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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1423/2021

ATAS/1008/2022 du 17.11.2022 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1423/2021 ATAS/1008/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 novembre 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, anciennement domiciliée ______, MEYRIN, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Marc MATHEY-DORET

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante) et Monsieur (ci-après : le père) se sont mariés en 1994. Deux enfants sont issus de cette union : C______, né en mai 1997, et D______, née en juin 2000. Les époux se sont séparés en 2009. Par jugement du 21 décembre 2015, l’autorité parentale conjointe a été maintenue sur la mineure D______.

b. Le 3 mai 2019, l’assurée a déposé une demande de rente auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI). Par décision du 12 novembre 2020, l’OAI a octroyé à l’assurée une rente entière de l’assurance-invalidité dès novembre 2019.

c. Par décision du même jour, notifiée au père des enfants, l’OAI a assorti la rente principale de l’assurée de deux rentes complémentaires en faveur des enfants. En application de l’art. 71ter RAVS la caisse a ordonné le versement des rentes des enfants en mains de leur père, vu qu’il en assumait la garde. Toutefois, l’OAI a retenu la somme de CHF 17'424.-, correspondant aux prestations échues des enfants, de novembre 2019 à novembre 2020 (soit CHF 1’452.- x 11 + CHF 726.- + CHF 726.-), dans l’attente de l’instruction complémentaire concernant les pensions alimentaires versées par son ex-épouse durant la période précitée.

d. Par courriel du 1er décembre 2020 adressé à l’OAI, le père des enfants s’est opposé à cette décision, faisant valoir, en substance, que les rentes étaient destinées aux enfants et non à leur mère. Or, si cette dernière venait à percevoir ces montants, les enfants ne pourraient pas en bénéficier.

e. Le 4 décembre 2020, l’OAI a transmis cette écriture à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans), comme objet de sa compétence.

f. Par arrêt du 27 avril 2021 (ATAS/385/2021), la chambre de céans a déclaré le recours du père irrecevable.

g. Par ordonnance du 27 mai 2021, le Tribunal de première instance (ci-après : TPI), agissant sur mesures provisionnelles déposées par le père, a pris note que l’assurée comptait quitter la Suisse pour retourner en Argentine et a constaté que les arriérés de contribution d’entretien de C______, pour la période allant du 1er novembre 2019 au 30 novembre 2020, s’élevaient à CHF 8'712.- ; il a considéré que le père était en droit d’exiger le versement des rentes futures ainsi que du montant rétroactif de CHF 8’712.-. Le TPI a donc fait interdiction à l’OAI de verser en mains de l’assurée le montant rétroactif des rentes pour enfants, à concurrence de CHF 8’712.-, jusqu’à droit jugé au fond dans le cadre de la procédure civile.

B.             Par courrier, intitulé « communication » du 8 avril 2021, avec copie au mandataire de l’assurée, l’OAI a informé le père des enfants du montant des rentes complémentaires pour enfants, et notamment de celle concernant C______. L’OAI a également établi un décompte de son prochain versement, mentionnant le montant qui parviendrait prochainement au père, à hauteur de CHF 5’118.- (sic), et comprenant les paiements du 1er octobre 2020 jusqu’au mois d’avril 2021. Il était encore mentionné que le montant de CHF 1'452.-, correspondant au rétroactif dû pour la période allant du 1er octobre au 30 novembre 2020, était retenu dans l’attente d’une instruction complémentaire concernant les pensions alimentaires versées par l’assurée.

C. a. Par acte de son mandataire, posté le 22 avril 2021, l’assurée a interjeté recours contre la décision du 8 avril 2021, en tant qu’elle concernait le rétroactif de rente complémentaire pour C______. Elle a conclu à ce que la chambre de céans ordonne à l’OAI que ledit rétroactif, soit le montant de CHF 5'106.- correspondant à la rentrée complémentaire AI pour C______ pour les mois d’octobre 2020 à avril 2021 inclus, lui soit reversée, sous suite de frais et dépens. Selon la recourante, cette dernière s’était acquittée de son obligation d’entretien vis-à-vis de C______ et avait donc droit au paiement rétroactif des rentes, jusqu’à concurrence des contributions mensuelles qu’elle avait fournies.

b. Par réponse du 26 mai 2021, l’OAI s’est rapporté intégralement aux développements et aux conclusions résultant de la détermination du 25 mai 2021 établie par la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : la caisse) au motif qu’il n’appartenait pas à l’autorité de contrevenir à l’art. 71 ter RAVS sous prétexte que la recourante continuait de verser l’intégralité de la contribution d’entretien, alors qu’elle savait que les rentes étaient versées en mains du père des enfants.

c. Par réplique du 22 juin 2021, la recourante a rappelé que son obligation de verser une contribution à l’entretien de ses enfants résultait d’un jugement entré en force et qu’elle ne pouvait donc pas se contenter de ne verser qu’une partie de la pension, sans quoi elle violerait la loi, notamment les dispositions pénales, et risquerait de s’exposer à une procédure de recouvrement. La recourante relevait également le comportement contradictoire de l’intimé qui, dans un premier temps, s’était déterminé dans son courrier du 19 février 2021, en concluant que le rétroactif de rente en faveur des enfants de CHF 17'424.- devait lui être intégralement versé, compte tenu du fait qu’elle s’était « acquittée sans discontinuer de son obligation d’entretien », alors même que, quelques mois plus tard, l’intimé décidait que le rétroactif des montants dus pour C______, pour les mois d’octobre 2020 à avril 2021, devait être versé au père de l’enfant. Pour le surplus, la recourante persistait dans ses conclusions.

d. Par duplique du 6 juillet 2021, l’OAI a fait siennes les déterminations du même jour de la caisse, selon lesquelles le dossier de la recourante avait été transféré à la centrale de compensation (ci-après : CdC) de l’office de l’assurance-invalidité pour les assurés résidant à l’étranger (ci-après : OAIE) en raison du fait que la recourante avait définitivement quitté la Suisse, le 25 mai 2021, pour l’Argentine.

e. Dans leurs observations ultérieures, les parties ont campé sur leurs positions. Sur proposition de la chambre de céans de suspendre la procédure, jusqu’à droit connu quant à la détermination de la CdC de l’OAIE, la recourante y a acquiescé et l’intimé s’en est rapporté à justice.

f. Par arrêt incident du 30 novembre 2021, la chambre de céans a décidé de la suspension de la procédure jusqu’à droit connu dans la procédure pendante devant la CdC concernant le sort des montants rétroactifs correspondant à la rente complémentaire des enfants de la recourante, C______ et D______.

g. Par courrier du 6 juillet 2022, l’OAI a fait siennes les déterminations établies le 5 juillet 2022 par la caisse, selon lesquelles le sort du versement des rentes complémentaires avait été définitivement réglé par la décision du 12 novembre 2021. Celle-ci n’ayant pas été contestée dans le délai légal, elle était entrée en force. Dès lors, le recours du 22 avril 2021 devait être déclaré irrecevable car la communication du 8 avril 2021 n’était pas une décision, mais une simple information.

h. Par courrier du 13 juillet 2022, le conseil de la recourante a contesté le fait que la décision du 8 avril 2021 n’était qu’une simple information, ajoutant que ce n’était finalement que le 25 mai 2022 – par décision de la CdC - que le sort du solde du rétroactif relatif à la décision du 12 novembre 2020 avait été tranché en faveur de la recourante. Le recours devait donc non seulement être déclaré recevable, mais également bien-fondé et admis sous suite de dépens.

i. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

j. Les autres faits seront cités, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

 

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

2.        Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

3.        Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA).

4.        À titre préalable, il convient d’examiner le grief d’irrecevabilité soulevé par l’intimé, qui considère n’avoir pas rendu de décision en date du 8 avril 2021 lorsqu’il a communiqué le montant des prestations qui seraient versées au père de l’enfant, en rapport avec la rente complémentaire simple pour enfant de C______.

5.        Selon l'art. 49 LPGA, l'assureur doit rendre par écrit les décisions qui portent sur des prestations, créances ou injonctions importantes ou avec lesquelles l'intéressé n'est pas d'accord (al. 1). Si le requérant rend vraisemblable un intérêt digne d'être protégé, l'assureur rend une décision en constatation (al. 2).

6.        La décision n'est pas définie dans la LPGA. Elle correspond cependant à la notion de décision au sens de l'art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021) (ATF 131 V 42 consid. 2.4). Selon cette disposition, sont considérées comme décisions les mesures prises par les autorités dans des cas d'espèce, fondées sur le droit public fédéral et ayant pour objet : de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (let. a) ; de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits ou d'obligations (let. b) ; de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c).

7.        Cette définition correspond presque exactement à celle prévue en droit cantonal, contenue à l'art. 4 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), dont la teneur est la suivante : sont considérées comme des décisions au sens de l'art. 1, les mesures individuelles et concrètes prises par l'autorité dans les cas d'espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet : de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (let. a) ; de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits, d'obligations ou de faits (let. b) ; de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c).

8.        En l’occurrence, en tant que le litige porte sur la détermination de celui des deux parents auquel le paiement rétroactif de la rente pour enfant de C______ devra être versé, la mère des enfants est intéressée à l’issue de la présente procédure ce qui n’a pas échappé à l’intimé, qui a transmis une copie de la communication du 8 avril 2021 au mandataire de la recourante.

S’agissant de déterminer si la communication du 8 avril 2021 était, ou non, une décision, on peut tout d’abord constater que la communication émane de l’intimé, qu’elle est fondée sur le droit public fédéral et qu’elle a pour objet de créer ou de modifier une obligation dans la mesure où elle fixe le montant de la rente ordinaire dû pour l’enfant, pour la période allant du 1er octobre 2020 au 30 avril 2021. Elle fixe également le montant du solde qui devrait prochainement parvenir au père, ce qui a une incidence directe sur les droits de la recourante puisque cette dernière revendique ces montants. S’y ajoute, enfin, une précision sous la forme d’une remarque précisant que « le montant de CHF 1’452.- correspond au rétroactif du 1er octobre au 30 novembre 2020 qui est retenu dans l’attente d’une instruction complémentaire concernant les pensions alimentaires versées par votre ex-épouse ». Dès lors que la communication fixe non seulement le montant de la rente pour l’enfant C______, mais précise qu’elle sera payée en mains du père et fait référence directement au montant retenu dans l’attente d’une instruction complémentaire concernant les pensions alimentaires versées par la recourante, il sied de considérer la communication du 8 avril 2021 comme une décision, quand bien même elle n’est pas désignée comme telle et n’indique pas de voies de recours.

Cette analyse, qui fait primer l’acception matérielle de la décision sur son acception formelle, a été encore récemment confirmée par le Tribunal administratif fédéral dans un arrêt du 18 mai 2022 (C-1649/2020, consid. 3.1.2) « ainsi, même si un acte n'est pas désigné comme une décision ou même si les voies de droit manquent, il peut néanmoins être qualifié de décision. Le contenu juridique réel d'un acte, ses effets et ses caractéristiques structurelles sont déterminants pour sa qualification en tant que décision (interprétation objective), indépendamment de la volonté des parties. Par conséquent, et conformément au principe de la confiance, un acte doit être qualifié de décision lorsqu'il émane d'une autorité, est unilatéral et fondé sur le droit public, vise une situation individuelle et concrète, a pour objet de produire un effet juridique et est contraignant et exécutoire pour l'administré (ATF 139 V 143 consid. 1.2, 139 V 72 consid. 2.2.1, 135 II 38 consid. 4.3 ; ATAF 2016/28 consid. 1.4.1, 2016/17 consid. 4.3.1, 2016/3 consid. 3.2, 2015/15 consid. 2.1.2.1 ; TAF C-1649/2020 du 21 janvier 2020 consid. 2, A-1350/2017 du 20 mars 2019 consid. 2.1, A-3102/2017 du 3 décembre 2018 consid. 1.3.2 et les réf. cit. ; Felix Uhlmann, in : Praxiskommentar Verwaltungsverfahrensgesetz, 2ème éd. 2016, art. 5 PA n° 94, 128, 129, 132; Markus Müller, Bundesgesetz über das Verwaltungsverfahren Kommentar, 2ème Edition, 2019 ad. art. 5 PA/I. Einleitung, n. 2) ».

9.        Le litige porte sur la rente complémentaire pour enfant, en particulier sur la question de savoir si le paiement rétroactif de la rente complémentaire de C______, pour la période allant du 1er octobre 2020 au 30 avril 2021, doit être versé à la recourante.

10.     

10.1 Aux termes de l’art. 35 al. 1 LAI, les hommes et les femmes qui peuvent prétendre au versement d’une rente d’invalidité ont droit à une rente pour chacun des enfants qui, au décès de ces personnes, auraient droit à la rente d’orphelin de l’assurance-vieillesse et survivants.

Les rentes de l'assurance-invalidité n'ont pas pour but d'assurer l'entretien de leurs seuls bénéficiaires, mais aussi de subvenir à celui de leur famille. Si le rentier de l'assurance-invalidité est certes le créancier de ces prestations, il n'en demeure pas moins que les rentes complémentaires pour le conjoint et les enfants sont destinées uniquement à permettre l'entretien de ces derniers, ainsi que l'éducation des enfants (ATF 119 V 425 consid. 4a). La rente complémentaire est ainsi destinée à l'entretien de l'enfant (arrêt du Tribunal fédéral 9C_339/2009 du 1er février 2010 consid. 1.1).

L’art. 35 al. 4 LAI et l’art. 22ter al. 2 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10) ont une formulation identique. Ils prévoient que les rentes pour enfants sont versées comme la rente à laquelle elles se rapportent. Les dispositions relatives à un emploi de la rente conforme à son but (art. 20 LPGA) ainsi que les décisions contraires du juge civil sont réservées. Le Conseil fédéral peut édicter des dispositions spéciales sur le versement de la rente, en dérogation à l'art. 20 LPGA, notamment pour les enfants de parents séparés ou divorcés.

10.2 L’art. 71ter du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101) prévoit que lorsque les parents de l’enfant ne sont pas ou plus mariés ou qu’ils vivent séparés, la rente pour enfant est versée sur demande au parent qui n’est pas titulaire de la rente principale si celui-ci détient l’autorité parentale sur l’enfant avec lequel il vit. Toute décision contraire du juge civil ou de l’autorité tutélaire est réservée (al. 1). L’al. 1 est également applicable au paiement rétroactif des rentes pour enfant. Si le parent titulaire de la rente principale s’est acquitté de son obligation d’entretien vis-à-vis de son enfant, il a droit au paiement rétroactif des rentes jusqu’à concurrence des contributions mensuelles qu’il a fournies (al. 2). La majorité de l’enfant ne modifie pas le mode de versement appliqué jusque-là, sauf si l’enfant majeur demande que la rente pour enfant lui soit versée directement. Toute décision contraire du juge civil ou de l’autorité tutélaire est réservée (al. 3).

11.     

11.1 La règle prévue à l’art. 71ter al. 2 2ème phr. RAVS vise à éviter que lorsque le parent débiteur des contributions d'entretien s'en est effectivement acquitté, les arriérés de la rente pour enfant soient versés à l’enfant. Ceci conduirait en effet à une surindemnisation discutable au regard du but de la rente complémentaire pour enfant, qui tend à alléger le devoir d'entretien du débiteur devenu invalide et à compenser la diminution du revenu de son activité, et non à enrichir le bénéficiaire de l’entretien (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 840/04 du 28 décembre 2005 consid. 4.2). Le Tribunal fédéral a interprété l'art. 71ter al. 2 1ère phr. RAVS en ce sens qu'il autorise également le paiement rétroactif des rentes pour enfants en mains du parent non bénéficiaire de la rente principale, lorsqu'il est établi que les enfants ont vécu de manière durable et stable chez ce parent et que celui-ci a assumé effectivement leur entretien et leur éducation durant cette période (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 364/05 du 19 juin 2006 consid. 4.2).

11.2 L’application de la règle prévue à l'art. 71ter al. 2 2ème phr. RAVS (en lien avec l’art. 285a al. 2 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 [CC - RS 210]) suppose qu’une contribution d’entretien ait été fixée par le juge (ATF 145 V 154 consid. 3.2 et 4.3).

12.    En l’occurrence, la décision entreprise statue sur le droit du père à des rentes complémentaires simples pour enfants et en fixe le montant, ainsi que la date à partir de laquelle celles-ci sont dues, avec l’indication que le montant en question, soit CHF 5'118.-, est un « solde en votre faveur qui vous parviendra prochainement ». Il est également précisé qu’un montant de CHF 1'452.-, correspondant à la rente due pour les mois d’octobre et novembre 2020, est retenu dans l’attente d’une instruction complémentaire.

Comme cela été défini supra, la communication du 8 avril 2021 doit être considérée comme une décision d’attribution du montant de CHF 5'118.- au père de l’enfant, et de blocage du montant de CHF 1'452.- en attente de mesures d’instruction complémentaires.

Au moment où la décision a été rendue, en avril 2021, la recourante n’avait pas encore quitté la Suisse, ce qu’elle n’a fait qu’en date du 25 mai 2021 lors de son départ pour l’Argentine ; l’OAI était donc compétent pour traiter le cas. Ce n’est qu’après le départ de l’assurée que l’intimé a transféré son dossier à la CdC, dépendant de l’OAIE.

12.1 Ce transfert n’a toutefois pas mis fin au litige, raison pour laquelle la présente procédure a été suspendue, jusqu’à droit connu sur la décision de l’OAIE. À cet égard, il convient de constater que l’OAIE a tranché en faveur de la recourante, dès lors que la CdC, par décision du 25 mai 2022, lui a octroyé le montant de CHF 17'424.- correspondant aux arriérés de la rente complémentaire pour enfant dont elle réclamait le versement.

12.2 Dans son courrier du 5 juillet 2022, la caisse a reconnu que la CdC avait pris une décision « parfaitement conforme au droit », ajoutant qu’après examen des mois d’octobre et novembre 2020, elle considérait que le montant rétroactif de CHF 1'452.- (soi les mois d’octobre et novembre 2020, par CHF 726.- chacun) dont le paiement était jusqu’alors réservé, était également dû à la recourante et allait être versé à la CdC, charge à cette dernière de rendre une décision.

Dans ces conditions, force est de constater que la décision définitive sur la détermination de celui des parents auquel le paiement rétroactif devrait être versé à finalement été prise, non pas par l’intimé, mais par la CdC.

Il n’en reste pas moins que la recourante avait un intérêt direct à déposer un recours pour obtenir l’annulation de la décision du 8 avril 2021, quand bien même l’intimé considérait, subjectivement, n’avoir pas rendu de décision, mais une simple communication au père de C______.

13.    Il conviendra donc d’admettre le recours et d’annuler la décision du 8 avril 2021.

14.    La recourante, assistée par un mandataire professionnellement qualifié et obtenant gain de cause, a droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixera à CHF 3'500.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

15.    Limitée à la question du mode de paiement des rentes pour enfants, la procédure ne porte pas sur l’octroi ou le refus de prestations (ATF 129 V 362 consid. 2 et 7), de sorte qu’elle est gratuite (cf. art. 69 al. 1bis LAI a contrario).

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision du 8 avril 2021.

4.        Constate que la centrale de compensation de l’office de l’assurance-invalidité pour les assurés résidant à l’étranger a rendu une décision, en date du 25 mai 2022, donnant droit à la recourante de percevoir les arriérés de rentes pour enfants, à hauteur de CHF 17'424.-.

5.        Constate que l’intimé s’est déterminé sur le sort du montant rétroactif de CHF 1'452.-, en considérant qu’il était dû à la recourante et qu’il allait être versé à la centrale de compensation de l’office de l’assurance-invalidité pour les assurés résidant à l’étranger, pour décision.

6.        Condamne, en tant que de besoin, l’intimé à verser ledit montant de CHF 1'452.- à la centrale de compensation.

7.        Alloue à la recourante, à charge de l’intimé, une indemnité de CHF 3’500.- à titre de participation à ses frais et dépens.

8.        Dit que la procédure est gratuite.

9.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le