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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/830/2023

ATAS/483/2023 du 19.06.2023 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 11.07.2023, rendu le 06.09.2023, IRRECEVABLE, 8C_450/2023
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/830/2023 ATAS/483/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 juin 2023

Chambre 6

 

En la cause

A______

 

 

recourant

 

contre

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1963, de nationalité colombienne, a travaillé pour la société B______ SA (ci-après : l'employeuse) en qualité de nettoyeur d'entretien depuis le 1er mars 2020 et était assuré à ce titre contre le risque accident auprès de la CAISSE NATIONALE SUISSE EN CAS D'ACCIDENTS (ci-après : SUVA).

b. Le 10 novembre 2020, l'assuré a chuté dans les escaliers sur son lieu de travail et s'est blessé à l'épaule gauche.

B. a. Les premiers soins ont été donnés le jour même à la Clinique des Grangettes où une luxation antérieure de l'épaule gauche avec fracture du tubercule majeur de l'humérus a été diagnostiquée et traitée par réduction.

b. La SUVA a versé des indemnités journalières en raison de l'accident à compter du 13 novembre 2020.

c. Le 8 juin 2021, la médecin d'arrondissement de la SUVA a jugé que l'atteinte à la santé justifiait une incapacité de travail d'au minimum six à huit mois en présence d'une évolution favorable.

d. Une imagerie par résonance magnétique (ci-après : IRM) du 10 août 2021 a conclu à la consolidation de la fracture du trochiter, à une tendinopathie fissuraire du susépineux, à une tendinopathie microfissuraire du sous-scapulaire avec ébauche de subluxation médiale du long chef et à une arthrose acromioclaviculaire.

e. Dans un rapport de consultation ambulatoire des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) du 27 septembre 2021, le docteur C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a préconisé la poursuite de la physiothérapie et une infiltration, au vu de la gêne et des douleurs rapportées par l'assuré.

f. Le 29 novembre 2021, le docteur D______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation, a posé les diagnostics de tendinopathie ainsi que de subluxation de la fracture. Il a attesté de ce que l'évolution était lentement favorable, avec une forme de chronicisation. Le pronostic était variable en raison de la subluxation de la fracture du trochiter.

g. Dans un rapport du 22 février 2022, le Dr C______ a indiqué que l'infiltration dont avait bénéficié l'assuré cinq mois plus tôt avait eu un bénéfice sur ses douleurs pendant un mois, avant qu'elles ne réapparaissent. Il a à nouveau conseillé la poursuite de la physiothérapie de manière intensive pendant trois mois et, en cas de mauvaise évolution, une nouvelle infiltration.

h. L'assuré a séjourné à la clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR) de la SUVA du 22 mars au 21 avril 2022. Le rapport dressé le 8 mai 2022 à la suite de ce séjour retient, à titre de diagnostics principaux, des thérapies physiques et fonctionnelles pour douleurs persistantes de l'épaule gauche après le traumatisme du 10 novembre 2020, une luxation gléno-humérale antérieure et fracture-impaction du trochiter, ainsi qu'une tendinopathie du supra-épineux avec déchirure interstitielle profonde et bursite sous-acromiale selon IRM du 22 avril 2022. Le status d'entrée mettait en évidence une hypotrophie musculaire autour de l'épaule gauche, des douleurs à la palpation de la face antérieure de ce membre, ainsi que des restrictions des amplitudes articulaires. Une amélioration de la mobilité active de l'épaule gauche a été notée à la sortie, étant précisé que les tests fonctionnels n'avaient alors pas pu être réalisés en raison d'une augmentation des douleurs à la suite d'une infiltration de la bourse sous-acromiale réalisée le 20 avril 2022. D'après les médecins de la CRR, les plaintes et limitations fonctionnelles de l'assuré s'expliquaient en partie par les lésions objectives constatées pendant le séjour ; des facteurs contextuels influençaient négativement ses aptitudes fonctionnelles (focalisation et cotation élevée de la douleur, catastrophisme élevé, kinésiophobie modérée à sévère, chez un patient anxieux). Lors de sa participation aux ateliers professionnels, l'assuré avait effectué des activités avec un niveau d'effort très léger, évitant les contraintes posturales importantes ; des douleurs limitantes au niveau de l'épaule gauche dans les mouvements avec l'avant-bras en porte-à-faux et les mouvements en-dessus du plan de l'épaule ont été constatées, la position statique debout a été peu endurante et évitée et les déplacements à plat ont été lents. La situation n'était pas stabilisée sur le plan médical et des aptitudes fonctionnelles, dans l'attente des effets de l'infiltration du 20 avril 2022 et de la poursuite de la physiothérapie. Une stabilisation devait être attendue dans les deux à trois mois, avec un pronostic de réinsertion dans l'ancienne activité défavorable, et théoriquement favorable dans une activité adaptée respectant les limitations fonctionnelles suivantes : port de charges supérieures à 5-10 kg, port de charges répété supérieures à 5 kg, travail avec le membre supérieur gauche au-dessus du plan des épaules, activités nécessitant de la force ou des mouvements répétés du membre supérieur gauche et position en porte-à-faux prolongée de ce membre. Sur le plan psychologique, aucun diagnostic n'a été posé au cours du séjour, bien que l'assuré ait décrit un moral bas.

i. Dans ses notes de suite du 13 juin 2022, le docteur E______ du service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil moteur des HUG, a mentionné un tableau de douleurs chroniques de l'épaule gauche avec une épaule globalement hyperalgique dans les degrés d'amplitude maximaux et une palpation diffusément douloureuse, ainsi qu'un examen du rachis cervical douloureux avec des contractures des muscles péri-cervicaux. Il a souligné l'intérêt d'une consultation spécialisée de la douleur.

j. Une IRM de la colonne cervicale réalisée le 22 septembre 2022 a mis en évidence une discopathie C6-C7 sans rétrécissement foramino-canalaire significatif.

k. Le docteur F______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur et médecin d'arrondissement de la SUVA, a examiné l'assuré en date du 28 novembre 2022. Il a constaté des douleurs à la mobilisation et à la palpation de l'épaule gauche, des douleurs modérées à la palpation de l'épaule droite et des douleurs à la palpation du rachis cervical. Le médecin a posé les diagnostics de luxation gléno-humérale antéro-inférieure avec fracture du trochiter à l'épaule gauche le 10 novembre 2022, de tendinopathie du supra-épineux avec déchirure interstitielle et bursite sous-acromiale à l'épaule gauche et de discopathie C6-C7 sans rétrécissements foraminaux canalaires significatifs. Les deux premiers diagnostics étaient en relation de causalité naturelle au degré de vraisemblance prépondérante avec l'évènement du 10 novembre 2020, tandis que le troisième diagnostic ne l'était pas. La situation médicale était stabilisée, la rééducation n'amenant plus d'amélioration ou de progression. L'assuré présentait les limitations fonctionnelles suivantes : mouvements répétitifs de l'épaule gauche, activités nécessitant les bras au-dessus du plan des épaules à gauche, activités nécessitant une position en porte-à-faux du membre supérieur gauche, et port de charge avec ce membre. Sur le plan professionnel, l'activité habituelle de conciergerie n'était plus exigible, de manière définitive. Dans une activité adaptée respectant les limitations fonctionnelles, de type manutention légère privilégiant l'utilisation d'outils informatiques, la capacité de travail était théoriquement complète, sans diminution de rendement.

l. Le 1er décembre 2022, le Dr F______, procédant à l'estimation de l'atteinte à l'intégrité, a indiqué que l'épaule gauche présentait une atteinte comparable par analogie à une périarthrite scapulo-humérale avec une arthrose gléno-humérale qui justifiait un taux de 15% selon la table 5, correspondant à la fourchette haute des atteintes arthrosiques moyennes (10%), auxquelles il fallait ajouter un taux de 5% pour l'aggravation prévisible.

m. Par courrier du 5 décembre 2022, la SUVA a informé l'assuré qu'elle allait mettre fin au paiement des indemnités journalières et soins médicaux au 31 janvier 2023, sur la base de l'examen médical réalisé le 28 novembre 2022.

n. Par décision du 16 décembre 2022, la SUVA a fixé l'indemnité pour atteinte à l'intégrité à CHF 22'230.-, correspondant à une diminution de l'intégrité de 15%, et a refusé l'octroi d'une rente d'invalidité, en raison de l'absence de toute perte de gain, le salaire avec invalidité issu des statistiques étant plus élevé que le salaire réalisé avant l'atteinte à la santé.

o. Par lettre du 15 janvier 2023, l'assuré a expliqué qu'il souhaitait continuer son traitement avec la SUVA.

p. Par courrier du 26 janvier 2023 intitulé « demande changement du taux d'intégrité », l'assuré s'est opposé à la décision du 16 décembre 2022, mentionnant qu'il n'était pas d'accord avec le taux d'atteinte à l'intégrité de 15%. Il estimait qu'il manquait 35%, car, depuis l'accident, sa vie s'était arrêtée et n'était plus normale. En outre, il ne pouvait plus rien faire et sa fille avait dû venir vivre chez lui pour l'aider dans ses tâches du quotidien, ce qui était très humiliant. À 60 ans, son corps n'avait plus de force pour se rétablir rapidement et il resterait ainsi jusqu'à la fin de sa vie. Sa demande d'une indemnisation plus généreuse était légitime car il était la seule personne à connaître et ressentir sa douleur physique et mentale.

q. Le 9 février 2023, le Dr E______ a attesté que la situation de l'assuré était stable avec une épaule gauche fonctionnellement insuffisante, très douloureuse. L'épaule droite était également en train de compenser et les douleurs se bilatéralisaient. Ces douleurs étaient apparues de façon secondaire, non traumatique, à l'instar des douleurs cervicales, également de compensation. D'un point de vue professionnel, il n'imaginait pas une autre activité qu'une activité bimanuelle coude au corps, sans effort de soulèvement de charges de plus de 5 kg.

r. Le 23 février 2023, la SUVA a rejeté l'opposition portant sur l'évaluation de l'atteinte à l'intégrité, relevant que les griefs de l'assuré constituaient des avis personnels et n'étaient soutenus par aucune pièce médicale au dossier. Rien n'autorisait à s'écarter des conclusions probantes et convaincantes de son médecin d'arrondissement qui avait évalué l'atteinte à 15%. Elle considérait par ailleurs que l'assuré n'avait pas contesté le refus de rente d'invalidité.

C. a. Le 6 mars 2023, la SUVA a transmis à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice pour objet de sa compétence l'écriture de l'assuré du 1er mars 2023 intitulée « opposition taux intégration », par laquelle il a contesté la décision sur opposition en reprenant les griefs élevés dans son opposition, et a communiqué de nouveaux rapports médicaux, soit :

-          Un rapport du Dr D______ du 12 décembre 2022 portant sur la causalité des cervicalgies avec l'accident du 10 novembre 2020, dans lequel il affirme que l'accident intéresse l'épaule gauche du recourant, mais aussi son rachis cervical, avec répercussion pour les gestes de la vie quotidienne, étant relevé qu'avant l'évènement traumatique le recourant ne souffrait pas de cervicalgies. Il indique que l'état clinique du recourant nécessite la prise en charge des soins par la SUVA.

-          Une attestation du Dr D______ du 1er mars 2023 dans laquelle ce dernier rappelle que le recourant présente une pathologie aux deux épaules, limitant beaucoup ses activités quotidiennes et justifiant le dossier auprès de l'assurance-invalidité, et par laquelle il transmet à cette assurance les notes de suite de la consultation du Dr E______ du 9 février 2023.

-          Le calendrier des séances de physiothérapie du recourant depuis début janvier 2023 et jusqu'à la fin du mois de mars 2023.

b. Par écriture du 15 mars 2023, l'intimée a conclu au rejet du recours, se référant à sa décision sur opposition du 23 février 2023, le recours n'étant qu'une copie de l'opposition déjà formée par le recourant.

c. Une audience de comparution personnelle s'est tenue le 15 mai 2023.

Le recourant a déclaré qu'il était totalement incapable de travailler, ce d'autant que sa profession consistait en un travail physique. Il a produit diverses pièces, dont un certificat médical du Dr D______ mentionnant une dépression réactionnelle.

Quant au représentant de l'intimée, il a expliqué avoir considéré que l'opposition et le recours ne concernaient que l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, et non la rente d'invalidité. Il pouvait dans certains cas envisager d'envoyer un courrier à l'assuré pour qu'il précise ce qu'il contestait, mais il lui apparaissait en l'occurrence clair que seule la première problématique était contestée, de sorte qu'il concluait à l'irrecevabilité des conclusions concernant la rente d'invalidité.

d. Par ordonnance du 15 mai 2023, la chambre de céans a requis de l'office de l'assurance-invalidité du Canton de Genève la production du dossier du recourant. En sus des éléments déjà au dossier de l'intimée, y figure un certificat médical du Dr D______ du 19 avril 2023 stipulant que, suite à l'accident, le recourant présente une douleur de l'épaule droite qui l'empêche de soulever des charges de plus de 5 kg, avec cervicalgie.

e. Le 2 juin 2023, le recourant a déposé auprès de la chambre de céans de nouveaux documents médicaux, dont :

-          Une IRM des épaules réalisée le 21 février 2023 concluant à une tendinopathie fissuraire du tendon supra-épineux des deux côtés et du long chef du biceps à gauche, sans lésion transfixiante mise en évidence, à des signes de bursite sous-acromiale à droite et à un œdème au sein du muscle petit rond, évoquant une dénervation aiguë, sans argument pour une lésion du nerf axillaire sur le volume exploré.

-          Les notes de suite de la consultation du Dr E______ du 17 mai 2023 dans lesquelles sont notamment mentionnées la volonté de réaliser en premier lieu un traitement topique de l'épaule droite, suivi d'une infiltration en cas de persistance, ainsi que des douleurs rhomboïdes des trapèzes et de l'épineuse C7.

-          Une convocation pour une consultation spécialisée de l'épaule aux HUG le 15 juin 2023.

f. Le 13 juin 2023, il a versé à la procédure la décision de l'office cantonal de l'emploi du 8 juin 2023 le déclarant inapte au placement depuis le premier jour contrôlé, soit dès le 7 mars 2023.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.              

2.1 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-accidents, à moins que la loi n’y déroge expressément.

2.2 La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

2.3 Le recours a été interjeté en temps utile (art. 60 al. 1 LPGA), étant précisé qu’un recours déposé devant une autorité incompétente doit être transmis d’office à la juridiction administrative compétente (comme y a procédé l'intimée) et le recourant en être averti, l’acte de recours étant réputé déposé à la date à laquelle il a été adressé à la première autorité (art. 64 al. 2 et 89A LPA ; cf. aussi art. 30 et 58 al. 3 LPGA).

Respectant également les exigences de forme prévues par les art. 61 let. b LPGA et 89B LPA, le recours est recevable.

3.             S'agissant de l'objet du litige, le fait que le recourant conteste l'indemnité pour atteinte à l'intégrité allouée n'est pas litigieux. Il convient néanmoins de déterminer s'il forme également recours contre le refus de rente d'invalidité et, cas échéant, s'il s'est opposé sur ce point à la décision du 16 décembre 2022.

4.              

4.1 L'art. 61 let. b LPGA qui énonce que le tribunal doit impartir un délai convenable au recourant pour combler les lacunes de son acte de recours s'il ne contient pas un exposé succinct des faits et des motifs invoqués, ainsi que les conclusions, découle du principe de l'interdiction du formalisme excessif et constitue l'expression du principe de la simplicité de la procédure qui gouverne le droit des assurances sociales. C'est pourquoi le juge saisi d'un recours dans ce domaine ne doit pas se montrer trop strict lorsqu'il s'agit d'apprécier la forme et le contenu de l'acte en question. Il suffit que la motivation du recours laisse apparaître les raisons pour lesquelles les faits constatés ou les dispositions appliquées par l'autorité inférieure sont contestés (arrêt du Tribunal fédéral 9C_761/2015 du 3 mai 2016 consid. 4 et les références).

4.2 Les exigences de forme relatives à l'opposition ne sauraient être plus sévères que celles qui ont trait à la recevabilité du recours devant l'autorité cantonale (ATF 123 V 128 consid. 3b).

5.              

5.1 Selon l'art. 52 al. 1 LPGA, les décisions peuvent être attaquées dans les 30 jours par voie d'opposition auprès de l'assureur qui les a rendues, à l'exception des décisions d'ordonnancement de la procédure.

L’art. 10 al. 1 de l’ordonnance du 11 septembre 2002 sur la partie générale du droit des assurances sociales (OPGA - RS 830.11) prévoit que l’opposition doit contenir des conclusions et être motivée. L’opposition peut être formée au choix par écrit ou oralement, lors d’un entretien personnel (art. 10 al. 3 OPGA). Si l’opposition ne satisfait pas aux exigences de l’al. 1, l’assureur impartit un délai convenable pour réparer le vice, avec l’avertissement qu’à défaut, l’opposition ne sera pas recevable (al. 5).

5.2 L'opposition est un moyen de droit permettant au destinataire d'une décision d'en obtenir le réexamen par l'autorité administrative, avant qu'un juge ne soit éventuellement saisi (ATF 125 V 118 consid. 2a). Elle assure la participation de l'assuré au processus de décision et poursuit notamment un but d'économie de procédure et de décharge des tribunaux, dans les domaines du droit administratif où des décisions particulièrement nombreuses sont rendues. Dans ce cadre, la procédure d'opposition ne revêt de véritable intérêt que si l'opposant doit exposer les motifs de son désaccord avec la décision le concernant ; à défaut, on courrait le risque de faire de l'opposition une simple formalité avant le dépôt d'un recours en justice, sans qu'assuré et autorité aient véritablement examiné sur quoi portent leurs divergences. Les exigences formelles posées par l'art. 10 al. 1 OPGA concrétisent, par ailleurs, l'obligation de l'assuré de collaborer à l'exécution des différentes lois d'assurances sociales (art. 28 al. 1 et 43 al. 3 LPGA), et correspondent largement à celles posées par la jurisprudence antérieure à la LPGA pour la procédure d'opposition prévue dans certaines branches d'assurances sociales (arrêt du Tribunal fédéral I 158/05 du 2 juin 2006 consid. 2.2 et les références).

5.3 Les exigences posées à la forme et au contenu d'une opposition ne sont pas élevées. Il suffit que la volonté du destinataire d'une décision de ne pas accepter celle-ci ressorte clairement de son écriture ou de ses déclarations (arrêt du Tribunal fédéral 8C_404/2008 du 26 janvier 2009 consid. 3.3 et les références ; ATF 115 V 422 consid. 3a).

L'obligation d'articuler les griefs portés à l'encontre de la décision querellée vaut en principe aussi dans la procédure d'opposition. Dans la mesure où la décision n'est pas attaquée dans son ensemble, elle entre partiellement en force (ATF 119 V 347 consid. 1b).

L'opposant a donc la possibilité de ne contester que partiellement une décision, la maxime de disposition étant applicable. L'objet du litige se définit selon les conclusions de la demande, lesquelles sont volontairement peu formalistes et doivent être interprétées à la lumière de la motivation. L'objet du litige peut aussi englober des questions qui ne sont pas directement critiquées, mais qui se trouvent dans un lien étroit avec la question litigieuse (Hansjörg SEILER, Rechtsfragen des Einspracheverfahrens in der Sozialversicherung, Sozialversicherungsrechtstagung 2007, p. 82).

Dans le cas d'une décision portant sur deux objets, il suffit qu'il soit possible de déduire des conclusions de l'opposant interprétées au regard des griefs formulés une volonté de contester l'un et l'autre des objets (arrêt du Tribunal fédéral 8C_817/2017 du 31 août 2018 consid. 3.2).

6.              

6.1 En matière d'assurance-accident, lorsque l'assuré s'oppose à la fin de la prise en charge du traitement médical signifié par une décision niant par la même occasion le droit à une rente et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité, il faut considérer qu'il réserve, du moins implicitement, l'examen de son droit à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité, même s'il indique ne pas être intéressé par l'aspect financier de la décision. En effet, aux termes de l'art. 19 al. 1 LAA, le droit à une rente d'invalidité ne prend en principe naissance que s'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de santé de l'assuré ; par ailleurs, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est fixée en même temps que la rente d'invalidité ou, si l'assuré ne peut prétendre à une rente, lorsque le traitement médical est terminé (art. 24 al. 2 LAA) (arrêt du Tribunal fédéral U 378/99 du 23 mars 2000 consid. 2c et les références).

6.2 Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de rappeler que la suspension des prestations provisoires et la liquidation du cas avec examen des conditions du droit à la rente sont des questions si étroitement liées entre elles, qu'il faut partir du principe qu'il s'agit d'un seul objet du litige. Vu que l'art. 19 al. 1 LAA fait coïncider la suspension des prestations provisoires avec l'examen, le cas échéant la fixation, du droit à la rente, il n'y a pas de place pour une pratique divergente du tribunal cantonal, selon laquelle on se trouve en présence de deux objets litigieux différents lorsqu'il est question de la suspension des indemnités journalières et du traitement médical d'une part, et de l'examen des conditions du droit à la rente d'autre part (ATF 144 V 354). L'assureur qui a statué, dans une première décision, sur la fin du droit au traitement médical et à l'indemnité journalière, et, d'autre part, dans une seconde, sur le droit à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité, doit examiner l'ensemble de ces questions, lorsque, sur recours de l'assuré, le tribunal cantonal lui renvoie le dossier pour instruction complémentaire, quand bien même l'assuré ne s'est pas opposé à la décision niant le droit à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_243/2021 du 11 octobre 2021 consid. 1.4.2 et 1.5.3).

6.3 En outre, lorsque l'assuré s'oppose au rejet du droit à une rente d'invalidité au motif que le lien de causalité, contrairement à ce qu'a jugé l'assureur, est rempli, la question de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité ne peut pas entrer en force, même si elle n'a pas été contestée, car elle dépend aussi de l'existence du lien de causalité (RKUV 1999 Nr. U 323 (U 53/98) consid. 1b cité in Hansjörg SEILER, op. cit., p. 82 ; arrêt du Tribunal fédéral U 152/01 du 8 octobre 2003 consid. 3).

7.              

7.1 La procédure d'opposition faisant encore partie du contentieux administratif, les art. 27 à 54 LPGA sont applicables, en sus de l'art. 52 LPGA (Hansjörg SEILER, op. cit., p. 71).

7.2 Aux termes de l'art. 27 al. 1 LPGA, dans les limites de leur domaine de compétence, les assureurs et les organes d’exécution des diverses assurances sociales sont tenus de renseigner les personnes intéressées sur leurs droits et obligations. L'alinéa 2 énonce que chacun a le droit d’être conseillé, en principe gratuitement, sur ses droits et obligations. Sont compétents pour cela les assureurs à l’égard desquels les intéressés doivent faire valoir leurs droits ou remplir leurs obligations. Le Conseil fédéral peut prévoir la perception d’émoluments et en fixer le tarif pour les consultations qui nécessitent des recherches coûteuses.

7.3 L'art. 27 LPGA renverse la présomption selon laquelle « nul n'est censé ignorer la loi » ; il constitue un changement important, en faveur des assurés, par rapport à la conception classique (Raymond SPIRA, Du droit d'être renseigné et conseillé par les assureurs et les organes d'exécution des assurances sociales, in RSAS 2001, p. 531).

7.4 Si l'administration omet de renseigner un administré, alors que l'autorité était légalement tenue de l'informer ou que les circonstances du cas particulier le justifiaient, il convient d'assimiler ce comportement à la fourniture d'un renseignement inexact (ATF 131 V 472 consid. 5).

Un assureur qui reçoit par exemple de la part des services de l'assistance juridique d'un canton la demande d'une assurée demandant à bénéficier de l'assistance judiciaire pour savoir si elle peut former opposition dans le cas d'espèce, doit rendre l'assurée attentive au fait que le dépôt de la demande d'assistance judiciaire n'est pas suffisant pour former valablement opposition et qu'il peut être remédié à cette irrégularité avant l'expiration du délai d'opposition. L'omission de l'assureur de rendre attentive l'assurée aux désavantages qu'elle pourrait encourir sur le plan légal en raison de l'inexactitude de son comportement doit être assimilée à la fourniture d'un renseignement inexact, lequel est constitutif d'une violation du principe de la bonne foi (arrêt du Tribunal fédéral I 25/06 du 27 mars 2007 consid. 5).

Sauf à faire preuve de formalisme excessif, l'assureur doit par ailleurs interpeller l'assuré afin qu'il précise la teneur de son opposition ne portant que sur l'aspect soins, singulièrement qu'il indique si, dans l'hypothèse où la fin du droit à un traitement médical était confirmée, il se montrerait quand même d'accord – en quelque sorte à titre subsidiaire – avec le montant de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité et le refus de rente d'invalidité (arrêt du Tribunal fédéral U 378/99 du 23 mars 2000 consid. 2c et les références).

L'envoi de certificats médicaux attestant d'une incapacité totale ou partielle de travail constitue une manifestation imparfaitement formulée d'une opposition à la décision de l'assureur concernant la fin des indemnités journalières pour cause de rétablissement de la capacité de travail qui l'oblige à interpeller l'assuré avant de pouvoir considérer sa décision comme définitive (ATF 123 V 128 consid. 3b et 3c et les références).

8.             Aux termes de l'art. 6 LAA, l'assureur-accidents verse des prestations à l'assuré en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA).

9.             L'assuré a droit au traitement médical approprié des lésions résultant de l'accident (art. 10 al. 1 LAA). S'il est totalement ou partiellement incapable de travailler (art. 6 LPGA) à la suite d’un accident, il a droit à une indemnité journalière (art. 16 al. 1 LAA). Le droit à l'indemnité journalière naît le troisième jour qui suit celui de l'accident. Il s’éteint dès que l’assuré a recouvré sa pleine capacité de travail, dès qu’une rente est versée ou dès que l’assuré décède (art. 16 al. 2 LAA).

10.         Si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10 % au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d'invalidité, pour autant que l’accident soit survenu avant l’âge ordinaire de la retraite (art. 18 al. 1 LAA).

11.         Selon l'art. 19 al. 1 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme. Le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente.

12.         Aux termes de l'art. 24 LAA, si par suite d'un accident, l'assuré souffre d'une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, il a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l'intégrité (al. 1). L'indemnité est fixée en même temps que la rente d'invalidité ou, si l'assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé (al. 2).

13.          

13.1 En l'espèce, le recourant a transmis à l'intimée, en date du 23 janvier 2023 selon le sceau apposé sur la première page de ces documents, la feuille-accident LAA actualisée par l'un de ses médecins attestant d'une incapacité de travail totale à partir du 20 janvier 2023, un certificat d'arrêt de travail à 100% du 1er février au 28 février 2023, ainsi qu'une lettre qu'il avait rédigée le 15 janvier 2023 par laquelle il sollicitait « continuer [son] traitement au sein de [l']établissement [de l'intimée] ».

Le 27 janvier 2023, le recourant a par ailleurs remis à l'intimée une attestation de sa physiothérapeute faite « pour servir et valoir ce que de droit », énonçant son besoin actuel de séances de physiothérapie, étant donné la persistance des douleurs à l'épaule gauche, ainsi que sa lettre d'opposition datée de la veille.

Le 9 février 2023, l'intimée a encore reçu divers documents de la part du recourant, dont la feuille-accident LAA complétée avec un arrêt à 100% dès le même jour ordonné par son médecin, deux autres certificats d'arrêt de travail à 100% pour tout le mois de février et mars 2023, ainsi que les notes de suite du Dr E______ du 9 février 2023.

13.2 Par ailleurs, l'opposition du recourant du 26 janvier 2023, qui est intitulée « demande changement du taux d'intégrité » et requiert expressément une indemnisation plus élevée que celle de 15% accordée, porte indubitablement sur l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, mais contient aussi l'idée que le recourant ne peut plus travailler. Au deuxième paragraphe de la lettre, le recourant affirme en effet qu'il ne peut plus rien faire et que sa fille a dû venir vivre chez lui pour l'aider. Plus loin, il indique qu'il est meurtri, qu'à 60 ans son corps n'a plus la force pour se « restituer » rapidement, qu'il restera dans cet état jusqu'à la fin de sa vie et qu'il est la seule personne à connaître et ressentir sa douleur physique ainsi que mentale.

13.3 L'ensemble de ces éléments aurait dû conduire l'intimée, si ce n'est à examiner d'emblée d'autres griefs que celui relatif à l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, à tout le moins à interpeller le recourant afin qu'il précise la portée de son opposition.

En effet, outre la formulation de l'opposition elle-même, qui laissait entendre que le recourant contestait être en mesure de travailler (cf. le deuxième paragraphe qui énonce qu'il ne peut plus rien faire), il sied de constater que le recourant avait préalablement critiqué la fin de la prise en charge de son traitement médical et remis plusieurs attestations d'arrêt total de travail. Or, ces éléments sont suffisants, selon la jurisprudence, pour retenir que l'assuré s'oppose à la conclusion de l'assureur portant sur sa capacité de travail, d'autant plus en matière d'assurance-accident, domaine dans lequel la naissance du droit à la rente et à l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est intimement liée à la fin du traitement médical et des indemnités journalières.

Dans ces circonstances, l'intimée ne pouvait pas partir du principe que seule l'indemnité pour atteinte à l'intégrité était contestée, mais devait clarifier auprès du recourant ses intentions, en l'interpellant. En ne le faisant pas, alors que le recourant agissait en personne et que les exigences de la procédure d'opposition sont peu élevées, l'intimée a versé dans le formalisme excessif et violé ses obligations.

Entendu en audience, le recourant a déclaré qu'il était totalement incapable de travailler, ce qui conforte le fait qu'il n'était pas d'accord avec les conclusions de l'intimée concernant sa capacité de travail.

Il découle des éléments qui précèdent que le recourant contestait non seulement l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, mais également la décision de l'intimée de ne pas lui accorder de rente d'invalidité, ainsi que la fin de la prise en charge du traitement médical.

14.         Dans la mesure où l'intimée ne s'est prononcée que sur une partie des points litigieux, il convient de lui renvoyer l'affaire, afin qu'elle statue, par le biais d'une nouvelle décision sur opposition, sur l'objet du litige dans son entier, à savoir sur la fin du traitement médical, la rente d'invalidité et l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, en prenant cas échéant en considération les éléments produits par le recourant dans le cadre de la procédure devant la chambre de céans, notamment les avis de ses médecins traitants concernant la causalité entre les cervicalgies ainsi que les troubles de l'épaule droite et l'accident.

Il ne revient en effet pas à la chambre de céans de statuer sur les questions non tranchées dans la décision sur opposition (cf. art. 56 al. 1 LPGA), ce d'autant plus qu’on ne saurait priver les parties de la garantie d’une double instance avec plein pouvoir d’examen en fait et en droit (décision administrative, puis recours).

15.         Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et la décision du 23 février 2023 sera annulée.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision de l'intimée du 23 février 2023.

4.        Renvoie la cause à l'intimée dans le sens des considérants.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le