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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2519/2022

ATAS/505/2023 du 29.06.2023 ( CHOMAG ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2519/2022 ATAS/505/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 juin 2023

Chambre 5

 

En la cause

A______

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née en ______ 1990, de nationalité italienne et titulaire d’un permis d’établissement, s’est inscrite auprès de l’office régional de placement (ci-après : ORP), pour un taux d’activité de 80%, en date du 8 juillet 2021. Elle a conclu avec sa conseillère en personnel un contrat d’objectifs de recherches d’emploi, en date du 19 juillet 2021, prévoyant un nombre minimum de 10 recherches d’emploi par mois. Ce nombre a ensuite été réduit à 6 recherches d’emploi par mois, selon le contrat d’objectifs de recherches d’emploi du 10 août 2021.

b. Un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur par la caisse de chômage UNIA.

c. L’assurée a fait l’objet de plusieurs sanctions décidées par l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE ou l’intimé), pendant les années 2021 et 2022, notamment pour n’avoir pas remis dans les délais les preuves de recherches d’emploi, ainsi que pour une absence à un entretien de conseil par visioconférence et pour n’avoir pas postulé à un emploi qui lui avait été assigné. Chaque décision de sanction mentionnait que le cumul de sanctions constituait un motif de négation de l’aptitude au placement, qui pouvait avoir pour conséquence l’arrêt total du versement des indemnités de chômage.

d. À l’issue du mois de mars 2022, l’assurée n’a pas transmis son formulaire récapitulatif de ses recherches d’emploi ; un délai lui a été accordé au 9 mai 2022, pour qu’elle exerce son droit d’être entendue, s’agissant de ce nouveau manquement. Dans le délai qui lui avait été octroyé, l’assurée n’a pas réagi. Selon les éléments figurant au dossier, il ressortait que celle-ci avait confirmé sa pleine capacité et disponibilité à l’emploi à sa caisse de chômage, sur le formulaire « indications de la personne assurée » du mois de mars 2022.

B. a. En date du 13 mai 2022, l’OCE a rendu une décision d’inaptitude au placement de l’assurée, dès le 1er mars 2022. La décision récapitulait les sanctions qui avaient déjà été prononcées à l’encontre de l’assurée, et rappelait la dernière violation des devoirs de demandeuse d’emploi, qui n’avait pas transmis ses recherches d’emploi du mois de mars 2022, ce manquement supplémentaire cumulé avec les précédents justifiant la décision d’inaptitude au placement.

b. Le 16 mai 2022, l’OCE a communiqué à l’assurée un courrier l’informant de l’annulation de son dossier de demandeuse d’emploi dès le 27 avril 2022.

c. Par courriel du 18 mai 2022, l’assurée a exprimé son désaccord avec la décision de l’OCE et l’a informé qu’elle n’était pas apte à travailler au mois de mars 2022 pour cause de maladie, ce qu’elle était disposée à prouver par l’envoi d’un certificat médical. Elle ajoutait qu’en raison de ses problèmes de santé, elle avait des difficultés à tenir son dossier à jour.

d. L’assurée a confirmé son opposition par courrier du 31 mai 2022 en reprenant les différentes sanctions dont elle avait fait l’objet et en fournissant des explications supplémentaires. S’agissant de la décision d’inaptitude au placement, à laquelle elle s’opposait, elle a expliqué qu’elle n’avait pas fait de recherches d’emploi en mars 2022 car elle était en incapacité de travailler pour cause de maladie et a joint en annexe un certificat médical le démontrant. Elle ajoutait qu’elle souffrait de dépression depuis plusieurs années et qu’il s’agissait d’une maladie chronique qui était difficile à traiter. Lors de ses épisodes dépressifs, elle mentionnait avoir beaucoup de mal à « gérer ses papiers » ainsi que tous les autres aspects de sa vie et communiquait plusieurs certificats médicaux qui l’excusaient du 27 septembre 2021 au 31 janvier 2022 ainsi que pour mars 2022, tout en précisant que son état de santé allait et venait et ne pouvait pas être réduit à ces seuls mois. Elle ajoutait encore qu’elle avait fait ses recherches d’emploi pour les mois d’avril et mai 2022. En annexe à son opposition figuraient plusieurs certificats médicaux, signés par la docteure B______, médecin interne aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), respectivement datés du 2 novembre 2021, du 26 novembre 2021, du 5 janvier 2022 et enfin, concernant le dernier manquement, un certificat médical du 25 mai 2022 attestant d’un arrêt de travail pour maladie à 100% du 1er au 31 mars 2022.

e. Par décision sur opposition du 6 juillet 2022, l’OCE a écarté l’opposition de l’assurée et a confirmé la précédente décision du 13 mai 2022, au motif que selon la jurisprudence et les directives du secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO), il y avait lieu de considérer que l’assurée ne pouvait pas se prévaloir d’un certificat médical qu’elle n’avait produit qu’au stade de l’opposition, pour justifier l’absence de recherches personnelles d’emploi en mars 2022, dès lors que ledit certificat médical avait été établi plusieurs mois après la maladie.

C. a. Par écriture postée en date du 8 août 2022, l’assurée a recouru contre la décision sur opposition du 6 juillet 2022 par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans). Elle mentionnait ses difficultés de santé mentale et le fait qu’elle souffrait d’un trouble de la personnalité borderline et d’un état dépressif plus ou moins constant depuis ses 16 ans ; cet état de santé était récurrent et induisait chez elle une incapacité d’agir, elle mettait de côté ses démarches administratives, n’arrivait pas à s’exprimer, ni à respecter les délais. En raison de ses troubles de la santé, elle considérait que le manquement était excusable et concluait, implicitement, à l’annulation de la décision d’inaptitude au placement.

b. Par réponse du 6 septembre 2022, le service juridique de l’OCE a déclaré s'en rapporter à justice sur la question de savoir s’il fallait tenir compte du certificat médical du 25 mai 2022, étant toutefois souligné que ce dernier avait été rédigé plusieurs mois après les faits et que la Dre B______ avait précédemment établi des certificats médicaux attestant d’une incapacité de travail pour maladie à quatre reprises. L’OCE ajoutait encore que la recourante n’avait jamais déclaré à l’ORP ou à sa caisse de chômage qu’elle avait été en incapacité de travail pour raison de santé.

c. Par réplique du 5 août [recte : octobre] 2022, l’assurée s’est étonnée que l’OCE ne prenne pas en compte la gravité de son état de santé. Elle a à nouveau exposé ses problèmes psychiques ainsi que les limitations fonctionnelles qui en résultaient et a conclu à ce que son dossier soit rouvert et que les allocations lui soient versées pendant la période où elle était sous certificat médical. Elle a joint plusieurs certificats médicaux, dont un certificat médical daté du 4 août 2022 établi par le département de psychiatrie des HUG et rédigé par la Dre B______, qui exposait que la recourante était connue pour un trouble de la personnalité borderline sévère (F60.31) se manifestant par des difficultés à réguler les émotions, rendant compte actuellement d’une instabilité professionnelle sociale et familiale et d’un trouble identitaire. Elle avait débuté une prise en charge spécialisée pour le trouble borderline et avait pu apprendre à intégrer des compétences de tolérance à la détresse et d’efficacité interpersonnelle. Il était encore mentionné qu’elle souffrait d’un état dépressif, qui était une comorbidité fréquente chez les patients souffrant d’un trouble de personnalité borderline, les signes de l’état dépressif étant apparus en septembre 2021 et s’étant aggravés au début de l’année 2022, avec une baisse de la thymie, une apparition d’idées noires, aboulie et anhédonie et des difficultés à se projeter dans l’avenir. Un traitement antidépresseur lui avait été prescrit qui avait apporté les premiers effets bénéfiques objectivés en mars 2022. Compte tenu de ces pathologies, la docteure confirmait qu’en raison du cadre psychopathologique complexe, pendant les périodes indiquées dans les certificats médicaux qui avaient été établis, la recourante était incapable à 100% d’exercer sa profession ou toute autre activité professionnelle.

d. Par duplique du 20 octobre 2022, l’OCE a considéré que la réplique ne contenait pas d’élément susceptible de modifier la décision sur opposition et qu’il était relevé, pour le surplus, que l’assurée faisait référence, notamment, à la décision de refus du service des prestations cantonales en cas de maladie, alors que la décision contestée portait sur son inaptitude au placement.

e. La chambre de céans a appointé, en date du 6 avril 2023, une audience de comparution personnelle des parties ainsi qu’une convocation de la Dre B______ en qualité de témoin. La recourante et le témoin ne se sont pas présentés.

f. Convoqués à une nouvelle audience, appointée en date du 4 mai 2023, les parties et le témoin se sont présentés à l’audience. Le témoin a expliqué qu’elle n’avait pas été informée de l’audience du 6 avril 2023 car elle avait été en incapacité de travail pour cause de maladie, puis en vacances et n’avait pris connaissance de la convocation qu’à son retour sur son lieu de travail, après le 6 avril 2023. La recourante, quant à elle, s’est excusée de n’avoir pu se présenter à l’audience du 6 avril 2023 car elle n’avait pas reçu la convocation ; elle se trouvait alors en Angleterre, dans le cadre d’un cursus d’une année d’université en relations internationales à Brighton (UK).

Sur le fond, la recourante a expliqué qu’elle avait été suivie par la Dre B______ depuis septembre 2021 jusqu’au mois de juin 2022, étant précisé qu’il s’agissait du terme du traitement thérapeutique, d’une durée de deux ans. Par la suite, elle avait consulté un psychiatre privé, le docteur C______, une première fois en septembre 2022, puis une seconde fois, au mois de décembre 2022, surtout dans la perspective d’obtenir un renouvellement de ses prescriptions d’antidépresseurs, qu’elle consommait à raison de 100 mg de Sertraline par jour. Il était prévu qu’elle revoie le Dr C______ dans le courant de l’été et de reprendre éventuellement un lien thérapeutique avec ce dernier. Elle confirmait n’avoir pas renvoyé son formulaire du mois de mars 2022, en raison de ses troubles psychiques, illustrant ses difficultés en expliquant qu’elle n’était même pas parvenue à signer un simple formulaire qui lui aurait permis d’obtenir ses indemnités de chômage au mois de janvier 2022, ce qui était dû à son trouble borderline et à un trouble identitaire qui l’empêchait, notamment, de se nourrir et d’effectuer des démarches quotidiennes. Ce n’était pas par mauvaise volonté qu’elle agissait ainsi, mais en raison de ses troubles psychiques.

La représentante de l’OCE a rappelé que l’inaptitude au placement avait été prononcée à la suite d’un cumul de sanctions, soit les absences de recherches d’emploi pendant le délai de congé, puis les insuffisances de recherches d’emploi au mois de juillet et de septembre 2021, puis l’assignation du 3 février 2022 à laquelle la recourante n’avait pas donné suite, puis une absence à un test et enfin une absence à l’entretien de conseil du 14 mars 2022. Sur question du président, elle a précisé que le service juridique ne demandait une expertise médicale que s’il était approché par la caisse de chômage qui, par hypothèse, aurait reçu des certificats médicaux. Une deuxième possibilité était que le conseiller en personnel contacte le service juridique si le demandeur d’emploi lui avait fait part de ses troubles de santé.

La recourante a exposé que tous ses problèmes étaient survenus à la suite d’une démission impulsive qu’elle avait effectuée en mai ou juin 2021 et qui était typique de personnes souffrant de troubles borderline ; les manquements qui s’en étaient suivis, notamment au niveau des recherches d’emploi, découlaient de la même problématique. Elle n’avait pas voulu faire recours contre les décisions de sanction car elle n’avait pas demandé de certificat médical et c’était sa conseillère en placement qui lui avait conseillé d’aller consulter un médecin.

Entendue en qualité de témoin, la Dre B______ a exposé être déliée de son secret de fonction ainsi que du secret médical ; elle était à présent médecin cheffe de clinique au service des spécialités psychiatriques (ci-après : SSP) du département de psychiatrie des HUG. En vue de l’audience, elle avait réexaminé le dossier médical de la recourante et expliquait qu’elle avait pu établir, au mois de mai 2022, l’état de santé et les troubles psychiques de la recourante au mois de février et de mars 2022, en raison du fait qu’il y avait deux composantes dans les troubles dont souffrait la recourante ; tout d’abord, sa patiente avait un trouble de la personnalité borderline, qui était un trouble relativement constant ; ensuite, elle avait souffert d’une dépression qui était venue s’ajouter à ce trouble de la personnalité. Elle situait le début de la dépression à l’automne 2021, avec un pic au mois de février ou mars 2022 ; pendant cette période, sa dépression pouvait être qualifiée de modérée à sévère, ce qui l’avait conduite à prescrire à la recourante un traitement antidépresseur, commençant par une dose minimale de 50 mg qui avaient été maintenue jusqu’en été 2022, date à laquelle le suivi thérapeutique s’était terminé. Après le commencement du traitement antidépresseur, les idées noires, notamment suicidaires, avaient disparu mais le trouble borderline se maintenait en parallèle et nécessitait une prise en charge psychothérapeutique à raison d’une fois par semaine, étant précisé qu’elle était, elle-même, arrivée dans l’unité des troubles de la régulation émotionnelle au mois de novembre 2022 et que le système de séances hebdomadaires était déjà en place entre son prédécesseur et la patiente. Elle ajoutait que cette dernière souffrait également d’un trouble de l’attention de type hyperactif (ci-après : TDAH), ce qu’elle avait pu constater grâce à un test effectué par une neuropsychologue en 2022, étant précisé que ce trouble était déjà présent, mais qu’il fallait déterminer de façon plus précise, s’il était de type hyperactif ou inattentif. Lors du test de 2022, c’était la composante hyperactive qui était dominante mais, sur le plan de l’inattention, les valeurs étaient juste en dessous du point limite et il n’était pas exclu, qu’au gré des circonstances, la recourante puisse rebasculer dans une composante inattentive majoritaire. La Dre B______ ajoutait qu’aux HUG, les médecins établissaient un dossier informatique du patient, qui était notamment complété par un « débriefing », après les séances, ainsi que par les éventuelles prescriptions médicamenteuses ; avec ce système informatique, la docteure pouvait suivre la patiente et pouvait ainsi établir, même après un ou deux mois, les troubles psychiques dont elle souffrait en février ou mars 2022. Dès les premières séances, elle avait pu constater la présence du TDAH chez la recourante, ce qui avait été confirmé par le test de la neuropsychologue en 2022. Questionnée par la représentante de l’OCE sur l’aptitude au placement de la recourante eu égard à ses troubles psychiques, le médecin répondait qu’à teneur des certificats médicaux qu’elle avait remis, elle était en incapacité de travail pendant les périodes indiquées, mais en dehors de ces périodes, elle pouvait être capable de travailler, ce qui était le cas de plusieurs personnes qui souffraient du même trouble. Le fait de souffrir d’un trouble de la personnalité borderline et d’un TDAH n’empêchait pas forcément l’assurée de travailler, cela dépendait des circonstances et des personnes.

À l’issue de l’audience, la représentante de l’OCE a encore ajouté qu’il avait été demandé à la recourante de se présenter à une visite médicale auprès du médecin-conseil, le docteur D______, mais une date définitive n’avait pas encore pu être fixée.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

h. Les autres faits seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]), le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision d’inaptitude au placement de l’assurée, dès le 1er mars 2022.

4.              

4.1 Aux termes de l'art. 17 al. 1 LACI, l'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance doit, avec l'assistance de l'office du travail compétent, entreprendre tout ce que l'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l'abréger. Il lui incombe en particulier de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu'il exerçait précédemment. Il doit apporter la preuve des efforts qu'il a fournis.

L'art. 8 LACI énumère les conditions d'octroi de l'indemnité de chômage. Conformément à l'art. 8 al. 1 LACI, l'assuré doit, pour bénéficier de cette prestation prévue par l'art. 7 al. 2 let. a LACI, notamment être apte au placement (let. f) et satisfaire aux exigences de contrôle (let. g).

4.2 Les conditions de l'art. 8 al. 1, qui sont cumulatives (ATF 124 V 215 consid. 2), sont précisées par plusieurs dispositions de la LACI et de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02), ainsi que - dans les limites d'admissibilité de telles directives administratives (ATF 144 V 202 ; 144 V 195 ; ATAS/1191/2014 du 18 novembre 2014 consid. 4 et doctrine et jurisprudence citées) - par les instructions édictées par le SECO en sa qualité d'autorité de surveillance de l'assurance-chômage chargée d'assurer une application uniforme du droit (art. 110 LACI), notamment par le biais du Bulletin relatif à l'indemnité de chômage (ci-après : Bulletin LACI IC).

4.3 La condition de satisfaire aux exigences du contrôle, posée par l'art. 8 al. 1 let. g LACI, renvoie aux devoirs de l'assuré et prescriptions de contrôle prévus par l'art. 17 LACI. Les al. 1 à 3 de cette disposition-ci imposent aux chômeurs des devoirs matériels, qui concernent la recherche et l'acceptation d'un emploi, ainsi que la participation aux mesures de marché du travail et aux séances et entretiens obligatoires, ainsi que des devoirs formels, qui ont pour objet l'inscription au chômage et la revendication régulière des prestations au moyen de formules officielles (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, n. 1 ad art. 17 LACI).

5.              

5.1 Selon l’art. 30 al. 1 let. c LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu lorsqu’il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce que l’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable. Cette disposition doit être mise en relation avec l’art. 17 al. 1 LACI, aux termes duquel l’assuré qui fait valoir des prestations d’assurance doit entreprendre tout ce que l’on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter ou réduire le chômage (ATF 139 V 524 consid. 2.1.2). Il doit en particulier pouvoir apporter la preuve des efforts qu’il a fournis en vue de rechercher du travail (cf. art. 17 al. 1, 3ème phr., LACI). La suspension du droit à l’indemnité est destinée à poser une limite à l’obligation de l’assurance-chômage d’allouer des prestations pour des dommages que l’assuré aurait pu éviter ou réduire. En tant que sanction administrative, elle a pour but de faire répondre l’assuré, d’une manière appropriée, du préjudice causé à l’assurance-chômage par son comportement fautif (ATF 133 V 89 consid. 6.2.2 ; ATF 126 V 520 consid. 4).

5.2 Selon l'art. 24 al. 1 et 2 OACI, si l’office compétent considère que l’assuré n’est pas apte au placement ou ne l’est que partiellement, il en informe la caisse (al. 1). L’office compétent rend une décision sur l’étendue de l’aptitude au placement (al. 2).

5.3 Est réputé apte à être placé le chômeur qui est disposé à accepter un travail convenable et à participer à des mesures d'intégration et qui est en mesure et en droit de le faire (art. 15 al. 1 LACI).

5.4 L'aptitude au placement comprend ainsi deux éléments : la capacité de travail d'une part, c'est-à-dire la faculté de fournir un travail - plus précisément d'exercer une activité lucrative salariée - sans que l'assuré en soit empêché pour des causes inhérentes à sa personne, et, d'autre part, la disposition à accepter un travail convenable au sens de l'art. 16 LACI - ce qui implique non seulement la volonté de prendre un tel travail s'il se présente, mais aussi une disponibilité suffisante quant au temps que l'assuré peut consacrer à un emploi et quant au nombre des employeurs potentiels (ATF 125 V 58 consid. 6a ; ATF 123 V 216 consid. 3 et la référence).

6.             En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté des directives à l'intention des organes chargés de l'application de l'assurance-chômage afin d'assurer une pratique uniforme en ce domaine. Dans ce but, elles indiquent l'interprétation généralement donnée à certaines dispositions légales. Elles n'ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux (ATF 133 II 305 consid. 8.1 p. 315 et les références).

6.1 Au ch. B217 de sa directive LACI IC, le SECO souligne que lorsqu'un assuré est disposé à travailler, en mesure et en droit de le faire et qu'il cherche du travail, il est en principe réputé apte à être placé, indépendamment de ses chances sur le marché du travail. Par contre, si, en raison de sa situation personnelle et familiale ou pour des raisons d'horaire, il ne peut ou ne veut pas se mettre à disposition comme on pourrait l'exiger normalement d'un travailleur, il doit être considéré comme inapte au placement.

6.2 La volonté de l'assuré d'accepter une activité salariée est un élément fondamental de l'aptitude au placement. Il ne suffit pas que l'assuré déclare être disposé à être placé. Il doit se mettre à la disposition du service de l'emploi et accepter tout travail réputé convenable qui lui est offert. Il doit également chercher activement un emploi et participer à une mesure de réinsertion (ch. B219 Bulletin LACI).

6.3 Des recherches d'emploi continuellement insuffisantes ou le refus répété d'un emploi convenable ou de participer à une mesure de réinsertion sont autant de signes démontrant que l'assuré n'est pas disposé à être placé. La négation de l'aptitude au placement en cas de recherches d’emploi insuffisantes doit toutefois se fonder sur des circonstances particulièrement qualifiées : un tel cas se présente lorsqu'un assuré ayant subi plusieurs sanctions persiste à ne pas rechercher un emploi. Si l'on constate en revanche que l'assuré déploie tous ses efforts pour retrouver du travail, l'aptitude au placement ne sera pas niée (cf. ch. B221 et B326 Bulletin LACI)

7.             En ce qui concerne la preuve, le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

8.             En l’espèce, la recourante invoque des troubles psychiques pour expliquer les raisons pour lesquelles elle était en incapacité de travail, pour cause de maladie pendant le mois de mars 2022, ce qui l’a empêchée de remplir ses obligations de demandeuse d’emploi, soit d’effectuer des recherches personnelles d’emploi puis de les transmettre, dans les délais, à l’OCE.

L’intimé, de son côté, s’en rapporte à justice quant à la question de prendre en compte le certificat médical communiqué par la recourante, dans la mesure où ce dernier a été établi deux mois après l’incapacité de travail pour cause de maladie.

8.1 L’instruction du cas, et plus particulièrement l’audition, en qualité de témoin, de la Dre B______, cheffe de clinique au SSP des HUG, a permis de clarifier les troubles de la santé dont souffre la recourante. À l’aune des explications claires et détaillées fournies par la psychiatre, la chambre de céans considère qu’il est établi au degré de la vraisemblance prépondérante que l’assurée était en incapacité de travail pour cause de maladie pendant tout le mois de mars 2022, motif qui permet d’écarter un manquement fautif de la recourante.

8.2 Dès lors que c’est ce dernier manquement qui est retenu par l’intimé pour prononcer une décision d’inaptitude au placement, il convient d’annuler la décision querellée.

9.

9.1 À teneur des renseignements fournis par la Dre B______, sur les manifestations des troubles borderline et du TDAH, il paraît vraisemblable que certains des précédents manquements de l’assurée, qui ont été à l’origine de sanctions - lesquelles ont ensuite été prises en compte pour déclarer l’inaptitude au placement de la recourante - sont également à mettre sur le compte des troubles psychiques dont souffre cette dernière.

Lesdites sanctions ne peuvent toutefois pas être examinées par la chambre de céans dès lors qu’elles sont déjà entrées en force et que les conditions d’une révision ne sont pas remplies, puisque l’assurée était au courant des effets que ses troubles psychiques pouvaient avoir sur ses obligations de demandeuse d’emploi et qu’il ne s’agit donc pas d’un fait nouveau, ni d’un moyen de preuve nouveau (art. 53 al. 1 LPGA).

9.2 Cependant, à toutes fins utiles, la chambre de céans rappelle qu’en vertu de l'art. 53 al. 2 LPGA, qui formalise un principe général du droit des assurances sociales, l'assureur peut reconsidérer les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force, lorsqu'elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (ATF 133 V 50 consid. 4.1).

Les problèmes psychiques établis à l’occasion de la présente espèce pourraient donner lieu à une reconsidération, par l’intimé, des précédentes sanctions entrées en force, à la lumière des certificats médicaux transmis par l’assurée.

Il sied toutefois de rappeler que, selon la jurisprudence, l'administration n'est pas tenue de reconsidérer les décisions qui remplissent les conditions fixées ; elle en a simplement la faculté et ni l’intéressée, ni le juge ne peuvent l'y contraindre. Le corollaire en est que les décisions portant sur un refus d'entrer en matière sur une demande de reconsidération ne peuvent pas faire l'objet d'un contrôle en justice (ATF 133 V 50 consid. 4.1 p. 52 ; 119 V 475 consid. 1b/cc p. 479 ; 117 V 8 consid. 2a p. 12 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_447/2007 du 10 juillet 2008 consid. 1 ; UELI KIESER, ATSG Kommentar, 2ème éd., no 44 ad art. 53). Un assureur social refuse d'entrer en matière sur une demande de reconsidération lorsqu'il se borne à procéder à un examen sommaire de la requête et répète les motifs invoqués dans la décision initiale (ATF 117 V 8 consid. 2b/aa p. 14 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_866/2009 du 27 avril 2010 consid. 2.2). Il est en droit de communiquer ce refus à la personne assurée au moyen d'une simple lettre, sans indication des voies de droit ni motivation détaillée (Margit MOSER-SZELESS, Commentaire romand de la LPGA, no. 91 ad art. 53 LPGA, p. 643).

10.         La recourante, qui n'est pas représentée en justice et qui n'a pas allégué ou démontré avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacre à la gestion courante de ses affaires, n'a pas droit à des dépens.

11.         Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA en lien avec l’art. 1 al. 1 LACI).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet et annule la décision sur opposition de l’intimé du 6 juillet 2022.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le