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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3761/2021

ATAS/499/2022 du 01.06.2022 ( AI )

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3761/2021 ATAS/499/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Ordonnance d’expertise du 2 juin 2022

6ème Chambre

 

En la cause

 

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Mathilde RAM-ZELLWEGER

 

 

recourant

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1974, titulaire d’une autorisation d’établissement C, originaire de Tunisie, a travaillé comme magasinier pour la société B______ de juin 2001 à mars 2005, puis comme chauffeur-livreur de 2010 à 2012, puis comme chauffeur indépendant de 2017 à 2018.

b. Le 19 janvier 2005, l’assuré a subi une arthrotomie para-patellaire interne du genou gauche avec greffe du cartilage, suite à un accident du 1er avril 2002.

B. a. Par décision du 24 août 2012, l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI) a alloué à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er juin au 30 septembre 2005, compte tenu d’une capacité de travail nulle dès le 22 juin 2004 et de 100% dès juillet 2005 dans une activité adaptée (pas de port de charges de plus de 10 kg, pas de position debout prolongée, nécessité d’alterner les positions assise et debout, pas de montée et descente répétitive d’escaliers ou échelle, pas de position accroupie, à genoux ou de déplacement sur sol irrégulier).

b. Le 13 janvier 2020, l’assuré a déposé une nouvelle demande de prestations, en mentionnant une atteinte aux genoux et aux épaules.

c. Le docteur C______, FMH médecine générale, a attesté d’une incapacité de travail totale depuis décembre 2016, en raison d’arthropathie et tendinopathie fissuraire des épaules et d’arthrotomie sévère des genoux.

d. Le 20 janvier 2020, la doctoresse D______, FMH orthopédie et traumatologie de l’appareil locomoteur, a attesté de lésions aux deux épaules (capsulite et bursite avec arthrose des deux épaules), une hernie discale C6-C7 et de l’arthrose aux genoux ainsi qu’un problème hépatique.

e. Le 26 mai 2020, le Dr C______ a mentionné une volumineuse hernie cervicale C6-C7 droite, une arthrose invalidante des deux genoux, une arthrose lombaire étagée, une arthropathie dégénérative et une tendinopathie fissuraire des deux épaules.

f. Le 30 juin 2020, il a précisé que la symptomatologie douloureuse s’était péjorée depuis le 26 juin 2018 et que la capacité de travail était nulle dans toute activité.

g. Le 28 août 2020, la Dresse D______ a mentionné une capacité de travail de 4 h par jour dans une activité adaptée.

h. A la demande de l’OAI, le service médical d'expertise E______ a rendu, le 18 mai 2021, un rapport d’expertise pluridisciplinaire (docteurs F______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur, G______, FMH médecine interne générale et H______, FMH psychiatrie et psychothérapie).

Il n’y avait pas de pathologie psychiatrique. Les diagnostics somatiques suivants avaient une incidence sur la capacité de travail : gonalgies gauches sur arthrose fémoro-patellaire après pris de greffe pour Mosaïque plastie du condyle fémoral interne pour ostéonécrose en 2005, gonalgies droites sur arthrose débutante, lombalgies basses depuis 2018 avec des discopathies correspondantes à l’âge, cervicalgies avec hernie discale C6-C7 droite, sans trouble neurologique et dyschromatopsie sur l’axe rouge-vert diagnostiquée en 2002.

Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : alternance de position toutes les 30 minutes, pas de port de charges de plus de 10 kg, pas d’échelle, pas d’échafaudage, pas de marche en terrain inégal, pas de montée et descente répétitives d’escaliers, échelles, position accroupie, à genoux, pas de flexion antérieure du rachis, pas d’activité en-dessus de la ceinture scapulaire et dyschromatopsie sur l’axe rouge-vert.

La capacité de travail était de 50% dans l’activité de chauffeur de taxi depuis fin 2018 et de 100% dans une activité adaptée.

i. Le 21 mai 2021, le service médical régional (ci-après : SMR) a estimé que l’expertise de E______ était probante et a retenu une capacité de travail de 50% comme chauffeur de taxi dès le 1er décembre 2018 et de 100% dans une activité adaptée depuis toujours. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : alternance de position assis-debout toutes les 30 minutes, pas de position penché en avant ou en porte-à-faux, pas de mouvement répété en rotation ou en flexion-extension du tronc, pas de port de charges de plus de 10 kg, pas d’échelle, pas d’échafaudage, pas de marche en terrain inégal, pas de station debout et de marche prolongée, pas de montée et descente répétitives d’escaliers, pas de position accroupie ou à genoux, pas de position avec la tête penchée en avant ou en rotation forcée, pas de mouvement répété de rotation ou de flexion-extension de la tête, pas d’activité avec les bras au-dessus de la ceinture scapulaire, pas de conduite de transport en commun, de pilotage aéronautique ou nautique et pas de manipulation de fils électriques de couleur.

j. Le 12 août 2021, l’OAI a établi un rapport d’enquête pour activité professionnelle indépendante, lequel a pris en compte un revenu sans invalidité de magasinier et un revenu d’invalide calculé selon l’ESS 2018 et a conclu à un degré d’invalidité nul.

k. Par projet de décision du 24 août 2021, l’OAI a rejeté la demande de prestations.

C. a. Le 3 novembre 2021, l’assuré, représenté par une avocate, a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision du 1er octobre 2021, en concluant à son annulation et à l’octroi d’une rente entière d’invalidité dès le 1er décembre 2018.

Il était en totale incapacité de travail depuis le 1er décembre 2018, comme l’attestait le Dr C______ (rapport non daté, transmis le 29 septembre 2021). En particulier, il ne pouvait exercer ni comme magasinier, ni comme chauffeur de taxi.

b. Le 29 novembre 2021, le SMR a observé que les avis des Drs C______ et D______ n’amenaient pas d’éléments nouveaux et que la capacité de travail totale dans une activité adaptée pouvait être confirmée.

c. Le 14 décembre 2021, l’OAI a estimé qu’une mesure d’orientation était indiquée en vue de déterminer les cibles professionnelles.

d. Le 14 février 2022, l’OAI a conclu à la confirmation d’une capacité de travail de 100% et au renvoi du dossier pour cibler les activités adaptées par le biais d’une orientation professionnelle.

e. Le 14 février 2022, l’assuré a répliqué, en observant qu’il convenait d’effectuer l’orientation professionnelle d’abord et de statuer ensuite sur sa capacité de travail.

Il a produit :

-        un rapport du Dr I______, FMH rhumatologie, du 10 décembre 2021 retenant des gonalgies bilatérales prédominant à gauche, une arthrose légère à modérée bilatérale fémoro-patellaire ainsi que du condyle fémoro-tibial interne, une obésité, des lombalgies communes chroniques, des cervicalgies chroniques avec des cervicobrachialgies droites dans un contexte de hernie discale C6-C7 droite, au contact de la racine C7 droite, des douleurs des deux épaules avec des signes en faveur d’une tendinopathie de la coiffe des rotateurs et d’un conflit sous-acromial, avec à l’échographie un épaississement de la bourse sous-acromio-deltoïdienne des deux épaules. Dans un emploi lui permettant de changer de positions, de ne pas marcher de façon prolongée, de ne pas rester debout de façon prolongée, de ne pas s’accroupir, de ne pas travailler en position agenouillée, de ne pas devoir utiliser des escaliers ni une échelle, de ne pas porter de charges de plus de 5 kg, de ne pas effectuer des travaux avec les bras en l’air, de ne pas effectuer des travaux manuels nécessitant des gestes précis, il subsistait une capacité de travail, qui pouvait être évaluée à 50% environ ;

-        un rapport du docteur J______, FMH médecine physique et réadaptation, du 4 février 2022 observant qu’il rejoignait l’avis du Dr I______ et qu’une tentative de réorientation professionnelle était nécessaire dans une activité légère à un taux de 40 à 50% ;

-        un rapport de la doctoresse K______, FMH psychiatrie et psychothérapie, du 7 février 2002, mentionnant un suivi depuis le 14 décembre 2021 pour un état dépressif sévère et une capacité de travail nulle.

f. La chambre de céans a informé les parties le 2 mai 2022 qu’elle entendait ordonner une expertise judiciaire qui serait confiée au Professeur L______, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur.

g. Le 17 mai 2022, l’OAI s’est opposé à l’ordonnance d’une expertise judiciaire, tout en mentionnant qu’il n’avait pas de motif de récusation à l’encontre de l’expert.

h. Le 24 mai 2022, le recourant a indiqué qu’il n’avait pas d’objection quant à la nomination du Pr L______, mais qu’il souhaitait une expertise portant sur toutes ses pathologies. Il a requis une modification de certaines questions de la mission d’expertise.

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

2.             Le litige porte sur le droit du recourant à une rente d’invalidité, singulièrement sur l’évaluation de sa capacité de travail.

3.             Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705). En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur ancienne teneur.

4.             En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

5.              

5.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

5.2 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

5.3 Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

5.4 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

5.5 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

6.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

7.             Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

8.             En l’occurrence, l’intimé s’est fondé sur l’expertise de E______, laquelle retient une capacité de travail du recourant de 100% dans une activité adaptée, pour refuser au recourant tout droit à des prestations. Cependant, du point de vue orthopédique, les conclusions du Dr F______ sont sérieusement mises en doute par les avis des Drs D______, I______ et J______, lesquels considèrent que la capacité de travail du recourant, compte tenu de ses limitations fonctionnelles, est d’au maximum 50%.

En présence d’évaluations contraires, il se justifie d’ordonner une expertise judiciaire orthopédique, laquelle sera confiée au professeur L______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur.

S’agissant des remarques du recourant sur la mission d’expertise, il convient de relever, qu’en l’état, il ne se justifie pas d’ordonner une expertise pluridisciplinaire, que le nom du Dr J______ sera ajouté au point I.B. mais pas celui de la Dresse K______, dès lors qu’elle est psychiatre, que les questions 6.2.2 et 6.4 seront modifiées dans le sens requis mais, qu’en revanche, les questions 7.2 et 10 seront maintenues, dès lors que l’expert n’a pas une mission de soins.

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

 

Préparatoirement :

I. Ordonne une expertise médicale. La confie au professeur L______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur à Genève. Dit que la mission d’expertise sera la suivante :

A. Prendre connaissance du dossier de la cause.

B. Si nécessaire prendre tous renseignements auprès des médecins ayant traité la personne expertisée, notamment les Drs D______, C______, I______ et J______.

C. Examiner la personne expertisée et, si nécessaire, ordonner d'autres examens.

D. Etablir un rapport détaillé comprenant les éléments suivants :

1. Anamnèse détaillée

2. Plaintes de la personne expertisée

3. Status et constatations objectives

4. Diagnostics

4.1 Avec répercussion sur la capacité de travail

4.1.1 Dates d'apparition

4.2 Sans répercussion sur la capacité de travail

4.2.2 Dates d'apparition

5. Limitations fonctionnelles

5.1. Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic

5.1.2 Date d'apparition

6. Capacité de travail

6.1 La personne expertisée est-elle capable d’exercer son ancienne activité lucrative ?

6.1.2 Si non, ou seulement partiellement, pourquoi ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?

6.1.3 Depuis quelle date sa capacité de travail est-elle réduite/ nulle ?

6.2 La personne expertisée est-elle capable d’exercer une activité lucrative adaptée à ses limitations fonctionnelles ? 

6.2.1 Si non ou dans une mesure restreinte, pour quels motifs ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?

6.2.2 Si oui, à quel taux ? Depuis quelle date ?

6.3 Des mesures médicales sont-elles nécessaires préalablement à la reprise d’une activité lucrative ? Si oui, lesquelles ?

6.4 Comment la capacité de travail de la personne expertisée a-t-elle évolué depuis décembre 2018 ?

6.5 Quel est votre pronostic quant à l’exigibilité de la reprise d’une activité lucrative ?

6.6 La personne expertisée est-elle limitée dans ses activités du quotidien ? Si oui, dans quelle mesure ?

7. Traitement

7.1 Examen du traitement suivi par la personne expertisée et analyse de son adéquation.

7.2 Propositions thérapeutiques et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée

8. Appréciation d'avis médicaux du dossier

8.1 Etes-vous d'accord avec l'avis du Dr F______ (expertise E______ du 18 mai 2021) ? En particulier avec les limitations fonctionnelles retenues, le constat d’une atteinte orthopédique légère et l'estimation d'une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée depuis toujours ? Si non, pourquoi ?

8.2 Etes-vous d’accord avec les avis de la Dresse D______ du 20 août 2020, du Dr I______ du 10 décembre 2021 et du Dr  J______ du 4 février 2022 ? En particulier avec les limitations fonctionnelles constatées et l’estimation d’une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée ? Si non, pourquoi ?

9. Quel est le pronostic ?

10. Des mesures de réadaptation professionnelle sont-elles envisageables ?

11. Faire toutes autres observations ou suggestions utiles.

 

 

 

II. Réserve le sort des frais jusqu’à droit jugé au fond.

 

 

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties le