Skip to main content

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/4015/2020

ATA/422/2022 du 26.04.2022 sur JTAPI/71/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4015/2020-PE ATA/422/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 avril 2022

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________




Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 janvier 2022 (JTAPI/71/2022)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1999, est ressortissant de la République arabe d’Égypte.

2) Il est arrivé à Genève le 5 août 2017 avec ses parents et sa sœur. Son père travaillant à la mission permanente de la République arabe d’Égypte, il a été mis au bénéfice d’une carte de légitimation.

3) Il a fait la connaissance, en Suisse, de Madame B______, née le ______ 2000, ressortissante érythréenne, au bénéfice d’une autorisation de séjour en qualité de réfugiée.

Leur mariage a été célébré au consulat d’Égypte le 14 octobre 2019.

4) Le 20 février 2020, M. A______ a déposé une demande d'autorisation de séjour en vue de regroupement familial auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM).

5) Sa carte de légitimation a échu le 28 mars 2020.

6) Par courrier du 2 juin 2020, l’OCPM a indiqué à M. A______ que son mariage, célébré auprès d’un consulat, n’était pas reconnu par les autorités d’état civil en Suisse.

7) Le 7 septembre 2020, l’OCPM l’a informé de son intention de refuser sa demande de regroupement familial et de prononcer son renvoi de Suisse.

8) M. A______ n’ayant pas fait valoir son droit d’être entendu, l’OCPM a, par décision du 26 octobre 2020, refusé de lui délivrer une autorisation de séjour et lui a imparti un délai au 22 novembre 2020 pour quitter la Suisse.

Son mariage n’était pas reconnu par les autorités d’état civil en Suisse et le couple émargeait à l’aide sociale. Il n’avait pas démontré avoir acquis le niveau de français A1 à l’oral, ni s’être inscrit à un cours de français. Les conditions d’une autorisation de séjour au sens de l’art. 44 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) n’étaient pas remplies ce qui impliquait que l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) ne trouvait pas application.

9) M. A______ a interjeté recours contre cette décision le 27 novembre 2020 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI). Il a conclu à son annulation et subsidiairement au renvoi de la cause à l’OCPM pour nouvel examen.

Il était au bénéfice d’un contrat de travail de durée indéterminée depuis le 1er juillet 2020, qui prévoyait un salaire mensuel brut, treizième salaire inclus, de CHF 3'889.90 et net de CHF 3'437.15. Ses décomptes de salaire des mois d’août, septembre et octobre 2020 faisaient état, respectivement, d’un salaire net de CHF 2'615.45, 2'856.55 et 2'962.05. Il était indépendant financièrement et ne dépendait plus de l’aide sociale, n’ayant été bénéficiaire de l’Hospice général que durant la période allant du 1er février au 31 mai 2020, ce dans le cadre du dossier de son épouse. Sur ce point et la détermination de son salaire, l’OCPM avait procédé à une constatation inexacte des faits. Une autorisation de séjour permettrait, au regard de son activité lucrative, d’améliorer la situation financière du couple et non de la péjorer.

Il disposait d’un logement adéquat et y faisait ménage commun avec son épouse. Si les autorités compétentes ne devaient pas reconnaître son mariage, il souhaiterait entreprendre avec son épouse toutes démarches utiles en vue de concrétiser, sur le territoire suisse, leur union par la conclusion d’un mariage.

Il maîtrisait parfaitement la langue française et s’engageait à présenter, à la demande de l’autorité, un certificat de langue française de niveau A1 à l’oral, voire une attestation de suivi de cours de français.

10) L’OCPM a conclu au rejet du recours.

Le mariage ne pouvait être reconnu comme valablement célébré. Le regroupement familial prévu à l’art. 44 LEI ne trouvait pas application. Enfin, par courriels des 9 et 25 novembre 2020, Mme B______ l’avait informé de son intention de divorcer.

11) Dans sa réplique, l’intéressé a relevé que les difficultés conjugales dues à la crise avaient été surmontées. Le couple souhaitait poursuivre sa vie commune. Son épouse était revenue sur son intention de divorcer. Ils avaient entamé les formalités en vue de la célébration de leur union devant les autorités suisses.

12) Par décision du 6 avril 2021, le TAPI a suspendu l’instruction du recours à la demande conjointe des parties. L’OCPM avait reçu une demande d’octroi d’autorisation de séjour de courte durée en vue de la célébration de son mariage avec Mme B______.

13) Le 6 septembre 2021, l’OCPM a sollicité la reprise de la procédure, au motif que l’arrondissement de l’état civil de Chêne-Bourg, Thônex et Veyrier lui avait fait savoir que Mme B______ avait annulé la procédure préparatoire en vue de mariage.

14) Le même jour, M. A______ a sollicité un visa pour pouvoir assister au mariage de sa sœur en Égypte. Il a précisé qu’il n’avait pas vu sa famille depuis deux ans.

Le visa lui a été accordé.

15) Après que les parties ont persisté dans leurs conclusions, le TAPI a, par jugement du 27 janvier 2022, notifié le 31 janvier 2022, rejeté le recours.

Il n’était pas contesté que le mariage de l’intéressé, célébré dans un consulat, n’était pas reconnu par les autorités suisses. Ainsi, au moins l'une des conditions cumulatives permettant le regroupement familial, à savoir l'existence d'un ménage commun, n’était pas remplie depuis à tout le moins le mois de juillet 2021. Pour ce motif déjà, le recourant ne pouvait invoquer les art. 44 LEI et 8 CEDH. Partant, il n’était pas nécessaire de déterminer si les autres conditions posées par l’art. 44 LEI étaient remplies et, donc, d'examiner la question de savoir si l’OCPM avait opéré une constatation inexacte des faits quant à la situation salariale de l’administré et sa dépendance à l’aide sociale.

C’était de même à bon droit que son renvoi avait été prononcé.

16) Par acte posté le 2 mars 2022, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité. Il a conclu à son annulation.

Les sentiments qu’il éprouvait pour Mme B______ n’étaient apparemment pas réciproques et leur relation avait pris fin brutalement, à la suite de la décision de celle-ci. Il ne remplissait dès lors plus les conditions pour demander le regroupement familial.

Il avait toutefois récemment rencontré Madame C______ sur sa place de travail, au D______. Leur relation sentimentale s’était développée et ils souhaitaient se marier. Malheureusement, elle n’était pas encore divorcée, mais vivait séparée de son époux, conformément à un jugement du Tribunal civil de première instance du 25 août 2021. La garde sur ses quatre enfants lui avait été confiée. Après avoir été violentée par son mari, elle avait mis du temps à faire confiance au recourant, qui lui apportait soutien émotionnel, sentimental et une confiance dont elle avait besoin avec ses enfants. Le couple souhaitait ainsi se marier dès que possible et agrandir la famille. Mme C______ devait toutefois encore attendre une année environ avant que le divorce ne puisse être prononcé. Le recours avait en conséquence pour objectif que la chambre de céans le laisse résider auprès de sa future femme et de ses enfants et poursuivre ainsi leur vie familiale. S’il devait retourner en Égypte, il vivrait séparé de ceux-ci. Son départ impacterait non seulement leur relation sentimentale mais aussi ses relations avec les enfants de sa compagne ce qui contribuerait à des difficultés scolaires notamment, compte tenu de ce qu’ils avaient déjà enduré par le passé à cause du comportement de leur père.

Il résidait en Suisse depuis presque cinq ans. Il avait pu devenir indépendant, financièrement et « mentalement ». Il était resté seul en Suisse lorsque ses parents et sa sœur avaient quitté ce pays. Il avait mis tous ses efforts pour trouver un emploi et ne pas avoir de dettes. Il travaillait en qualité de serveur et percevait un salaire horaire brut de CHF 26.40. Précédemment, il avait été engagé par la boîte de nuit du « E______ » jusqu’en décembre 2021. Il payait régulièrement ses impôts et était déclaré à l’AVS. Même s’il n’était pas encore marié, il remplissait les conditions pour obtenir le regroupement familial, Mme C______ et ses enfants étant au bénéfice d’une autorisation de séjour en qualité de réfugiés syriens.

Il produisait notamment une fiche de salaire du mois de janvier 2022 pour un salaire brut de CHF 1'898.60.

17) L’OCPM a conclu au rejet du recours.

La relation du recourant avec Mme C______ n’avait aucune incidence sur la présente procédure. Si le projet de mariage devait se concrétiser, une fois le divorce de celle-ci prononcé, une nouvelle demande devrait alors être déposée par le recourant.

18) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

19) Par courrier du 20 avril 2022, le recourant a informé la chambre de céans que Mme C______ était enceinte. Le terme de la naissance de leur futur enfant était prévu le 22 décembre 2022.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur le refus de l’autorité intimée de délivrer au recourant une autorisation de séjour au titre de regroupement familial suite à son « mariage ».

3) a. Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, celle-ci ne connaît pas de l'opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario ; ATA/12/2020 du 7 janvier 2020 consid. 3).

b. Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), qui a alors été renommée LEI, et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l’art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l’espèce, après le 1er janvier 2019 sont régies par le nouveau droit.

4) La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissantes et ressortissants d’Égypte.

a. L’autorité compétente peut octroyer une autorisation de séjour au conjoint étranger du titulaire d’une autorisation de séjour à la condition notamment de vivre en ménage commun avec elle (art. 44 let. a LEI).

b. En l’espèce, le recourant ne conteste pas que le mariage célébré avec Mme B______ au consulat d’Égypte n’était pas reconnu par les autorités suisses et qu’en tous les cas leur relation est terminée. Il ne sollicite dès lors plus d’autorisation de séjour à ce titre, rendant, sur ce point, le recours sans objet.

5) Le recourant sollicite de pouvoir obtenir une autorisation de séjour au titre du regroupement familial compte tenu de sa nouvelle relation avec Mme C______.

Celle-ci étant actuellement mariée, le recourant ne peut revendiquer la qualité d’époux. Comme l’a précisé l’autorité intimée, si le projet de mariage devait se concrétiser, une fois le divorce de celle-ci prononcé, une nouvelle demande devrait alors être déposée par l’intéressé.

La seule annonce de la grossesse de Mme C______ ne modifie pas ce qui précède.

6) Au vu de ce qui précède, le refus de l’OCPM de délivrer une autorisation de séjour pour regroupement familial, confirmé par le TAPI, est fondé, par substitution de motifs.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

7) a. Aux termes de l’art. 64 al. 1 let. c LEI, tout étranger dont l’autorisation est refusée, révoquée ou n’est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyé. La décision de renvoi est assortie d’un délai de départ raisonnable (art. 64d al. 1 LEI). Le renvoi d’un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l’exécution de cette mesure est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

b. En l'espèce, le dossier ne laisse pas apparaître d’éléments qui tendraient à démontrer que le renvoi du recourant serait impossible, illicite ou non raisonnablement exigible ; il ne le soutient d'ailleurs pas.

8) Un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe, et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 mars 2022 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 janvier 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d’État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Krauskopf et Lauber, juges.


 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.