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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3133/2021

ATAS/484/2023 du 22.06.2023 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3133/2021 ATAS/484/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 juin 2023

Chambre 3

 

En la cause

Monsieur A______

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L’ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1990, a effectué sa scolarité et des études techniques (option agriculture) au Kosovo avant son arrivée en Suisse en juin 2013. Depuis lors, il a exercé les activités d’aide-menuisier (2015-2017), manutentionnaire (2016-2017), aide-jardinier (2016-2017) et, en dernier lieu, nettoyeur de trains (à 100%) pour le compte de l’entreprise B______ SA (ci-après : l’employeur), à partir du 14 mai 2018.

b. Le 7 septembre 2018, alors qu’il circulait à scooter, l’assuré a été percuté par une voiture qui sortait d’un parking.

c. La CAISSE NATIONALE D’ASSURANCES EN CAS D’ACCIDENTS (ci-après : la SUVA), auprès de laquelle l’assuré était affilié en sa qualité d’agent d’entretien de trains, a pris en charge le cas.

d. Le 12 décembre 2018, le docteur C______, médecin d’arrondissement de la SUVA et spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil moteur, a exposé à l’issue de son examen qu’aucune anomalie post-traumatique visible n’avait été relevée aux radiographies, qu’il
n’y avait pas d’anomalie discovertébrale significative, pas d’œdème osseux et que l’ensemble des ligaments était préservé. Seules étaient relevées des anomalies
de type dégénératif (débord disco-ostéophytaire C3-C4 et anomalies de la colonne lombaire sans débord discal). Les lésions constatées au bilan radiologique étaient cohérentes avec l’examen clinique normal, montrant une mobilité de la colonne cervicale satisfaisante. La situation ne justifiait pas d’incapacité de travail.

e. Par décision du 13 décembre 2018, la SUVA a mis fin au versement de l’indemnité journalière avec effet au 18 décembre 2018.

f. Le 15 décembre 2018, le docteur D______, praticien en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, a diagnostiqué une entorse de la colonne cervicale, une contusion du genou gauche et de l’épaule droite, une lombalgie post-traumatique, une cervicalgie post-traumatique et un état de stress post-traumatique (ESPT). La mobilité de la colonne cervicale était bonne, meilleure qu’auparavant. L’assuré ne portait plus sa minerve, mais se plaignait encore de douleurs à la palpation des apophyses épineuses et de douleurs aux lombaires et au genou gauche.

g. Le 21 janvier 2019, l’assuré s’est opposé à la décision de la SUVA en soutenant qu’il n’avait pu reprendre le travail le 19 décembre 2018.

h. Par décision du 28 janvier 2019, la SUVA a rejeté l’opposition en se basant sur l’avis de son médecin d’arrondissement.

i. Saisie d’un recours de l’assuré, la Cour de céans l’a rejeté (ATAS/1191/2020 du 10 décembre 2020), confirmant l’absence, au-delà du 18 décembre 2018, de causalité adéquate entre les troubles psychiques (stress post-traumatique et trouble de l’adaptation) et non objectivables et l’accident.

B. a. Le 22 février 2019, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI).

b. Le 20 mars 2019, le docteur E______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie, a répondu à un questionnaire de l’OAI et renvoyé au Dr D______ pour l’obtention d’un status détaillé (anamnèse et constatations objectives). Pour l’heure, l’assuré se plaignait toujours de douleurs à la nuque. Cependant, d’un point de vue strictement orthopédique, il n’y avait pas de diagnostic ayant une répercussion sur la capacité de travail, que ce soit dans l’activité habituelle ou toute autre activité. C’était « le problème psychologique/ psychiatrique » qui dominait le tableau clinique et influençait l’incapacité de travail.

c. Le 5 avril 2019, l’OAI a reçu en retour un questionnaire adressé à l’employeur. Selon les indications fournies, l’assuré n’avait pas repris le travail. Le dernier jour de travail effectif remontait au 7 septembre 2018 et la fin du contrat de travail au 1er février 2019.

d. Le 19 mars 2019, Madame F______, psychologue clinicienne exerçant au Centre médical Carteret, a attesté avoir suivi l’assuré d’octobre 2018 à février 2019. Les entretiens menés durant cette période avaient porté sur le syndrome de stress post traumatique (F43.10) apparu à la suite de l’accident du 7 septembre 2018. Elle disait avoir observé des symptômes tels qu’une reviviscence répétée de l’événement traumatique et un évitement des activités et des situations pouvant réveiller les souvenirs du traumatisme. S’y ajoutaient une hyperactivité neurovégétative, une hypervigilance et un état de qui-vive, une insomnie associés à une anxiété, de la peur, des cauchemars, un isolement social, un trouble de l’humeur et des troubles cognitifs (mémoire, concentration, etc.), incompatibles avec toute reprise d’activité professionnelle.

e. Dans un rapport du 11 avril 2019, la Dre G______ a indiqué que depuis le « 27 février 2018 » (recte : 7 septembre 2018), date de l’accident, la capacité de l’assuré à exercer son activité habituelle de « travailleur du bâtiment » était nulle en raison des troubles suivants :

-          entorse cervicale (S13.4) ;

-          contusion du genou gauche (S80.0) ;

-          contusion de l’épaule droite (S40.0) ;

-          lombalgie (M54.5) ;

-          cervicalgie (M54.2) ;

-          état de stress post-traumatique (F43.1).

Dans une activité adaptée, n’impliquant ni station debout prolongée, ni marche sur de longues distances, ni soulèvement, ni port de charges, ni flexion du tronc, ni accroupissement, ni travail tête et bras en élévation, la capacité de travail était comprise entre quatre et six heures par jour et pouvait être augmentée progressivement.

f. L’OAI a mis l’assuré au bénéfice de mesures d’intervention précoce sous la forme d’un cours de formation (français intensif ; cf. communications des 21 mai et 18 juin 2019).

g. Le docteur H______, spécialiste FMH en psychiatre et psychothérapie, a posé les diagnostics de contusion cérébrale avec atteintes neurocognitives aigües (F02.81), d’état de stress post-traumatique (F43.10) et de troubles de l’adaptation persistant sans prolongation de la durée de stress et de deuil complexe persistant attaché à des circonstances développementales (F43.8). « Sous guidance dans un accès de formation ou de réintégration professionnelle », la capacité de travail était de 50% (cf. rapports des 16 juin et 16 juillet 2019).

h. Le 9 janvier 2020, le docteur I______, spécialiste FMH en neurologie, a indiqué que l’imagerie par résonance magnétique (IRM) cervicale du 2 décembre 2019 était normale, sans lésion osseuse ; elle montrait simplement une très discrète discopathie protrusive C3-C4 qui n’expliquait pas l’examen clinique. Les autres examens effectués le 8 janvier 2020 (examen clinique neurologique et électroencéphalogramme) étaient tout à fait normaux. La légère asymétrie à l’exploration de la sensibilité s’intégrait de façon très probable à un syndrome douloureux chronique. Suite à l’accident, l’assuré avait développé très vraisemblablement un trouble fonctionnel dans le cadre d’un syndrome douloureux chronique, lequel avait peut-être été entretenu par un essai de traitement, d’abord par des AINS (anti-inflammatoires non stéroïdiens), puis par des dérivés morphiniques. Or, il convenait en principe d’éviter tous les dérivés morphiniques en présence d’un syndrome de ce type, et de remplacer le dérivé morphinique (Co-Dafalgan) par un tricyclique.

i. Dans un rapport du 12 août 2020 à l’OAI, la Dre G______
a indiqué que l’incapacité de travail – de 50% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles déjà évoquées le 11 avril 2019 –, était due à l’entorse cervicale (S13.4), aux cervicalgies (M54.2) et à l’état de stress post-traumatique (F43.1) apparus lors de l’accident du 7 septembre 2018.

j. Par courriers des 24 septembre et 2 octobre 2020, les Établissements publics pour l’intégration (ci-après : EPI) ont informé l’OAI, respectivement l’assuré, qu’une place de stage s’était libérée du 19 octobre 2020 au 24 janvier 2021 ; l’assuré était attendu le 19 octobre 2020 à leur unité d’évaluation et d’orientation.

k. Le 5 octobre 2020, le Service médical régional Suisse romande (SMR) a estimé qu’il ne disposait pas, en l’état, d’information permettant de justifier le maintien d’une incapacité de travail de 50% telle qu’attestée par les Drs H______ et G______. Il préconisait une expertise rhumato-psychiatrique.

l. Il ressort d’une note de travail du 15 octobre 2020, que l’orientation professionnelle aux EPI a dû être annulée en raison de la demande d’expertise bidisciplinaire.

m. L’assuré a été examiné, en date du 17 mars 2021 par les docteurs J______, spécialiste FMH en rhumatologie, et K______, spécialiste en psychiatrie.

Dans leur rapport du 21 mars 2021, ces experts ont retenu les diagnostics d’ESPT en rémission, de trouble somatoforme indifférencié (F45.1) et de status post contusions multiples, en précisant qu’ils étaient sans répercussion sur la capacité de travail.

D’un point de vue rhumatologique, il n’y avait pas lieu de remettre en question l’avis émis le 12 décembre 2018 par le Dr VARGAS sur l’atteinte post-traumatique au vu du descriptif de son examen du 15 novembre 2019 et des radiographies effectuées.

En ce qui concernait l’assurance-invalidité, la question en suspens était de savoir s’il existait des troubles dégénératifs pouvant expliquer les symptômes de l’assuré et s’il existait des limitations fonctionnelles durables. Tel n’était pas le cas : il n’y avait de troubles dégénératifs significatifs, ni au niveau de la nuque, ni au niveau lombaire, ni au niveau du genou gauche, pouvant expliquer les plaintes de l’assuré ou ses difficultés à reprendre une activité professionnelle. On était donc en présence d’un syndrome algique sans substrat organique, si bien qu’il y avait lieu de retenir le diagnostic de trouble somatoforme indifférencié (F45.1). Les contusions multiples dues à l’accident avaient conduit à une incapacité de travail limitée dans le temps du 7 septembre au 12 décembre 2018, ne répondant pas aux critères d’une incapacité de travail durable au sens de l’assurance-invalidité. En effet, le trouble somatoforme indifférencié n’était pas incapacitant vu les ressources disponibles ou mobilisables de l’assuré, globalement conservées.

Sur le plan psychiatrique, l’incapacité de travail ayant débuté le 7 septembre 2018, si elle était toujours totale le 12 décembre 2018 en raison de l’ESPT, avait évolué de sorte que, depuis mars 2020, l’ESPT était en rémission et non incapacitant.

C. a. Le 30 avril 2021, l’OAI a adressé à l’assuré un projet de décision dont il ressortait qu’il se proposait de lui reconnaître le droit à une rente entière d’invalidité limitée dans le temps.

Le 1er septembre 2019, à l’échéance du délai d’attente d’un an, l’incapacité de gain de l’assuré, entière, lui ouvrait droit à une rente entière d’invalidité.

Par la suite, l’assuré avait recouvré une capacité de travail entière dans toute activité dès mars 2020, de sorte que le droit à la rente prenait fin le 31 mai 2020, trois mois après l’amélioration constatée. Dans cette situation, des mesures professionnelles n’étaient pas indiquées.

b. Par pli du 17 mai 2021, l’assuré a contesté ce projet en contestant toute amélioration de son état de santé en mars 2020.

c. Par courrier du 21 mai 2021 à l’OAI, la Dre G______ a indiqué soutenir sa démarche. Les cervicalgies, réfractaires aux antalgiques, perturbaient sans arrêt le quotidien de son patient et ne lui permettaient pas de reprendre une activité professionnelle. Il présentait en outre un état anxieux et dépressif ainsi qu’un syndrome de stress post-traumatique.

d. Dans un rapport du 30 mai 2021, le Dr H______ a maintenu les diagnostics posés précédemment et invité l’OAI à reconsidérer son refus d’octroyer des mesures d’ordre professionnel.

e. Le 14 juin 2021, le docteur L______, médecin SMR, a estimé
en substance qu’il convenait de s’en tenir aux conclusions du rapport d’expertise rhumato-psychiatrique du 21 avril 2021.

f. Par décision du 9 août 2021, l’OAI a octroyé à l’assuré une rente d’invalidité du 1er septembre 2019 au 31 mai 2020.

D. a. Le 13 septembre 2021, l’assuré a saisi la Cour de céans d’un recours concluant à l’octroi, principalement, d’une rente d’invalidité non limitée dans le temps, subsidiairement, de mesures de réadaptation. Il conteste toute amélioration de son état de santé.

b. Le 15 novembre 2021, l’assuré a notamment produit :

-          un rapport du 5 juin 2021 du docteur M______, radiologue, relatif à une IRM de la colonne cervicale pratiquée deux jours plus tôt, concluant à une rectitude de la lordose cervicale avec discopathie circonférentielle et interépineuse C3-C4 et protrusion discale foraminale droite, déstabilisant une uncarthrose, et au contact de la racine C4 droite ;

-          un rapport du 3 juin 2021 du Dr M______, relatant une infiltration interépineuse en C2-C3, C3-C4 et C6-C7, partiellement réalisée, le Dr M______ jugeant préférable de commencer par un renforcement conservateur avec acupuncture et prise en charge par « notre consultation de la douleur chronique de première intention » ;

-          un rapport du 18 octobre 2021 du Dr H______, réitérant les diagnostics précédemment posés et soulignant la nécessité de mesures professionnelles ;

-          une copie du rapport du 13 juin 2019 du Dr H______ déjà produit.

c. Le 14 décembre 2021, l’intimé a conclu au rejet du recours et renvoyé à un avis du 9 décembre 2021 dans lequel la docteure N______, médecin SMR, se détermine sur les rapports produits par le recourant.

Ce médecin relève que la discopathie C3-C4 était déjà connue. Comme les experts l’ont indiqué dans leur rapport du 21 mars 2021, les douleurs alléguées dépassent largement l’intensité attendue en lien avec les atteintes organiques sous-jacentes. Sur le plan psychiatrique, les deux rapports produits sont en tous points identiques aux rapports transmis précédemment lors de l’instruction et largement pris en compte dans le rapport d’expertise du 21 mars 2021. Sachant par ailleurs qu’un ESPT constitue une réponse différée ou prolongée à une situation ou à un événement stressant (de courte ou de longue durée) exceptionnellement menaçant ou catastrophique et qui provoquerait des symptômes évidents de détresse chez la plupart des individus (par ex. catastrophe naturelle ou d’origine humaine, guerre, accident grave, mort violente en présence du sujet, torture, terrorisme, viol et autres crimes), les examinateurs du SMR ont été cléments en retenant un ESPT dans le cas du recourant, étant rappelé que celui-ci n’a été victime que d’un accident à faible cinétique, ayant entraîné uniquement quelques contusions.

d. Entendu le 27 septembre 2022 par la Cour de céans, le recourant a tenu à faire part à la Cour de céans de son mal-être psychique. En comparaison, ses douleurs physiques ne sont pas importantes. Depuis l’accident, il ne peut plus dormir tranquille en raison du stress. Il est désespéré et, dans son état actuel, il estime être dans l’incapacité totale d’exercer la moindre activité. Alors qu’il se réjouissait beaucoup d’effectuer un stage aux EPI, il dit avoir vécu l’annulation de cette mesure comme un deuxième accident. Ce qu’il souhaite, c’est retrouver une vie normale et retravailler pour payer ses factures.

L’intimé a expliqué pour sa part que le stage initialement prévu aux EPI a été annulé en raison de la demande d’expertise bidisciplinaire. L’instruction médicale a ensuite pris le pas.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.              

2.1 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.

2.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

2.3 Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement
(art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b LPA), le recours est recevable.

3.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201 ; RO 2021 706).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l’état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

En l’occurrence, la décision querellée concerne un premier octroi de rente dont le droit est né avant le 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

4.             Le litige porte sur le point de savoir si le recourant a droit à une rente d’invalidité au-delà du 31 mai 2020.

5.             Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l’assurance-invalidité accorde une rente d’invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l’augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5.2 ; 125 V 413 consid. 2d et les références ; VSI 2001 p. 157 consid. 2).

L’art. 17 al. 1 LPGA dispose que si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée.

Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon
l’art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 134 V 131 consid. 3 ; 130 V 343 consid. 3.5). Tel est le cas lorsque la capacité de travail s’améliore grâce à une accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_622/2015 du 9 mars 2016 consid. 4.1). Il n’y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; 112 V 371 consid. 2b ; 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l’art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier. La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral I 111/07 du 17 décembre 2007 consid. 3 et les références). Un changement de jurisprudence n’est pas un motif de révision (ATF 129 V 200 consid. 1.2).

Le point de savoir si un changement notable des circonstances s’est produit doit être tranché en comparant les faits tels qu’ils se présentaient au moment de la dernière révision de la rente entrée en force et les circonstances qui régnaient à l’époque de la décision litigieuse. C’est en effet la dernière décision qui repose sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et une comparaison des revenus conformes au droit qui constitue le point de départ temporel pour l’examen d’une modification du degré d’invalidité lors d’une nouvelle révision de la rente (ATF 133 V 108
consid. 5.4 ; 130 V 343 consid. 3.5.2).

Si les conditions de la révision sont données, les prestations sont, conformément
à l’art. 17 al. 1 LPGA, modifiées pour l’avenir dans le sens exigé par le nouveau degré d’invalidité. Chaque loi spéciale peut fixer le point de départ de la modification ou encore exclure une révision en s’écartant de la LPGA (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 806/04 du 15 mars 2005 consid. 2.2).

Dans le domaine de l’assurance-invalidité, le point de départ d’une modification du droit aux prestations est fixé avec précision. En cas de modification de la capacité de gain, la rente doit être supprimée ou réduite avec effet immédiat si
la modification paraît durable et par conséquent stable (phr. 1 de l’art. 88a al. 1 RAI) ; on attendra en revanche trois mois au cas où le caractère évolutif de l’atteinte à la santé, notamment la possibilité d’une aggravation, ne permettrait pas un jugement immédiat (phr. 2 de la disposition ; arrêt du Tribunal fédéral I 666/81 du 30 mars 1983 consid. 3, in RCC 1984 p. 137 s.). En règle générale, pour examiner s’il y a lieu de réduire ou de supprimer la rente immédiatement ou après trois mois, il faut examiner pour le futur si l’amélioration de la capacité de gain peut être considérée comme durable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_32/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1). L’OAI doit réduire ou supprimer la rente avec effet à la fin du mois au cours duquel le délai de trois mois a expiré (voir arrêt du Tribunal fédéral 9C_900/2013 du 8 avril 2014 consid. 6.5 dans le même sens).

6.              

6.1 Est réputée invalidité, l’incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d’une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).

6.2 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l’art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l’art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d’un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l’assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l’assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; 102 V 165
consid. 3.1 ; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral I 786/04 du
19 janvier 2006 consid. 3.1).

6.2.1 La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanant d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, telle la classification internationale des maladies (ci-après : CIM) ou le DSM-IV (Diagnostic and Statiscal Manual ; ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1 ; 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

6.2.2 Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d’évaluation de la capacité de travail, respectivement de l’incapacité
de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d’affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d’évaluation au moyen d’un catalogue d’indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d’évaluation aux autres affections psychiques
(ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d’atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d’un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au nombre desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l’art (ATF 143 V 409 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).

Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé, la portée des motifs d’exclusion définis dans l’ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l’absence d’une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d’assurance, si les limitations liées à l’exercice d’une activité résultent d’une exagération des symptômes ou d’une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d’un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d’une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, d’allégation d’intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, d’absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l’anamnèse, de plaintes très démonstratives laissant insensible l’expert, ainsi qu’en cas d’allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2 ; 132 V 65 consid. 4.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2).

6.2.3 L’organe chargé de l’application du droit doit, avant de procéder à l’examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d’une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l’assurance-invalidité, c’est-à-dire qui résiste aux motifs dits d’exclusion tels qu’une exagération ou d’autres manifestations d’un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

6.2.4 Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d’évaluation normative et structurée si elle n’est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu’il n’existe aucun indice en faveur d’une incapacité de travail durable ou lorsque l’incapacité de travail est niée sous l’angle psychique sur la base d’un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d’éventuelles appréciations contraires n’ont pas de valeur probante du fait qu’elles proviennent de médecins n’ayant pas une qualification spécialisée ou pour d’autres raisons (arrêts du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence ; 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l’absence d’un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n’a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).

6.2.5 Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d’une procédure d’établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d’évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d’une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d’autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L’accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d’exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence). 

Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

-     Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),

A.    Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)

Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3)

B.     Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles ; consid. 4.3.2) 

C.     Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)

-     Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement ; consid. 4.4) 

Limitation uniforme du niveau d’activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l’anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).

Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).

7.              

7.1 En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s’il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Selon les art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA. Selon l’art. 29 al. 3 LAI, la rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance.

7.2 Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et
art. 28a al. 1 LAI).

La comparaison des revenus s’effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l’un avec l’autre, la différence permettant de calculer le taux d’invalidité (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 128 V 29 consid. 1 ; 104 V 135 consid. 2a et 2b).

Selon la jurisprudence, il est possible de fixer la perte de gain d’un assuré directement sur la base de son incapacité de travail en faisant une comparaison en pour-cent. Cette méthode constitue une variante admissible de la comparaison des revenus basée sur des données statistiques : le revenu hypothétique réalisable sans invalidité équivaut alors à 100%, tandis que le revenu d’invalide est estimé à un pourcentage plus bas, la différence en pour-cent entre les deux valeurs exprimant le taux d’invalidité. L’application de cette méthode se justifie lorsque le salaire sans invalidité et celui avec invalidité sont fixés sur la base des mêmes données statistiques, lorsque les salaires avant et/ou après invalidité ne peuvent pas être déterminés, lorsque l’activité exercée précédemment est encore possible (en raison par exemple du contrat de travail qui n’a pas été résilié), ou encore lorsque cette activité offre de meilleures possibilités de réintégration professionnelle, en raison, par exemple, d’un salaire sans invalidité supérieur à celui avec invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_237/2016 du 24 août 2016 consid. 2.2 et les références).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d’invalidité, au sens
du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ;
ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001
consid. 1).

8.              

8.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il
y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

8.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

8.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d’apprécier certains types d’expertises ou de rapports médicaux.

8.3.1 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d’observations approfondies et d’investigations complètes, ainsi qu’en pleine connaissance du dossier, et que l’expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu’aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

8.3.2 Un rapport du SMR a pour fonction d’opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu’il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d’une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d’un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l’office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).

8.3.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l’expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l’unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S’il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l’objectivité ou l’impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l’éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l’existence d’éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

8.3.4 On ajoutera qu’en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n’est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s’apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu’au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d’expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l’administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu’un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n’en va différemment que si ces médecins traitants font état d’éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l’expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l’expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

9.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

10.          

10.1 En l’espèce, le recourant conteste en substance la suppression de la rente au 31 mai 2020, contestant toute amélioration de son état de santé le 1er mars 2020. L’intimé se fonde quant à lui sur le rapport d’expertise rhumato-psychiatrique du 21 mars 2020 et les rapports du SMR pour justifier sa décision.

Il n’est ni contesté, ni contestable qu’à l’issue du délai d’attente d’un an, soit en septembre 2019, le recourant était dans l’incapacité totale d’exercer la moindre activité, ce qui lui ouvre droit à une rente entière à partir du 1er septembre 2019.

Dans la mesure où le recourant conteste les conclusions des examinateurs du SMR au motif qu’elles sont contredites par les Drs G______ et H______ sur les plans rhumatologique et psychiatrique, il convient tout d’abord d’examiner la valeur probante du rapport d’expertise bidisciplinaire du SMR.

10.2 Il ressort en synthèse du rapport d’expertise du 21 mars 2021 qu’en l’absence de limitations fonctionnelles durables d’ordre ostéoarticulaire – ayant justifié une incapacité de travail totale du 7 septembre au 18 décembre 2018 –, seul le diagnostic psychiatrique d’ESPT a entraîné une incapacité de travail pertinente pour le droit aux prestations d’assurance-invalidité, mais seulement jusqu’au 29 février 2020, date à compter de laquelle il a été en rémission. En effet, les plaintes douloureuses, encore d’actualité au moment de l’expertise, ont conduit les médecins, vu l’absence de substrat organique, à conclure à un trouble somatoforme indifférencié qu’ils ont considéré comme non invalidant, vu les ressources disponibles ou mobilisables de l’assuré, globalement conservées.

Il ressort de l’expertise que, sur le plan somatique, les genoux étaient normo-axés, sans tuméfaction, ni épanchement. Fonctionnellement, la vitesse de marche était normale, sans canne, ni boiterie. L’assuré était capable de s’accroupir à 100%. Certes, l’assuré se plaignait du genou et des lombaires. Cependant, l’expert J______ a constaté qu’une IRM du genou gauche, effectuée le 23 octobre 2018, n’avait révélé d’atteinte ni aux ménisques, ni aux ligaments croisés. Il n’y avait pas non plus de fracture. Le seul élément particulier résidait dans une infiltration de type œdémateux au niveau de la graisse intra-patellaire latérale, évoquant un syndrome de friction fémoro-patellaire. En l’absence de chondropathie et d’épanchement, cette seule infiltration ne permettait pas de conclure à des signes de surcharge fémoro-patellaire, de sorte que les douleurs persistantes de l’assuré au niveau des genoux ne s’expliquaient pas. Au niveau du rachis, l’assuré n’avait pas d’attitude antalgique. Il existait une incohérence entre la mobilité automatique ou spontanée de la nuque, qui était symétrique, d’amplitude modérée, et une diminution de la mobilité marquée en extension et en rotation. L’expert a exclu un syndrome rachidien lombaire, compte tenu de la mobilité constatée en flexion et de l’absence de contracture paravertébrale. À la recherche de signes comportementaux, le score de Waddell était positif. En novembre 2018, une IRM cervicale et lombaire s’était révélée dans les limites de la norme. Cet examen montrait, selon le radiologue, un léger débord disco-ostéophytaire C3-C4 postéro-latéral droit. Il s’agissait d’une atteinte dégénérative toute débutante, une trouvaille fortuite qui n’expliquait ni les symptômes de l’assuré, ni la non-réponse aux traitements.

Sur le plan psychique, la Cour de céans constate que même si l’expert K______ ne s’en tient pas strictement aux standards usuels d’une expertise psychiatrique réalisée selon la procédure probatoire structurée au sens de l’ATF 141 V 281 (ATF 143 V 418) et que ses explications requièrent de la part du lecteur qu’il recherche dans l’expertise les différents indicateurs jurisprudentiels et en fasse la synthèse lui-même, il ne résulte pas moins de l’inventaire de tous les points pertinents, en particulier des informations qu’il y a lieu de classer sous l’indicateur « atteinte à la santé », que l’ESPT a connu une régression des symptômes depuis un an. L’analyse de l’anamnèse psychiatrique et du status ne révèlent plus de reviviscences ou de cauchemars envahissant la vie psychique de l’intéressé. En ce qui concerne le trouble somatoforme indifférencié, l’expert psychiatre n’a relevé, durant son examen de près de deux heures, qu’une seule attitude antalgique au bout d’une heure, mais ni douleur intense, ni sentiment de détresse. Quant à l’axe « personnalité », les constatations faites, éclairées notamment par le parcours de l’intéressé (enfance, scolarité, formation, parcours professionnel et famille) et son status psychiatrique ont conduit l’expert psychiatre à retenir que les ressources de l’intéressé sont bonnes et qu’il ne présente aucun trouble de la personnalité. S’agissant de l’axe « contexte social », soit la recherche d’un éventuel retentissement des troubles psychiques sur la vie sociale, les constatations de l’expert ne révèlent aucune particularité (hormis quelques réticences à prendre son véhicule personnel ou à utiliser les transports en commun). Il est relevé que, depuis un an, le recourant participe davantage aux tâches ménagères, sort plus souvent de son appartement, reçoit régulièrement la visite d’un ami et ne vit plus systématiquement avec les volets fermés. De plus, il se rend seul chez son thérapeute, s’adonne à son loisir favori (écouter de la musique), et consulte Internet plusieurs heures par jour sur son smartphone. Il s’ensuit, en synthèse, que depuis le 1er mars 2020, le degré fonctionnel de l’atteinte à la santé ne se répercute pas sur la capacité de travail du recourant, que ce soit dans son activité habituelle de nettoyeur de trains ou toute autre.

Tenant compte des plaintes de l’intéressé, comportant une anamnèse détaillée, des diagnostics motivés et des conclusions claires et cohérentes, le rapport d’expertise rhumato-psychiatrique du 21 mars 2021 remplit les réquisits permettant de lui reconnaître valeur probante.

10.3 Par l’intermédiaire de ses médecins, le recourant conteste toute amélioration de son état de santé en mars 2020.

La Cour de céans constate que les experts expliquent de manière circonstanciée les raisons pour lesquelles les troubles dégénératifs au niveau du genou gauche et de la colonne cervicale et lombaire ne sont pas significatifs au point de justifier les plaintes douloureuses du recourant ou les difficultés alléguées à reprendre une activité professionnelle. Les experts motivent également de manière convaincante les raisons pour lesquelles l’ESPT n’a plus été incapacitant à compter de mars 2020 et pourquoi ils ne retiennent pas les diagnostics de troubles de l’adaptation sociale (F43.8) et de contusion cérébrale aiguë avec confusion (F02.81) posés par le Dr H______, pas plus que celui d’état anxieux et dépressif évoqué par la Dre G______ dans son rapport du 11 avril 2019.

Les appréciations des Drs G______ et H______ divergent certes de celles des experts – ce qui ne justifie pas en soi la mise en œuvre d’une nouvelle expertise (cf. ci-dessus : consid. 8.3.4) –, mais en tout état, elles ne révèlent aucun élément objectivement vérifiable et suffisamment circonstancié qui aurait été ignoré par les experts J______ et K______.

Partant, il convient de retenir qu’il est établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que les atteintes, pour autant qu’elles aient subsisté – en particulier l’ESPT – ne l’ont plus empêché d’exercer son ancienne activité de nettoyeur de trains (ou toute autre activité professionnelle) au même taux qu’avant l’accident (100%) depuis mars 2020.

11.         Il reste à examiner le degré d’invalidité.

L’intimé, considérant que les revenus sans et avec invalidité devaient être fixés sur la base d’une comparaison en pour-cent, a retenu que la perte de gain du recourant se confondait avec l’incapacité de travail, totale du 7 septembre 2018 jusqu’au 29 février 2020, mais nulle à compter du 1er mars 2020, justifiant qu’il soit mis fin à la rente avec effet au 31 mai 2020 (cf. ci-dessus : consid. 5 in fine). En septembre 2019, soit à l’échéance du délai d’attente d’une année, et jusqu’au 29 février 2020, l’invalidité a donc été totale compte tenu d’une incapacité de gain qui ne l’était pas moins.

Le recourant ne conteste pas la méthode d’évaluation de l’invalidité choisie par l’intimé, singulièrement le procédé consistant à faire correspondre sa perte de gain à son incapacité de travail, en faisant une comparaison en pour-cent (cf. ci-dessus : consid. 7.2). Ce choix ne prête pas non plus le flanc à la critique dans le cas particulier.

Partant, c’est à bon droit que l’intimé a considéré que le degré d’invalidité, de 0% dès mars 2020, ne permettait pas de maintenir au-delà du 31 mai 2020 la rente entière d’invalidité allouée dès le 1er septembre 2019.

12.         Il reste à examiner si le recourant peut prétendre une mesure d’ordre professionnel.

Selon l’art. 8 al. 1 LAI, les assurés invalides ou menacés d’invalidité ont droit à des mesures de réadaptation pour autant :

-          que ces mesures soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d’accomplir leurs travaux habituels (let. a) ;

-          que les conditions d’octroi des différentes mesures soient remplies (let. b).

Il découle de la systématique légale et de l’art. 8 al. 1 let. b LAI qu’en tant que mesures de réadaptation, les mesures d’ordre professionnel (art. 15 ss LAI) ne sont pas seulement soumises aux conditions qui leur sont spécifiques mais aussi aux conditions générales de la règle de base de l’art. 8 LAI (arrêt du Tribunal fédéral 8C_485/2021 du 23 décembre 2021 consid. 5.2).

Lorsqu’une absence de réadaptation professionnelle n’est pas due à des difficultés de recherches d’emploi elles-mêmes liées à l’état de santé, mais à des problèmes étrangers à l’invalidité, les conditions pour des mesures de réadaptation ne sont pas remplies au regard de l’art. 8 al. 1 let. a LAI (cf. arrêt 8C_485/2021 précité, consid. 5.4).

En l’occurrence, un droit à une mesure d’ordre professionnel doit être nié puisqu’il est établi, d’un point de vue médical, que l’état de santé de l’assuré ne l’empêche pas d’exercer une activité lucrative, quelle qu’elle soit.

13.         Compte tenu de ce qui précède, le recours doit être rejeté.

14.         Un émolument de CHF 200.- est mis à la charge du recourant, qui n’obtient pas gain de cause (art. 69 al. 1bis LAI).

 

*****


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge du recourant.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le