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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/181/2020

ATAS/883/2021 du 25.08.2021 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/181/2020 ATAS/883/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 25 août 2021

8ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à Genève, représentée par ASSUAS Association suisse des assurés

 

 

recourante

contre

 

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, Genève

 

 

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______, née le ______ 1980, (ci-après l'assurée ou la recourante), titulaire d'un CFC d'horticultrice, a travaillé à plein temps pour la commune de B______ depuis 2003.

2.        L'assurée a été opérée d'un syndrome du canal carpien le 12 juin 2017, date depuis laquelle elle est en incapacité de travail totale. Elle a développé des douleurs diffuses et un état anxio-dépressif réactionnel. Le Docteur C______, médecine générale FMH, médecin traitant, a diagnostiqué un syndrome somatoforme douloureux. Le Docteur D______, rhumatologue, retient le diagnostic de fibromyalgie.

3.        Le 2 janvier 2018, l'assurée a déposé une demande de prestations auprès de l'Office cantonal de l'assurance invalidité (ci-après : l'OAI ou l'intimé).

4.        La Docteure E______, psychiatre-psychothérapeute FMH, indique dans son rapport du 23 février 2018 suivre la patiente depuis le 24 mai 2017. Elle retient les diagnostics de burn out et de trouble de l'adaptation, réaction mixte anxieuse et dépressive qui font suite au harcèlement sexuel et psychologique subi par la patiente sur son lieu de travail pendant plusieurs années. Elle était la seule femme dans son équipe et elle a développé une forme d'état de stress post-traumatique. La patiente n'imagine pas pouvoir reprendre son poste et le fait d'y penser génère une anxiété extrême. La patiente n’est pas encore suffisamment rétablie pour envisager une reprise de travail thérapeutique dans un autre domaine. Son état psychologique s’est péjoré suite au décès de sa mère le 4 janvier 2018. L'incapacité de travail est totale pour une dure indéterminée.

5.        Dans son rapport du 17 août 2018 à l’attention de l’OAI, la Dre E______ diagnostique un épisode dépressif moyen, un état de stress post-traumatique, une somatisation (fibromyalgie) et un trouble de la personnalité sans précision. La patiente présente une humeur dépressive, une diminution de l’intérêt et du plaisir, une perturbation du sommeil et de l’appétit, une idéation suicidaire sans projet précis, depuis deux semaines. Concernant le stress post-traumatique, la patiente présente une reviviscence répétée de l’événement traumatique, avec des souvenirs envahissants. Les remarques et blagues sexistes, vulgaires et intimidantes de la part de ses collègues de travail pendant des années et lorsqu’elle était la seule femme dans l’équipe ont fini par briser sa confiance en elle et son estime d’elle-même. Opérée du tunnel carpien en juin 2017, la patiente n’a jamais totalement récupéré l’usage de sa main droite. Le médecin indique que l'état de la patiente s'est péjoré en janvier 2018 suite au décès de sa mère et qu'en raison de l'état dépressif, du PTSD et de la fibromyalgie, la capacité de travail est nulle dans toute activité. Au vu de son état, la patiente, qui a une nette préférence pour les médecines naturelles, accepte l'introduction du Cipralex à partir du 16 août 2018.

 

6.        L'ALIANZ, assureur maladie, a confié une expertise au Docteur F______, FMH praticien, qui a examiné l'assurée le 17 novembre 2018. Dans son rapport du 19 mars 2019, l'expert diagnostique un état de stress post-traumatique avec composante anxio-dépressive moyenne et un trouble de la personnalité à déterminer. Il s'est entretenu avec la Dre E______ le 11 mars 2019, qui lui a expliqué suivre la patiente une fois par mois depuis six mois. La psychiatre trouve que la patiente exprime un discours rigide et se trouve devant l'impossibilité de l'aider ; elle estime que dans l'état actuel, elle est apte au travail pour son poste actuel ou dans tout autre domaine d'activité à 100% dès le jour de la communication. L'expert n'a pas objectivé un état dépressif majeur. Au vu de l'examen clinique et de la communication avec la Dre E______, le Dr F______ conclut que la capacité de travail est de 100% pour toute travail sans limitation physique et psychique.

7.        Depuis le 18 février 2019, l'assurée est suivie par le Service de psychiatrie générale CAPPI des Eaux-Vives. Dans un rapport du 20 mai 2019, la Dre G______retient les diagnostics de dépression sévère sans symptôme psychotique et de trouble anxieux généralisé. La patiente prend du Jarcin (millepertuis) ; en cas d'échec de ce traitement, un traitement médicamenteux sera proposé à la patiente, associé à un traitement de type thérapie cognitivo-comportementale. L'incapacité de travail est totale, le pronostic sur la capacité de travail est réservé pour au moins 6 mois avec un traitement psychotrope bien conduit. Concernant la réadaptation, en cas de rémission, le pronostic est bon et elle peut atteindre 100% de capacité avec les mesures de réadaptation. Cependant, le travail en équipe et en milieu masculin constitue des obstacles.

8.        Par avis du 4 juin 2019, le Dr H______, médecin auprès du Service médical régional AI (ci-après : SMR) relève que l’assurée ne bénéficie pas de traitement psychotrope, mais d’un simple traitement par phytothérapie. L’aggravation décrite semble réactionnelle à l’idée de reprendre le travail. Mais le pronostic est bon, l’assurée reste autonome dans la gestion de ses activités quotidiennes. L’appréciation de l’exigibilité par le psychiatre (capacité de travail nulle pour une durée d’au moins 6 mois) est en contradiction avec la reprise d’activité progressive préconisée par ce même médecin. Pour le SMR, ses conclusions du 6 avril 2029 restent valables, à savoir que selon l’expert F______ et le psychiatre E______, la capacité de travail de l’assurée est entière dès le 11 mars 2019.

9.        Par décision du 5 décembre 2019, l’Office cantonal de l’assurance invalidité (ci-après l’OAI) a octroyé à l’assurée une rente entière d’invalidité pour la période du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019. L’OAI a retenu une incapacité de travail totale dans toute activité dès le 12 juin 2017. L’état de l’assurée s’étant amélioré dès le mois de mars 2019, l’OAI considère que la capacité de travail est de 100% dès cette date dans toute activité. Par conséquent, la rente d’invalidité est supprimée au 30 juin 2019. De plus, des mesures professionnelles ne sont pas nécessaires.

10.    Le 15 janvier 2020, l’assurée, représentée par l’ASSUAS, interjette recours contre la décision précitée. Elle conteste l’appréciation faite par l’expert F______ de sa capacité de travail sur le plan psychique, dès lors que ce dernier n’est pas psychiatre. Cette expertise ne peut se voir reconnaitre pleine valeur probante. Elle relève que sa nouvelle psychiatre, la Dre G______, a fait état d’une incapacité de travail de 100% depuis le 18 janvier 2019 en raison d’une dépression sévère sans symptôme psychotique et d’un trouble anxieux généralisé. La recourante considère qu’elle est en droit d’attendre de l’OAI qu’il la soutienne dans son projet de réadaptation. Elle conclut à l’annulation de la décision querellée, à l’octroi de mesures de réadaptation et d’une rente d’invalidité au-delà du 30 juin 2019, subsidiairement au renvoi du dossier à l’OAI pour instruction complémentaire.

11.    Par réponse du 10 février 2020, l’OAI conclut au rejet du recours. Le SMR a tenu compte de l’ensemble des documents médicaux et la recourante n’a apporté aucun élément médical objectif qui aurait été ignoré, de sorte qu’une instruction complémentaire ne se justifie pas. Quant aux mesures de réadaptation, elles ne peuvent être octroyées, dès lors que la capacité de travail de la recourante est entière dans toute activité et qu’elle ne subit pas d’incapacité de gain de 20%.

12.    Dans sa réplique du 26 février 2020, la recourante fait valoir que dans son rapport du 20 mai 2019, la Dre G______ contredisait l’expertise du Dr F______ pour ce qui concerne le diagnostic psychiatrique. Elle explique par ailleurs que les remarques sexistes, les attouchements subis de manière répétitive de la part de ses collègues ont réveillé chez elle des traumatismes anciens d’abus, ce qui explique qu’elle ne se voit pas travailler à nouveau dans un milieu masculin. Elle n’a pas bénéficié de soutien de la part de sa famille, ni de la responsable des ressources humaines et a été ainsi privée de ressources pour surmonter sa maladie. Elle ne sort pas de chez elle, sauf pour faire ses courses. Lorsque le Dr F______ a rédigé son rapport d’expertise en mars 2019, c’était quatre mois après l’avoir vue ; les choses n’étaient plus d’actualité. Selon la Dre G______, dans une activité adaptée, elle ne pourrait travailler qu’au maximum 6 heures par jour, ce qui correspond à une invalidité de 20%, ouvrant droit à des mesures de reclassement. La recourante persiste dans ses conclusions.

13.    Par duplique du 25 mars 2020, l’OAI persiste et conclut au rejet du recours.

14.    Le 19 juin 2020, la recourante communique un rapport de la Dre G______ du 9 juin 2020 qui considère qu’il est plus approprié de demander une contre-expertise psychiatrique. Elle maintient ses conclusions, notamment quant au renvoi de la cause à l’intimé pour instruction complémentaire.

15.    Le 6 juillet 2020, l’intimé se réfère à l’avis du SMR du 2 juillet 2020 et considère qu’aucun élément objectif ne permet de remettre en cause l’appréciation du cas.

16.    Par écriture du 24 juillet 2020, la recourante relève que contrairement à ce que soutient le SMR, la Dre G______ n’a pas abordé la question de la capacité de travail dans son rapport du 9 juin, mais indiquait qu’une amélioration clinique partielle avait permis à a patiente de récupérer son autonomie de base et ses activités sportives. C’est à tort que l’intimé a considéré qu’elle présentait une capacité de travail de 100% dès mars 2019.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.        Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 82a LPGA ; RO 2020 5137 ; FF 2018 1597 ; erratum de la CdR de l’Ass. féd. du 19 mai 2021, publié le 18 juin 2021 in RO 2021 358).

4.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pendant la période du 18 décembre au 2 janvier inclusivement (art. 38 al. 4 let. c LPGA et art. 89C let. c LPA), le recours est recevable.

5.        Le litige porte sur le point de savoir si c’est à bon droit que l’intimé a supprimé la rente d’invalidité de la recourante au 30 juin 2019 et a refusé l’octroi de mesures de réadaptation.

Il convient de rappeler qu’une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5.2; ATF 125 V 413 consid. 2d et les références; VSI 2001 p. 157 consid. 2).

6.        a. Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

b. Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c; ATF 102 V 165 consid. 3.1; VSI 2001 p. 223 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1; ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

7.        a. En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

b. Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

8.        a. Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux

b. Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

c. Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes même faibles quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_301/2013 du 4 septembre 2013 consid. 3).

d. Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

e. Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier.

9.        a. En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante a été en incapacité de travail totale depuis le 17 juin 2017. Suite à une cure du canal carpien, elle a développé par la suite un syndrome somatoforme douloureux et un mouvement dépressivo-anxieux réactionnel, en raison desquels l’incapacité de travail a perduré. Le Dr C______, médecin traitant, indiquait dans son rapport du 25 avril 2018 que l’incapacité de travail était toujours de 100%, et qu’elle ne pouvait pas revenir dans son milieu de travail que l’on considère comme toxique. Dans une activité adaptée, elle pouvait travailler à 50% ailleurs que dans l’horticulture jusqu’à l’accomplissement d’une formation appropriée.

Dans un rapport adressé au médecin traitant le 2 octobre 2017, le Dr D______, rhumatologue, indiquait que l’impression générale était celle d’une fibromyalgie chez une jeune femme anxieuse qui souffrait d’importants troubles du sommeil. Une reprise de travail à 100 % les prochains mois n’apparaissait pas envisageable. Cela étant, la Chambre de céans constate que l’on ne dispose pas de rapport plus récent du Dr D______, ce dernier n’ayant pas répondu à la demande de renseignements de l’intimé.

b. Sur le plan psychiatrique, la recourante a été suivie dès le 24 mai 2017 par la Dre E______ qui a confirmé dans son rapport du 23 février 2018 l’incapacité de travail totale, en raison d’un burn out et de troubles de l’adaptation, réactions mixte anxieuse et dépressive (F43.22). La patiente ne pouvait pas imaginer une reprise de travail dans sa profession et encore moins dans la même équipe, car elle avait vécu une ambiance de travail très lourde, avec des remarques et blagues sexistes, vulgaires et intimidantes. En outre, petite et très mince, elle devait soulever des objets lourds. La psychiatre notait que le pronostic pur une réadaptation était bon, mais que la patiente n’était pas encore suffisamment rétablie pour envisager une reprise de travail thérapeutique dans un autre domaine. D’autre part, son état psychologique s’était péjoré suite au décès de sa mère début janvier 2018. Dans son rapport du 17 août 2018, la psychiatre retient cette fois les diagnostics d’épisode dépressif moyen, d’état de stress post-traumatique, de fibromyalgie et de trouble de la personnalité sans précision. La patiente présente une fatigabilité, des difficultés à se concentrer, à planifier et mettre en exécution les tâches prévues et n’a quasiment plus de vie sociale. Au vu de son état, la patiente, qui a une nette préférence pour les médecines naturelles, a accepté l’introduction du Cipralex à partir du 16 août 2018. L’incapacité de travail est toujours de 100%, que ce soit dans son activité d’horticultrice ou dans une activité adaptée.

10.    La recourante a été examinée le 27 novembre 2018 par le Dr F______, mandaté comme expert par l’assureur perte de gain maladie. Se fondant sur les conclusions du rapport de l’expert du 19 mars 2019, le SMR considère que l’état de santé de la recourante s’est amélioré et que sa capacité de travail est totale depuis la date dudit rapport.

La recourante conteste les conclusions dudit rapport, relevant que le Dr F______ n’est pas psychiatre, de sorte qu’il n’est pas à même de poser un diagnostic psychiatrique. En effet, selon le rapport du Dr F______, il retient le diagnostic d’état de stress post-traumatique avec composante anxio-dépressive moyenne. Sur le plan thérapeutique, la recourante prend du Cipralex depuis 3 mois. L’expert fait état d’une communication téléphonique avec la Dre E______ le 11 mars 2019, aux termes duquel la patiente est apte au travail pour son poste actuel ou dans toute autre domaine d’activité à 100%, dès le jour de la communication.

La chambre de céans constate que le Dr F______ n’est pas psychiatre, de sorte que ses conclusions sur le plan psychiatrique ne peuvent être suivies. De plus, il se réfère à un entretien téléphonique avec la Dre E______, ce qui n’est pas acceptable, ce d’autant moins que cette dernière ne suivait plus la recourante sur le plan psychiatrique et qu’elle n’a pas rendu de rapport postérieur au 17 août 2018. Pour ces motifs déjà, l’expertise du Dr F______ ne saurait se voir reconnaitre valeur probante.

Enfin, il convient de relever que la Dre G______, psychiatre au CAPPI des Eaux-Vives, suit la patiente depuis le 17 février 2019. Dans son rapport du .28 mai 2019, la psychiatre diagnostique une dépression sévère sans symptômes psychotiques et un trouble anxieux généralisé, entraînant une incapacité de travail totale depuis la date de la première consultation le 18 février 2019. Le pronostic sur la capacité de travail est réservé pour au moins 6 mois avec un traitement psychotrope bien conduit.

L’intimé relève que la recourante ne bénéficie pas de traitement psychotrope, mais d’un simple traitement par phytothérapie et que l’aggravation décrite semble réactionnelle à l’idée de reprendre le travail. Il considère que l’appréciation de l’exigibilité par la psychiatre est en contradiction avec la reprise d’activité progressive qu’elle préconise.

Certes, la recourante prend un traitement de Millepertuis, mais on ignore pour quelles raisons le traitement de Cipralex introduit auparavant par la Dre E______ a été abandonné. La Dre G______ envisageait d’ailleurs l’introduction d’un traitement médicamenteux en cas d’échec du traitement par Millepertuis.

Dans la mesure où le rapport d’expertise doit être écarté, une capacité de travail de 100% dès le 19 mars 2019 ne peut être retenue, au regard notamment du rapport psychiatrique de la Dre G______. C’est ainsi à tort que l’intimé a supprimé la rente d’invalidité au 30 juin 2019.

On ignore toutefois si un traitement psychotrope a été finalement introduit et quelle a été l’évolution de l’état de santé de la recourante jusqu’au moment de la décision litigieuse.

La chambre de céans n’est par conséquent pas en mesure de se prononcer sur l’évolution de l’état de santé de la recourante en 2019 et de ses conséquences sur la capacité de travail, dans l’activité habituelle et/ou dans une autre activité. La question également des limitations dans l’exercice de sa profession doit être clarifiée.

11.    Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis et la cause renvoyée à l’intimé pour instruction complémentaire sous forme d’une expertise psychiatrique et nouvelle décision.

12.    La recourante obtenant gain de cause, une indemnité de CHF 3'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Annule la décision du 5 décembre 2019 dans le sens des considérants.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour instruction complémentaire dans le sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Condamne l’intimé à payer à Madame A______ la somme de CHF 3'500.- à titre de participation à ses frais et dépens ainsi qu’à ceux de son mandataire.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente suppléante

 

 

 

 

Juliana BALDÉ

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le