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Décisions | Chambre civile

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C/11870/2023

ACJC/481/2024 du 16.04.2024 sur JTPI/11695/2023 ( SCC ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/11870/2023 ACJC/481/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 16 AVRIL 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 13ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 11 octobre 2023, représenté par Me Julien BLANC, avocat, GVA law, rue des Alpes 15, case
postale 1592, 1211 Genève 1,

et

B______ SA, sise ______, intimée, représentée par Me Diane SCHASCA-BRUNONI, avocate, d.avocats SA, rue Pedro-Meylan 1, 1208 Genève.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/11695/2023 du 11 octobre 2023, notifié à A______ le 16 octobre 2023, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire en protection de cas clair, a ordonné à A______ d'évacuer immédiatement de sa personne, de tout tiers et de ses biens, la villa sise no. ______, avenue 1______ à Genève, en la laissant en bon état d'usage et de propreté, et de restituer les clés à B______ SA (ch. 1 du dispositif), prononcé cette injonction sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP (ch. 2), autorisé B______ SA à requérir par la force publique, dès l'entrée en force du jugement, l'évacuation de A______, ainsi que tout autre occupant éventuel en cas d'inexécution du chiffre 1 du dispositif du jugement et dit que l'intervention de la force publique devrait être précédée de l'intervention d'un huissier judiciaire (ch. 3).

Le Tribunal a arrêté les frais judiciaires à 2'000 fr., compensés avec l'avance fournie par B______ SA et mis à la charge de A______, ce dernier étant en conséquence condamné à payer à B______ SA un montant de 2'000 fr. (ch. 4), ainsi que 2'500 fr. TTC à titre de dépens (ch. 5), et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 6).

B. a. Par acte expédié le 26 octobre 2023 à la Cour de justice, A______ a appelé de ce jugement, dont il a sollicité l'annulation.

Il a conclu à ce que la Cour déclare irrecevable la demande formée par B______ SA le 7 juin 2023 et à ce que cette dernière soit déboutée de toutes ses conclusions, avec suite de frais judiciaires et dépens.

b. Dans sa réponse du 27 novembre 2023, B______ SA a conclu à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle s'en rapportait à justice quant à la recevabilité de l'appel. Elle a, sur ce point, motivé son écriture en ce sens que l'appel était, selon elle, irrecevable, faute de répondre à "l'exigence minimale de motivation".

Sur le fond, elle a sollicité la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et dépens.

A cette occasion, elle a produit trois pièces nouvelles, à savoir des extraits des informations accessibles sur le site internet de l'Etat de Genève (SAD-consultation) relatifs aux demandes d'autorisation de construire et de démolir DD 2______/2, DD 3______/1 et M 4______/1 à la date du 21 novembre 2023.

c. Par répliques et duplique des 8, 18 et 22 décembre 2023, les parties ont persisté dans leurs explications et conclusions respectives.

d. Par courriers du 22 janvier 2024, elles ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure de première instance :

a. B______ SA, société sise à Genève, est propriétaire de la parcelle no 5______ de la commune de Genève-C______ sur laquelle sont érigées deux habitations, soit les bâtiments 6______ (maison sise avenue 1______ no. ______) et 7______ (dépendance sise à la rue 8______ no. ______), faisant l'objet d'un projet immobilier.

D______ en est l'administrateur président.

A______ est actionnaire de la société à hauteur de 3% du capital-actions.

b. Par courrier du 20 décembre 2019, B______ SA a confirmé à A______ son accord avec la mise à disposition gratuite en faveur de ce dernier de ladite "maison sise No. ______ Rue 1______" (bâtiment 6______) pour une durée de six mois, soit, selon déclaration commune des parties sur ce point, dans l'attente de travaux à venir.

Au terme de ces six mois, A______ n'a pas quitté les lieux. Le démarrage des travaux ayant pris du retard, B______ SA a accepté à bien plaire que A______ demeure dans la villa.

A______ allègue que cet accord prévoyait également qu'au début du chantier de démolition de la maison, il pourrait emménager dans la dépendance (bâtiment 7______) sise rue 8______ no. ______, ce qui est contesté par B______ SA. Il n'a produit aucune pièce à l'appui de cette allégation. Il est d'avis que seule une audition des parties - qu'il avait sollicitée en première instance - aurait pu "déterminer la véracité de ce fait".

c. Le 4 mai 2021, B______ SA s'est vu délivrer une autorisation ayant pour objet la démolition partielle d'une habitation (M 4______-RE), ainsi qu'une autorisation de construire ayant pour objet la rénovation d'une habitation et la réhabilitation d'une orangerie (DD 3______-RE) visant le bâtiment 6______.

Le 5 juillet 2021, elle a reçu une autorisation de construire ayant pour objet la construction d'habitats groupés et d'un garage souterrain, un réaménagement du jardin et des abattages d'arbres à la future adresse sise rue 8______ no. ______ (DD 2______-RE) visant le bâtiment 7______. Le 27 janvier 2023, elle a déposé une demande d'autorisation complémentaire concernant cette construction (suppression du 2ème sous-sol et divers aménagements).

Le 13 avril 2023, elle a transmis à l'Office des autorisations de construire les formulaires d'ouverture des chantiers DD 3______-RE et M 4______-RE, les travaux devant débuter le 20 avril 2023 et se terminer le 31 mars 2025.

d. Par courrier du 8 mars 2023, elle a écrit à A______ pour lui "rappeler" que "comme [cela lui] a[vait] été indiqué", il devrait avoir quitté la maison au 20 mars 2023, puisque les travaux devaient impérativement commencer le 1er avril 2023; A______ était invité à être sur place le 20 mars 2023 à 17h pour un état des lieux de sortie et la remise des clefs.

e. Le 17 mars 2023, A______ a répondu à B______ SA qu'il ne pourrait pas quitter les lieux dans le délai imparti.

f. Par courrier du 22 mars 2023, B______ SA l'a averti que les travaux d'abattage des arbres allaient commencer le 28 mars 2023 et l'a à nouveau invité à quitter les lieux immédiatement.

g. Par courrier du 24 mars 2023, A______ a fait part à B______ SA de ce que, bien que leurs rapports soient régis par un contrat de prêt à usage selon art. 305ss CO, le délai de résiliation lui semblait trop court au vu des travaux que la société savait prévus de longue date.

h. Par courriels des 12 avril et 31 mai 2023, B______ SA a à nouveau invité A______ à quitter les lieux.

i. Ce dernier est demeuré dans la maison (bâtiment 6______).

j. Par requête en cas clair déposée le 7 juin 2023 au Tribunal, B______ SA a conclu à ce que A______, ainsi que tout autre occupant, soit, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, condamné à évacuer de manière immédiate de leur personne, de leurs biens et de tous tiers, la villa sise no. ______, avenue 1______ à Genève, en la laissant en bon état d'usage et de propreté et à lui restituer les clefs, et à ce qu'il soit ordonné à l'autorité chargée de l'exécution d'y procéder avec l'assistance de l'autorité compétente en cas d'inexécution dans un délai de dix jours à la suite de l'entrée en force de la décision à rendre.

k. Dans sa réponse du 18 juillet 2023, A______ a conclu à l'irrecevabilité de la requête, ainsi qu'au déboutement de B______ SA de toutes ses conclusions.

Il n'a pas sollicité formellement la comparution personnelle des parties, mais a indiqué "Comparution de M. A______" à titre de preuve pour certains de ses allégués, dont celui relatif à la possibilité alléguée d'occuper le bâtiment 7______ dès le démarrage des travaux.

l. Par courrier du 25 juillet 2023, les parties ont été informées de ce que la cause serait gardée à juger sous dix jours.

m. Par répliques et duplique spontanées des 3, 17 et 23 août 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

n. Aux termes du jugement entrepris, le Tribunal a, notamment, retenu sa compétence ratione materiae au motif que les parties étaient liées par un contrat de prêt à usage, la désignation de l'appelant en qualité de "locataire" dans le cadre de l'accord conclu entre elles n'ayant aucune incidence sur la qualification du contrat.

S'agissant de la requête, il a considéré que la situation était claire, dès lors que B______ SA était propriétaire de la parcelle no 5______ litigieuse, ce qui n'était pas contesté par A______.

La situation était également claire sur le plan juridique, puisque ce dernier occupait gratuitement la villa dont B______ SA était propriétaire, conformément à un contrat de prêt à usage conclu le 20 décembre 2019 pour une durée de six mois. Si la durée initiale était déterminée, le contrat s'était ensuite prolongé tacitement sans qu'aucune échéance n'ait été fixée et s'était transformé en contrat de durée indéterminée, étant rappelé que l'accord des parties prévoyait que A______ pouvait occuper la villa dans l'attente de travaux à venir.

Partant, le premier juge a considéré que la propriétaire était libre de résilier le contrat, ce qu'elle avait fait par courrier du 8 mars 2023 en demandant à l'occupant de restituer la chose prêtée pour le 20 mars 2023. Cette résiliation était d'autant plus valable qu'elle ne contrevenait pas aux règles de la bonne foi, puisque des travaux devaient commencer quelques semaines plus tard et que les parties avaient expressément convenu d'une occupation par l'emprunteur dans l'attente de travaux.

Considérant que A______ ne disposait plus d'aucun titre pour demeurer dans la villa, le Tribunal a fait droit à l'action en revendication de B______ SA.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

1.1.1 Il n'est pas contesté que les parties ont été liées par un contrat de prêt à usage. Dans cette situation, la valeur litigieuse se détermine, par application analogique de la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière d'évacuation du locataire, d'après l'intérêt patrimonial du prêteur à récupérer sa chose (arrêt du Tribunal fédéral 4A_330/2012 du 30 octobre 2012 consid. 2.1; 4A_72/2007 du 22 août 2007 consid. 2.2).

Pour calculer la valeur litigieuse dans les actions en expulsion initiées selon la procédure de l'art. 257 CPC, il faut distinguer les cas où seule est litigieuse l'expulsion en tant que telle, de ceux où la résiliation l'est également à titre de question préjudicielle. S'il ne s'agit que de la question de l'expulsion, l'intérêt économique des parties réside dans la valeur que représente l'usage des locaux pendant la période de prolongation résultant de la procédure sommaire elle-même, laquelle est estimée à six mois. Si, en revanche, le congé est également contesté, il y a lieu de prendre en compte la durée prévisible pendant laquelle l'usage de l'objet se prolongerait si le congé était éventuellement invalidé, soit la période de protection de trois ans de l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 144 III 346 consid. 1.2.1 et 1.2.2.3, in JT 2019 II 235).

La question de savoir s'il convient, en l'espèce, de calculer la valeur litigieuse en tenant compte d'un délai de six mois ou de trente-six mois peut demeurer ouverte, dès lors que, bien que les parties ne se déterminent pas sur la question de la valeur litigieuse, il sera retenu que le bien litigieux pourrait être loué pour un montant d'au moins 1'667 fr. par mois s'agissant d'une maison au centre-ville de Genève et que la valeur litigieuse de 10'000 fr. est en tout état atteinte (10'000 fr. / 6 mois = 1'666 fr. 66). La voie de l’appel est ainsi ouverte.

1.1.2 L'intimée considère que l'appel serait irrecevable, au motif qu'il ne respecterait pas les exigences de motivation, l'appelant se contentant, selon elle, de répéter les faits déjà exposés en première instance, ainsi que de citer et de commenter le jugement sans développer de manière claire ses griefs.

L’appelant doit démontrer le caractère erroné de la motivation attaquée. Il doit tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Sa motivation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre aisément, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision que le recourant attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 141 III 569 consid. 2.3.3; 138 III 374 consid. 4.3.1). Il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement (arrêts du Tribunal fédéral 4A_218/2017 du 14 juillet 2017 consid. 3.1.2; 4A_376/2016 du 2 décembre 2016 consid. 3.2.1).

Une motivation succincte ou sommaire peut, suivant les circonstances, être suffisante (Reetz/Theiler, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozess-ordnung (ZPO), 2016, n. 37 s. ad art. 311 CPC; ACJC/144/2018 consid. 2.1.3; ACJC/569/2012 consid. 1.2.2; ACJC/672/2011 consid. 2). Il faut toutefois qu'il y ait au moins un reproche par conclusion contre le jugement querellé, reproche que l'instance de recours doit pouvoir comprendre, sans avoir à rechercher des griefs par elle-même (Reetz/Theiler, op. cit., n. 12 et 38 ad art. 311 CPC).

In casu, l'appelant formule des critiques à l'égard du jugement entrepris. Contrairement à ce que soutient l’intimée, il ne se contente pas de renvoyer aux moyens soulevés devant le premier juge, mais il désigne les éléments qui auraient dû, selon lui, être pris en compte et les considérations qui auraient dû être adoptées par le Tribunal, de sorte que son appel est suffisamment motivé.

1.1.3 Déposé auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de dix jours (art. 248 let. b et 314 al. 1 CPC) et selon les exigences de forme prescrites par la loi (art. 130, 131 et 311 CPC), l'appel est recevable.

1.2 Sont également recevables la réponse de l'intimée, déposée dans le délai légal (art. 321 al. 2 cum 322 al. 2 CPC), ainsi que les réplique et duplique respectives, conformément au droit de réplique (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1 et 142 III 48 consid. 4.1.1).

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par les juges de première instance et vérifie si ceux-ci pouvaient admettre les faits qu'ils ont retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

1.4 La maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC) et le principe de disposition (art. 58 al. 1 CPC) sont applicables à la présente procédure.

1.5 La question de la recevabilité des pièces nouvelles produites par l'intimée peut rester ouverte dès lors que leur contenu n'est pas décisif pour l'issue du litige.

2. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir considéré que les conditions de l'art. 257 CPC étaient remplies.

Il soutient que la situation juridique ne serait pas claire s'agissant des questions de la durée du contrat et du délai de résiliation. En effet, selon l'appelant, qui raisonne par analogie avec le contrat de bail, le contrat de prêt à usage - d'une durée initiale de six mois - aurait été reconduit tacitement de six mois en six mois, de sorte que l'intimée aurait dû respecter à tout le mois un préavis de six mois pour une échéance de six mois. Quand bien même le contrat aurait été reconduit pour une durée indéterminée, il convenait d'examiner si le prêteur pouvait, sans violer les règles de la bonne foi (art. 310 CO), réclamer son départ de la maison sous dix jours, un tel délai étant impossible à tenir et aucune solution de remplacement ne lui ayant été proposée. L'appelant considère que les clauses du contrat mériteraient d'être examinées dans le cadre d'une procédure ordinaire.

Il relève également qu'en considérant que la "résiliation était d'autant plus valable qu'elle ne contre[venait] pas aux règles de la bonne foi", le Tribunal aurait procédé à une appréciation excédant le cadre de l'art. 257 CPC.

L'appelant soutient par ailleurs que l'état de fait serait contesté et aurait nécessité des mesures probatoires, notamment une audition des parties, pour déterminer le contenu leurs volontés concordantes s'agissant des termes exacts de leur accord relatif aux délais de mise à disposition et de résiliation, ainsi qu'à la mise à disposition d'un bien de remplacement (dépendance 7______). De plus, l'intimée n'avait pas démontré la nécessité de mettre fin au contrat et de le voir quitter la maison. Selon lui, cette habitation disposait d'un accès séparé du chantier. Les autorisations de construire avaient une validité de deux ans et pouvaient être prolongées. Une demande d'autorisation de construire complémentaire avait été déposée et la démolition de la maison litigieuse n'était pas liée au chantier ouvert le 20 avril 2023, si bien qu'il n'y avait pas d'urgence à résilier le contrat de prêt à usage. Enfin, l'intimée aurait pu l'avertir, dès juillet 2021, qu'elle demanderait la libération des lieux.

En tout état, le contrat de prêt n'ayant pas été résilié dans les formes et délais prescrits contractuellement, le simple écoulement d'un délai de six mois dans une procédure inapplicable ne saurait réparer l'erreur du prêteur.

L'intimée considère, quant à elle, que la durée du prêt aurait été déterminée par un usage convenu, soit celui de la mise à disposition et de la jouissance de l'habitation avant le début des travaux, ce qui serait incompatible avec une reconduction du contrat de six mois en six mois. Elle était ainsi en droit de demander la restitution de la chose dès l'usage effectif arrivé à son terme, soit dès le début des travaux, lesquels étaient prévus de longue date, ce dont l'appelant avait connaissance.

Elle relève également que, malgré la mise en demeure formelle de quitter la villa adressée à l'appelant il y a de nombreux mois, celui-ci n'a toujours pas quitté les lieux.

2.1 En vertu de l'art. 257 al. 1 CPC, le tribunal admet l'application de la procédure sommaire lorsque l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé (let. a) et que la situation juridique est claire (let. b).  

L'état de fait n'est pas litigieux lorsqu'il n'est pas contesté par le défendeur. Il est susceptible d'être immédiatement prouvé lorsque les faits peuvent être établis sans retard et sans trop de frais. En règle générale, la preuve doit être rapportée par la production de titres, conformément à l'art. 254 al. 1 CPC. Si le défendeur - qui doit être entendu (art. 253 CPC) - fait valoir des objections et exceptions motivées et concluantes, qui ne peuvent être écartées immédiatement et qui sont de nature à ébranler la conviction du juge, la procédure pour les cas clairs est exclue et la requête irrecevable (ATF 144 III 462 consid. 3.1). A l'inverse, le cas clair doit être retenu lorsque sont émises des objections manifestement mal fondées ou inconsistantes sur lesquelles il peut être statué immédiatement (ATF 138 III 620 consid. 5.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_550/2020 du 29 avril 2021 consid. 5.1). 

La situation juridique est claire lorsque l'application de la norme au cas concret s'impose de façon évidente au regard du texte légal ou sur la base d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées. En règle générale, la situation juridique n'est pas claire si l'application d'une norme nécessite l'exercice d'un certain pouvoir d'appréciation de la part du juge ou que celui-ci doit rendre une décision en équité, en tenant compte des circonstances concrètes de l'espèce, ce qui est notamment le cas lorsqu'il doit statuer sur la bonne foi (ATF 144 III 462 consid. 3.1). 

Si le juge parvient à la conclusion que les conditions du cas clair sont réalisées, le demandeur obtient gain de cause par une décision ayant l'autorité de la chose jugée et la force exécutoire. Si elles ne sont pas remplies, le juge doit prononcer l'irrecevabilité de la demande (ATF 144 III 462 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_550/2020 du 29 avril 2021 consid. 5.1).

2.2 A réception de la requête, le Tribunal donne à la partie adverse l'occasion de se déterminer oralement ou par écrit (art. 253 CPC). L'art. 253 CPC offre explicitement au Tribunal une alternative entre la procédure orale et la procédure écrite (arrêt du Tribunal fédéral 5A_403/2014 du 19 août 2014 consid. 4.2.1; ACJC/239/2014 du 24 février 2014 consid. 3; ACJC/1308/2011 du 17 octobre 2011 consid. 4).

Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend pour le justiciable le droit de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique (ATF 135 II 286 consid. 5.1). Il ne garantit en revanche pas le droit de s'exprimer oralement devant l'autorité appelée à statuer (ATF 130 II 425 consid. 2.1).

2.3 Le prêt à usage est un contrat par lequel le prêteur s'oblige à céder gratuitement l'usage d'une chose que l'emprunteur s'engage à rendre après s'en être servi (art. 305 CO).

Selon l'art. 309 CO, lorsque la durée du contrat n’a pas été fixée conventionnellement, le prêt à usage prend fin aussitôt que l’emprunteur a fait de la chose l’usage convenu, ou par l’expiration du temps dans lequel cet usage aurait pu avoir lieu (al. 1); le prêteur peut réclamer la chose, même auparavant, si l’emprunteur en fait un usage contraire à la convention, s’il la détériore, s’il autorise un tiers à s’en servir, ou enfin s’il survient au prêteur lui-même un besoin urgent et imprévu de la chose (al. 2).

Si le prêt a été fait pour un usage dont ni le but ni la durée ne sont déterminés, le prêteur est libre de réclamer la chose quand bon lui semble (art. 310 CO).

Si la durée du prêt a été déterminée, par un terme, une durée ou l'usage convenu, les parties sont liées par cet accord et le prêteur ne peut réclamer sa chose de façon anticipée qu'aux conditions de l'art. 309 al. 2 CO. Si la durée du prêt ne peut pas être déterminée, ni par la convention des parties ni par l'usage convenu, le prêteur peut réclamer la chose en tout temps (art. 310 CO). Lorsqu'il est convenu l'exploitation par une personne morale d'un centre culturel et social, le prêt n'est pas limité dans le temps, puisqu'on ne peut dire en effet quand l'emprunter a fait l'usage convenu ou aurait pu le faire en agissant de bonne foi (art. 309 al. 1 CO). Les hypothèses visées par l'art. 309 al. 1 CO sont, par exemple, le prêt d'un stylo pour signer une lettre, d'une bicyclette pour aller à la poste, de bijoux pour une soirée, d'une voiture pour un voyage, d'un logement pendant des études universitaires, etc. Lorsque la convention des parties ne permet de discerner aucune limite dans le temps, il s'agit d'un prêt d'une durée indéterminée, ce qui entraîne l'application de l'art. 310 CO, et non de l'art. 309 CO (ATF 125 III 363 consid. 2h et 2i; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 4A_330/2012 du 30 octobre 2012 consid. 2.2).

L’emprunteur a le fardeau de la preuve (art. 8 CC) s’agissant de l’existence d’un terme ou d’une durée, faute de quoi la règle l'art. 310 CO s’applique (Bovet/Richa, CR-CO I, n. 10 ad art. 309 CO).

2.4 A teneur de l'art. 641 al. 1 et 2 CC, le propriétaire d'une chose a le droit d'en disposer librement dans les limites de la loi et il peut la revendiquer contre quiconque la détient sans droit et repousser toute usurpation. Cette disposition donne au propriétaire le moyen de défendre son droit par l'action en revendication pour obtenir la restitution de l'objet (Steinauer, Les droits réels, tome I, 2019, n° 1397). Le propriétaire peut ainsi demander l'évacuation de son immeuble. La restitution sera toutefois pas ordonnée si le défendeur prouve qu'il a le droit de posséder l'objet, soit en vertu d’un droit réel limité (droit de gage, usufruit), soit en vertu d'un droit personnel (découlant, par exemple, d'un bail ou d'un prêt) (Steinauer, op. cit., n° 1407).

2.5 En l'espèce, l'état de fait est établi et la situation juridique est claire, de sorte que c'est à raison que le Tribunal a retenu que les conditions d'application de l'art. 257 CPC étaient réunies. En effet, il n'est pas contesté que l'intimée est propriétaire de la parcelle no 5______ de la commune de Genève-C______ et que les parties ont convenu, à tout le moins dès la date du 20 décembre 2019, de la mise à disposition gratuite en faveur de l'appelant du bâtiment 6______ édifié sur cette parcelle, pour une durée initiale de six mois dans l'attente de travaux à venir. L'appelant n'apporte aucun élément tangible permettant de retenir, comme il l'allègue et comme le conteste l'intimée, que les parties se seraient également entendues sur la mise à disposition d'un bien de remplacement au moment où il devrait libérer ladite maison. Alors qu'il s'est dûment exprimé par écrit devant le premier juge, il n'indique pas dans quelle mesure une audition des parties permettrait d'éclaircir ce point.

A l'expiration du délai de six mois, les travaux n'ayant pas encore commencé, l'appelant a été maintenu à bien plaire dans la maison. Il ne saurait être suivi lorsqu'il prétend que, par analogie avec le contrat de bail, le contrat de prêt à usage aurait alors été reconduit tacitement de six mois en six mois et que, partant, la propriétaire aurait dû résilier le contrat en respectant à tout le moins un préavis de six mois pour une échéance de six mois, la reconduction du contrat selon cette modalité étant contestée par l'intimée et n'étant corroborée par aucun élément du dossier.

Subsidiairement, l'appelant fait valoir que le contrat aurait été prolongé pour une durée indéterminée, l'intimée soutenant, pour sa part, qu'il aurait été prolongé pour une durée déterminée par un usage convenu, à savoir l'usage de la maison jusqu'au début des travaux. La question du délai déterminé ou indéterminé du contrat litigieux peut toutefois rester ouverte, dès lors qu'elle n'est pas susceptible de modifier l'issue du litige. En effet, la demande de quitter les lieux faite par courrier du 8 mars 2023 peut être, dans l'hypothèse d'un contrat à durée déterminée, considérée comme l'avertissement fait à l'appelant de la prochaine résiliation automatique du contrat résultant du fait du commencement des travaux, respectivement, dans l'hypothèse d'un contrat à durée indéterminée, considérée comme la résiliation du contrat. Contrairement à ce que soutient l'appelant, les travaux entrepris au printemps 2023 ont mis en œuvre les autorisations de démolir (M 4______-RE) et de construire (DD 3______-RE) concernant le bâtiment 6______ sur ladite parcelle no 5______. Il importe ainsi peu que l'autorisation de construire DD 2______-RE ait fait l'objet d'une demande d'autorisation complémentaire déposée le 27 janvier 2023, que la maison dispose d'un accès séparé ou encore que les travaux sur celle-ci allaient être exécutés plus tard. Conformément à l'accord des parties, le démarrage des travaux envisagés entraînait la fin du contrat de prêt, sans que l'appelante n'ait à justifier d'une nécessité et/ou d'une urgence particulières. S'agissant du délai dont l'appelant a disposé pour quitter les lieux, quand bien même il ne lui aurait pas été octroyé suffisamment de temps pour déménager comme il le prétend, il sera souligné que la fin du contrat est intervenue en bonne et due forme et qu'il a disposé de huit mois pour libérer la maison avant le prononcé de la décision entreprise, respectivement de plus d'une année à ce jour.

Par conséquent, l'appelant ne disposant plus d'aucun titre pour demeurer dans la maison litigieuse, c'est à raison que le premier juge a fait droit à l'action en revendication de l'intimée.

En l'absence de griefs à l'encontre de l'assortiment de la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP et des mesures d'exécution prononcées par le Tribunal, le jugement entrepris sera intégralement confirmé.

3. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'000 fr. (art. 26 et 35 RTFMC), mis à la charge de l'appelant, qui succombe (art. 95 et 106 al. 1 CPC), et entièrement compensés avec l'avance de frais de même montant fournie par ce dernier, laquelle reste acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).

L'appelant sera, par ailleurs, condamné à verser à l'intimée la somme de 1'000 fr. à titre de dépens d'appel, débours et TVA compris (art. 84, 85 et 90 RTFMC; art. 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 26 octobre 2023 par A______ contre le jugement JTPI/11695/2023 rendu le 11 octobre 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/11870/2023-13.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr. et les met à la charge de A______.

Dit qu'ils sont entièrement compensés avec l'avance fournie par A______, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ SA la somme de 1'000 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Monsieur
Jean REYMOND, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.