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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3781/2021

ATAS/287/2022 du 23.03.2022 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3781/2021 ATAS/287/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 23 mars 2022

4ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à MEYRIN, représenté par le syndicat UNIA

 

 

recourant

 

contre

UNIA CAISSE DE CHOMAGE, case postale 1479, LAUSANNE

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né le ______ 1969, est entré au service de la société horlogère B______ SA (ci-après : l’employeur) le 1er septembre 2005. Engagé dans un premier temps en qualité de monteur sur boîtes, il occupait, depuis le 1er février 2013, la fonction
de responsable de l’îlot atelier GSH (gestion stock habillement), rémunérée
CHF 8’241.- par mois (treize fois l’an) en 2020.

b. Le 7 janvier 2020, l’employeur lui a notifié une lettre de « congé sous réserve de modification ». Se référant à l’entretien qui avait eu lieu le même jour – en présence de l’assuré, de deux supérieurs hiérarchiques et d’une employée des ressources humaines – et aux raisons qui avaient été invoquées à cette occasion, à savoir « l’écart entre votre contribution, en qualité de responsable îlot GSH, à l’évolution de cette activité dans le contexte de changement de la Division habillement et les attendus dans votre poste », l’employeur a confirmé à l’assuré son changement d’activité au poste d’opérateur au sein de la division habillement avec effet au 1er février 2020. Cette modification du poste serait accompagnée d’un passage du statut de cadre de 1er niveau à celui de collaborateur et assortie d’une diminution de salaire à CHF 7’216.- (treize fois l’an), pour un taux d’occupation à 100% dès le 1er mai 2020. Contractuellement, le délai de congé était de trois mois pour la fin d’un mois. Toutefois, pour permettre, le cas échéant, à l’employeur de se réorganiser, celui-ci a invité l’assuré à lui faire connaître sa décision par écrit le plus rapidement possible mais au plus tard jusqu’au 15 janvier 2020. Enfin, il était précisé qu’en cas de refus ou de non réponse de l’assuré à cette date, le contrat serait rompu et le salaire versé jusqu’au 30 avril 2020, date à laquelle il serait libre de tout engagement vis-à-vis de l’employeur.

c. Par courrier du 23 janvier 2020, l’assuré, représenté par le syndicat UNIA, s’est référé à un entretien qui s’était déroulé la veille entre lui-même et l’employeur, lors duquel ce dernier avait allégué que l’assuré n’avait pas les compétences pour mettre en œuvre les changements à venir dans l’entreprise, à savoir l’introduction prochaine d’une nouvelle méthode de gestion de production, dénommée « Lean ». Tout en relevant que l’employeur n’avait pas précisé au cours de l’entretien du
22 janvier 2020 en quoi les compétences de l’assuré n’étaient pas compatibles avec ladite méthode, ce dernier a soutenu en substance que la familiarisation avec cette méthode ne figurait pas parmi les objectifs qu’on lui avait demandé d’atteindre lors des entretiens d’évaluation périodiques et que pour le surplus, les objectifs qu’on lui avait assignés avaient été atteints. Aussi l’assuré a-t-il indiqué qu’il ne comprenait pas les raisons du congé-modification du 7 janvier 2020, tout en rappelant qu’il avait proposé, lors de l’entretien du 22 janvier 2020, que l’employeur lui attribue un « poste au quai » pour un salaire de CHF 7’720.- bruts par mois, mais que cette proposition avait été déclinée par courriel du 22 janvier 2020 de l’employeur faute de poste correspondant à pourvoir. Sur la base de ces éléments, l’assuré a fait part de son refus d’accepter l’offre de devenir opérateur au sein de la division habillement de l’entreprise et réitéré sa volonté de rester au service de l’employeur « si un poste devait se libérer au quai ».

d. Par pli du 30 janvier 2020, l’employeur a confirmé les modalités de fin des rapports de travail évoquées dans son précédent courrier du 7 janvier 2020 et rappelé à l’assuré que le dernier jour de son contrat serait le 30 avril 2020, tout en précisant que le dernier jour de travail effectif avait été fixé au 23 janvier 2020, date à laquelle l’employeur avait libéré l’assuré de son obligation de travailler.

e. Par la suite, la fin du contrat de travail, initialement fixée au 30 avril 2020, a
été reportée au 28 février 2021 en raison d’une suspension du délai de congé due à une incapacité de travail de l’assuré à partir du 22 janvier 2020.

f. Le 10 février 2021, l’assuré s’est inscrit à l’office cantonal de l’emploi
(ci-après : l’OCE) et a choisi la caisse de chômage UNIA (ci-après : la caisse ou l’intimée) pour le versement des indemnités journalières qui lui seraient octroyées durant le délai-cadre d’indemnisation courant du 1er mars 2021 au 28 février 2023.

g. Par pli du 12 mars 2021, la caisse a informé l’employeur que l’assuré avait déposé une demande d’indemnité auprès d’elle. Afin de pouvoir compléter les informations en sa possession et évaluer si le chômage était imputable à une faute de l’assuré, la caisse a invité l’employeur à compléter un questionnaire.

h. Le 16 mars 2021, l’employeur a retourné ce questionnaire en indiquant que les raisons qui avaient conduit au licenciement de l’assuré consistaient dans « l’écart entre sa contribution en qualité de responsable, à l’évolution de cette activité
dans le contexte de changement de la division habillement dans laquelle [celui-ci] travaillait ». L’employeur a mentionné, en outre, que l’assuré avait fait l’objet d’avertissements écrits et oraux à l’occasion non seulement d’entretiens annuels, mais aussi d’une médiation et d’un audit de l’atelier. Interrogé sur la suite donnée aux « avertissements », l’employeur a répondu qu’il avait proposé à l’assuré un repositionnement dans l’entreprise comme opérateur, dans sa lettre de congé sous réserve de modification du 7 janvier 2020.

i. Le 6 avril 2021, la caisse a écrit à l’assuré pour lui annoncer que pour pouvoir déterminer si son chômage était fautif, elle avait besoin non seulement de savoir pourquoi il n’avait pas accepté le changement de contrat proposé mais aussi, qu’il complète et lui retourne un questionnaire annexé à son courrier.

j. Le 9 avril 2021, l’assuré a indiqué dans ledit questionnaire que la lettre de congé-modification lui avait été notifiée le 7 janvier 2020 et qu’elle prévoyait un délai de réflexion de sept jours – que l’employeur avait prolongé de sept jours supplémentaires suite à l’intervention du syndicat UNIA. Interrogé sur le point de savoir s’il avait donné son congé pour raisons de santé, l’assuré a répondu par la négative en précisant que ce n’était pas lui qui avait résilié le contrat et qu’après la réunion du 22 janvier 2020, il avait fait part plusieurs fois à l’employeur – mais en vain – de son souhait de rester à son service, quitte à subir une diminution
de salaire de CHF 1’000.-, à la condition toutefois d’être placé dans une autre division de l’entreprise. Pour le surplus, l’assuré a produit notamment :

-          un courrier du 4 décembre 2015 par lequel l’employeur rappelait à l’assuré qu’il lui avait remis, le 25 juin 2015, une demande d’amélioration de ses performances professionnelles et qu’après analyse desdites performances jusqu’au mois de novembre 2015, celui-ci avait atteint les différents objectifs décrits dans cette demande. Dès lors, l’employeur comptait sur l’engagement de l’assuré, ses compétences professionnelles et ses qualités personnelles « pour garder ce niveau de satisfaction » ;

-          un courrier du 13 janvier 2020 à l’assuré par lequel l’employeur indiquait, d’une part, qu’il acceptait, à la demande de celui-ci, que le délai de réponse indiqué dans le courrier du 7 janvier 2020 fût prolongé du 15 au 22 janvier 2020 et, d’autre part, que le motif de résiliation mentionné dans le courrier
du 7 janvier 2020 – à savoir « l’écart entre [sa] contribution, en qualité de responsable îlot GSH, à l’évolution de cette activité dans le contexte de changement de la division habillement et les attendus de [son] poste » – exprimait, en d’autres termes, les difficultés de management et de pilotage de l’atelier depuis 2015 (cf. courrier spécifique du 25 juin 2015, entretiens réguliers avec la hiérarchie et accompagnement par la cellule formation, développement et changement) ainsi que l’atteinte des objectifs demandés, mentionnés dans les évaluations de 2016, 2017 et 2018. Enfin, l’employeur relevait également « un manque de remise en question de l’existant et de capacité [de l’assuré] à améliorer la performance de [son] activité » ;

-          une prise de position de l’assuré dans laquelle celui-ci indiquait en substance avoir dû faire face, à partir de 2015 et durant cinq ans, à des problèmes
de harcèlement et de tensions entre les collaboratrices placées sous sa responsabilité, lesquels avaient conduit à des absences (non remplacées) au sein de son équipe, de sorte qu’il avait été éprouvé par un stress mental considérable – tant sur le plan professionnel que privé – et qu’il lui avait été d’autant plus difficile d’atteindre les objectifs demandés que la hiérarchie n’avait pas été à l’écoute des problèmes qu’il lui avait signalés. C’étaient-là les causes principales de sa demande d’être déplacé dans une autre division
de l’entreprise pour « pouvoir finalement retrouver le plaisir au travail ».

k. Par pli du 9 avril 2021, l’OCE a annulé le dossier de demandeur d’emploi de l’assuré avec effet au 11 avril 2021, motif pris qu’il avait retrouvé en emploi à plein temps à compter du 12 avril 2021.

B. a. Par décision du 16 avril 2021, la caisse a considéré que l’assuré avait adopté intentionnellement un comportement en vue d’être licencié puisqu’il savait que son refus, exprimé le 23 janvier 2020, d’accepter le congé-modification du
7 janvier 2020, déboucherait sur un licenciement. Comme, par ailleurs, les nouvelles conditions contractuelles, qui représentaient une baisse de rémunération d’environ 12% pour le même taux d’occupation (100%), restaient convenables et ne représentaient pas non plus un abus de la part de l’employeur, l’assuré s’était retrouvé sans travail par sa faute. Cependant, en tenant compte de toutes les circonstances du cas, notamment de la longue période d’incapacité de travail découlant de la tentative de l’employeur de modifier les conditions contractuelles qui étaient celles de l’assuré, de son ancienneté dans l’entreprise, de la qualité de son travail « reconnue en opposition à la convenance des nouvelles conditions contractuelles », l’assuré n’avait certes pas commis de faute grave mais celle-ci était néanmoins de gravité moyenne et justifiait une suspension de son droit à l’indemnité pour une durée de 18 jours.

b. Le 14 mai 2021, l’assuré, assisté du syndicat UNIA, a formé opposition à cette décision en soutenant en substance que son refus d’accepter le contrat de travail proposé par l’employeur n’était pas dû à la rémunération proposée, dont la baisse était tout de même significative, mais découlait surtout des problèmes rencontrés depuis plusieurs années au sein de son service (division habillement), où il avait subi un mobbing dès 2015, rendant inexigible la poursuite de son activité au sein de cette division, même en tant que simple collaborateur. Enfin, l’assuré a précisé que des démarches étaient en cours, visant à assigner l’employeur devant le Tribunal des Prud’hommes.

c. Le 21 mai 2021, l’assuré a formé, devant le Tribunal des Prud’hommes, une requête de conciliation contre l’employeur, concluant à la condamnation de celui-ci à lui payer notamment la somme brute de CHF 59’320.50 avec intérêts à 5% l’an dès le 1er mars 2021 à titre d’indemnité pour résiliation abusive de son contrat de travail.

d. Par pli du 6 septembre 2021 à l’assuré, la caisse a indiqué avoir pris acte de son opposition du 14 mai 2021, en particulier des allégations de mobbing dès l’année 2015. Aussi a-t-elle demandé pour quelle(s) raison(s) l’assuré n’en avait pas fait part à l’employeur, soit aux responsables et/ou aux ressources humaines dès l’année 2015, tout en l’invitant à transmettre tout élément permettant de prouver le mobbing qu’il affirmait avoir subi.

e. Le 17 septembre 2021, l’assuré a répondu à la caisse que la problématique de mobbing était connue et qu’il l’avait signalée à plusieurs reprises à son supérieur avant de s’adresser aux ressources humaines à ce même sujet. En ce qui concernait les éléments de preuve demandés, l’assuré a renvoyé aux explications développées dans sa requête de conciliation du 21 mai 2021 en relevant que les déclarations faites dans cette écriture étaient étayées majoritairement par des offres de preuve par témoins et que la problématique du mobbing avait été également relayée par les médias.

f. Le 21 septembre 2021, la caisse a rendu une décision de suspension de la procédure d’opposition, prévoyant que cette dernière serait reprise dès que la caisse aurait connaissance d’une décision de justice entrée en force réglant la question de la résiliation des rapports de travail. En effet, l’examen de la demande par le Tribunal était susceptible d’apporter des éléments d’appréciation à prendre en considération dans le traitement de l’opposition à la décision du 16 avril 2021.

g. Par pli du 28 septembre 2021, l’assuré a fait savoir à la caisse que dans le cadre de la procédure prud’homale qui l’opposait à l’employeur, un accord avait finalement été trouvé, en exécution duquel il s’était vu verser la somme la somme de CHF 16’514.- bruts. En attestait un « décompte de salaire » du même montant, daté du mois de septembre 2021, prévoyant le versement de CHF 15’549.10 sur
le compte de l’assuré après déduction des charges sociales. Enfin, l’assuré a précisé que les auditions de témoins n’auraient par conséquent pas lieu mais qu’il espérait que l’accord trouvé suffirait à convaincre la caisse que l’ancien employeur reconnaissait ses torts.

h. Par décision du 1er octobre 2021, la caisse a levé la suspension de la procédure et rejeté l’opposition du 14 mai 2021, motif pris qu’il n’était pas de son ressort
de se prononcer sur le bien-fondé de la motivation invoquée par l’employeur à l’appui du congé-modification. Par ailleurs, elle ne pouvait retenir que le versement d’un montant de CHF 15’549.10 en faveur de l’assuré démontrait une quelconque faute de la part de l’employeur dès lors que le litige – opposant l’assuré à la caisse – portait sur le refus d’accepter le congé modification proposé par l’employeur. Dans la mesure où l’emploi proposé pouvait être qualifié de convenable, c’était de manière fautive que l’assuré l’avait refusé. Cependant, compte tenu de la présence de circonstances atténuantes, plus précisément de l’ancienneté de l’assuré au sein de l’entreprise, la caisse avait retenu une faute de gravité moyenne en lieu et place d’une faute grave. Étant donné que les arguments développés par l’assuré dans son opposition ne permettaient pas de modifier cette appréciation, la décision du 16 avril 2021 devait être confirmée.

C. a. Le 3 novembre 2021, l’assuré a saisi la chambre des assurances sociales de
la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) d’un recours contre cette décision, concluant principalement à son annulation et, subsidiairement, à une réduction de la sanction prononcée à son encontre.

À l’appui de ses conclusions, il a fait valoir en substance avoir refusé le congé-modification du 7 janvier 2020 pour des raisons excusables et avoir entrepris toutes les démarches nécessaires à la reconnaissance du caractère abusif de son licenciement et obtenu, de la part de l’employeur, une indemnité en exécution de l’accord conclu avec ce dernier.

b. Par réponse du 23 novembre 2021, l’intimée a conclu au rejet du recours en renvoyant aux arguments développés dans la décision attaquée.

c. Le 24 novembre 2021, la chambre de céans a transmis une copie de ce courrier au recourant, lui a accordé un délai au 15 décembre 2021 pour venir consulter les pièces du dossier tout en lui offrant la possibilité, dans ce même délai, de faire part de ses remarques en y joignant toutes pièces utiles.

d. En l’absence de nouvelle écriture du recourant, la cause a été garder à juger.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du
6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI – RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension du droit du recourant à l’indemnité de chômage, durant 18 jours, en raison de son refus de faire dépendre la continuation de ses rapports de travail avec l’employeur de la conclusion d’un nouveau contrat de travail proposé par ce dernier.

4.             Il faut déterminer en premier lieu, si l’on peut reprocher un manquement au recourant.

4.1 En vertu de l’art. 30 al. 1 let. a LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu lorsqu’il est établi que celui-ci est sans travail par sa propre faute.

Aux termes de l’art. 44 al. 1 de l’ordonnance sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 31 août 1983 (OACI – RS 837.02), est notamment réputé sans travail par sa propre faute l’assuré qui par son comportement, en particulier par la violation de ses obligations contractuelles, a donné à son employeur un motif de résiliation de son contrat de travail (let. a) ou qui a résilié lui-même le contrat de travail, sans avoir été préalablement assuré d’obtenir un autre emploi, sauf s’il ne pouvait être exigé de lui qu’il conservât son ancien emploi (let. b).

4.2 Selon la jurisprudence, la « violation [par l’assuré] de ses obligations contractuelles » n’est mentionnée à l’art. 44 al. 1 let. a OACI qu’à titre exemplatif comme l’un des comportements pouvant donner à l’employeur un motif de résiliation du contrat de travail. En d’autres termes, il n’est pas nécessaire que l’assuré ait violé ses obligations contractuelles de travail pour qu’une suspension de son droit à l’indemnité de chômage puisse lui être infligée (arrêt du Tribunal fédéral C 254/06 du 26 novembre 2007 consid. 4.2). Il suffit que le comportement à l’origine de la résiliation ait pu être évité si l’assuré avait fait preuve de la diligence voulue, en se comportant comme si l’assurance n’existait pas (ATF 112 V 242 consid. 1) Pour qu’une sanction se justifie, il faut que le comportement
de l’assuré ait causé son chômage. Un tel lien fait défaut si la résiliation est fondée essentiellement sur un autre motif que le comportement du travailleur. Il est
par ailleurs indifférent que le contrat de travail ait été résilié de façon immédiate
et pour de justes motifs ou à l’échéance du congé légal ou contractuel. Il suffit
que le comportement à l’origine de la résiliation ait pu être évité si l’assuré
avait fait preuve de la diligence voulue, comme si l’assurance n’existait pas.
Le comportement reproché doit toutefois être clairement établi (ATF 112 V 242 consid. 1; arrêt du Tribunal fédéral 8C_370/2014 11 juin 2015 consid. 2.2; Thomas NUSSBAUMER, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Arbeitslosenversicherung, vol. XIV, 3ème éd. 2016, p. 2515 n. 837). En outre, il est nécessaire, en application de l’art. 20 let. b de la Convention n° 168 du 21 juin 1988 concernant la promotion de l’emploi et la protection contre le chômage
(RS 0.822.726.8), que l’assuré ait délibérément contribué à son renvoi, c’est-à-dire qu’il ait au moins pu s’attendre à recevoir son congé et qu’il se soit ainsi rendu coupable d’un dol éventuel (arrêt du Tribunal fédéral 8C_268/2015 du 6 août 2015 consid. 4.2 et les références). Le dol simple entraîne a fortiori une sanction (cf. Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 24 ad art. 30 LACI).

4.3.1 Parmi les comportements tombant sous l’art. 44 al. 1 let. a OACI figure notamment le fait pour l’assuré d’amener son employeur à résilier le contrat
de travail qui les lie en raison du refus d’une modification contractuelle exigible (arrêt du Tribunal fédéral 8C_829/2009 du 17 décembre 2009 consid. 2 ; NUSSBAUMER, op. cit., p. 2515, n. 827 et les réf.). Le droit du travail distingue deux types de congé-modification. Le congé-modification au sens étroit se caractérise par le fait qu’une partie résilie le contrat, mais accompagne sa déclaration de l’offre de poursuivre les rapports de travail à des conditions modifiées. En revanche, dans le congé-modification au sens large, les deux actes juridiques ne sont pas immédiatement couplés; une partie reçoit son congé
parce qu’elle n’a pas accepté une modification consensuelle des obligations contractuelles. Dans cette situation, le risque que le licenciement soit considéré comme un congé-représailles, abusif conformément à l’art. 336 al. 1 let. d CO, est naturellement plus important. Qu’il soit pris dans son acception étroite ou large,
le congé-modification ne doit pas être par principe qualifié d’abusif mais il
peut l’être notamment lorsque le travailleur est licencié parce qu’il n’a pas accepté des modifications du contrat qui devaient entrer en vigueur immédiatement, soit avant l’expiration du délai de congé (cf. ATF 123 III 246 consid. 3b et 4a). La résiliation est également abusive lorsqu’elle sert de moyen de pression pour imposer au travailleur une modification défavorable du contrat, sans qu’il existe des motifs économiques liés à l’exploitation de l’entreprise ou aux conditions du marché (ATF 125 III 70 consid. 2a; 123 III 246 consid. 3b et les références). Un congé-modification sera en outre qualifié de congé-représailles, abusif, lorsqu’il est signifié au salarié parce que celui-ci refuse de conclure un nouveau contrat qui viole la loi, une convention collective ou un contrat-type applicables (arrêt du Tribunal fédéral 4C.282/2006 du 1er mars 2007 consid. 4.2 et les réf.). Lors de
la mise en œuvre de la modification proposée, le travailleur devra bénéficier
d’un délai de réflexion suffisant pour lui permettre de se déterminer en toute connaissance de cause et après avoir pu prendre conseil s’il le souhaite. Un délai de réflexion trop bref est susceptible de rendre le congé-modification abusif quant à sa forme (GUYOT/ JACCARD/ KERN/ ZAPPELLA, Le contrat de travail,
2ème éd. 2010, n. 514 ; Werner GLOOR, Le congé-modification et l’acceptation de l’offre modificative abusive, in DTA 2008, p. 261).

4.3.2 Il importe cependant de souligner que les critères d’admissibilité d’une modification du contrat de travail sont différents de ceux qui déterminent l’admissibilité d’un poste de travail pour un chômeur, ceux-ci étant définis à l’aune de la notion, plus étroite, de « travail convenable » de l’art. 16 LACI. Des recoupements sont toutefois possibles ; ainsi, ce que le juge des assurances sociales considère comme travail (ou proposition) non convenable, le sera à plus forte raison aussi pour le juge prud’homme. Autrement dit, s’avère abusive une offre modificative qui d’emblée tombe dans un des cas de travail non-convenable énoncés à l’art. 16 al. 2 LACI (cf. Werner GLOOR, op. cit., pp. 259-260 et les références). Dans le domaine de l’assurance-chômage, la jurisprudence part ainsi du principe que même en cas de modification sensible du contrat, le travailleur doit accepter les nouvelles conditions de travail dans l’attente de pouvoir retrouver un autre emploi correspondant mieux à ses attentes (arrêt du Tribunal fédéral 8C_510/2017 du 22 février 2018 consid. 3.1 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 28 ad art. 30 LACI).

En tant que l’art. 16 LACI dispose qu’en règle générale, l’assuré doit accepter immédiatement tout travail en vue de diminuer le dommage, cette disposition institue, à son al. 1er, une présomption selon laquelle tout travail est en principe réputé convenable, à moins que l’une des exceptions exhaustivement énumérées à l’al. 2 soit réalisée (ATF 124 V 63 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 133/03 du 29 octobre 2003 consid. 3.1). Une mauvaise ambiance de travail ou des tensions entre la personne assurée et ses collègues de travail ou ses supérieurs ne constituent pas encore un motif de refus (ATF 124 V 234 consid. 4b/bb et la référence). Ils peuvent tout au plus être pris en compte dans le cadre de l’appréciation de la faute (arrêt du Tribunal fédéral 8C_742/2013 du 27 novembre 2013 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 133/03 du 29 octobre 2003 consid. 3.2).

Selon l’art. 16 al. 2 LACI, n’est pas réputé convenable et, par conséquent est exclu de l’obligation d’être accepté, tout travail qui, notamment :

-          n’est pas conforme aux usages professionnels et locaux et, en particulier, ne satisfait pas aux conditions des conventions collectives ou des contrats-type de travail ;

-          ne tient pas raisonnablement compte des aptitudes de l’assuré ou de l’activité qu’il a précédemment exercée (let. b) ;

-          ne convient pas à l’âge, à la situation personnelle ou à l’état de santé de l’assuré (let. c) ;

-          procure à l’assuré une rémunération qui est inférieure à 70% du gain assuré, sauf si l’assuré touche des indemnités compensatoires conformément à
l’art. 24 (gain intermédiaire) (let. i).

L’art. 16 al. 2 let. b LACI vise essentiellement à permettre aux assurés de refuser les postes qui exigent des aptitudes physiques, mentales et professionnelles supérieures à celles qu’il possèdent. Cette disposition ne protège pas les assurés qui refuseraient des emplois qui exigent moins de qualifications que celles dont ils peuvent se prévaloir (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 130/03 du 6 février 2004 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 133/03 du 29 octobre 2003 consid. 3.3 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 25 ad art. 16 LACI)

Un assuré qui entend se prévaloir d’un motif de santé (art. 16 al. 2 let. c LACI) pour quitter ou refuser un poste de travail doit en principe fournir un certificat médical circonstancié, reposant sur une analyse clinique et technique (ATF 124 V 234 consid. 4b), indiquant précisément quelles activités sont contre-indiquées (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 60/05 du 18 avril 2006 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 182/01 du 22 février 2002).

En lien avec l’art. 16 al. 2 let. c précité, on précisera encore que selon le Tribunal fédéral, le mobbing est un comportement systématique, hostile, qui se prolonge dans le temps et qui vise à isoler une personne sur son lieu de travail, à
la marginaliser, voire à l’éloigner de son poste (arrêts du Tribunal fédéral 8C_826/2009 du 1er juillet 2010 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_32/2010 du 17 mai 2010 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_245/2009 du 6 avril 2010 consid. 4.2 et les réf.). La victime se trouve souvent dans une situation où chaque acte individuel peut, dans certaines circonstances, être jugé admissible, mais où l’ensemble des actes peut conduire à une déstabilisation de la victime et jusqu’à son éloignement du lieu de travail. Il ne suffit toutefois pas qu’il y ait un conflit ou une mauvaise ambiance de travail, ou qu’un employé soit sommé – même de manière insistante ou sous la menace de mesures disciplinaires ou d’un licenciement – de remplir ses obligations professionnelles pour qu’il y ait mobbing (arrêts du Tribunal fédéral 4A_32/2010 du 17 mai 2010 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_245/2009 du 6 avril 2010 consid. 4.2 et les références). Le harcèlement moral est difficile à prouver. En règle générale, une preuve ne peut reposer que sur l’appréciation d’un grand nombre d’indices. Il faut cependant toujours prendre en considération le fait que la personne concernée n’a, cas échéant, fait qu’imaginer le mobbing, voire qu’elle l’a invoqué abusivement (arrêt du Tribunal fédéral 8C_107/2018 du 7 août 2018 consid. 5 et les arrêts cités). Le harcèlement sexuel au travail ou le mobbing peuvent diminuer la faute, voire la supprimer (cf. Bulletin LACI IC, D22 et la référence à l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_829/2009 du 17 décembre 2009).

5.             Dans le domaine des assurances sociales, la procédure est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle les faits pertinents de la cause doivent être constatés d’office par le juge. Mais ce principe n’est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l’instruction de l’affaire (art. 61 let. c LPGA). Celui-ci comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 I 183 consid. 3.2).

En vertu des art. 61 let. d LPGA et 89E LPA, la chambre des assurances sociales peut, indépendamment des conclusions des parties, réformer la décision attaquée en faveur ou au détriment du recourant.

S’il n’est pas lié par les arguments et griefs soulevés par les parties, le juge
n’est toutefois pas tenu de soulever d’office toutes les questions juridiques qui pourraient théoriquement se poser en relation avec l’objet du litige déterminé
par les conclusions de la partie recourante. Comme en matière d’établissement
des faits, le devoir d’examen d’office du juge est en principe limité par celui de
la partie recourante de motiver son recours («Rügeprinzip» ; Jean MÉTRAL, in Commentaire romand de la LPGA, n. 76 ad art. 61 LPGA). Les questions juridiques non soulevées par les parties à la procédure ne sont examinées par le juge que si, sur la base des allégations des parties ou d’autres éléments ressortant du dossier, elles sont pertinentes (ATF 119 V 347 consid. 1a).

6.             En l’occurrence, il est constant que l’employeur a résilié le contrat du recourant le 7 janvier 2020 et accompagné sa déclaration de l’offre de poursuivre les rapports de travail à des conditions modifiées, soit à un poste de simple collaborateur
et pour un salaire inférieur, de sorte qu’il s’agissait d’un congé-modification au sens étroit (cf. ci-dessus : consid. 4.3.1). Il est également admis par les parties et corroboré par les pièces du dossier qu’en raison d’une incapacité de travail ayant débuté le 22 janvier 2020, le contrat de travail du recourant a pris fin le 28 février 2021 et qu’il a émargé à l’assurance-chômage dès le 1er mars 2021.

6.1 Dans un premier moyen, le recourant soutient qu’il s’est vu notifier un congé-modification sans qu’aucune justification cohérente puisse être apportée tant d’un point de vue financier que structurel, et sans qu’un délai de réflexion suffisant lui ait été initialement octroyé. Il s’ensuivrait que le congé-modification signifié serait abusif non seulement quant à ses motifs mais aussi quant à sa forme et, partant, le refus de la modification contractuelle proposée excusable.

S’agissant tout d’abord du moyen tiré du délai de réflexion insuffisant, force est de relever que l’employeur a prolongé ce délai du 15 au 22 janvier 2020, à la demande du recourant (cf. pièce 18 intimée), permettant ainsi à ce dernier de prendre conseil auprès du syndicat de son choix et de se déterminer en toute connaissance de cause sur la proposition de modification contractuelle lors de l’entretien ayant eu lieu avec l’employeur le 22 janvier 2020, soit au terme de la prolongation de délai accordée par ce dernier. Le congé-modification du 7 janvier 2020 ne saurait donc être qualifié d’abusif en raison d’un délai de réflexion trop bref. Il s’ensuit que le recourant ne saurait pas non plus tirer de cet état de fait
un quelconque argument qui excuserait le refus de la modification contractuelle proposée faute d’avoir eu le temps d’en examiner la portée.

En ce qui concerne les motifs du congé, il est exact qu’un congé-modification peut être abusif s’il est utilisé comme moyen de pression, aux fins de susciter un comportement déterminé des employés, ou pour imposer des changements inéquitables des conditions de travail, qui ne seraient commandés ni par la marche de l’entreprise, ni par les exigences du marché (cf. arrêt du Tribunal fédéral 4C.234/2001 consid. 3b, non publié dans l’ATF 128 III 129 ; Rémy WYLER,
Boris HEINZER, Droit du travail, 3ème éd. 2014, pp. 657-658).

Sous l’angle de l’assurance-chômage, l’ancien Tribunal fédéral des assurances
a considéré qu’un assuré n’est pas sans travail par sa faute et, partant, ne saurait
se voir infliger une suspension de son droit à l’indemnité lorsque son employeur
subordonne la continuation des rapports de travail à l’entrée en vigueur immédiate de la modification contractuelle proposée (réduction de salaire ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 151/04 du 30 novembre 2004 consid. 2.2).

En l’espèce, il y a lieu de constater que la modification de poste proposée le
7 janvier 2020 n’était appelée à déployer ses effets qu’à partir du 1er mai 2020, soit au terme du délai de congé contractuel de trois mois, de sorte que le congé-modification du 7 janvier 2020 ne saurait, de ce point de vue, être qualifié d’abusif ou rendre inexigible l’acceptation de la modification contractuelle proposée (cf. ci-dessus : consid. 4.3.1 in initio). Pour le surplus, il n’est pas nécessaire, dans le cas particulier, de trancher la question de savoir si la proposition de rétrograder l’assuré à un poste de collaborateur avec un salaire inférieur à partir du 1er mai 2020 serait néanmoins abusive car utilisée comme moyen de pression non justifié au sens de l’arrêt 4C.234/2001 précité ; dans la mesure où un congé-modification abusif ne saurait déboucher ipso facto sur la reconnaissance d’un travail non convenable (cf. ci-dessus : consid. 4.3.2), il s’agit bien plutôt de déterminer si le poste que l’employeur a proposé au recourant ne constitue pas un « emploi convenable » à l’aune de l’art. 16 al. 2 LACI. Or, à l’examen des motifs invoqués par l’employeur à l’appui du congé-modification du 7 janvier 2020, il apparaît que ceux-ci concernent exclusivement les insuffisances – avant tout managériales – dont le recourant aurait fait preuve à son ancien poste de responsable d’atelier, justifiant ainsi, sous réserve d’acceptation par l’intéressé, son repositionnement en tant qu’opérateur au sein de la division habillement. Aussi la chambre de céans se dispensera-t-elle d’examiner si ces reproches – qui demeurent contestés par le recourant – se révèlent fondés ou non. Il convient en revanche d’examiner, ci-après (consid. 6.2) les autres circonstances qui rendraient, cas échéant, excusable le refus de la modification contractuelle proposée.

6.2 À cet égard, le recourant s’en prend en substance aux mauvaises conditions
de travail, empreintes de mobbing, qui régneraient dans l’entreprise, notamment au sein de la division habillement, pour justifier son refus d’un poste d’opérateur dans ce secteur précis de l’entreprise.

Dans son opposition à la décision (initiale) du 16 avril 2021, le recourant a indiqué, dans un premier temps, par l’intermédiaire de sa mandataire, avoir été victime de mobbing. Invité par l’intimée à étayer ces allégations par des éléments de preuve, le recourant a renvoyé, par courrier du 17 septembre 2021, aux explications développées dans sa requête en conciliation du 21 mai 2021. Il ressort toutefois de cette écriture (pièce 13 recourant) et de la prise de position personnelle du recourant annexée au questionnaire du 9 avril 2021, que ce dernier n’indique pas avoir été lui-même la cible d’un tel mobbing mais en avoir souffert indirectement (stress mental considérable tant sur le plan professionnel que privé) pour avoir dû gérer, en tant que responsable d’atelier – mais sans l’aide escomptée de son supérieur avec qui les relations étaient tendues –, un cas de harcèlement subi par une nouvelle collaboratrice arrivée dans son équipe en 2015, qui n’avait pas été acceptée par certaines de ses collègues déjà en place. Dans la prise de position précitée, le recourant ajoute que cette situation, qui avait également
induit de l’absentéisme dans son équipe, n’avait trouvé une issue qu’avec le licenciement d’une des collaboratrices impliquées mais qu’en ce qui le concernait, il n’avait jamais été absent ne serait-ce qu’un jour et toujours donné le meilleur de lui-même.

Il ressort de ses éléments que les difficultés décrites par le recourant concernaient au premier chef une de ses anciennes subordonnées et, par ricochet, lui-même en tant que responsable d’atelier. On ne saurait toutefois inférer d’emblée de ces circonstances qu’en acceptant le poste d’opérateur au sein de la division habillement, proposé le 7 janvier 2020, le recourant, une fois déchargé de son rôle de responsable d’atelier, aurait fait un choix qui n’aurait pas convenu à son état de santé.

À cet égard, le recourant a produit :

-          une attestation (pièce 20) établie le 21 mai 2021 par le docteur C______, par laquelle ce spécialiste en psychiatrie et psychothérapie atteste que l’épouse du recourant est en traitement régulier chez lui. Quant au recourant, ce médecin indique qu’il « aurait dénoncé une situation de mobbing à son travail [...] et aurait entrepris des démarches légales pour défendre ses droits. Tout ceci aurait affecté et stressé [le recourant] (avec augmentation de son eczéma, plus nerveux et tendu), ainsi que la relation de couple avec [son épouse]. Dans ce contexte, [le recourant et son épouse étaient] venus consulter en couple une fois le 26 août 2019 » ;

-          un courrier du 14 janvier 2021 du docteur D______, psychiatre, à un confrère, indiquant que le recourant souffrait encore d’une symptomatologie dépressive résiduelle qui justifiait une incapacité de travail de 20% encore pour le mois de décembre 2020 et janvier 2021. Aussi le Dr D______ demandait à ce confrère (NDR : vraisemblablement médecin conseil de l’assureur maladie perte de gain de l’employeur) d’en tenir compte pour la poursuite du versement des indemnités de perte de gain. En effet, il continuait à souffrir d’une humeur dépressive mais une reprise à 100% était prévue dès le 1er février 2021.

La chambre de céans relève que le premier rapport se réfère aux problèmes endurés par le recourant alors qu’il était responsable d’atelier alors que le second concerne l’arrêt de travail qui a commencé le 22 janvier 2020, au terme du délai de réflexion prolongé. À la lumière des critères jurisprudentiels évoqués plus haut (ci-dessus : consid. 4.3.2), ces deux rapports ont toutefois pour point commun de ne pas indiquer en quoi l’acceptation du poste d’opérateur au sein de la Division habillement aurait été médicalement contre-indiquée. Il s’ensuit que ces rapports ne prouvent pas une telle incompatibilité et ne sont par conséquent pas de nature à justifier le refus de la modification contractuelle proposée. Pour le surplus, il ressort certes des explications données par le recourant lui-même, dans sa prise de position annexée au questionnaire du 9 avril 2021, que les difficultés qu’il avait rencontrées en tant que responsable d’atelier étaient la cause principale de sa demande (exprimée au cours de l’entretien du 22 janvier 2020 avec l’employeur), de pouvoir travailler dans une autre division de l’entreprise afin de retrouver du plaisir au travail. On rappellera toutefois que selon la jurisprudence précitée (ci-dessus : consid. 4.3.2), l’existence d’un mauvais climat de travail ou des tensions entre un assuré et ses collègues ou supérieurs – circonstances qu’en l’espèce, le recourant a rendues plausibles – ne constituent pas un motif valable de refuser une modification des rapports de travail.

Il s’ensuit que les éléments versés au dossier ne permettent pas de retenir que
le refus de l’offre formulée le 7 janvier 2020 par l’employeur aurait été justifié, notamment d’un point de vue médical. Dans ces circonstances, on était en droit d’attendre du recourant qu’il maintienne sa collaboration avec l’employeur sous la forme modifiée qui lui était proposée, dans l’attente de retrouver un
autre emploi correspondant mieux à ses attentes (cf. l’arrêt 8C_510/2017 précité,
consid. 3.1).

6.3 S’agissant des autres critères énoncés par l’art. 16 al. 2 LACI, qui permettraient de considérer le travail proposé au recourant comme n’étant pas convenable, ils ne sont pas invoqués et ne trouvent pas application non plus dans le cas particulier. Il en va notamment ainsi des aptitudes du recourant (let. b)
– que personne ne remet en cause à un poste d’opérateur – ou de la rémunération (let. i), cette dernière représentant, en l’espèce, une perte de gain d’environ 12.5%.

Il résulte des considérants qui précèdent que les éléments avancés et ressortant
du dossier ne sont pas de nature à renverser la présomption d’emploi convenable posée par l’art. 16 al. 1 LACI.

6.4 Il convient encore de se demander si le recourant ne s’est pas retrouvé au chômage sans sa faute puisqu’il a fait part à l’employeur, notamment lors de l’entretien du 22 janvier 2020, qu’il était prêt à demeurer à son service si ce dernier lui attribuait un « poste au quai ».

Un tel argument ne saurait être suivi. Il ressort en effet clairement du congé-modification du 7 janvier 2020 que les rapports de travail en tant que responsable d’atelier prendraient fin à moins que le recourant accepte le poste d’opérateur au terme du délai de réflexion imparti à cet effet – et prolongé jusqu’au 22 janvier 2020. En formulant de son côté une contre-proposition le 22 janvier 2020 (« poste au quai »), le recourant ne pouvait pas s’attendre à ce que celle-ci soit acceptée. Il s’ensuit qu’en n’acceptant pas la modification contractuelle telle qu’elle avait été proposée et formulée par l’employeur, le recourant savait que son comportement aurait – ou à tout le moins pouvait avoir – pour conséquence son licenciement, issue dont il a à tout le moins accepté le risque qu’elle se produisît.

Ce manquement justifie le prononcé d’une suspension de son droit à l’indemnité de chômage, conformément à l’art. 30 al. 1 LACI.

7.             Il reste à déterminer le degré de la faute et la quotité de la sanction qui en découle.

7.1 L’art. 30 al. 3 LACI prévoit notamment que la durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute et ne peut excéder, par motif de suspension, soixante jours.

Conformément à l’art. 45 OACI, la suspension dure d’un à quinze jours en cas de faute légère (al. 3 let. a), de seize à trente jours en cas de faute de gravité moyenne (al. 3 let. b) et de trente-et-un à soixante jours en cas de faute grave (al. 3 let. c).

Il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l’assuré abandonne un emploi réputé convenable sans être assuré d’obtenir un nouvel emploi (al. 4 let. a) ou qu’il refuse un emploi réputé convenable (al. 4 let. b). Si l’assuré est suspendu de façon répétée dans son droit à l’indemnité, la durée de suspension est prolongée en conséquence.

Les suspensions subies pendant les deux dernières années sont prises en compte dans le calcul de la prolongation (al. 5).

7.2 Il y a notamment faute grave lorsque l’assuré refuse un emploi réputé convenable sans motif valable (cf. art. 45 al. 4 let. b OACI). La précision apportée par cette disposition (absence de « motif valable ») laisse donc une certaine marge d’appréciation à l’autorité. Par conséquent, même en cas d’abandon ou de refus d’emploi, il est possible, exceptionnellement, de fixer un nombre de jours de suspension inférieur à 31 jours, en présence de circonstances objectives ou subjectives particulières faisant apparaître, dans le cas concret, la faute comme plus légère (ATF 130 V 125 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_775/2012 du 29 novembre 2012 consid. 2). La jurisprudence considère que lorsqu’un assuré peut se prévaloir d’un motif valable au sens de l’art. 45 al. 4 OACI, il n’y a pas forcément faute grave, même en cas de refus d’un emploi assigné et réputé convenable. Par motif valable, il faut entendre un motif qui fait apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère. Il peut s’agir, dans le cas concret, d’un motif lié à la situation subjective de la personne concernée ou à des circonstances objectives (ATF 130 V 125 consid. 3.4.3 et 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances 245/06 du 2 novembre 2007 consid. 4.1).

7.3 En tant qu’autorité de surveillance, le Secrétariat d’État à l’économie (ci-
après : SECO) a adopté un barème indicatif à l’intention des organes d’exécution (Bulletin LACI IC). Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d’exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d’apprécier le comportement de l’assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas d’espèce et de fixer la sanction en fonction de la faute (arrêt du Tribunal fédéral 8C_425/2014 du 12 août 2014 consid. 5.1).

La durée de la suspension est fixée en tenant compte de toutes les circonstances du cas particulier, telles que le mobile, les circonstances personnelles (l’âge, l’état civil, l’état de santé, une dépendance éventuelle, l’environnement social, le niveau de formation, les connaissances linguistiques, etc.), des circonstances particulières (le comportement de l’employeur ou des collègues de travail, le climat de travail, etc.), de fausses hypothèses quant à l’état de fait (par exemple quant à la certitude d’obtenir un nouvel emploi (Bulletin LACI IC, D64).

Selon le barème du SECO, le refus d’un emploi convenable ou d’un emploi en gain intermédiaire à durée indéterminée assigné à l’assuré ou qu’il a trouvé lui-même est considéré comme une faute grave et sanctionné d’une suspension de l’indemnité de 31 à 45 jours en cas de premier refus (Bulletin LACI IC, D79 2.B ch. 1).

7.4 En l’espèce, l’intimée a considéré dans sa décision (initiale) du 16 avril 2021 qu’il se justifiait, en dérogation à l’art. 45 al. 4 let. b OACI, de ne pas retenir une faute grave mais de gravité moyenne à la charge du recourant, justifiant une suspension de 18 jours, eu égard notamment à son ancienneté dans l’entreprise et à la « convenance [sic] » des nouvelles conditions contractuelles. Sur opposition, l’intimée a confirmé cette sanction en indiquant que les circonstances atténuantes reposaient sur l’ancienneté du recourant dans l’entreprise.

Sachant que dans un cas similaire, le Tribunal fédéral des assurances a retenu l’existence d’une faute moyenne et fixé à 23 jours la suspension prononcée à l’encontre d’un assuré qui, s’il avait accepté l’offre de poursuivre les rapports de travail à des conditions différentes, aurait dû s’accommoder d’une réduction de salaire de 25%, d’une relation tendue avec son supérieur et ses collègues ainsi que d’une rétrogradation du rang de chef de groupe à celui de collaborateur (cf. arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 133/03 du 29 octobre 2003 consid. 4.2), ni la faute moyenne, ni la quotité de la sanction fixée à 18 jours – qui se situe dans la fourchette inférieure de la faute moyenne – ne prêtent le flanc à la critique.

8.             Compte tenu de ce qui précède, le recours est rejeté.

9.             Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 LPGA et 89H al. 1 LPA).

 

*****

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d’État à l’économie par le greffe le