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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1243/2023

ATAS/503/2023 du 28.06.2023 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1243/2023 ATAS/503/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 28 juin 2023

Chambre 4

 

En la cause

A______ SA

 

 

recourante

 

contre

CAISSE DE CHÔMAGE UNIA

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur B______ (ci-après : l’employeur) est l’administrateur unique de A______ SA (ci-après : la société ou la recourante), domiciliée rue C______, à Genève.

b. La société a déposé, le 4 janvier 2022, une demande d’allocations d’initiation au travail (ci-après : AIT) en faveur de Madame D______(ci-après : l’employée), née en 1959, pour un engagement en tant que représentante commerciale à 100% du 1er mars 2022 au 31 août 2022, avec un salaire brut de CHF 5'000.- par mois.

B. a. Par décision du 7 février 2022, le service d’aide au retour à l’emploi (ci-après : le SARE) de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) a admis la demande d’AIT de la société pour une durée de six mois, soit du 1er mars au 31 août 2022, mentionnant que le respect du contrat de travail du 24 janvier 2022, signé entre l’employée et la société, était une condition essentielle dont dépendait le versement des prestations AIT et que le remboursement des prestations AIT pourrait être sollicité si le contrat de travail était résilié en dehors du temps d’essai et sans justes motifs pendant la période d’initiation ou dans les trois mois suivant.

b. Par lettre du 28 juillet 2022, la société a informé à l’employée qu’elle résiliait son contrat de travail à compter du 31 juillet 2022 à la suite d’une « phase de réorganisation du magasin, avec des orientations différentes ».

c. Dans le questionnaire AIT pour le mois de juillet 2022, signé le 2 août 2022, l’employeur a indiqué que le contrat de travail avait été résilié.

d. Par décision du 7 octobre 2022, le SARE a révoqué le droit aux AIT de la société pour la période du 1er mars au 30 juin 2023 au motif que celle-ci avait licencié l’employée sans justes motifs, au sens du droit des obligations, pendant la période d’initiation. Il a invité la caisse à réclamer à la société le remboursement des allocations perçues à tort.

e. Par décision du 12 octobre 2022, la caisse de chômage UNIA (ci-après : la caisse ou l’intimée) a requis de la société la restitution des AIT versées du 1er mars au 30 juin 2022, à concurrence de CHF 13'000.-.

f. Le 14 octobre 2022, la société a formé opposition à la décision du 7 octobre 2022 de l’OCE ainsi qu’à la décision du 12 octobre 2022 de la caisse, expliquant, que de bonne foi, elle avait dû se séparer de l’employée, car celle-ci avait épousé son administrateur unique le 29 juillet 2022 et que tout membre de la famille d’un administrateur de la société ne pouvait pas bénéficier des AIT.

g. Par décision sur opposition du 9 janvier 2023, l’OCE a confirmé la révocation des AIT et rejeté l’opposition, relevant qu’aucune disposition légale ne permettait d’annuler le droit aux AIT à l’égard du conjoint d’un employeur, de sorte qu’aucun juste motif ne justifiait le licenciement de l’employée. Cette décision n’a pas fait l’objet d’un recours.

h. Par décision sur opposition du 31 mars 2023, la caisse a confirmé sa décision du 12 octobre 2022.

C. a. Par courrier du 4 avril 2023, la société a interjeté recours contre la décision précitée, en faisant valoir les mêmes motifs que ceux exposés dans son opposition.

b. Par réponse du 26 avril 2023, l’intimée a persisté dans les termes de sa décision sur opposition.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision sur opposition de l’intimée du 31 mars 2023, réclamant à la société le remboursement de CHF 13'000.-, correspondant aux AIT perçues du 1er mars au 30 juin 2022.

4.              

4.1  

4.1.1 D’après l’art. 1a al. 2 LACI, les buts de cette loi consistent entre autres à prévenir le chômage imminent, à combattre le chômage existant et à favoriser l’intégration rapide et durable des assurés dans le marché du travail. Afin d’atteindre les buts précités, le législateur a notamment instauré les mesures relatives au marché du travail (art. 59 ss LACI). Aux termes de l’art. 59 al. 1 LACI, l’assurance alloue des prestations financières au titre des mesures relatives au marché du travail en faveur des assurés et des personnes menacées de chômage. Les mesures relatives au marché du travail visent à favoriser l’intégration professionnelle des assurés, dont le placement est difficile, pour des raisons inhérentes au marché de l’emploi (al. 2).

4.1.2 Selon l’art. 65 LACI, les assurés, dont le placement est difficile, et qui, accomplissant une initiation au travail dans une entreprise, reçoivent de ce fait un salaire réduit, peuvent bénéficier d’allocations d'initiation au travail lorsque le salaire réduit durant la mise au courant correspond au moins au travail fourni (let. b) et qu’au terme de cette période l’assuré peut escompter un engagement aux conditions usuelles dans la branche et la région, compte tenu, le cas échéant, d'une capacité de travail durablement restreinte (let. c).

Selon l'art. 66 LACI, les AIT couvrent la différence entre le salaire effectif et le salaire normal auquel l'assuré peut prétendre au terme de sa mise au courant, compte tenu de sa capacité de travail, mais tout au plus 60 % du salaire normal (al. 1). Pendant le délai-cadre, les allocations sont versées pour six mois au plus, dans des cas exceptionnels pour douze mois au plus (al. 2). Les allocations sont versées par l'intermédiaire de l'employeur, en complément du salaire convenu. L'employeur doit payer les cotisations usuelles aux assurances sociales sur l'intégralité du salaire et prélever la part du travailleur (al. 4).

4.1.3 Aux termes de l'art. 90 al. 3 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02), l'autorité cantonale vérifie auprès de l'employeur si les conditions dont dépend l'octroi d'allocations d'initiation au travail sont remplies. Elle peut exiger que les conditions selon l'art. 65 let. b et c LACI fassent l'objet d'un contrat écrit. Bien que les assurés soient eux-mêmes titulaires du droit aux allocations d'initiation au travail, celles-ci sont versées par la caisse à l'employeur et ce dernier les verse à son tour à l'assuré avec le salaire convenu (art. 90 al. 4 OACI).

Le Tribunal fédéral a retenu, à réitérées reprises, que la formule de confirmation de l’employeur relative à l’initiation au travail modifie et complète le contrat de travail en posant des conditions supplémentaires - notamment la durée minimale du contrat de travail - auxquelles l’employeur se soumet expressément en le signant. Il a jugé que l’autorité cantonale peut introduire de telles conditions, qui font l’objet d’une clause accessoire, dans le cadre des compétences qui lui sont conférées par l’art. 90 al. 3 OACI, dès lors qu’elles servent à la réalisation des exigences posées par la loi (arrêt du Tribunal fédéral C 14/02 du 10 juillet 2002 ; André GRISEL, Traité de droit administratif, vol. I, p. 408 ss ; Ulrich HÄFELIN / Georg MÜLLER, Grundriss des Allgemeinen Verwaltungsrechts, 3ème éd., Zurich, 1998, p. 186 ss). Dans un arrêt C 15/05 du 23 mars 2006, le Tribunal fédéral a confirmé que ce formulaire est une clause accessoire au contrat de travail, laquelle prime tout accord contenant des clauses contraires.

Lorsque l’octroi des AIT est soumis à la condition du respect du contrat de travail, il s’agit là d’une réserve de révocation qui a explicitement pour effet qu’en cas de violation des obligations contractuelles par l’employeur, notamment la durée minimale de l’engagement de l’assuré - sous réserve d’une résiliation pour justes motifs -, les conditions du droit aux allocations d’initiation ne sont pas remplies. Une telle réserve est tout à fait admissible au regard du but de la mesure, qui est de favoriser l’engagement durable de personnes au chômage dont le placement est fortement entravé, ainsi que d’éviter une sous-enchère sur les salaires, ainsi qu’un subventionnement des employeurs par l’assurance-chômage (ATF 126 V 45 consid. 2a et les références).

4.1.4 Selon le Bulletin LACI/MMT J 27, janvier 2019, du Secrétariat d’État à l’économie (SECO), l’employeur s’engage à remplir un certain nombre d’obligations. Afin que l’employeur soit parfaitement informé, il est ainsi recommandé d’introduire une clause dans la « Demande et confirmation relative à l’initiation au travail qui protège les assurés contre les licenciements pendant les AIT et/ou durant une période après l'échéance des AIT ». Cela signifie que le contrat de travail ne peut être résilié durant les périodes précitées. L’employeur peut ainsi être tenu de restituer les allocations perçues si les rapports de travail sont résiliés sans justes motifs selon le code des obligations avant l’échéance du délai indiqué par l'autorité compétente ; cette restitution s’opère conformément à l’art. 95 al. 1 LACI.

4.1.5 Les décisions relatives à la suspension du droit à l’AIT au sens des art. 1a al. 2, 7, 59 ss, 65, 66 LACI et 90 OACI sont de la compétence exclusive de l’autorité cantonale, singulièrement de l’office régional de placement ; la caisse cantonale de chômage ne peut se prononcer sur le bien-fondé d’une telle décision. Lorsqu’une décision entrée en force (sanction, etc.) débouche sur une demande de restitution des prestations touchées indûment, une contestation portant sur la décision demandant la restitution ne peut être étendue à l’examen de la validité de la décision entrée en force, sauf motif de nullité de celle-ci (arrêt du Tribunal fédéral C 285/01 du 4 septembre 2002 consid.  2 ; Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 5 ad art. 100 LACI).

4.2  

4.2.1 En vertu de l'art. 95 al. 1 LACI, en relation avec l'art. 25 LPGA, la caisse doit exiger la restitution de prestations indûment versées, si les conditions d'une reconsidération ou d'une révision procédurale soient réalisées (ATF 129 V 110 consid. 1.1).

À teneur de l’art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. Ce principe général est complété par les art. 2 à 5 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11). La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile (art. 25 al. 1 phr. 2 LPGA).

L'obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d'une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d'une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) de la décision - formelle ou non - par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 et les références; ATF 138 V 426 consid. 5.2.1 et les références; ATF 130 V 318 consid. 5.2 et les références).

4.2.2 En vertu de l'art. 25 al. 2 phr. 1 LPGA, le droit de demander la restitution s'éteint trois ans après le moment où l'institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Il s’agit de délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d'office (ATF 146 V 217 consid. 2.1 et les références; ATF 142 V 20 consid. 3.2.2 et les références). Contrairement à la prescription, la péremption prévue à l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut être ni suspendue ni interrompue et lorsque s’accomplit l’acte conservatoire que prescrit la loi, comme la prise d’une décision (ATF 119 V 431 consid. 3c), le délai se trouve sauvegardé une fois pour toutes (ATF 138 V 74 consid. 5.2 et les références). En tant qu'il s'agit de délais de péremption, l’administration est déchue de son droit si elle n'a pas agi dans les délais requis (cf. ATF 134 V 353 consid. 3.1 et les références).

Le délai de péremption absolu de cinq ans commence à courir à la date du versement effectif de la prestation, et non à la date à laquelle elle aurait dû être fournie (ATF 112 V 180 consid. 4a et les références).

Le délai de péremption relatif de trois ans commence à courir dès le moment où l'administration aurait dû connaître les faits fondant l'obligation de restituer, en faisant preuve de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger d'elle (ATF 148 V 217 consid. 5.1.1 et les références; ATF 140 V 521 consid. 2.1 et les références; ATF 139 V 6 consid. 4.1 et les références).

5.              

5.1 En l’espèce, l’OCE a révoqué la décision d’octroi des AIT à la recourante par décision du 7 octobre 2022, qui a été confirmée par décision sur opposition du 9 janvier 2023. Cette dernière décision n’ayant pas fait l’objet d’un recours, elle est entrée en force. La recourante n’invoque pas un cas de révision ou de reconsidération qui permettrait la remettre en cause.

Il en résulte qu’il est ainsi suffisamment établi que les indemnités versées à la recourante ne lui étaient plus dues dès la révocation des AIT et que l’intimée était dès lors fondée à en réclamer la restitution. Il n’est pas contesté que le montant de CHF 13'000.- correspond aux indemnités versées à tort. L’intimée a demandé la restitution le 12 octobre 2022, soit très peu de temps après que l’OCE a révoqué le droit aux AIT, le 7 octobre 2022, soit dans les délais de prescription relatif et absolu.

Il s’ensuit que la décision de restitution de l’intimée doit être confirmée.

6.             Selon l’art. 25 al. 1 2e phr. LPGA, la restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation financière difficile. La recourante pourra en application de cette disposition demander à l’intimée la remise de l'obligation de restituer la somme réclamée une fois le présent arrêt entré en force de chose jugée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_799/2017).

7.             Infondé, le recours doit être rejeté et la décision sur opposition de l’intimée du 31 mars 2023 confirmée.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le