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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3778/2021

ATAS/1011/2022 du 21.11.2022 ( CHOMAG ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3778/2021 ATAS/1011/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 novembre 2022

1ère Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1965, s’est inscrite à l’Office régional de placement (ci-après : l’ORP) le 17 août 2020.

B. a. Le 5 août 2020, l’ORP a notifié à l’assurée une assignation à un emploi d’auxiliaire de santé CRS à un taux de 80% de durée déterminée jusqu’au 31 décembre 2021, avec possibilité de changement en durée indéterminée, pour la Résidence Les Châtaigniers, entrée en fonction immédiate. Elle devait postuler par courriel à l’adresse « smoix@Châtaigniers.ch ».

b. Le 13 août 2020, l’Office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) a demandé à l’assurée qu’elle explique pourquoi elle n’avait pas postulé.

c. Par courriel du même jour à 19h32, l’assurée a fait parvenir à l’OCE la capture d’écran des assignations qu’elle avait faites le 5 août 2020, notamment pour la Résidence Les Châtaigniers, à 20h30.

d. Par décision du 20 août 2021, l’OCE a suspendu le droit de droit de l’assurée pendant 16 jours. L’assurée n’avait pas fait preuve de la vigilance attendue, en orthographiant de manière incorrecte l’adresse électronique du destinataire et en adressant son dossier à « smox@Châtaigniers.ch », raison pour laquelle l’employeur ne l’avait pas reçue.

e. Le 25 août 2021, l’assurée a fait opposition à cette décision, en faisant valoir qu’elle avait effectivement postulé, mais avait mal orthographié le nom de son interlocuteur, ce dont elle n’avait pas pu se rendre compte puisqu’elle n’avait pas reçu de courriel de non-transmission du sien. D’après les informations qu’elle avait obtenues, cela signifiait que le courriel avait été reçu mais pas traité. Par ailleurs, la sanction était excessive au regard de l’erreur qu’elle avait commise, ce d’autant qu’elle péjorait encore sa situation financière et l’empêchait de payer les factures et la nourriture de sa famille.

f. Par décision du 11 octobre 2021, l’OCE a rejeté l’opposition en relevant que l’assurée s’était trompée dans l’adresse de courrier électronique, en écrivant « smox@Châtaigniers.ch » au lieu de « smoix@Châtaigniers.ch », de sorte que l’employeur n’avait jamais reçu sa candidature. L’assurée devait s’assurer du suivi de sa postulation et de la bonne réception de son dossier, ce qu’elle n’avait pas fait, les considérations sur sa situation personnelle et financière ne pouvant être prises en compte en application de la jurisprudence. La sanction était donc justifiée et proportionnée.

g. Le 4 novembre 2021, l’assurée a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision précitée, demandant la reconsidération de la décision, en reprenant ses arguments. Elle a précisé qu’elle avait insisté pour postuler à l’emploi en question, malgré sa surqualification car elle cherchait activement du travail.

h. Le 22 novembre 2021, l’OCE a conclu au rejet du recours.

i. Sur quoi la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

3.        Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension de 16 jours du droit à l’indemnité du recourant.

4.        Selon l'art. 17 al. 1 à 3 LACI, l’assuré qui fait valoir des prestations d’assurance doit, avec l’assistance de l’office du travail compétent, entreprendre tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l’abréger. Il lui incombe, en particulier, de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu’il exerçait précédemment. Il doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu’il a fournis (al. 1). En vue de son placement, l’assuré est tenu de se présenter à sa commune de domicile ou à l’autorité compétente aussitôt que possible, mais au plus tard le premier jour pour lequel il prétend à l’indemnité de chômage; il doit ensuite se conformer aux prescriptions de contrôle édictées par le Conseil fédéral (al. 2). L’assuré est tenu d’accepter tout travail convenable qui lui est proposé. Il a l’obligation, lorsque l’autorité compétente le lui enjoint, de participer: a. aux mesures relatives au marché du travail propres à améliorer son aptitude au placement; b. aux entretiens de conseil, aux réunions d’information et aux consultations spécialisées visées à l’al. 5; c. de fournir les documents permettant de juger s’il est apte au placement ou si le travail proposé est convenable (al. 3).

Selon l'art. 30 al. 1 let. c et d LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu lorsqu’il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable ou n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente, notamment refuse un travail convenable, ne se présente pas à une mesure de marché du travail ou l’interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but.

Selon l'art. 45 al. 3 et 4 OACI, la suspension dure: a. de 1 à 15 jours en cas de faute légère; b. de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne; c. de 31 à 60 jours en cas de faute grave (al. 3). Il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l’assuré: a. abandonne un emploi réputé convenable sans être assuré d’obtenir un nouvel emploi; ou qu’il b. refuse un emploi réputé convenable (al. 4).

Selon l'échelle des suspensions à l'intention de l'autorité cantonale et des ORP, le refus d'un emploi convenable ou en gain intermédiaire à durée indéterminée assigné à l'assuré ou qu'il a trouvé lui-même est sanctionné, pour un premier refus par une suspension du droit à l'indemnité de 31 à 45 jours (030-Bulletin LACI D72.2B.1)

Il est précisé que pour toute suspension, le comportement général de la personne assurée doit être pris en considération. Lorsque la suspension infligée s'écarte de la présente échelle, l'autorité qui la prononce doit assortir sa décision d'un exposé des motifs justifiant sa sévérité ou sa clémence particulière (030-Bulletin LACI/D72).

5.        a. Dans un arrêt du 5 mars 2012 (ATAS/234/2012), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) a réduit une sanction de trente et un jours de suspension du droit à l’indemnité à une durée de seize jours dans le cas d’un assuré qui, assigné à postuler à un emploi par l’OCE, avait commis une erreur dans l’adresse mail de l’employeur. La chambre de céans a relevé que l’erreur, qui était possible au vu de l’adresse mail peu lisible figurant sur l’assignation, ne relevait pas de la négligence ; en revanche, après avoir reçu un message de non-transmission du courriel, l’assuré avait, certes, tenté de téléphoner à l’employeur à deux reprises mais n’avait pas persisté dans sa démarche, ni cherché à obtenir l’adresse mail correcte de l’employeur. Il lui était donc reproché d’avoir commis une négligence en laissant en suspens sa postulation.

b. Dans un arrêt du 25 juin 2018 (ATAS/581/2018), la chambre de céans a considéré que l’assurée avait commis une négligence légère en ne vérifiant pas attentivement la saisie de l’adresse email de l’employeur, qui comportait une faute de frappe. Cette négligence était toutefois atténuée par le fait que la recourante n’avait reçu aucun message en retour de non-transmission de son courriel, comme c’était habituellement le cas, de sorte qu’elle n’avait pas pu rectifier son erreur, en tentant à nouveau de contacter l’employeur. Par ailleurs, l’assurée effectuait ses recherches avec motivation et remplissait toutes ses obligations correctement. Elle avait d’ailleurs pris la peine d’envoyer un courriel à sa conseillère en personnel deux minutes après celui envoyé à l’employeur, pour confirmer sa postulation. La très légère négligence de la recourante, ayant consisté à ne pas vérifier attentivement l’adresse de l’employeur au moment de l’envoi du courriel à celui-ci, ne justifiait pas le prononcé d’une sanction.

6. En l’espèce, la recourante a commis une erreur d’envoi, en saisissant « smox@Châtaigniers.ch » au lieu de « smoix@Châtaigniers.ch » comme adresse de l’employeur. Cette erreur de saisie ne saurait être qualifiée de négligence, même légère, une faute de frappe pouvant être rapidement commise. En revanche, constitue une telle négligence légère le fait de ne pas avoir vérifié attentivement la saisie de l’adresse. Cette négligence est toutefois atténuée par le fait que la recourante n’a reçu aucun message en retour de non-transmission de son courriel, comme c’est habituellement le cas, ce qui n’est pas contesté par l’intimé. Elle n’a donc pas été avisée de son erreur, de sorte qu’elle n’a pas pu la rectifier.

Contrairement à la jurisprudence de la chambre de céans précitée, on ne peut en l’occurrence reprocher à la recourante de ne pas avoir persisté en tentant de contacter à nouveau l’employeur après l’échec de l’envoi de son courriel puisque la recourante, faute de message de non-transmission de son courriel, n’en était pas avertie.

Par ailleurs, il est établi par les pièces au dossier et le courriel de la conseillère en personnel de la recourante, que celle-ci effectuait ses recherches avec motivation et remplissait toutes ses obligations correctement.

Vu les circonstances du cas d’espèce, il convient de constater que la très légère négligence de la recourante, ayant consisté à ne pas vérifier attentivement l’adresse de l’employeur au moment de l’envoi du courriel à celui-ci, ne justifie pas le prononcé d’une sanction.

7.        Partant, le recours sera admis et la décision litigieuse annulée.

8.        La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Annule la décision du 11 octobre 2021.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Maryline GATTUSO

 

La présidente

 

 

 

 

Fabienne MICHON RIEBEN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le