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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2023/2021

ATAS/1266/2021 du 09.12.2021 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2023/2021 ATAS/1266/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 9 décembre 2021

5ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE, représenté par le syndicat UNIA

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______(ci-après : l’assuré ou le recourant), ressortissant portugais, né en ______ 1978, est titulaire d’une autorisation d’établissement en Suisse. Il est au bénéfice d’une expérience en tant qu’agent de propreté, métier qu’il exerce presque exclusivement depuis l’année 2002.

b. Le 14 janvier 2020, son contrat de travail avec la société B______SA, à Genève, a été résilié par cette dernière avec effet au 31 mars 2020. L’assuré s’est en conséquence inscrit au chômage en date du 24 février 2020. Il a bénéficié d’un droit aux indemnités de chômage depuis le 1er avril 2020.

c. L’assuré a été sanctionné à plusieurs reprises par des décisions suspendant son droit à l’indemnité : par décision du 7 juillet 2020, il a été sanctionné de huit jours de suspension pour absence de recherches d’emploi ; par décision du 20 août 2020, il a été sanctionné de trente-quatre jours de suspension pour absence de postulation à une offre d’emploi qui lui avait été assignée ; par décision du 21 août 2020, il a été sanctionné de seize jours de suspension pour ne pas s’être rendu à un cours qui lui avait été assigné.

d. Suite à une nouvelle absence à un cours où son conseiller en personnel lui avait demandé de se rendre, l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE ou l’intimé), a rendu une décision, datée du 27 août 2020, prononçant l’inaptitude au placement de l’assuré. Ce dernier a fait opposition à cette décision en date du 9 septembre 2020. L’OCE a confirmé sa décision initiale par décision sur opposition du 18 novembre 2020.

e. Suite à un entretien téléphonique avec une employée du service juridique de l’OCE, en date du 26 octobre, laquelle lui a expliqué sommairement la décision d’inaptitude au placement et la possibilité pour l’assuré d’être considéré comme à nouveau apte au placement s’il montrait qu’il était prêt à respecter ses obligations à l’avenir, l’assuré s’est à nouveau inscrit au chômage, en date du 17 novembre 2020.

f. Dans ce cadre, son conseiller en personnel lui a remis un plan d’actions daté du 25 novembre 2020 ; celui-ci enjoignait à l’assuré d’envoyer à son conseiller la preuve d’avoir effectué un nombre suffisant de recherches d’emploi en octobre et novembre 2020, d’ici au 5 décembre 2020, d’accomplir la formation « être au chômage » d’ici le 15 décembre 2020, de réaliser un dossier de candidature à envoyer à son conseiller jusqu’à la même date, de s’inscrire sur la plateforme internet « job-room » et de s’y rendre régulièrement, d’ici au 31 décembre 2020 et enfin de fournir ses coordonnées personnelles à jour, d’ici à la même date. L’assuré a envoyé ses recherches d’emploi pour les mois d’octobre 2020, de novembre 2020 et de décembre 2020, mais il ne s’est pas conformé aux autres incombances qui lui avait été imposées.

g. Au cours d’un entretien téléphonique avec son conseiller en personnel, le 5 janvier 2021, l’assuré a remis en cause la qualité de l’accompagnement fourni par celui-ci. En date du 6 janvier 2021, l’assuré a écrit à la supérieure hiérarchique de son conseiller en personnel, pour requérir un changement de conseiller.

h. Suite à cette requête, l’assuré a été convoqué à un entretien pour le 14 janvier 2021. Il ne s’est cependant pas rendu audit entretien, sans s’être excusé au préalable.

i. En date du 15 janvier 2021, l’assuré a été sanctionné de douze jours de suspension pour absence de recherches d’emploi suffisantes au cours du mois de novembre 2020. En date du 18 janvier 2021, l’assuré a été sanctionné de quinze jour de suspension pour ne pas avoir rempli ses obligations de demandeur d’emploi, telles qu’imposées par le plan d’actions du 25 novembre 2021.

B. a. Par décision du 22 janvier 2021, l’OCE a confirmé l’inaptitude au placement de l’assuré.

b. Par courrier du 18 février 2021, l’assuré a fait opposition à cette décision et a requis que l’OCE lui transmette une copie de son dossier.

c. L’OCE a confirmé sa décision initiale par décision sur opposition du 12 mai 2021.

d. Le dossier de l’assuré a été transmis au syndicat UNIA Genève, par pli du 3 juin 2021, suite à une requête dudit syndicat du 1er juin 2021.

C. a. En date du 10 juin 2021, l’assuré, sous la plume du syndicat UNIA, a déposé un recours sommaire contre la décision sur opposition de l’OCE du 12 mai 2021, tout en demandant un délai pour compléter celui-ci. Un acte de recours complet a été déposé en date du 30 juin 2021.

b. Interpellé par la chambre de céans, l’intimé a, par courrier du 8 juillet 2021, renvoyé aux motifs de sa décision sur opposition.

c. Le recourant a exprimé, par courrier du 26 août 2021, qu’il renonçait à répliquer.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence en raison de la matière pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

Interjeté pour dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision sur opposition du 12 mai 2021, constatant l’inaptitude au placement de l’assuré.

2.1 Selon le recourant, la décision établissant son inaptitude au placement ne respecte pas le cadre strict défini par la jurisprudence fédérale à l’aune du principe de proportionnalité. De son opinion, son comportement, quoiqu’irrégulier, n’est pas suffisamment grave pour justifier une inaptitude au placement fondée sur un manque de volonté de retrouver du travail. Il faut en particulier tenir compte du fait qu’il a continué à réaliser des recherches d’emploi postérieurement à la décision d’inaptitude au placement du 27 août 2020 et du fait qu’il n’avait pas accès à ses courriels de façon régulière, dès lors qu’il ne possède pas d’ordinateur et que son téléphone était cassé.

2.2 Selon l’intimé, il ne se justifie pas de revenir sur la décision d’inaptitude au placement du 18 novembre 2020. En effet, malgré l’existence de cette décision, le recourant a commis de nouveaux manquements aux obligations lui incombant en tant que demandeur d’emploi. En outre, il a requis un changement de conseiller mais ne s’est ensuite pas rendu au rendez-vous fixé pour discuter de cette demande. De l’opinion de l’OCE, l’assuré n’a ainsi pas modifié son comportement de manière suffisamment significative pour pouvoir être déclaré à nouveau apte au placement.

3.             La question à trancher est celle de l’existence d’un motif de réexamen de la décision négative portant sur la capacité au placement de l’assuré. Autrement dit, il s’agit d’examiner si c’est à tort que l’OCE n’a pas modifié sa décision du 18 novembre 2020, entrée en force, établissant que l’assuré n’était pas apte à travailler.

3.1 Selon l’art. 15 al. 1 LACI, est réputé apte à être placé le chômeur qui est disposé à accepter un travail convenable et à participer à des mesures d’intégration et qui est en mesure et en droit de le faire.

Lorsque le comportement de l’assuré sur une certaine période de temps démontre qu’il n’a pas l’intention de rechercher sérieusement un nouvel emploi, son aptitude au placement doit être niée (ATF 146 V 210 consid. 5.3 ; ATF 123 V 216 consid. 3 ; ATF 112 V 215 consid. 1b ; ATAS/1107/2021 du 2 novembre 2021 consid. 4b). Une inaptitude au placement pour un tel motif nécessite toutefois un manque qualifié d’efforts de la part de l’assuré (ATF 146 V 210 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_246/2014 du 24 juin 2014 consid. 2). Autrement dit, en vertu du principe de proportionnalité (ATF 125 V 196 consid. 4c), l'aptitude au placement ne peut être niée qu'en présence de manquements répétés et au terme d'un processus de sanctions de plus en plus longues, pour autant que les fautes aient été commises en quelques semaines, voire en quelques mois et qu'un ou plusieurs manquements au moins correspondent à des fautes moyennes ou graves ; l'assuré doit pouvoir se rendre compte, au vu de la gradation des sanctions endurées, que son comportement compromet de plus en plus son droit à l'indemnité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_64/2020 du 19 novembre 2020 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_65/2020 du 24 juin 2020 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_816/2018 du 5 décembre 2019 consid. 6.1 ; ATAS/791/2021 du 3 août 2021 consid. 6 ; ATAS/660/2021 du 21 juin 2021 consid. 2.1). En vertu du même principe de la proportionnalité, l’insuffisance de recherches d’emploi doit être sanctionnée, en premier lieu, par une suspension du droit à l’indemnité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_64/2020 du 19 novembre 2020 consid. 4.3). L'aptitude au placement doit être appréciée sur la base des circonstances de fait existant jusqu'à la décision sur opposition (ATF 146 V 210 consid. 3.2).

3.2  

3.2.1 Selon l’art. 53 al. 1 LPGA, les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si l’assuré ou l’assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits auparavant. Selon l’art. 17 al. 2 LPGA, toute prestation durable accordée en vertu d’une décision entrée en force est, d’office ou sur demande, augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée si les circonstances dont dépendait son octroi changent notablement.

3.2.2 La question de la base légale permettant de modifier une décision d’inaptitude au placement en lien avec des indemnités-journalières de chômage fait l’objet de débats. Alors que la jurisprudence fédérale semble tendre vers l’application de l’art. 53 LPGA (ATF 133 V 57 consid. 6.6.2 et 6.7 [relatif à des indemnités-journalières de l’assurance-accident obligatoire] ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_365/2019 du 25 septembre 2019 consid. 3.1 [relatif à l’aptitude au placement] ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_789/2014 du 7 septembre 2015 consid. 3.2.3 [relatif à l’aptitude au placement]), certains auteurs se prononcent pour l’application de l’art. 17 al. 2 LPGA (Ueli KIESER, Kommentar ATSG, 4ème éd. 2020, n. 81 s. ad art. 17 LPGA ; Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 106).

3.2.3 Dans les deux cas, un changement notable de circonstances, respectivement la découverte d’un fait important, est requis pour qu’une décision entrée en force puisse être modifiée ; une simple appréciation différente de la situation n’est pas suffisante (en lien avec l’art. 17 LPGA : ATF 147 V 167 consid. 4.1 ; en lien avec l’art. 53 al. 1 LPGA : ATF 144 V 245 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_12/2021 du 11 octobre 2021 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_658/2017 du 23 février 2018 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_365/2015 du 6 janvier 2016 consid. 3.1). Celui qui requiert la modification d’une décision sur la base d’une modification des faits supporte les conséquences d’un échec de la preuve desdits faits ; le degré de la preuve est celui de la vraisemblance prépondérante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_434/2011 du 8 décembre 2011 consid. 7.1).

4.             Il convient d’examiner si les circonstances établies par la procédure permettent de retenir que la situation factuelle, s’agissant de la volonté du recourant de retrouver du travail, a subi un changement important entre le 18 novembre 2020 et le 12 mai 2021.

4.1 En l’espèce, force est de constater que le recourant n’a pas rempli à satisfaction les obligations qui lui incombaient en tant que demandeur d’emploi postérieurement au 18 novembre 2020. Il n’a ainsi pas effectué, ou du moins pas dans les délais prescrits, la plupart des objectifs qui lui avaient été fixés par son conseiller dans le plan d’actions du 25 novembre 2020 et ce sans explications. Ses recherches d’emploi en septembre, octobre, novembre et décembre 2020 comportent en outre plusieurs postulations auprès du même employeur dans les mêmes trois mois ; l’assuré a, à cet égard, limité ses recherches au territoire du canton de Genève alors qu’il réside à moins de quinze minutes à pied de la principale gare genevoise.

4.2 Le comportement du recourant apparait difficilement compréhensible s’agissant de sa requête de changement de conseiller. En effet, alors qu’un rendez-vous avait été appointé pour le 14 janvier 2021, pour discuter d’un potentiel remplacement, l’assuré ne s’y est pas rendu, sans s’excuser au préalable. Ce comportement jette le doute sur les allégations de l’assuré dans son recours, selon lesquelles il aurait toujours pris très au sérieux ses obligations de demandeur d’emploi. Le recourant affirme, certes, qu’il ne disposait pas de moyens informatiques à domicile et que son téléphone était cassé. On remarque toutefois qu’il a fait usage de sa messagerie électronique en date du 6 janvier 2021, à 14h25. Dans une telle situation, il lui revenait, au minimum, d’avertir l’autorité s’il s’avérait que ce canal n’était plus adéquat pour communiquer avec lui (dans le même sens : ATF 141 I 97 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_15/2016 consid. 2.2).

5.             Au vu de ce qui précède, la chambre de céans considère qu’il n’existait pas, au 12 mai 2021, des faits nouveaux susceptibles de fonder une modification de la décision du 18 novembre 2020, en ce qui concerne la volonté de l’assuré de rechercher sérieusement un nouvel emploi. Dès lors, la décision sur opposition du 12 mai 2021 est bien fondée et le recours doit être rejeté.

6.             Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA en lien avec l’art. 1 al. 1 LACI).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le