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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3599/2021

ATAS/620/2022 du 30.06.2022 ( CHOMAG ) , REJETE

Recours TF déposé le 16.09.2022, rendu le 08.03.2023, REJETE, 8C_464/2022
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3599/2021 ATAS/620/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 juin 2022

3ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à GENÈVE

 

 

recourante

contre

CAISSE DE CHÔMAGE SIT, sise rue des Chaudronniers 16; GENÈVE

 

 

 

intimée

 


 

 

EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après l’assurée), née en 1961, a travaillé en tant que secrétaire, du 13 novembre 2017 au 30 juin 2018, puis en qualité d’aide-comptable, du 1er octobre 2019 au 30 avril 2020.

b. Le 7 mai 2020, elle a déposé une demande d’indemnités de chômage auprès de la Caisse de chômage du Sit (ci-après la Caisse).

c. Le 22 septembre 2020, la Caisse lui a nié le droit aux indemnités de chômage, au motif que l'assurée n'avait cotisé que 8.87 mois durant le délai de cotisation courant du 7 mai 2018 au 6 mai 2020.

B. a. L’assurée a ensuite travaillé pour un laboratoire, du 9 avril au 31 juillet 2021.

b. Le 27 juillet 2021, elle a déposé auprès de la Caisse une nouvelle demande requérant le versement d’indemnités de chômage dès le 1er août 2021.

c. Par décision du 24 août 2021, la Caisse lui a derechef nié le droit aux indemnités, dès lors qu’elle n’avait cotisé que 10.747 mois pendant le délai de cotisation courant du 1er août 2019 au 31 juillet 2021.

d. Le 20 septembre 2021, l’assurée s’est opposée aux décisions de la Caisse du 22 septembre 2020 et du 24 août 2021 en concluant à leur annulation et à leur reconsidération. Elle arguait que l'obtention d'un gain ou d'une période de cotisation était sensiblement plus difficile pour les demandeurs d'emploi qui avaient dû s’adresser à l’assurance-chômage entre le 1er mars et le 31 août 2020 et qu'ils n’avaient de ce fait pu obtenir des périodes de cotisation pouvant être prises en compte en cas de nouveau chômage. Elle faisait valoir qu'il y avait inégalité de traitement pour les demandeurs d’emploi qui s’étaient adressés à l’assurance-chômage entre le 1er mars et le 31 août 2020. Elle demandait à ce qu'il soit constaté qu'elle n’avait pas eu la possibilité d'obtenir une période de cotisation de 3.xxx mois (sic) entre le 1er mars et le 31 août 2020 et à ce qu'une dérogation lui soit accordée au vu de sa situation personnelle.

L'assurée soulignait avoir été active toute sa vie et avoir cotisé à l'assurance-chômage pendant plus de 35 ans. Elle expliquait avoir recherché un travail pendant la période de confinement, après avoir été licenciée sans faute de sa part avant la crise du COVID-19. Les personnes qui, comme elle, s’étaient retrouvées sans emploi et sans droit aux indemnités de chômage pendant cette période extraordinaire avaient été doublement sanctionnées, puisqu’elles avaient dû subvenir à leurs besoins par leurs propres moyens sans pouvoir cotiser à l’AVS et à l'assurance-chômage. Elle reprochait au législateur de n'avoir pas envisagé ce cas de figure. L'assurée se plaignait d'avoir dû survivre grâce à ses économies et de se retrouver sans ressources. Le Conseil fédéral ayant prolongé les droits des assurés au chômage entre le 1er mars et le 31 août 2020, compte tenu des difficultés à obtenir un emploi, il convenait de la faire également bénéficier de cette prolongation.

d. Par décision du 29 septembre 2021, la Caisse a rejeté l’opposition de l’assurée à l’encontre de sa décision du 24 août 2021 en rappelant que le Conseil fédéral n’avait pas prévu de prolongation du délai-cadre de cotisation pour les personnes n'étant pas au bénéfice d'un délai-cadre d'indemnisation pendant la pandémie. Dès lors, les périodes de travail de l’assurée antérieures au 1er août 2019 ne pouvaient être prises en compte.

C. a. Le 19 octobre 2021, l’assurée a interjeté recours auprès de la Cour de céans en reprenant les arguments avancés dans son opposition et en demandant la "jonction des décisions du 22 septembre 2020 et du 24 août 2021" (sic).

b. Dans sa réponse du 29 novembre 2021, l’intimée a conclu au rejet du recours.

c. Une audience de comparution personnelle s'est tenue en date du 28 avril 2022, lors de laquelle il a été expliqué à la recourante que la décision du 22 septembre 2020 était entrée en force, faute d’opposition formée en temps utile.

L’intimée a exposé que l’argumentation de la recourante ne pouvait être suivie, au vu des dispositions prises par le Conseil fédéral et des directives applicables.

La recourante a répété qu'elle avait épuisé ses économies, ajoutant qu'elle avait dû retirer son troisième pilier, en novembre 2021. Elle trouvait inéquitable que seuls certains chômeurs puissent bénéficier de mesures de soutien.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             La modification du 21 juin 2019 de la LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2021. Le recours ayant été interjeté à cette date, il est soumis au nouveau droit (art. 82a LPGA a contrario).

3.             Déposé dans les forme et délai prévus par la loi (art. 56ss LPGA), le recours est recevable.

La recourante a formulé plusieurs conclusions constatatoires dans son opposition, qu’elle a reprises dans son recours. Celles-ci sont en principe irrecevables (ATF 129 V 289 consid. 2.1). Toutefois, elles n’ont dans le cas d’espèce pas de portée propre, mais ne sont que les prémisses des conclusions condamnatoires également prises par la recourante.

4.             Le litige porte sur le droit de la recourante à des indemnités de chômage dès le 1er août 2021, plus particulièrement sur le point de savoir si les conditions relatives à la période de cotisation minimale sont remplies.

Le droit aux prestations dès le 7 mai 2020 ayant été tranché par décision du 22 septembre 2020, entrée en force faute d’opposition dans le délai de 30 jours prévu à cet effet par l’art. 52 LPGA, il excède l'objet du litige et ne peut être examiné ici.

5.             L’art. 8 LACI dispose que l’assuré a droit à l’indemnité de chômage s’il remplit les conditions relatives à la période de cotisation ou en est libéré (art. 13 et 14).

L’art. 9 LACI prévoit que des délais-cadres de deux ans s’appliquent aux périodes d’indemnisation et de cotisation, sauf disposition contraire de la loi (al. 1). Le délai-cadre applicable à la période de l’indemnisation commence à courir le premier jour où toutes les conditions dont dépend le droit à l’indemnité sont réunies (al. 2). Le délai-cadre applicable à la période de cotisation commence à courir deux ans plus tôt (al. 3).

Aux termes de l’art. 13 al. 1 LACI, celui qui, dans les limites du délai-cadre prévu à cet effet (art. 9 al. 3), a exercé durant douze mois au moins une activité soumise à cotisation remplit les conditions relatives à la période de cotisation.

L’art. 11 de l’ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02) précise que compte comme mois de cotisation, chaque mois civil, entier, durant lequel l’assuré est tenu de cotiser (al. 1). Les périodes de cotisation qui n’atteignent pas un mois civil entier sont additionnées. Trente jours sont réputés constituer un mois de cotisation (al. 2). Dans un tel cas, pour la conversion d'une journée de travail, on utilise le facteur 1.4 (arrêt du Tribunal fédéral 8C_541/2020 du 21 décembre 2020 consid. 5.3.6).

6.              

6.1 Le Conseil fédéral a pris plusieurs mesures en lien avec la pandémie, notamment en adoptant l’ordonnance sur les mesures dans le domaine de l’assurance-chômage en lien avec le coronavirus (COVID-19; ordonnance COVID-19 assurance-chômage - RS 837.033; ci-après : l’ordonnance).

6.2 Cette ordonnance, dans sa teneur en vigueur du 26 mars au 31 août 2020, prévoyait à l’alinéa premier de l’art. 8a que toute personne ayant droit à l’indemnité en vertu de la loi bénéficiait au maximum de 120 indemnités journalières supplémentaires. Le nombre maximum d’indemnités journalières actuel n’en était pas affecté. Dans sa teneur en vigueur au 1er juillet 2021 – applicable au présent litige conformément aux principes régissant le droit intertemporel (ATF 147 V 278 consid. 2.1) – l’art. 8a de l’ordonnance dispose que le délai-cadre d’indemnisation des assurés qui ont eu droit à 120 indemnités journalières au plus entre le 1er mars et le 31 août 2020 est prolongé de la durée pendant laquelle la personne assurée a eu droit aux indemnités journalières supplémentaires, mais de 6 mois au maximum (al. 2), et que la personne assurée, dont le délai-cadre d’indemnisation a été prolongé au sens de l’al. 2, a le droit, au besoin, à la prolongation du délai-cadre de cotisation si un nouveau délai-cadre d’indemnisation est ouvert. La durée de prolongation du délai-cadre de cotisation correspond à la durée de prolongation du délai-cadre d’indemnisation selon l’al. 2 (al. 3).

6.3 Le rapport explicatif du 20 août 2020 concernant la modification de l’ordonnance, publié par le Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR), relevait à son point 2.3 que l’art. 8a al. 2 et 3 permettait de garantir que personne n'arrive en fin de droits durant la période de validité de l’ordonnance et que les indemnités puissent réellement être versées. L'objectif consistait à empêcher que les personnes dont les chances de retrouver un emploi étaient rendues très mauvaises par la situation extraordinaire soient défavorisées. En raison de la durée limitée de l'ordonnance, le droit à 120 indemnités journalières supplémentaires au maximum prenait fin au 1er septembre 2020. Comme la prolongation du délai-cadre d'indemnisation prendrait également fin à cette date, l'objectif sous-jacent à la réglementation correspondante ne pourrait plus être mis en œuvre. Par exemple, les indemnités journalières ordinaires non demandées pendant la période COVID-19 (du 1er mars au 31 août 2020) ne pourraient éventuellement plus être perçues par les assurés, car ils auraient atteint la fin de leur délai-cadre. De plus, les assurés qui étaient au chômage durant la période COVID-19 n’avaient pu obtenir ni périodes de cotisation, ni gains intermédiaires pouvant être pris en compte en cas de nouveau chômage. Pour ces raisons, une prolongation symétrique du délai-cadre d'indemnisation et du délai-cadre de cotisation devait être rendue possible. C’était à cet effet que l'alinéa 2 de l'article 8a était modifié et un troisième alinéa introduit.

Le rapport illustrait ces modifications par les exemples suivants : l'assuré avait droit à la totalité des 120 indemnités journalières supplémentaires du 1er mars au 31 août 2020. Son délai-cadre d'indemnisation était prolongé de six mois (exemple 1). L'assuré s’était retrouvé sans emploi à partir du 1er mai 2020 et n'avait donc droit qu'à environ 80 indemnités journalières supplémentaires jusqu'au 31 août 2020. Son délai-cadre d'indemnisation était prolongé de quatre mois (exemple 2). La prolongation s’élevait au maximum à la durée de la période COVID-19 (six mois) ou à la durée pendant laquelle l’assuré avait droit à des indemnités journalières supplémentaires.

Au sujet de l’alinéa 3 nouveau, le rapport soulignait que lorsqu'un assuré était toujours sans emploi au terme de la prolongation du délai-cadre d'indemnisation ou s'il l’était à nouveau dans les deux ans, le délai-cadre de cotisation pour l'ouverture d'un nouveau délai-cadre — soit directement après le délai-cadre d'indemnisation précédent soit indirectement — était également prolongé au besoin. L'obtention d'un gain intermédiaire ou d'une période de cotisation était sensiblement plus difficile pour les personnes assurées qui étaient au chômage entre le 1er mars et le 31 août 2020. C’était pour cette raison que la durée du délai-cadre de cotisation de ces personnes était prolongée de la durée exacte dont avait été prolongé le délai-cadre d'indemnisation précédent en raison du droit à des indemnités journalières supplémentaires entre le 1er mars et le 31 août 2020. De ce fait, la prolongation était symétrique. Le délai-cadre de cotisation était prolongé manuellement et seulement au besoin, c’est-à-dire seulement si la personne assurée obtenait par ce moyen un droit à l'indemnité journalière ou un droit à un nombre plus élevé d'indemnités journalières.

6.4 L’ordonnance est fondée sur l’art. 17 de la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l’épidémie de COVID-19 (loi COVID-19 - RS 818.102).

Selon l’al. 1 let. c de cette disposition, le Conseil fédéral peut édicter des dispositions dérogeant à la LACI sur la prolongation des délais-cadres applicables à la période d’indemnisation et à la période de cotisation des assurés qui ont eu droit à 120 indemnités journalières au plus entre le 1er mars et le 31 août 2020.

7.             L’art. 8 al. 1 de la Constitution fédérale (Cst. – RS 101) prévoit que tous les êtres humains sont égaux devant la loi.

Une décision ou un arrêté viole le principe de l'égalité consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'elle ou il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer, ou qu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir s'il existe un motif raisonnable pour une distinction peut recevoir des réponses différentes suivant les époques et les idées dominantes. Le législateur dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans le cadre de ces principes (ATF 142 I 195 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1016/2019 du 5 octobre 2021 consid. 8.1).

8.             Aux termes de l’art. 190 Cst., le Tribunal fédéral et les autres autorités sont tenus d’appliquer les lois fédérales et le droit international.

L’obligation d’appliquer les lois fédérales selon l’art. 190 Cst. produit tant un effet direct qu’un effet indirect. Une norme qui figure dans un acte normatif inférieur à une loi fédérale au sens formel et qui reprend ou précise une règle se trouvant dans une telle loi est indirectement protégée par l’art. 190 Cst. En d’autres termes, le contenu d’une ordonnance du Conseil fédéral est déterminé par une loi fédérale. L’art. 190 Cst. produit dès lors un effet indirect par le biais d’une loi fédérale. S’agissant des ordonnances adoptées par le Conseil fédéral en réponse à la pandémie du coronavirus, les autorités politiques fédérales les ont inscrites dans le cadre légal de la loi COVID-19 à l’automne 2020. Ces ordonnances sont ainsi protégées, dans une large mesure et de manière indirecte, par l’art. 190 Cst. (Vincent MARTENET in Commentaire romand, Constitution fédérale, 2021, nn. 25, 31 et 35 ad art. 190 Cst.)

9.             En l’espèce, la recourante ne conteste pas qu’elle ne remplit pas les conditions prévues par la LACI en lien avec la période de cotisation pour prétendre l’octroi d’indemnités de chômage. Elle se prévaut cependant des dispositions particulières ancrées à l’art. 8a de l’ordonnance, affirmant qu’elles devraient également lui être appliquées.

9.1 Il n’est pas inutile ici de souligner que plusieurs tribunaux cantonaux se sont déjà penchés sur l’application de l’art. 8a de l’ordonnance.

Le tribunal des assurances sociales du canton de Zurich a ainsi tranché le cas d’une assurée qui ne remplissait pas les conditions liées au délai-cadre de cotisation lors de son inscription au chômage du 14 avril 2020, en retenant qu’à défaut de droit aux indemnités de chômage à cette date, elle ne pouvait se prévaloir de cette disposition (arrêt AL.2020.00174 du 2 octobre 2020 consid. 3.3).

Dans un arrêt du 3 janvier 2022 (ACH 301/21 - 3/2022), la Cour des assurances sociales du canton de Vaud a également nié le droit d’un assuré aux indemnités de chômage sollicitées dès le 1er novembre 2021 en raison d’une période de cotisation insuffisante, soulignant qu’il était douteux que cette période puisse être prolongée, dès lors que celui-ci n’était pas au chômage pendant la période visée par l’art. 8a de l’ordonnance. Elle a également confirmé le refus de verser des indemnités de chômage en raison d’une période de cotisation insuffisante, alors que l’assurée faisait valoir qu’elle n’avait pu cotiser car elle était bloquée à l’étranger en raison du confinement. La Cour a relevé qu’aucun allègement n’était prévu par la loi COVID-19 et l’ordonnance dans un tel cas (arrêt ACH 292/21 - 25/2022 du 16 février 2022).

Le Tribunal des assurances sociales du canton de Bâle-Ville a également retenu qu’un assuré qui ne remplissait pas les exigences liées à la période de cotisation ne pouvait se voir appliquer l’art. 8a de l’ordonnance, dès lors qu’il n’était pas au chômage le 1er mars 2021 (arrêt AL.2021.5 [SVG.2021.169] du 10 mai 2021 consid. 4.4).

Deux arrêts cantonaux se sont plus particulièrement penchés sur une éventuelle inégalité de traitement que l’art. 8a de l’ordonnance instaurerait entre les chômeurs ayant droit à des indemnités de chômage entre le 1er mars et le 31 août 2020 et les autres assurés. La justice vaudoise a considéré qu’il était justifié de traiter différemment une assurée qui avait épuisé son droit aux indemnités de chômage au 1er mars 2020 et une assurée qui pouvait encore prétendre de telles indemnités à cette date – ce qui conférait à cette dernière un droit aux indemnités de chômage supplémentaires prévues par l’art. 8a al. 1 de l’ordonnance – et que cela ne constituait pas une inégalité de traitement (arrêt de la cour des assurances sociales du canton de Vaud ACH 138/20 - 207/2021 du 15 novembre 2021 consid. 6b). Le Tribunal administratif du canton de Berne, dans le cas d’une assurée ayant épuisé son droit aux indemnités de chômage avant le 1er mars 2020, a retenu que la condition prévue pour prolonger le délai d’indemnisation conformément à l’art. 8a de l’ordonnance, soit la perception d’indemnités de chômage entre le 1er mars et le 31 août 2020, était une distinction reposant sur un critère objectif et ne relevait ainsi pas d’une inégalité de traitement par rapport aux autres assurés (arrêt 200 21 43 ALV du 19 mars 2021 consid. 4.3 et 4.4).

9.2 Il n’existe pas de raisons de s’écarter de la stricte application de l’art. 8a de l’ordonnance consacrée par la jurisprudence cantonale précitée.

En effet, le texte de cette disposition est clair et ne laisse pas de place à une interprétation plus large du cercle des bénéficiaires des indemnités supplémentaires. Par ailleurs, même s’il fallait admettre que l’art. 8a de l’ordonnance entraîne une inégalité de traitement par rapport aux assurés sans droit à des indemnités de chômage entre le 1er mars et le 31 août 2020, cela ne permettrait pas pour autant d’octroyer des indemnités supplémentaires ou des prolongations de délais à d’autres assurés. Eu égard à l’effet indirect de l’art. 190 Cst., la Cour de céans n’est pas fondée à s’écarter de l’ordonnance, adoptée sur la base d’une loi fédérale. En effet, lorsqu'une violation de la Constitution est constatée, la loi doit néanmoins être appliquée et le juge ne peut qu'inviter le législateur à modifier la disposition en cause (ATF 141 II 338 consid. 3.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_481/2009 du 24 novembre 2009 consid. 5.2).

La recourante souligne les difficultés rencontrées par les demandeurs d’emploi durant la pandémie. Si la Cour de céans n’est pas insensible à cet argument, le fait qu’il eut peut-être été opportun d’étendre les mesures de protection des chômeurs ne lui permet pas de faire abstraction des conditions légales et réglementaires auxquelles est subordonné le droit aux indemnités de chômage, quand bien même une autre solution aurait été concevable ou même préférable.

9.3 Par surabondance, on relèvera que même si l'on admettait que les prolongations de délais-cadres prévues à l’art. 8a de l’ordonnance soient appliquées en l'occurrence, cela n’aurait pas d’incidence sur le droit aux indemnités de chômage de la recourante. En effet, comme cela ressort sans équivoque du rapport explicatif, ce n’est pas le délai de cotisation précédant le délai-cadre d’indemnisation qui peut être prolongé, mais celui qui lui succède.

Enfin, même s’il fallait consentir une prolongation du délai-cadre de cotisation avant la seconde demande d’indemnités de chômage, cela ferait courir ce délai au plus tôt dès 1er février 2019. Or, entre le 1er février 2019 et le 31 juillet 2021, la recourante a cotisé moins de douze mois, puisqu’elle a travaillé sept mois entre le 1er octobre 2019 et le 30 avril 2020 et un peu plus de trois, du 9 avril 2021 au 31 juillet 2021, ce qui représente une durée totale de cotisation qui reste en toute hypothèse insuffisante pour ouvrir droit aux prestations.

9.4 Compte tenu de ces éléments, la décision de l’intimée, conforme au droit, doit être confirmée.

10.         Le recours est rejeté.

La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le