise reste possible, même sous l'empire de la nouvelle jurisprudence, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

2.             En l'occurrence, l'arthro-IRM du 2 mars 2022 a mis en évidence une lésion du labrum, ce qui peut expliquer les douleurs à l'aine et au bassin du recourant depuis l'accident. En raison de ce nouvel examen, l'expertise du Dr J______ du 15 juin 2021 ne paraît plus valable.

L’intimée continue en outre de nier un lien de causalité entre les douleurs du recourant consécutives à l'accident et cet évènement.

En ce que le Dr L______ nie le lien de causalité, au motif que la lésion du labrum ne se situe pas au même endroit que l’aine, il sied de relever que le choc reçu se situait dans la région de l'aine gauche, selon le rapport de la CRR du 19 octobre 2019. Le Dr G______ précise à cet égard que le recourant a reçu un panneau sur le haut de la cuisse gauche tout proche de l'aine. À cela s'ajoute que les ceintures de contention pelviennes ont permis de diminuer considérablement la symptomatologie après l'accident, ce qui constitue un indice que cet évènement a provoqué des lésions au niveau du bassin.

Partant, il s'avère nécessaire de mettre en œuvre une expertise judiciaire.

3.             L’intimée s'oppose à ce que celle-ci soit confiée au Prof. O______, au motif que ce médecin est spécialisé pour les atteintes aux épaules et aux coudes, qu'il pourrait manquer d'impartialité du fait que certains médecins consultés ont travaillé possiblement sous sa direction aux HUG, et qu'il n'est pas au bénéfice d'une certification SIM.

3.1 En ce qui concerne la spécialisation du Prof. O______, celui-ci est un spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatique, et dispose d’une grande pratique dans le domaine de l’orthopédie. Par ailleurs, il a déjà été mandaté par la Cour de céans pour expertiser les atteintes à la hanche et leur lien de causalité avec un accident (cf. ATAS/323/2023 et ATAS/184/2023). Au demeurant, il est à supposer qu'il n'aurait pas accepté le mandat, s'il avait considéré qu'il n'avait pas les compétences pour d'apprécier de telles lésions, étant précisé qu'il était informé du genre d'atteinte à expertiser.

Cela étant, la Cour de céans estime que ce chirurgien présente des compétences amplement suffisantes pour répondre aux questions de la mission d’expertise.

3.2  

3.2.1 S'agissant de l'impartialité, les règles sur l'impartialité des membres d'un tribunal valent en principe pour les experts (ATF 132 V 93 consid. 7.1). En conséquence, un expert passe pour prévenu lorsqu'il existe des circonstances propres à faire naître un doute sur son impartialité. La récusation d'un expert n'est pas limitée aux cas dans lesquels une prévention effective est établie, car une disposition interne de l'expert ne peut guère être prouvée ; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale. Seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération (ATF 139 III 433 consid. 2.1.2 et les références) ; les impressions individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 127 I 196 consid. 2b ; 120 V 357 consid. 3a).

3.2.2 En l'occurrence, il n'y a aucun indice concret que certains médecins consultés par le recourant auraient travaillé sous la direction du Prof. O______ aux HUG. Il s'agit d'une simple supposition. Il est en outre douteux que, même si cela devait être le cas, cette circonstance serait propre à influencer le Prof. O______. Aucun élément objectif ne laisse donc naître un doute sur son impartialité.

3.3  

3.3.1 La certification SIM est dorénavant imposée aux experts mandatés par les assureurs (art. 44 LPGA et 7m OPGA). Un délai de 5 ans est prévu pour son exigibilité selon les dispositions transitoires de la modification du 3 novembre 2021.

3.3.2 Il appert que cette obligation s'adresse en premier lieu aux assureurs. De surcroît, le délai de 5 ans pour cette exigence n'est pas encore écoulé. L'absence de cette certification ne fait ainsi pas obstacle au mandat du Prof. O______ comme expert judiciaire.

4.             L’intimée requiert que la mission de l'expert soit complétée. Il sera tenu compte de ses propositions dans la mesure jugée nécessaire.

 

*****


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant préparatoirement

 

I.                   Ordonne une expertise judiciaire du recourant.

II.                Commet à ces fins le Professeur O______.

III.             Dit que la mission d’expertise sera la suivante :

A.    Prendre connaissance du dossier de la cause.

B.     Examiner l'expertisé et, si nécessaire, ordonner d’autres examens.

C.     Charge l’expert d’établir un rapport détaillé comprenant les éléments suivants :

1.      Anamnèse

2.      Plaintes

3.      Description précise des circonstances de l'accident et de l'impact de la plaque de plexiglas qui a glissé

4.      Constatations cliniques

5.      Diagnostics

-          Les plaintes de l'expertisé reposent-elles sur un substrat organique ?

-          Quels diagnostics sont en rapport de causalité avec l'accident au degré de la vraisemblance prépondérante (plus de 50%) ?

-          Quels diagnostics ne sont pas en rapport avec l'accident ?

-          Y-a-t-il des états maladifs préexistants ou des prédispositions constitutionnelles ?

-          Y-a-t-il une maladie intercurrente qui s'est déclarée après l'accident ?

6. L'état de santé, en rapport avec l'accident, est-il stabilisé et, dans l'affirmative, à quelle date ? Dans la négative, quand le statu quo ante vel sine sera-t-il vraisemblablement atteint ?

7.      Quelles sont les limitations fonctionnelles en rapport avec les diagnostics liés à l'accident au degré de la vraisemblance prépondérante ?

8.      Quelle est la capacité de travail de l'expertisé dans son activité habituelle pour ce qui concerne les seuls diagnostics en rapport de causalité probable avec l'accident ? Y-a-t-il une diminution de rendement ?

9.      Quelle est la capacité de travail de l'expertisé dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, compte tenu des seules atteintes en rapport de causalité avec l'accident ? Y-a-t-il une diminution de rendement ?

10.  La capacité de travail est-elle influencée par des facteurs étrangers à l'accident ?

11.  L'accident a-t-il aggravé un état maladif préexistant et, si oui, pendant combien de temps ? De quel pourcentage la capacité de travail ou le rendement sont-ils le cas échéant diminués en raison de la décompensation temporaire d'un état maladif antérieur ?

12.  Peut-on encore attendre de la poursuite du traitement médical une amélioration de l'état de santé, ou des traitements sont-ils encore nécessaires pour conserver la capacité de gain de l'expertisé en rapport avec les atteintes provoquées au degré de la vraisemblance prépondérante par l'accident ? Dans l'affirmative, pendant combien de temps ?

13.  L'expertisé subit-il une atteinte à l'intégrité et, dans l'affirmative, de quel pourcentage ?

14.  Comment vous déterminez-vous sur l'expertise du Dr J______ du 15 juin 2021 ?

15.  Formuler un pronostic global.

16.  Toute remarque utile

IV.             Invite l’expert à déposer à sa meilleure convenance un rapport en trois exemplaires à la chambre de céans ;

V.                Réserve le fond.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente suppléante

 

 

 

 

Maya CRAMER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties le