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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3455/2021

ATAS/777/2022 du 06.09.2022 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3455/2021 ATAS/777/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 septembre 2022

15ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à Annemasse, FRANCE, comparant avec élection de domicile en l’étude de Maître Maxime CLIVAZ

 

recourant

 

contre

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D’ASSURANCE EN CAS D’ACCIDENTS, Division juridique, Fluhmattstrasse 1, LUCERNE, comparant avec élection de domicile en l’étude de Maître Didier ELSIG

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______ 1960, a été engagé le 14 janvier 2019 en qualité de maçon coffreur par l’entreprise de placement de personnel B______ SA (ci-après : l’employeur), avec siège à Meyrin. À ce titre, il était assuré auprès de la SUVA – CAISSE NATIONALE SUISSE D’ASSURANCE EN CAS D’ACCIDENTS (ci-après : la SUVA, l’assureur ou l’intimée) pour les accidents professionnels ou non professionnels.

b. Alors qu’il effectuait une mission intérimaire auprès de la société C______ SA, entreprise cliente de son employeur, l’assuré a été victime d’un accident le 29 janvier 2019. Selon la déclaration de sinistre du 26 février 2019, c’était en déplaçant une poutre de 4 mètres avec un collègue qu’il avait glissé sur une plaque de neige et qu’il s’était réceptionné sur le bas droit.

c. L’assureur a pris en charge les suites de cet événement et a ainsi alloué des prestations pour les soins et des indemnités journalières durant l’arrêt de travail consécutif à l’accident.

d. Le 26 février 2019, l’employeur a informé l’assuré de la résiliation de son contrat de mission pour le 28 février 2019.

e. Le 26 juillet 2019, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI).

f. Dans un rapport du 18 octobre 2019, le docteur D______, chirurgien orthopédiste à Annemasse (France), a diagnostiqué une rupture traumatique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite en précisant qu’une intervention aurait lieu prochainement. Il fallait s’attendre à la persistance d’un problème (douleur et manque de force).

g. Ladite intervention a eu lieu le 14 novembre 2019 (« réparation à ciel ouvert » de la coiffe des rotateurs droite, associée à une acromioplastie).

h. Lors d’un examen du 24 juin 2020, le docteur E______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et médecin d’arrondissement de l’assureur, a constaté que l’état de santé de l’assuré n’était pas encore stabilisé.

i. Par appréciation du 2 février 2021, le Dr E______ a évalué à 15% l’atteinte à l’intégrité résultant de la rupture de la coiffe des rotateurs droite.

j. Le 2 février 2021 également, le Dr E______ a rendu le rapport qui faisait suite à l’examen final de l’assuré, pratiqué le 28 janvier 2021. À un peu plus d’une année de l’intervention du 14 novembre 2019, la rééducation avait été stoppée et la symptomatologie était sans évolution. L’assuré se plaignait toujours de douleurs de l’épaule droite, mais également de douleurs diffuses du bras, accompagnées d’une diminution de force du membre supérieur droit. Les nuits étaient difficiles, car l’assuré était réveillé par les douleurs. Sur le plan objectif, on notait une discrète récupération en élévation de l’épaule droite, sans autre changement. Il existait une faiblesse diffuse de la coiffe des rotateurs et une amyotrophie marquée de la fosse sous-épineuse et sus-épineuse. Pour ce droitier, la force, très diminuée, était inférieure à 50% par rapport au côté opposé. Vu l’absence d’évolution depuis l’examen du 24 juin 2020, l’état était stabilisé. Aux séquelles de l’événement du 29 janvier 2019 s’ajoutait un problème d’ordre maladif, soit un état dégénératif du rachis cervical (cervicarthrose en C3-C4). L’exigibilité en tant que maçon coffreur n’était plus donnée, pas plus que pour toute activité lourde sollicitant le membre supérieur droit. Les limitations fonctionnelles définitives empêchaient ainsi :

-          les activités, bras en abduction, impliquant un port de charges supérieures à 5kg de façon répétitive ou non ;

-          toute activité impliquant un grand bras de levier du membre supérieur ;

-          la montée d’échelles ;

-          le port de charges lourdes sur l’épaule droite.

Dans toute activité respectant les limitations fonctionnelles décrites et concernant l’épaule droite, la capacité de travail était complète sans limitation de temps ni de rendement.

Une antalgie à la demande, sur prescription du médecin-généraliste, devrait être prise en charge par l’assureur.

k. Par courrier du 2 février 2021, l’assureur a informé l’assuré que son état de santé était maintenant stabilisé, de sorte qu’il mettrait fin au paiement des soins médicaux et de l’indemnité journalière avec effet au 31 mars 2021 au soir.

l. Par projet de décision du 10 février 2021, l’OAI a octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité du 29 janvier 2020 au 31 mars 2021. Dès le 1er avril 2021, ce droit était nié.

m. Dans une note du 24 février 2021, l’assureur a indiqué que selon les informations recueillies auprès de l’employeur sur l’évolution salariale, le salaire de l’assuré se serait élevé à CHF 31.70/heure pour 42.5 heures/semaine sur 52 semaines, soit à CHF 70’057.- l’an, montant auquel il convenait d’ajouter un supplément de 8.3% au titre du 13ème salaire (CHF 5’814.75), de sorte que le total du gain présumé perdu se montait à CHF 75’871.75 pour l’année 2021.

n. Le 16 mars 2021, l’assureur a demandé au Dr E______ si au vu de son rapport du 2 février 2021, on pouvait estimer que l’assuré ne serait que peu limité pour
le port de charges le long du corps avec les deux bras.

o. Par appréciation du 23 mars 2021, le Dr E______ a confirmé les conclusions
de son précédent rapport et précisé, pour le surplus, que les activités avec port
de charges, coude au corps, n’étaient pas limitées, dans la mesure où elles ne sollicitaient pas l’épaule droite. Il convenait également d’avoir à l’esprit que pour le membre supérieur droit, la rotation externe et interne était limitée.

p. Par courrier du 14 avril 2021, l’assuré, représenté par le syndicat UNIA, a reproché à l’assureur d’avoir mis fin trop tôt au versement des indemnités journalières, ce qui n’était pas suffisant, dans la mesure où son âge (61 ans) et ses limitations fonctionnelles rendaient difficiles les recherches d’emploi dans un autre domaine.

q. Le 20 avril 2021, l’assureur a informé l’assuré qu’il verserait les indemnités journalières jusqu’au 31 mai 2021 au soir.

B. a. Par décision du 10 mai 2021, l’assureur a octroyé à l’assuré, à compter du
1er juin 2021, une rente d’invalidité de CHF 629.55 par mois, correspondant à une incapacité de gain de 13%, ainsi qu’une indemnité pour atteinte à l’intégrité (ci-après : IPAI) équivalent à 15% du montant annuel maximal du gain assuré dans l’assurance-accidents (CHF 148’200.-), soit CHF 22’230.-.

b. Le 9 juin 2021, l’assuré, représenté par un avocat, a formé opposition à cette décision en faisant valoir que le revenu d’invalide retenu était trop élevé, dans la mesure où la réduction accordée sur ce dernier se montait à 5% seulement. En effet, les limitations fonctionnelles retenues par le Dr E______, associées à l’âge, justifiaient que l’abattement soit majoré à 20%. L’assuré a également contesté
le taux de 15% retenu au titre de l’IPAI et soutenu qu’il y avait lieu de le porter
à 25%.

c. Par décision du 8 septembre 2021, l’assureur a modifié le revenu d’invalide retenu dans la décision initiale, fixé à CHF 69’474.97, en revoyant celui-ci à la baisse à CHF 68’372.20 (avant abattement), mais néanmoins rejeté l’opposition, au motif pris que les limitations fonctionnelles retenues par le Dr E______ justifiait de fixer l’abattement sur le revenu d’invalide à 5%. Aussi, une fois cette déduction opérée, le gain exigible était de CHF 64’953.58. Le revenu sans invalidité (non contesté) étant de CHF 75’871.75, la perte de gain s’élevait à 14.39%, ce qui correspondait à un taux d’invalidité de 14% (soit 14.39%, arrondi à 14%). Quant à l’IPAI, l’assuré n’avait apporté aucun élément médical nouveau à l’appui de son opposition qui aurait justifié l’octroi d’une indemnité supérieure à 15%, si bien que ce taux devait être confirmé.

C. a. Le 11 octobre 2021, l’assuré, représenté par un avocat, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) d’un recours contre cette décision, concluant à son annulation, à ce qu’il soit dit et constaté que le taux d’abattement sur le gain hypothétique était de 20% et que le taux d’atteinte à l’intégrité était de 25%. Cela fait, il concluait, sous suite de dépens, au renvoi de la cause à l’intimée pour le calcul et l’octroi d’une rente d’invalidité et d’une IPAI en conséquence.

À l’appui de ses conclusions, le recourant a réitéré, en substance, les arguments développés dans son opposition à la décision initiale.

b. Par réponse du 9 novembre 2021, l’intimée a conclu au rejet du recours.

c. Le 6 décembre 2021, le recourant a répliqué en faisant notamment grief à l’intimée de n’avoir procédé à aucune analyse concrète de la combinaison des critères d’abattement.

d. Par duplique du 24 décembre 2021, l’intimée a soutenu qu’en faisant abstraction du critère de l’âge – qui nécessitait un traitement particulier en matière d’assurance-accidents –, les autres critères, qu’elle avait d’ailleurs analysés dans sa réponse, ne justifiaient pas une déduction supérieure à 5% sur le revenu d’invalide.

e. Le 31 janvier 2022, le recourant a informé la chambre de céans qu’il n’avait pas d’observations complémentaires à formuler.

f. Le 1er février 2022, une copie de ce courrier a été transmise, pour information, à l’intimée.

g. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA – RS 832.20).

1.2 Selon l’art. 58 LPGA, applicable par renvoi de l’art. 1 al. 1 LAA, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de domicile de l’assuré ou d’une autre partie au moment du recours (al. 1). Si l’assuré ou une autre partie sont domiciliés à l’étranger, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de leur dernier domicile en Suisse ou celui du canton de domicile de leur dernier employeur suisse; si aucun de ces domiciles ne peut être déterminé, le tribunal des assurances compétent est celui du canton où l’organe d’exécution a son siège
(al. 2).

1.3 Le recourant est domicilié en France, mais son employeur a son siège dans le canton de Genève, de sorte que la chambre de céans est compétente à raison de la matière et du lieu pour juger du cas d’espèce.

2.              

2.1 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-accidents, à moins que la loi n’y déroge expressément.

2.2 La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA – E 5 10).

2.3 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 LPA). Lorsque le délai échoit un samedi, un dimanche ou un jour férié selon le droit fédéral ou cantonal, son terme est reporté au premier jour ouvrable qui suit (art. 38 al. 3 LPGA et 17 al. 3 LPA).

2.4 Après réception de la décision sur opposition le 10 septembre 2021, le délai de recours a commencé à courir le lendemain et est arrivé à échéance le 11 octobre 2021, le dernier jour du délai tombant un dimanche (10 octobre 2021). Posté le 11 octobre 2021, le recours a été interjeté en temps utile. Respectant également les exigences de forme prévues par l’art. 61 let. b LPGA (cf. aussi l’art. 89B LPA), le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le montant de la rente d’invalidité, singulièrement l’abattement à opérer sur le revenu d’invalide, ainsi que sur le montant de l’IPAI.

4.              

4.1 Aux termes de l’art. 6 al. 1 LAA, les prestations d’assurance sont allouées
en cas d’accident professionnel, d’accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine
et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire
qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort
(art. 4 LPGA; ATF
129 V 402 consid. 2.1, ATF 122 V 230 consid. 1 et les références).

4.2 Conformément à l’art. 18 al. 1 LAA, si l’assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d’invalidité, pour autant que l’accident soit survenu avant l’âge de la retraite.

Est réputée invalidité, l’incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d’une atteinte à la santé physique ou mentale et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).

4.3 Il découle de l’art. 19 al. 1 LAA que le droit à la rente prend naissance dès qu’il n’y a plus lieu d’attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de l’assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l’assurance-invalidité ont été menées à terme. Cette disposition délimite temporellement le droit au traitement médical et le droit à la rente d’invalidité, le moment déterminant étant celui auquel l’état de santé peut être considéré comme relativement stabilisé (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 391/00 du 9 mai 2001 consid. 2a).

5.              

5.1 Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA). La comparaison des revenus s’effectue, en règle générale, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l’un avec l’autre, la différence permettant de calculer le taux d’invalidité (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 137 V 334 consid. 3.1.1). Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente ; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d’influencer le droit à la rente survenues jusqu’au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et ATF 128 V 174).

5.2 Aux termes de l’art. 18 al. 2 LAA, le Conseil fédéral règle l’évaluation du degré de l’invalidité dans des cas spéciaux; il peut à cette occasion déroger à
l’art. 16 LPGA. Il a fait usage de cette compétence à l’art. 28 OLAA (RS 832.202). D’après l’art. 28 al. 4 OLAA, si, en raison de son âge, l’assuré ne reprend pas d’activité lucrative après l’accident ou si la diminution de la capacité de gain est due essentiellement à son âge avancé, les revenus de l’activité lucrative déterminants pour l’évaluation du degré d’invalidité sont ceux qu’un assuré d’âge moyen dont la santé a subi une atteinte de même gravité pourrait réaliser.

L’art. 28 al. 4 OLAA vise deux situations: celle où l’assuré, en raison de son âge, ne reprend plus d’activité lucrative après l’accident (variante I) et celle où l’atteinte à la capacité de gain a principalement pour origine l’âge avancé de l’assuré (variante II). L’assuré qui remplit l’un ou l’autre cas de figure ne touchera alors une rente d’invalidité que dans la mesure où une telle rente serait octroyée dans les mêmes conditions à un assuré d’âge moyen présentant les mêmes capacités professionnelles et les mêmes aptitudes professionnelles. Ce système repose sur la considération qu’une même atteinte à la santé peut entraîner chez une personne âgée des répercussions bien plus importantes sur la capacité de gain que chez une personne d’âge moyen pour diverses raisons (difficultés de reclassement ou de reconversion professionnels, diminution des capacités d’adaptation et d’apprentissage), alors que l’âge en tant que tel n’est pas une atteinte à la santé dont l’assureur-accidents doit répondre (ATF 122 V 418 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 8C_307/2017 du 26 septembre 2017 consid. 4.1). La deuxième variante est également applicable lorsque l’âge avancé n’est pas un facteur qui a une incidence sur l’exigibilité, mais qu’il est malgré tout un obstacle à la mise en valeur de la capacité résiduelle de gain, notamment parce qu’aucun employeur n’est disposé à engager un employé pour un laps de temps très court avant l’ouverture de son droit à une rente de l’AVS (arrêts du Tribunal fédéral 8C_307/2017 consid. 4.2.2 du 26 septembre 2017; 8C_346/2013 du 10 septembre 2013 consid. 4.2; 8C_806/2012 du 12 février 2013 consid. 5.2.2). Il s’agit d’empêcher l’octroi de rentes d’invalidité qui comporteraient, en fait, une composante de prestation de vieillesse (arrêt du Tribunal fédéral 8C_554/2017 du 4 juillet 2018 consid. 3.3.1).

5.3  

5.3.1 Le revenu d’invalide doit en principe être évalué en fonction de la situation professionnelle concrète de l’assuré. Le salaire effectivement réalisé ne peut cependant être pris en compte pour fixer le revenu d’invalide que si trois conditions cumulatives sont remplies: l’activité exercée après la survenance de l’atteinte à la santé doit reposer sur des rapports de travail particulièrement stables; cette activité doit en outre permettre la pleine mise en valeur de la capacité résiduelle de travail exigible; le gain obtenu doit enfin correspondre au travail effectivement fourni et ne pas contenir d’éléments de salaire social (cf. ATF 139 V 592 consid. 2.3; 135 V 297 consid. 5.2; 129 V 472 consid. 4.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_667/2017 du 19 juin 2018 consid. 3.2).

5.3.2 Lorsque l’assuré n’a pas repris d’activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d’invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu’elles résultent de l’ESS (ATF 126 V 75 consid. 3b/aa et bb). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) TA1, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb). La valeur statistique (médiane) s’applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu’elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu’ils seraient en mesure de réaliser en tant qu’invalides dès lors qu’il recouvre un large éventail d’activités variées et non qualifiées (branche d’activités), n’impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3).

Toutefois, lorsque cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l’assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, il y a lieu parfois de se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières. Tel est notamment le cas lorsqu’avant l’atteinte à la santé, l’assuré a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et qu’une activité dans un autre domaine n’entre pas en ligne de compte. En outre, lorsque les circonstances du cas concret le justifient, on peut s’écarter de la table TA1 (secteur privé) pour se référer à la table TA7 (secteur privé et secteur public [Confédération] ensemble), si cela permet de fixer plus précisément le revenu d’invalide et que le secteur en question est adapté et exigible (ATF 133 V 545, et les références citées).

5.3.3 Il est notoire que les personnes atteintes dans leur santé, qui présentent des limitations même pour accomplir des activités légères, sont désavantagées sur le plan de la rémunération par rapport aux travailleurs jouissant d’une pleine
capacité de travail et pouvant être engagés comme tels; ces personnes doivent généralement compter sur des salaires inférieurs à la moyenne (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb). La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent par conséquent être réduits, dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation) et résulte d’une évaluation dans les limites du pouvoir d’appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). L’étendue de l’abattement justifié dans un cas concret relève du pouvoir d’appréciation
(ATF 132 V 393 consid. 3.3). Cette évaluation ressortit en premier lieu à l’administration, qui dispose pour cela d’un large pouvoir d’appréciation. Le juge doit faire preuve de retenue lorsqu’il est amené à vérifier le bien-fondé d’une telle appréciation. L’examen porte alors sur le point de savoir si une autre solution que celle que l’autorité, dans le cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d’appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n’aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Pour autant, le juge ne peut, sans motif pertinent, substituer son appréciation à celle de l’administration; il doit s’appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 126 V 75 consid. 6; ATF 123 V 150 consid. 2 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 8C_337/2009 du 18 février 2010 consid. 7.5).

S’agissant du critère de l’âge, le Tribunal fédéral n’a pas encore tranché la question de savoir si, dans l’assurance-accidents obligatoire, celui-ci pourrait en principe justifier un abattement ou si l’influence de ce critère sur la capacité de gain doit être prise en compte uniquement dans le cadre de la réglementation particulière de l’art. 28 al. 4 OLAA précité (cf. ci-dessus : consid. 5.2). Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a considéré que cette question pouvait encore demeurer indécise, dès lors que la personne assurée n’avait pas exposé – et on ne voyait pas – en quoi ses perspectives salariales étaient concrètement réduites sur un marché du travail équilibré à raison de son âge. En outre, étant âgée de 58 ans au moment tant de la naissance d’un éventuel droit à la rente que de la décision sur opposition, la personne assurée n’avait pas encore atteint l’âge à partir duquel le Tribunal fédéral reconnaît généralement que ce facteur peut être déterminant et nécessite une approche particulière (arrêt du Tribunal fédéral 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 4.3.2 et les arrêts cités).

6.              

6.1 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l’accident, l’incapacité de travail, l’invalidité, l’atteinte à l’intégrité physique ou mentale) supposent l’instruction de faits d’ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l’assuré à des prestations, l’administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

6.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d’apprécier certains types d’expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

6.2.1 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d’observations approfondies et d’investigations complètes, ainsi qu’en pleine connaissance du dossier, et que l’expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu’aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

6.2.2 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d’un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu’aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l’assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l’objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l’égard de l’assuré. Ce n’est qu’en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l’impartialité d’une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l’importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l’impartialité de l’expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Dans une procédure portant sur l’octroi ou le refus de prestations d’assurances sociales, lorsqu’une décision administrative s’appuie exclusivement sur l’appréciation d’un médecin interne à l’assureur social et que l’avis d’un médecin traitant ou d’un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes suffisants quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l’un ou sur l’autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l’art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_301/2013 du 4 septembre 2013 consid. 3).

6.2.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l’expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l’unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S’il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l’objectivité ou l’impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l’éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l’existence d’éléments pouvant
jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

7.              

7.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

7.2 Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29
al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
(RS 101 – Cst; SVR 2001 IV n° 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b;
ATF 122 V 157 consid. 1d).

8.             En l’espèce, pour apprécier la capacité de travail du recourant, la décision entreprise se fonde sur les conclusions du Dr E______, prises à l’issue de l’examen du 28 janvier 2021, aux termes desquelles la rupture de la coiffe des rotateurs
de l’épaule droite causée par l’accident du 29 janvier 2019, et opérée le 14 novembre 2019, ne permet plus au recourant d’exercer son activité habituelle de maçon coffreur (ni toute autre activité lourde sollicitant le membre supérieur droit), mais ne l’empêche pas d’exercer une activité à plein temps, sans baisse de rendement, du moment que celle-ci exclut :

-          les activités, bras en abduction, impliquant un port de charges supérieures à 5kg de façon répétitive ou non ;

-          toute activité impliquant un grand bras de levier du membre supérieur ;

-          la montée d’échelles ;

-          le port de charges lourdes sur l’épaule droite.

Cette appréciation n’étant pas contredite par d’autres rapports médicaux, ni contestée par le recourant, la chambre de céans s’en tiendra à celle-ci (totale incapacité de travail dans l’activité antérieure de maçon coffreur, mais exercice possible à plein temps d’une profession adaptée aux limitations fonctionnelles décrites).

9.              

9.1 Pour la détermination du degré d’invalidité du recourant, il y a lieu de procéder à la comparaison des revenus en 2021 – date à laquelle l’état de santé doit être considéré comme stabilisé et donc de l’ouverture éventuelle du droit à
la rente. On précisera également que les variations enregistrées par les revenus à comparer doivent être prises en compte jusqu’à la date de la décision sur opposition (cf. ATF 143 V 295 consid. 4.1.3), en l’occurrence le 8 septembre 2021.

Le revenu sans invalidité retenu par l’intimée, soit CHF 75’871.75, n’est pas contesté.

9.2 S’agissant du revenu d’invalide, en l’absence d’exercice d’une activité lucrative, l’intimée s’est référée à juste titre aux données statistiques de l’ESS 2018 – étant relevé qu’il n’y avait pas de document plus récent à la date de la décision litigieuse –, plus précisément au tableau TA1_tirage_skill_level, niveau de compétences 1, selon lesquelles le revenu moyen des hommes exécutant des tâches physiques ou manuelles simples s’élevait à CHF 5’417.- pour 40 heures de travail par semaine. En tenant compte d’une durée moyenne de travail dans les entreprises de 41.7 heures et de l’évolution des salaires nominaux jusqu’à la date de la décision sur opposition (+0.9% en 2019, +0.8% en 2020 et -0.8% selon l’estimation, alors disponible pour le 2ème trimestre 2021).

La décision litigieuse ne prête pas le flanc à la critique en tant qu’elle fixe le revenu d’invalide à CHF 68’372.20.

10.         Reste à déterminer s’il y lieu d’opérer une réduction sur ce dernier revenu.

Au vu des limitations fonctionnelles retenues, l’intimée a réduit le salaire avec invalidité de 5%, de sorte à fixer le gain exigible à CHF 64’953.58.

Le recourant fait valoir que la décision (initiale) du 10 mai 2021 ferait référence, en justification de l’abattement de 5%, aux limitations « susmentionnées » qui ne seraient pas identiques à celles indiquées par le Dr E______. Par ailleurs, il ne ferait pas de doute que l’ensemble des limitations, comprenant des douleurs persistantes nécessitant la prise régulière d’antalgiques, nécessiterait un abattement supérieur à 5%, a fortiori en relation avec d’autres facteurs. Ceux-ci concernaient l’âge (61 ans à la date de la décision attaquée), son absence de formation autre que six ans de scolarité obligatoire au Portugal (complétés par un diplôme d’opérateur en plateformes élévatrices, acquis en 2016 mais sans utilité actuelle vu ses limitations fonctionnelles), et le fait qu’il n’a pas exercé d’autre activité que celle de maçon coffreur depuis 1989, à l’exception d’une période
de deux ans (de 1992 à 1994) durant laquelle il a été vendeur chez un concessionnaire automobile.

La chambre de céans relève tout d’abord que même si la décision du 10 mai 2021 ne reprend pas textuellement le rapport du Dr E______ sur le plan de la description des limitations fonctionnelles, elle n’en reproduit pas moins, en synthèse, les points pertinents comme suit : « [ ] est à même d’exercer une activité dans différents secteurs de l’industrie, à la condition qu’il ne doive pas porter de charges supérieures à 5kg de manière répétitive avec le membre supérieur droit en abduction et effectuer avec celui-ci des travaux avec grand bras de levier ». L’intimée a fait sienne l’appréciation de son médecin d’arrondissement en prenant la peine de vérifier avec lui (courrier du 16 mars 2021) l’étendue des limitations du recourant quant au port de charges le long du corps avec les deux bras. Il en a résulté que le recourant était peu limité à cet égard, à condition qu’il ne sollicite pas l’épaule droite (cf. l’appréciation complémentaire du 23 mars 2021 du Dr E______). Il ressort d’ailleurs du résumé des documents déterminants pour la fixation de la rente (dossier intimée, doc. 177) que l’intimée s’est référée aux appréciations du Dr E______ sur ce point également. Enfin, si la jurisprudence prévoit en particulier un abattement sur le revenu d’invalide lorsque la personne assurée présente des limitations même dans l’accomplissement d’activités physiquement légères (cf. ATF 126 V 75 consid. 5a/bb), elle n’en précise pas moins que le fait qu’une personne ne puisse exercer plus qu’un travail légèrement ou moyennement contraignant, mais sans limitation de l’horaire de travail ni du rendement, ne suffit pas à lui seul pour justifier un abattement, ceci découlant du fait que les tableaux de l’enquête suisse sur la structure des salaires correspondant au niveau d’exigence 4 (niveau d’exigence 1 depuis l’ESS 2012) englobent un grand nombre de tâches légères ou moyennement lourdes, si bien que la personne assurée n’a pas à subir de ce seul fait une diminution de son revenu (voir, parmi d’autres, l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_381/2017 du 7 août 2017 consid. 4.2.2).

Étant donné qu’il existe, sur le marché du travail, un éventail suffisamment large d’activités légères et adaptées à un handicap résultant d’une déchirure de l’épaule (cf. p. ex. l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_553/2011 du 21 octobre 2011) et que même si dans le cas particulier, le Dr E______ rapporte des douleurs de l’épaule droite et des douleurs diffuses du bras (pour lesquelles il prévoit, au besoin, la prescription d’antalgiques par le médecin-généraliste traitant), ce médecin n’en retient pas moins qu’une activité adaptée aux limitations fonctionnelles qu’il décrit est exigible sans limitation de l’horaire de travail ni du rendement. Dans ces conditions, le fait que l’intimée ait fixé à 5% l’abattement à opérer sur le revenu d’invalide n’apparaît pas critiquable à première vue, sous réserve que le critère des limitations fonctionnelles, associé à d’autres facteurs, ne justifie pas un abattement plus important.

À cet égard, il est vrai que le recourant ne peut plus exercer son activité habituelle de maçon coffreur et que cette circonstance s’accompagne, au moment de la naissance du droit à une rente d’invalidité en 2021, de l’absence d’années
de service dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, à tout le moins dans un passé récent. Cependant, le critère des années de service ne saurait conduire à lui seul à un abattement, dans la mesure où il revêt peu d’importance pour l’accomplissement d’activité simples et répétitives (niveau 1) dans le secteur privé (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_611/2013 du 11 février 2014 consid. 3.2.2). La même remarque vaut pour le niveau de formation (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_427/2011 du 15 septembre 2011 consid. 5.2) ou de maîtrise de la langue écrite (arrêt du Tribunal fédéral 8C_17/2011 du 21 avril 2011 consid. 6.2).

S’agissant ensuite du critère de l’âge, on rappellera que l’âge avancé d’un assuré comme facteur prépondérant à son empêchement de maintenir sa capacité de gain n’est pas pris en considération de la même manière dans l’assurance-invalidité que dans l’assurance-accidents, où l’art. 28 al. 4 OLAA, en lien avec l’art. 18 al. 2 LAA, commande de faire abstraction de ce critère pour les deux termes de la comparaison des revenus (ATF 134 V 392 consid. 6.2). L’art. 28 al. 4 OLAA vise en effet à empêcher l’octroi de rentes d’invalidité de l’assurance-accidents qui comporteraient, en fait, une composante de prestation de vieillesse. Cette norme s’applique également lorsque l’âge avancé n’est pas un facteur qui a une incidence sur l’exigibilité, mais qu’il est malgré tout un obstacle à la mise en valeur de la capacité résiduelle de gain, notamment parce qu’aucun employeur n’est disposé à engager un employé pour un laps de temps très court avant l’ouverture de son droit à une rente de l’AVS (cf. ci-dessus : consid. 5.2).

En l’occurrence, le recourant avait atteint l’âge de 61 ans au moment de l’ouverture du droit éventuel à une rente. Il apparaît donc douteux qu’il puisse retrouver un emploi pour une durée d’emblée limitée de quatre ans sur le marché réel du travail. L’absence de reprise du travail résulte donc à tout le moins dans une mesure sensible de son âge avancé, ce qui justifie l’application de l’art. 28 al. 4 OLAA. Cependant, à l’instar de ce que le Tribunal fédéral a considéré dans les arrêts rendus à ce jour, la question de savoir si dans le domaine de l’assurance-accidents obligatoire, l’âge constitue un critère d’abattement ou si l’influence de celui-ci doit être prise en compte uniquement dans le cadre de la réglementation particulière de l’art. 28 al. 4 OLAA peut continuer à rester indécise, à tout le moins dans le cas d’espèce.

En effet, dans un arrêt 8C_439/2017 du 6 octobre 2017, le Tribunal fédéral a considéré que même dans le cas d’un assuré, âgé de 62 ans au moment de la naissance du droit éventuel à la rente, les effets pénalisants au niveau salarial induits par l’âge ne pouvaient être considérés comme suffisamment établis. Il n’en va pas autrement dans le cas d’espèce : il ressort du dossier que l’expérience professionnelle du recourant ne se limite pas à celle de maçon coffreur puisqu’il a exercé, outre l’activité de vendeur de voitures précitée, celle de tisserand et d’agriculteur (cf. dossier intimée, doc. 188, p. 11). De plus, en parvenant à obtenir, en 2016, un certificat de formation d’opérateur, il a fait montre de capacités d’apprentissage de connaissances/techniques nouvelles qui, conjuguées à la polyvalence et la durée de son expérience professionnelle, acquise auprès de plusieurs employeurs successifs, lui confèrent des atouts sur le marché équilibré du travail qui sont susceptibles, cas échéant, de compenser les désavantages compétitifs liés à son âge. Il manque par ailleurs des indices concrets selon lesquels le recourant serait limité sur le plan de sa capacité d’adaptation et de reconversion, ce qui constitue un point positif en sa faveur, même en prenant en considération la période d’occupation relativement brève qui le sépare de l’âge
de la retraite, ce d’autant que les emplois non qualifiés sont, en règle générale, disponibles indépendamment de l’âge sur le marché équilibré du travail (ATF 146 V 16 consid. 7.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 8C_175/2020 consid. 4.2 et la réf. citée) et qu’il n’existe pas de statistique suffisamment fiable qui permettrait d’objectiver les éventuelles répercussions salariales négatives qui seraient induites par l’âge d’une personne assurée au moment de la perte de son emploi (cf. l’arrêt 8C_439/2017 précité, consid. 5.6.4).

À l’examen du tableau TA1 de l’ESS 2018, il s’avère toutefois que pour
les hommes sans fonction de cadre, le salaire médian s’élevait, en 2018, toutes catégories confondues (ressortissants suisses et étrangers, ceux-ci étant classés selon le type de permis) à CHF 5’941.- contre CHF 5’715.- pour les frontaliers, à l’image du recourant (cf. dossier intimée, doc. 21), ce qui représente, selon cette statistique, un salaire réduit de 3.8% (pour plusieurs cas d’application : arrêt du Tribunal fédéral 8C_115/2021 du 10 août 2021 consid. 4.2.4 et les arrêts cités).

Au regard de la pondération de l’ensemble des facteurs évoqués, il se justifie d’opérer un abattement de 10% sur le revenu d’invalide de CHF 68’372.20 et, partant, de se fonder sur un revenu de CHF 61’534.98 (soit CHF 68’372.20 sous déduction de 10% de ce montant).

Compte tenu de ce qui précède, la perte de gain du recourant se monte à
CHF 14’336.77 (soit CHF 75’871.75 sous déduction de CHF 61’534.98), ce
qui représente une diminution de 19% du revenu sans invalidité ([75’871.75 – 61’534.98] x 100 / 75’871.75 = 18.89%, arrondi au pourcent supérieur ; ATF 130 V 121 consid. 3.2). En conséquence, c’est un degré d’invalidité de 19% que l’intimée aurait dû prendre en considération, ce qui ouvre le droit au versement d’une rente d’invalidité à ce même taux.

11.         Il convient à présent d’examiner si l’intimée a correctement fixé à 15% le taux de l’IPAI.

11.1 Selon l’art. 24 al. 1 LAA, si, par suite de l’accident, l’assuré souffre d’une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, il a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l’intégrité (al. 1). L’atteinte à l’intégrité est réputée durable lorsqu’il est prévisible qu’elle subsistera avec au moins la même gravité pendant toute la vie; elle est réputée importante lorsque l’intégrité physique, mentale ou psychique subit, indépendamment de la diminution de la capacité de gain, une altération évidente ou grave (art. 36 al. 1 OLAA).

D’après l’art. 25 al. 1 LAA, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est allouée sous forme de prestation en capital; elle ne doit pas excéder le montant maximum du gain annuel assuré à l’époque de l’accident et elle est échelonnée selon la gravité de l’atteinte à l’intégrité.

Selon l’art. 36 al. 4 OLAA, il sera équitablement tenu compte des aggravations prévisibles de l’atteinte à l’intégrité. Une révision n’est possible qu’en cas exceptionnel, si l’aggravation est importante et n’était pas prévisible.

11.2 L’indemnité pour atteinte à l’intégrité a pour but de compenser le dommage subi par un assuré du fait d’une atteinte grave à son intégrité corporelle ou mentale due à un accident (Message du Conseil fédéral à l’appui d’un projet de loi sur l’assurance-accidents, FF 1976 III p. 29). Elle ne sert pas à réparer les conséquences économiques de l’atteinte, qui sont indemnisées au moyen d’une rente d’invalidité, mais joue le rôle d’une réparation morale. Elle vise à compenser le préjudice immatériel (douleurs, souffrances, diminution de la joie de vivre, limitation des jouissances offertes par l’existence etc.) qui perdure au-delà de la phase du traitement médical et dont il y a lieu d’admettre qu’il subsistera la vie durant (ATF 133 V 224 consid. 5.1 et les références). L’indemnité pour atteinte à l’intégrité se caractérise par le fait qu’elle est exclusivement fixée en fonction de facteurs médicaux objectifs, valables pour tous les assurés, et sans égard à des considérations d’ordre subjectif ou personnel (cf. Jean-Maurice FRÉSARD, Margit MOSER-SZELESS, L’assurance-accidents obligatoire in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht (SBVR), 3ème éd. 2016, n. 311). En cela, elle se distingue de l’indemnité pour tort moral du droit civil, qui procède de l’estimation individuelle d’un dommage immatériel au regard des circonstances particulières du cas. Cela signifie que pour tous les assurés présentant un status médical identique, l’atteinte à l’intégrité est la même (ATF 115 V 147 consid. 1; 113 V 218 consid. 4b; RAMA 2004 n° U 514 p. 415, U 134/03, consid. 5.2; RAMA 2000 n° U 362 p. 41).

Une atteinte à l’intégrité au sens de l’art. 24 al. 1 LAA consiste généralement en un déficit corporel – anatomique ou fonctionnel –, mental ou psychique (cf. Alfred MAURER, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, 1985, p. 414). La gravité de l’atteinte, dont dépend le montant de l’indemnité, se détermine uniquement d’après les constatations médicales (SVR 2009 UV n° 27 p. 97, 8C_459/2008, consid. 2.3; cf. aussi Thomas FREI, Die Integritätsentschädigung nach Art. 24 und 25 des Bundesgesetzes über die Unfallversicherung, 1998,
p. 41). L’évaluation incombe donc avant tout aux médecins, qui doivent, d’une part, constater objectivement quelles limitations subit l’assuré et, d’autre part, estimer l’atteinte à l’intégrité en résultant (FRÉSARD/MOSER-SZELESS, op. cit. n. 317).

L’annexe 3 de l’OLAA comporte un barème – reconnu conforme à la loi et non exhaustif (ATF 124 V 29 consid. 1b ; ATF 124 V 209 consid. 4a/bb ; ATF 113 V 218 consid. 2a) – des lésions fréquentes et caractéristiques, évaluées en pour cent. Pour les atteintes à l’intégrité spéciales ou qui ne figurent pas dans la liste, le barème est appliqué par analogie, compte tenu de la gravité de l’atteinte (ch. 1 al. 2). La perte totale de l’usage d’un organe est assimilée à la perte de celui-ci. En cas de perte partielle d’un organe ou de son usage, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est réduite en conséquence; aucune indemnité ne sera versée dans les cas où un taux inférieur à 5% du montant maximum du gain assuré serait appliqué (ch. 2).

La Division médicale de la CNA a établi des tables d’indemnisation en vue d’une évaluation plus affinée de certaines atteintes (Indemnisation des atteintes à l’intégrité selon la LAA). Ces tables n’ont pas valeur de règles de droit et ne sauraient lier le juge. Dans la mesure, toutefois, où il s’agit de valeurs indicatives destinées à assurer autant que faire se peut l’égalité de traitement entre les assurés, elles sont compatibles avec l’annexe 3 à l’OLAA (ATF 124 V 209 consid. 4a/cc; 116 V 156 consid. 3a p. 157; RAMA 1998 n° U 296 p. 235, U 245/96, consid. 2a).

Selon l’annexe 3 à l’OLAA, pour les atteintes à l’intégrité « désignées ci-après » (i.e : la liste figurant dans ladite annexe), l’indemnité s’élève en règle générale au pourcentage indiqué du montant maximum du gain assuré. Selon ladite liste, une atteinte très grave et douloureuse au fonctionnement de la colonne vertébrale donne droit à une IPAI de 50%. L’annexe 3 à l’OLAA précise à son ch. 1 que pour les atteintes à l’intégrité qui sont spéciales ou qui ne figurent pas dans la liste, on appliquera le barème par analogie en tenant compte de la gravité de l’atteinte.

11.3 Il ressort de la table 1 de la SUVA, révision 2000, traitant de l’atteinte à l’intégrité résultant de troubles fonctionnels des membres supérieurs, qu’une périarthrite scapulo-humérale « moyenne » donne droit à une IPAI de 10%, et de 25% lorsqu’elle est « grave ». En l’espèce, ce n’est pas le choix de la rubrique « périarthrite scapulo-humérale » de la table précitée qui est contesté (pour un cas d’application de cette affection à une déchirure de la coiffe des rotateurs : cf.
par ex. l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_304/2010 du 5 janvier 2011) mais le pourcentage de 15%, correspondant, selon le Dr E______, à une périarthrite scapulo-humérale moyenne à grave, symptomatique et douloureuse. Ce médecin justifie en outre le taux arrêté à 15% par le fait qu’il faut s’attendre, à moyen terme, à ce que le recourant doive subir une nouvelle intervention chirurgicale, plus précisément une arthroplastie totale inversée, laquelle donnerait droit, selon la table 5 de la SUVA (atteinte à l’intégrité résultant d’arthroses), à une IPAI de 15-20% en cas de bon résultat opératoire.

Par la voix de son conseil, le recourant soutient en synthèse que pour estimer un taux correspondant à la qualification « moyenne à grave » retenue par le
Dr E______, il serait possible d’effectuer un calcul de la moyenne des deux taux, soit 17.5%. Mais comme le cas serait plus proche d’un cas grave et qu’il conviendrait en outre de tenir compte des aggravations prévisibles de l’atteinte à l’intégrité selon la table 5 précitée, l’IPAI devrait être fixée à 25%.

Ces critiques ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions de ce médecin. En effet, dès lors que la gravité de l’atteinte, dont dépend le montant de l’indemnité, se détermine uniquement sur la base de constatations médicales, la chambre de céans ne saurait se fonder sur de simples allégations de gravité de l’atteinte – qui plus est non corroborées par le moindre avis médical –, ce d’autant qu’en application de l’art. 36 al. 4 OLAA, le taux de 15% pourrait, cas échéant, être revu à la hausse par le service médical de l’intimée, dans l’hypothèse où l’éventuelle arthroplastie à venir déboucherait sur un « résultat mauvais » selon la table 5, plus précisément sur une aggravation d’une certaine ampleur (cf. l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_238/2020 du 7 octobre 2020 consid. 4.3). Étant donné, pour le surplus, que le recourant ne cite aucune pièce médicale susceptible de mettre en doute l’imprévisibilité, à ce stade, d’une possible aggravation de l’atteinte qui ferait suite à l’éventuelle arthroplastie évoquée, la chambre de céans s’en tiendra au taux de 15% retenu par le Dr E______.

12.         Il convient ainsi d’admettre partiellement le recours, de réformer la décision litigieuse en ce sens que le recourant a droit à une rente d’invalidité de 19% à compter du 1er juin 2021.

13.         Étant donné que le recourant obtient partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 1’500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens, à charge de l’intimée (art. 61 let. g LPA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 – RFPA ; RS E 5.10.03).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

*****

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement au sens des considérants.

3.        Réforme la décision sur opposition du 8 septembre 2021, en ce sens que le recourant a droit à une rente d’invalidité de 19% à compter du 1er juin 2021.

4.        Alloue au recourant une indemnité de CHF 1’500.-, à charge de l’intimée, valant participation à ses dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le