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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4302/2020

ATAS/364/2021 du 20.04.2021 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4302/2020 ATAS/364/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 avril 2021

9ème Chambre

 

En la cause

A______SÀRL, sise ______, à GENÈVE, représentée par la Société fiduciaire Sofidad SA

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, Service juridique, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

1.        A______Sàrl (ci-après : la société), avec siège à Genève, a pour but social la fabrication et la vente de produits alimentaires, notamment de boulangerie, chocolaterie et confiserie, ainsi que l'exploitation d'un tea-room (cf. registre du commerce).

2.        Le 20 mars 2020, la société, soit pour elle Monsieur B______, a transmis à l'office cantonal de l'emploi (ci-après : l'OCE) un formulaire de préavis de réduction de l'horaire de travail (ci-après : RHT), annonçant une perte de travail de 80 % pour 25 employés (sur 31 employés au total), du 17 mars 2020 au 17 juin 2020. Sous la rubrique « branche », la société avait indiqué « boulangerie, pâtisserie, tea-room ».

Dans sa demande, la société a expliqué que les mesures prises par les autorités avaient entraîné la fermeture du tea-room. La société avait décidé de continuer à vendre les produits (boulangerie et pâtisserie) et d'effectuer toutes les livraisons possibles. Le volume des ventes avait toutefois fortement diminué et la clientèle avait déserté les rues.

3.        Par décision du 26 mars 2020, l'OCE a fait partiellement opposition au paiement de l'indemnité en cas de RHT. Pour autant que toutes les autres conditions du droit étaient remplies, la caisse pouvait octroyer l'indemnité en cas de RHT pour toute l'entreprise pour la période du 20 mars 2020 au 19 juin 2020.

4.        Le 4 juin 2020, la société a déposé un nouveau préavis de RHT, annonçant une perte de travail de 30 % pour 26 employés (sur 30 employés au total), du 20 juin 2020 au 30 septembre 2020. Sous la rubrique « branche », la société avait indiqué « boulangerie, tea-room ».

5.        Par décision du 9 juin 2020, l'OCE a fait partiellement opposition au paiement de l'indemnité en cas de RHT. Pour autant que toutes les autres conditions du droit étaient remplies, la caisse pouvait octroyer l'indemnité en cas de RHT pour toute l'entreprise pour la période du 20 juin 2020 au 19 septembre 2020.

6.        Par courriel du 4 novembre 2020, la société a transmis à l'OCE un nouveau préavis de RHT, signé le 3 novembre 2020, annonçant une perte de travail de 80 % pour 24 employés (sur 29 employés au total), du 2 novembre 2020 au 31 décembre 2020. Sous la rubrique « branche », la société avait indiqué « boulangerie, pâtisserie, confiserie ».

7.        Par décision du 6 novembre 2020, l'OCE ne s'est pas opposé au paiement de l'indemnité en cas de RHT à la société pour la période du 14 novembre 2020 au 3 février 2021.

8.        Le 27 novembre 2020, la société a formé opposition à cette décision, concluant à ce que l'indemnité soit versée dès le 3 novembre 2020, étant précisé que c'était par erreur qu'elle avait sollicité l'indemnité dès le 2 novembre 2020 dans sa demande de préavis.

9.        Par décision sur opposition du 3 décembre 2020, l'OCE a confirmé sa décision du 6 novembre 2020, au motif que la branche « boulangerie, pâtisserie et confiserie » ne faisait pas partie des installations et établissements qui devaient fermer, de sorte que le délai légal de dix jours devait s'appliquer.

10.    Par courrier du 7 décembre 2020, la société a signalé à l'OCE qu'il y avait eu une confusion, en ce sens que la mention « tea-room » avait malencontreusement été oubliée dans la demande de préavis du 3 novembre 2020. Or, dans la mesure où la société avait été contrainte de fermer le tea-room suite aux mesures prises par le Conseil fédéral, il convenait de faire rétroagir les indemnités au 3 novembre 2020. Elle se référait, notamment, à ses demandes de préavis des 20 mars 2020 et 4 juin 2020, qui mentionnaient l'exploitation d'un tea-room.

À l'appui de son courrier, la société a produit l'extrait du registre du commerce.

11.    Le 17 décembre 2020, l'OCE a transmis à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS) le courrier de la société du 7 décembre 2020 pour raison de compétence.

12.    Par réponse du 14 janvier 2021, l'OCE a conclu au rejet du recours, expliquant que la société n'avait apporté aucun élément nouveau permettant de revoir la décision précitée.

13.    Par pli du 18 janvier 2021, la chambre de céans a interpellé l'OCE sur le point soulevé par la société dans son écriture du 7 décembre 2020, selon lequel son but social comprenait également l'exploitation d'un tea-room.

14.    Le 28 janvier 2021, l'OCE a répondu que l'exploitation par la société d'un tea-room avait été prise en compte puisque c'était pour cette raison que la RHT avait été accordée. Dans ce contexte, le délai de préavis « aurait pu être écourté ». Toutefois, au vu du taux de perte de travail annoncé de 80 % et du nombre d'employés concernés (24 sur 28), il n'était pas vraisemblable que la demande concernait le tea-room. La question du bien-fondé de l'octroi de la RHT pouvait dès lors se poser.

15.    Le 22 février 2021, la société a expliqué qu'elle était touchée par la fermeture de son tea-room, qui affectait non seulement son personnel de vente, qui était à l'arrêt, mais également son personnel de production, qui était au ralenti. Le personnel de vente était constitué de 19 personnes. Les 14 autres employés de la société travaillaient entre six et quatorze heures par semaine. Depuis le début de la crise sanitaire, la société avait fait de gros efforts pour garder le maximum d'employés en activité. Elle avait réussi à se « passer des aides » de mai à septembre 2020.

À l'appui de son écriture, la société a produit le « formulaire d'aide pour la demande de décompte de RHT COVID-19 » rempli par la caisse de chômage UNIA (ci-après : la caisse) pour le mois de novembre 2020, selon lequel 18 employés (sur 24 ayant droit aux indemnités) étaient touchés par la perte de travail, ainsi qu'un extrait du site internet de l'OCE selon lequel aucun délai de préavis ne devait être appliqué à l'égard des établissements ayant dû fermer leurs portes suite aux mesures décidées par le Conseil d'État le 1er novembre 2020, à condition que leur demande de préavis ait été déposée jusqu'au 4 novembre 2020.

16.    Le 23 février 2021, la chambre de céans a transmis cette écriture à l'OCE.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l'assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

3.        Le litige porte sur le bien-fondé de la décision par laquelle l'intimé s'est opposé au versement de l'indemnité en cas de RHT à compter du 3 novembre 2020.

4.        Afin de surmonter des difficultés économiques passagères, un employeur peut introduire, avec l'accord de ses employés, une RHT, voire une suspension temporaire de l'activité de son entreprise (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, ch. 1 relatif aux remarques préliminaires concernant les art. 31ss). En effet, selon l'art. 31 al. 1 let. b et d LACI, les travailleurs dont la durée normale du travail est réduite ou l'activité suspendue ont droit à l'indemnité en cas de RHT lorsque la perte de travail doit être prise en considération et la réduction de l'horaire de travail est vraisemblablement temporaire, et si l'on peut admettre qu'elle permettra de maintenir les emplois en question. L'indemnité s'élève à 80 % de la perte de gain prise en considération (art. 34 al. 1 LACI).

Selon l'art. 36 al. 1 LACI, lorsqu'un employeur a l'intention de requérir une indemnité en faveur de ses travailleurs, il est tenu d'en aviser l'autorité cantonale par écrit dix jours au moins avant le début de la réduction de l'horaire de travail. Le Conseil fédéral peut prévoir des délais plus courts dans des cas exceptionnels. Le préavis est renouvelé lorsque la réduction de l'horaire de travail dure plus de trois mois.

Compte tenu de l'art. 58 al. 4 OACI, il doit être considéré que le respect des délais de préavis est une condition formelle du droit. Il s'agit d'un délai de déchéance (ATF 110 V 335 ; RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 36 ; Bulletin LACI RHT G7 ad art. 36). Le délai de préavis ne peut être ni prolongé ni suspendu mais il peut être restitué en présence d'une raison valable (RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 36 ; Bulletin LACI RHT G7 ad art. 36). L'inobservation du délai n'entraîne toutefois pas la péremption générale du droit mais uniquement son extinction pour la période donnée, le début du droit étant reporté de la durée du retard (ATF 110 V 335 ; voir également arrêt du Tribunal fédéral des assurances C_20/98 du 15 septembre 2000 consid. 1c ; RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 36 ; Bulletin LACI RHT G7 ad art. 36). Dans l'hypothèse d'un préavis tardif, il appartient à l'autorité cantonale de s'opposer partiellement au versement de l'indemnité (RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 36 ; Bulletin LACI RHT G7 ad art. 36).

Si une demande ne respecte pas les exigences de forme ou si elle est remise à un organe incompétent, la date à laquelle elle a été remise à la poste ou déposée auprès de cet organe est déterminante quant à l'observation des délais et aux effets juridiques de la demande (art. 29 al. 3 LPGA).

L'indemnité en cas de RHT doit être avancée par l'employeur (art. 37 let. a LACI) et sera, par la suite, remboursée par la caisse de chômage à l'issue d'une procédure spécifique (art. 36 et 39 LACI), étant précisé qu'un délai d'attente de deux à trois jours doit être supporté par l'employeur (art. 32 al. 2 LACI et 50 al. 2 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 [ordonnance sur l'assurance-chômage, OACI - RS 837.02], étant précisé que l'art. 50 al. 2 OACI a été supprimé temporairement en raison de la pandémie de coronavirus).

Le but de l'indemnité en cas de RHT consiste, d'une part, à garantir aux personnes assurées une compensation appropriée pour les pertes de salaire dues à des réductions de temps de travail et à éviter le chômage complet, à savoir des licenciements et résiliations de contrats de travail. D'autre part, l'indemnité en cas de RHT vise au maintien de places de travail dans l'intérêt tant des travailleurs que des employeurs, en offrant la possibilité de conserver un appareil de production intact au-delà de la période de réduction de l'horaire de travail (ATF 121 V 371 consid. 3a).

Une perte de travail est prise en considération lorsqu'elle est due, entre autres conditions, à des facteurs économiques et qu'elle est inévitable (art. 32 al. 1 let. a LACI). Ces conditions sont cumulatives (ATF 121 V 371 consid. 2a).

5.        a. En raison de la propagation de la COVID-19, le Conseil fédéral a, le 28 février 2020, qualifié la situation prévalant en Suisse de « situation particulière » au sens de l'art. 6 al. 2 let. b de la loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de l'homme (loi sur les épidémies ; LEP - RS 818.101). Sur cette base, le Conseil fédéral a édicté l'Ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus du 28 février 2020 (RO 2020 573) puis l'Ordonnance 2 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus du 13 mars 2020 (Ordonnance 2 COVID-19 ; RO 2020 773) qui limitait notamment l'accueil dans les restaurants, les bars, les discothèques et les boîtes de nuit à cinquante personnes (art. 6 al. 2). Après avoir qualifié la situation en Suisse de « situation extraordinaire » au sens de l'art. 7 LEP, le Conseil fédéral a procédé à des modifications de cette ordonnance, notamment en ordonnant la fermeture des restaurants (art. 6 al. 2 let. b). Cette modification est entrée en vigueur le 17 mars 2020 (RO 2020 783). Elle a été abrogée avec effet au 11 mai 2020 (RO 2020 1499). Dès cette date, les restaurants ont pu rouvrir à condition de disposer d'un plan de protection (art. 6 al. 3 let. bbis) et pour autant que les consommations soient prises assises, que le nombre de clients soit limité à quatre personnes à table et que les établissements restent fermés entre 00h00 et 06h00 (art. 6 al. 3bis). L'ordonnance 2 COVID-19 a été abrogée le 22 juin 2020 (RO 2020 773).

Le 19 juin 2020, à la suite d'une diminution du nombre de nouveaux cas, le Conseil fédéral a requalifié la situation extraordinaire en situation particulière et restructuré ses mesures notamment en édictant l'ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre l'épidémie de COVID-19 en situation particulière (Ordonnance COVID-19 situation particulière - RS 818.101.26). Il a en particulier levé l'obligation de rester assis dans les restaurants et la limitation des horaires d'ouverture de ceux-ci.

Le 18 octobre 2020, le Conseil fédéral a notamment imposé le port du masque facial dans les espaces clos accessibles au public des installations et des établissements, y compris les restaurants sauf si les clients sont assis à une table (art. 3b al. 1 et 2 let. c de l'ordonnance COVID-19 situation particulière) et imposé que les aliments et boissons soient consommés uniquement à des places assises (art. 5a de l'ordonnance COVID-19 situation particulière). Ces dispositions sont entrées en vigueur le 19 octobre 2020 (RO 2020 4159).

Le 28 octobre 2020, le Conseil fédéral a étendu l'obligation du port du masque aux espaces publics extérieurs des installations et établissements (art. 3b al. 1 de l'ordonnance COVID-19 situation particulière), limité le nombre de clients à quatre par table dans les restaurants et imposé leur fermeture entre 23h00 et 06h00 (art. 5a de l'ordonnance COVID-19 situation particulière). Ces dispositions sont entrées en vigueur le 29 octobre 2020 (RO 2020 4503).

Le 12 décembre 2020 est entrée en vigueur une modification de l'ordonnance COVID-19 situation particulière prévoyant que les établissements de restauration devaient demeurer fermés entre 19h00 et 06h00 (art. 5a de l'ordonnance COVID-19 situation particulière). Tout canton pouvait toutefois prévoir d'étendre ces heures d'ouverture si les capacités hospitalières étaient garanties, que le taux de reproduction effectif du virus était inférieur à 1 durant au moins sept jours consécutifs et que le nombre de nouvelles infections par 100'000 personnes était inférieur à la moyenne suisse au cours des sept derniers jours également ; le cas échéant, il pouvait décider que les établissements de restauration restaient ouverts au plus tard jusqu'à 23h00 (art. 7 al. 2 et 3 de l'ordonnance COVID-19 situation particulière).

Le 18 décembre 2020, le Conseil fédéral a procédé à une modification de l'ordonnance COVID-19 situation particulière, entrée en vigueur le 22 décembre 2020, et a notamment interdit l'exploitation des établissements de restauration (art. 5a al. 1 de l'ordonnance COVID-19 situation particulière), sous réserve des allègements pouvant être ordonnés par les cantons au sens de l'art. 7 al. 2 et 3 de l'ordonnance COVID-19 situation particulière (RO 2020 5813).

Le 9 janvier 2021, le Conseil fédéral a abrogé l'art. 7 al. 2 et 3 de l'ordonnance COVID-19 situation particulière sur les exceptions cantonales concernant notamment l'ouverture des établissements de restauration (RO 2021 2).

b. Sur le plan cantonal, le Conseil d'État a adopté, le 1er novembre 2020, l'arrêté d'application de l'ordonnance COVID-19 situation particulière et sur les mesures de protection de la population (ci-après : l'arrêté COVID-19), publié dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 2 novembre 2020, qui, à son art. 11 al. 1 let. d a ordonné la fermeture des installations et établissements offrant des consommations, notamment bars, cafés-restaurants, cafeterias, buvettes et établissements assimilés ouverts au public. Selon l'al. 2 de cette disposition, font exception à l'obligation de fermeture résultant de l'al. 1 les magasins d'alimentation et autres points de vente et étals de marchés qui vendent des denrées alimentaires ou des biens de consommation courante. Cet arrêté est entré en vigueur le 2 novembre 2020.

Le 7 décembre 2020, publié dans la FAO du même jour, le Conseil d'État a abrogé l'art. 11 al. 1 let. d de l'arrêté COVID-19 avec effet au 10 décembre 2020 à 00h01 (art. 2 al. 2 de l'arrêté du Conseil d'État du 7 décembre 2020).

6.        S'agissant du domaine particulier de l'indemnité en cas de RHT, le Conseil fédéral a adopté, le 20 mars 2020, l'ordonnance sur les mesures dans le domaine de l'assurance-chômage en lien avec le coronavirus (Ordonnance COVID-19 assurance-chômage ; RS 837.033), avec une entrée en vigueur rétroactive au 1er mars 2020 (art. 9 al. 1), qui prévoyait, à son art. 8b al. 1 que l'employeur n'était pas tenu de respecter un délai de préavis, lorsqu'il avait l'intention de requérir l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail en faveur de ses travailleurs. Cette disposition a été abrogée avec effet au 1er juin 2020 (RO 2020 3569). Quant à l'art. 8c de l'ordonnance COVID-19 assurance-chômage, il prévoyait qu'en dérogation à l'art. 36 al. 1 LACI, le préavis devait être renouvelé lorsque la réduction de l'horaire de travail durait plus de six mois. Cette disposition a été abrogée par modification du 12 août 2020, avec effet au 1er septembre 2020 (RO 3569).

Le 19 mars 2021, l'Assemblée fédérale a adopté l'art. 17b de la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l'épidémie de COVID-19 (loi COVID-19 - RS 818.102). D'après son al. 1er, en dérogation à l'art. 36 al. 1 LACI, aucun délai de préavis ne doit être observé pour la réduction de l'horaire de travail. Le préavis doit être renouvelé lorsque la réduction de l'horaire de travail dure plus de six mois. À partir du 1er juillet 2021, une réduction de l'horaire de travail pour une durée de plus de trois mois ne peut être autorisée que jusqu'au 31 décembre 2021 au plus tard. Toute modification rétroactive d'un préavis existant doit faire l'objet d'une demande auprès de l'autorité cantonale jusqu'au 30 avril 2021 au plus tard.

D'après le ch. III al. 7 de la modification du 19 mars 2021 à la loi COVID-19 (RO 2021 153), l'art. 17b al. 1 entre en vigueur rétroactivement le 1er septembre 2020 et a effet jusqu'au 31 décembre 2021.

Il ressort du message du Conseil fédéral relatif à une modification de la loi COVID-19 du 17 février 2021 que l'art. 17b crée une disposition directement applicable qui, après son entrée en vigueur, n'a pas besoin d'être mise en oeuvre dans l'ordonnance COVID-19 assurance-chômage. L'al. 1, 1ère phr. supprime totalement le délai de préavis pour toutes les entreprises. Le début de la réduction de l'horaire de travail pourra être autorisé à partir de la date du préavis pour autant que toutes les autres conditions dont dépend le droit à l'indemnité soient remplies. Par ailleurs, selon l'art. 36 al. 1 LACI, le préavis doit être renouvelé et la réduction de l'horaire de travail autorisée de nouveau si celle-ci dure plus de trois mois. L'al. 1, 2ème phr. de l'art. 17b de la loi COVID-19 prévoit que l'autorisation de réduction de l'horaire de travail émise par l'autorité cantonale sera désormais valable pendant six mois. Autrement dit, l'entreprise ne devra renouveler le préavis que si la réduction de l'horaire de travail dure plus de six mois. Cette réglementation allègera la charge administrative des entreprises et des organes d'exécution (FF 2021 285, p. 29s.).

7.        a. En l'espèce, la recourante exploite un tea-room qui a été contraint de fermer le 2 novembre 2020 en raison des mesures prises par le Conseil d'État par arrêté du 1er novembre 2020. Par courriel du 4 novembre 2020, l'intéressée a transmis son formulaire de préavis, sollicitant des indemnités en cas de RHT à compter du 3 novembre 2020. Appliquant le droit en vigueur à l'époque des faits, soit l'art. 36 al. 1 LACI, l'intimé ne s'est pas opposé au versement de l'indemnité en cas de RHT dès le 14 novembre 2020 pour une durée de trois mois, reportant ce faisant de dix jours le début du droit à l'indemnité.

Dans son recours, la société se prévaut des directives de l'intimé, publiées sur son site internet, selon lesquelles, aucun délai de préavis n'était applicable à l'égard des établissements ayant dû fermer leurs portes suite aux mesures décidées par le Conseil d'État le 1er novembre 2020, à condition que leur demande de préavis ait été déposée jusqu'au 4 novembre 2020. Elle soutient que, contrairement à ce qu'a retenu l'intimé, elle était dans ce cas de figure puisqu'elle exploitait un tea-room.

En l'occurrence, point n'est besoin d'examiner cet argument, car le recours doit de toute façon être admis pour un autre motif. Ainsi qu'il a été exposé ci-avant (cf. supra consid. 6), depuis la décision sur opposition du 3 décembre 2020, le droit applicable a été modifié par l'adoption, le 19 mars 2021, de l'art. 17b al. 1 de la loi COVID-19, selon lequel aucun délai de préavis ne doit être observé pour la RHT. Selon la disposition transitoire de l'art. 17b al. 1, celui-ci entre en vigueur avec effet rétroactif au 1er septembre 2020. Cette disposition institue ainsi une rétroactivité au sens propre en ce sens que les faits juridiquement déterminants se sont produits avant l'adoption du nouveau droit. Dès lors qu'elle est prévue par une loi fédérale (art. 190 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 [Cst. - RS 101] et qu'elle vise à conférer de nouveaux avantages aux administrés (cf. Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., n. 421), il convient de l'appliquer à la situation de la recourante. Ainsi, dans la mesure où la demande RHT a été formée le 4 novembre 2020, pour des indemnités en cas de RHT à compter du 3 novembre 2020, l'indemnité en cas de RHT doit être accordée dès la date de dépôt de la demande de RHT, soit le 4 novembre 2020.

Contrairement à ce que soutient la recourante, la date de dépôt de la demande de RHT correspond à la date de réception de la demande et non à la date de signature du formulaire de préavis (cf. art. 29 al. 3 LPGA en lien avec l'art. 1 al. 1 LACI). Or, il n'est pas contesté que la recourante a transmis son formulaire de préavis par courriel du 4 novembre 2020 et que l'intimé l'a reçu à cette date.

Pour le reste, et quoi qu'en dise l'intimé, force est d'admettre que la recourante a subi une perte de travail avérée et inévitable. Dans son écriture du 22 février 2021, la recourante a précisé que son personnel de vente, lequel était directement touché par la fermeture du tea-room, était composé d'environ 19 employés, qui avaient dû réduire le nombre d'heures effectuées par semaine. Cette perte de travail résulte du reste du décompte RHT établi par la caisse pour le mois de novembre 2020 selon lequel 18 travailleurs étaient touchés par la réduction du temps effectif de travail et que le pourcentage de la perte de travail due à des raisons économiques s'élevait à 40.58 %. La perte de travail subie par la recourante doit être considérée comme étant consécutive aux mesures prises par le Conseil d'État le 1er novembre 2020 ayant entraîné la fermeture du tea-room à compter du 2 novembre 2020. Or, en tant que ces mesures ont été prises dans le cadre de la pandémie du coronavirus, il convient d'admettre la présence de circonstances exceptionnelles non liées aux risques d'exploitation d'une entreprise. Enfin, dans la mesure où la recourante a continué la vente de ses produits alimentaires, on ne saurait lui reprocher d'avoir failli à son obligation de diminuer le dommage. Il sera, au passage, précisé que, pour la période du 20 septembre au 2 novembre 2020, la recourante n'a pas sollicité d'indemnités en cas de RHT en dépit des conditions restrictives dues aux plans de protection et aux mesures sanitaires édictées sur le plan fédéral et cantonal.

Au vu de ce qui précède, la recourante a droit à l'indemnité en cas de RHT dès le 4 novembre 2020, sous réserve de l'examen par la caisse de chômage des conditions conformément à l'art. 39 LACI.

b. En vertu de l'art. 17b al. 1 de la loi COVID-19, le préavis, en dérogation à l'art. 36 al. 1 LACI, doit être renouvelé lorsque la réduction de l'horaire de travail dure plus de six mois. L'autorisation de réduction de l'horaire de travail émise par l'autorité cantonale est ainsi valable pendant six mois. Dans la mesure où, comme on l'a vu (cf. supra consid. 6), cette disposition est entrée en vigueur avec effet rétroactif au 1er septembre 2020, la période couverte par le préavis durait jusqu'au 3 mai 2021.

8.        Le recours sera donc partiellement admis et la décision litigieuse modifiée en ce sens que la recourante a droit à l'indemnité en cas de RHT, pour une durée de six mois, à partir du 4 novembre 2020, sous réserve de l'examen par la caisse de chômage des conditions conformément à l'art. 39 LACI.

Bien qu'obtenant gain de cause, la recourante, qui n'est pas représentée en justice et qui n'a pas allégué avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacre à la gestion courante de ses affaires, n'a pas droit à des dépens.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA, dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020 en lien avec l'art. 1 al. 1 LACI).

* * * * * *

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Réforme la décision sur opposition du 3 décembre 2020, en ce sens que la recourante a droit à une indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail, pour une durée de six mois, à partir du 4 novembre 2020, sous réserve de l'examen par la caisse de chômage des conditions conformément à l'art. 39 LACI.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

6.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARÉCHAL

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le