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Décisions | Chambre civile

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C/24858/2019

ACJC/113/2024 du 30.01.2024 sur JTPI/11543/2022 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/24858/2019 ACJC/113/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 30 JANVIER 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 1ère Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 octobre 2022, représenté par Me Lida LAVI, avocate, LAVI AVOCATS, rue Tabazan 9,
1204 Genève,

et

B______ SA, sise ______, intimée, représentée par Me Mattia DEBERTI, avocat, NOMEA Avocats SA, avenue de la Roseraie 76A, 1205 Genève.

 

 


EN FAIT

A. a. A______ est copropriétaire avec son épouse d'une parcelle sise sur la commune de C______ [GE], située au chemin 1______ no. 2______, construite d'un bâtiment d'habitation dans lequel ils vivent avec leur famille. Un appartement est également loué à des tiers. Cette parcelle est située en zone 4B et dans une zone de sensibilité au bruit DS II (zone n'autorisant aucune entreprise gênante; cf. art. 43 de l'Ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit, ci-après : OPB).

b. B______ SA est active dans le commerce et le conditionnement de tous produits agro-alimentaires, notamment des fruits et légumes et de leurs dérivés. Elle s'occupe entre autres de la préparation, du conditionnement et de l'expédition des produits maraîchers provenant de la société D______ SA.

E______ est l'administrateur unique de B______ SA.

La société développe son activité au chemin 1______ no. 3______, sur une parcelle classée en zone agricole et dans une zone de sensibilité au bruit DS III (zone acceptant les entreprises moyennement gênante), dont les propriétaires sont E______, F______ et G______.

Le transport par camion des marchandises est confié à des entreprises tierces.

c. L'immeuble de A______ et le quai de chargement des marchandises de B______ SA sont séparés par un carrefour.

d. Pour accéder au quai de chargement, les camions frigorifiques des transporteurs empruntent jour et nuit la voie publique du chemin 1______, lequel est pourvu d'un éclairage public.

e. Il résulte des photographies déposées devant le Tribunal que le chemin 4______, parallèle au chemin 1______, est dépourvu d'éclairage.

f. Depuis le début de l'année 2015, A______ a adressé de nombreuses plaintes à la police et à diverses administrations, communales comme cantonales, notamment le Service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants (ci-après : SABRA), à l'encontre de D______ SA pour nuisances excessives.

g. Début décembre 2015, dix riverains de la société maraîchère, dont A______ et quatre membres de sa famille, ont signé une pétition relativement au passage des camions sur le chemin 1______. Sept personnes, soit la famille A______ ainsi qu'un couple habitant au no. 5______, chemin 6______, ont également demandé que les nuisances sonores nocturnes cessent.

h. Des relevés ont été effectués par le SABRA du 31 mai au 8 juin 2018 et du 17 juin au 22 juin 2019 au moyen d'un enregistreur posé contre la fenêtre d'une chambre à coucher de A______ située au premier étage de son domicile.

i. En juin et juillet 2019, à la requête de A______, un couple d'anciens locataires et la locataire d'alors de ce dernier ont attesté de l'existence de nuisances sonores nocturnes.

j. A______ a été déclaré en incapacité de travail pour maladie par son médecin traitant du 18 juin au 9 juillet 2019 et par le Dr H______, médecin psychiatre, du 2 au 30 septembre 2019 et du 1er au 31 janvier 2020.

Dans un certificat médical daté du 23 septembre 2019, le Dr H______ a attesté que A______ était suivi à sa consultation depuis le 2 septembre 2019 et qu'il présentait des troubles importants du sommeil ainsi qu'une dépression sévère en raison des nuisances nocturnes auxquelles il était exposé, ce qui rendait nécessaire une prise en charge psychiatrique intégrée.

Le 28 septembre 2019, A______ a formé une demande de prestations auprès de l'assurance-invalidité, exposant que la détérioration de sa santé était due à des réveils brutaux durant la nuit devenus quotidiens depuis juin 2019.

k. Par acte du 24 octobre 2019, A______ a formé, devant le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), à l'encontre de B______ SA, une action en cessation de trouble, concluant à ce qu'il soit ordonné à B______ SA de prendre toutes mesures pour que cessent immédiatement les nuisances sonores nocturnes provoquées par son activité, sous la menace de la peine d'amende prévue par l'art. 292 CP, et à ce que le Tribunal dise que faute d'exécution dans les 10 jours dès l'entrée en force de la décision, B______ SA serait condamnée à une amende d'ordre de 1'000 fr. au plus pour chaque jour d'inexécution.

A______ a allégué être victime de nuisances sonores nocturnes excessives liées à l'exploitation par B______ SA de son entreprise. Les nuisances seraient principalement provoquées par le bruit généré par le trafic des véhicules sur l'aire de l'entreprise (les chauffeurs laissant notamment tourner inutilement le moteur) ainsi que par la manutention des marchandises.

Il a fait valoir que B______ SA persistait, à titre de représailles car il s'était opposé à un projet de construction, à décharger les camions au chemin 1______ no. 3______, alors qu'elle avait réalisé en 2017 une extension de son entreprise avec des quais de chargement au chemin 4______, à quelque pas du chemin 1______, et que le nouvel emplacement pouvait être utilisé durant les heures nocturnes.

l. B______ SA a conclu au déboutement de A______ des fins de sa demande.

Elle n'a pas contesté l'existence de nuisances mais a exposé que l'expédition nocturne de marchandises (environ 50% de son chiffre d'affaires) était dictée par des impératifs logistiques, notamment l'éloignement géographique de certains de ses clients, et surtout l'exigence qu'avaient ceux-ci – essentiellement des acteurs de la grande distribution et des grossistes primeurs – de fonctionner désormais en circuit court, afin de garantir la fraîcheur de la marchandise exposée à la vente. Les détaillants ne se contentaient plus de livraisons effectuée la veille au soir. Les tenanciers de stands dans les marchés de plein vent, eux-mêmes fournis par les grossistes primeurs, devaient également disposer de la marchandise avant l'arrivée de leur clientèle.

Les opérations de manutention qui se déroulaient la nuit dans l'entreprise n'étaient pas de nature à perturber le sommeil du voisinage. Contrairement à ce qu'indiquait A______, B______ SA ne disposait pas d'alternatives pour le chargement des camions. Les quais de chargement attenants à la nouvelle serre n'étaient pas utilisables pour le chargement des marchandises car ils ne disposaient pas de chambres frigorifiques. En outre, les nouvelles serres et les quais de chargement attenants constituaient une aire de production soumise à des protocoles d'hygiène interdisant l'accès à des tiers, dont les entreprises de transport. Par ailleurs, les outils de traçabilité et d'aide à l'expédition se situaient dans le dépôt attenant aux quais de chargement utilisés et ces installations ne pouvaient être déplacées dans la nouvelle serre. Enfin, le chemin desservant la nouvelle serre était étroit, non revêtu et présentait un virage à 90 degrés à l'intersection de deux chemins, de sorte qu'il était problématique d'y faire passer des camions durant la nuit.

m. Lors de l'audience de débats d'instruction et de premières plaidoiries du 14 octobre 2020, le demandeur a pris position quant aux allégués de la réponse. Les parties ont eu l'occasion de se prononcer sur leurs offres et réquisitions de preuves respectives. Elles ont persisté dans leurs conclusions aux termes de leurs premières plaidoiries.

n. Par ordonnance du 19 juillet 2021, le Tribunal a rendu une première ordonnance de preuve écartant pour cause de tardiveté les pièces 34 à 60 déposées le 28 octobre 2020 par A______, considérant que celles-ci se composaient de photographies non datées et de courriers tous antérieurs au 14 octobre 2020 et pour lesquels il n'avait pas été allégué qu'ils n'auraient pu être versés à la procédure avant l'ouverture des débats principaux. Il a admis comme moyen de preuve l'interrogatoire et la déposition des parties, l'audition du témoin I______ et ordonné au SABRA de transmettre les rapports de mesures de bruit effectuées au domicile de A______.

o. Par courrier du 17 septembre 2021, le SABRA a adressé au Tribunal les résultats de ses enregistrements des niveaux sonores réalisés du 17 au 22 juin 2019 et du 31 mai au 8 juin 2018.

S'agissant des mesures réalisées en 2019, le SABRA est parvenu à la conclusion que le bruit généré par le trafic des véhicules de livraison sur l'aire de l'entreprise et celui produit par la manutention des marchandises respectait les exigences de l'annexe 6 de l'OPB.

Avec un résultat global Lr en dB(A) variant entre 32 et 39 (0 pour la nuit du 18 et 19 juin où aucune émission n'a apparemment été constatée), les résultats sont significativement inférieurs aux valeurs limites indiquées pour une parcelle en zone de sensibilité DS II.

Dans un courrier daté du 25 juin 2019, A______ avait lui-même indiqué au SABRA (tout en précisant ne pas pouvoir être exhaustif au vu des très nombreux va-et-vient) les heures de chargements et déchargements (manœuvres) des camions pour la période où l'enregistreur du SABRA était posé à sa fenêtre. Il précisait en son courrier avoir dû prendre, pour s'aider à dormir, un somnifère ("Un soir pour m'aider à dormir, j'ai pris du Stilnox").

p. Entendu en qualité de témoin par le Tribunal lors de l'audience du 15 mars 2022, I______, primeur en gros à O______ [GE], a déclaré, en substance, que B______ SA livrait tous les primeurs de la place et certainement des grandes surfaces, que des contraintes horaires liées aux heures auxquelles elle devait livrer ses propres clients existaient, rendant nécessaires des transports nocturnes de marchandise. Aucune instruction n'avait été donnée aux chauffeurs quant aux modalités d'accès et l'arrêt du moteur du camion. En général, le moteur était éteint et le bloc frigorifique devait être à l'arrêt pendant le chargement afin d'éviter que le froid ne soit expulsé. Son entreprise fonctionnait ainsi sans problème de voisinage avec 17 à 18 camions stationnés de minuit à trois heures du matin, moteurs arrêtés pendant les chargements et déchargements, au milieu [du quartier de] P______ [à] O______.

Lors de cette même audience, B______ SA, par la voix de son administrateur E______, a confirmé que les livraisons nocturnes étaient effectuées pour répondre aux exigences des clients, qu'on ne pouvait procéder au chargement depuis la nouvelle serre qui était une aire de production à protéger pour des raisons sanitaires, et que les camions ne pouvaient utiliser d'autres voies d'accès que le chemin 1______; les autres chemins se trouvaient en zone agricole, n'étaient pas éclairés, étaient étroits et présentaient des angles droits, empêchant les semi-remorques de manœuvrer.

A______, entendu au cours de la même audience, avait requis qu'un panneau soit installé pour demander aux chauffeurs d'éteindre les moteurs, ce qu'ils ne faisaient pas. Il n'y avait pas de nuisances au moment de son audition, mais celles-ci devenaient insupportables entre avril et fin septembre chaque année. Il demandait depuis longtemps que les camions empruntent le chemin 4______. On lui avait répondu que le chemin n'était pas praticable; or, des travaux avaient été réalisés en 2020 et il l'était depuis lors. Malgré les démarches qu'il avait entreprises, B______ SA n'avait jamais chercher à diminuer les nuisances.

q. Par ordonnance du 24 mars 2022, le Tribunal a déclaré la pièce 19 produite par B______ SA le 11 janvier 2022 et les pièces 61 à 76 produites par A______ le 11 mars 2022 irrecevables. Il a imparti aux parties un délai au 28 avril 2022 pour déposer leurs plaidoiries finales écrites.

r. A______ a persisté dans ses conclusions, apportant une précision à la première d'entre elles : il concluait toujours à ce que soit ordonné à B______ SA de prendre toutes mesures pour que cesse immédiatement les nuisances sonores nocturnes provoquées par son activité, mais précisait qu'une des mesures à prendre était notamment la pose d'un panneau indiquant aux chauffeurs de camions de couper le moteur et le compresseur frigorifique de leurs véhicules durant le chargement et le déchargement.

s. B______ SA a persisté dans ses conclusions.

t. Les 23 mai 2022 et 15 juillet 2022, A______ a encore déposé au Tribunal deux chargés de pièces nouvelles (pièces 76 à 93).

B. Par jugement JTPI/11543/2022 du 3 octobre 2022, le Tribunal a débouté A______ des fins de sa demande (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 3'200 fr. qu'il a mis à la charge de A______ (ch. 2 et 3), condamné A______ à verser à B______ SA 5'000 fr. TTC à titre de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

Le Tribunal a préalablement considéré que compte tenu des allégations de A______ quant à l'intensité des immissions alléguées, on pouvait admettre que la suppression de celles-ci ferait augmenter la valeur de l'immeuble de plus de 30'000 fr., de sorte que la valeur litigieuse était supérieure à ce montant, entraînant l'application de la procédure ordinaire. Il a également déclaré irrecevables les courriers spontanés de A______ des 23 mai et 15 juillet 2022 et leurs annexes (pièces 76 à 93) dès lors qu'ils avaient été déposés bien après les dernières plaidoiries écrites des parties.

Au fond, le Tribunal a constaté qu'il existait des immissions de bruit à mettre en relation avec l'exploitation du fonds de B______ SA du fait de l'arrivée régulière et nocturne de camions par le chemin 1______ en particulier en période estivale et de bruit liés à la manutention des marchandises (chargement, déchargement). Toutefois, se fondant sur le rapport du SABRA, le Tribunal a considéré qu'il ne pouvait être retenu que ces immissions étaient excessives. Même si le ressenti de A______ ne pouvait être contesté, force était de constater que le niveau des immissions était assez largement en deçà de la valeur limite de 45 dB(A). Par ailleurs, la pétition dirigée contre le passage des camions le long du chemin 1______ n'avait été signée que par dix personnes, dont cinq membres de la famille de A______. Les attestations émanant des locataires ou anciens locataires de A______ étaient peu probantes dès lors qu'il s'agissait de témoignages écrits effectués sans exhortation préalable à répondre aux questions conformément à la vérité. Dans la mesure où l'intensité des immissions devait être établie sur la base de critères objectifs, il apparaissait conforme d'accorder, dans l'appréciation des preuves, plus de poids aux mesures objectives réalisées par le SABRA qu'au ressenti d'une personne. L'appréciation du caractère incommodant d'un son pouvait, en effet, différer très largement d'une personne à l'autre; elle dépendait non seulement du volume sonore, de la fréquence, de la tonalité, de la composante impulsive et du déroulement dans le temps, mais également de facteurs personnels, individuels ou sociaux, de jugements de valeur, de la situation psychique ou de l’activité en cours de la personne concernée. Enfin, A______ n'avait pas démontré que B______ SA lui nuisait à dessein. Il avait été prouvé que les livraisons nocturnes correspondaient à des exigences de la clientèle, non seulement par le témoignage de I______, mais également par diverses pièces versées au dossier. La législation fédérale exemptait le transport des denrées alimentaires dont la consommation était limitée à 30 jours de l'interdiction de circuler de nuit applicable aux véhicules lourds (cf. art. 91 et 91a al. 1 let. g de l'ordonnance sur les règles de circulation routière - OCR). Enfin, A______ ne démontrait pas que les camions de livraison pouvaient emprunter une autre voie que le chemin 1______, étant souligné que les indications de B______ SA quant à l'impraticabilité des autres chemin d'accès (présence d'un virage à angle droit, absence d'éclairage) étaient convaincantes. Il en allait de même des explications fournies quant à l'impossibilité d'utiliser un autre quai de chargement. Enfin, il n'était pas établi que B______ SA tolérerait de manière récurrente que les chauffeurs routiers laissent tourner le moteur de leur camion durant les déchargements et chargements nocturnes. Les éléments de preuve à l'appui de cette accusation étaient essentiellement des plaintes rédigées par A______ lui-même.

C. a. Par acte expédié le 9 novembre 2022 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a appelé de ce jugement, qu'il a reçu le 10 octobre 2022. Il a conclu, sous suite de frais judiciaires et dépens, à son annulation et à ce que qu'il soit ordonné à B______ SA de prendre toutes les mesures pour réduire immédiatement les nuisances sonores (diurnes et/ou nocturnes) provenant de l'aire d'exploitation et notamment la pose de panneau indiquant aux chauffeurs de camion de couper le moteur et le compresseur frigorifique de leur véhicule durant le chargement et le déchargement des marchandises, sous la menace de la peine d'amende prévue par l'art. 292 CP, et à ce que la Cour dise que faute d'exécution dans les 10 jours dès l'entrée en force de la décision B______ SA sera condamnée à une amende d'ordre de 1'000 fr. au plus pour chaque jour d'inexécution.

Il a préalablement conclu à ce que l'expert-architecte J______ et l'acousticien K______ soient auditionnés.

b. B______ SA a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement, sous suite de frais judiciaires et dépens d'appel.

c. Dans leurs réplique et duplique, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

d. A______ a produit des pièces nouvelles soit un courrier de lui-même au Service des contraventions du 21 mai 2022 dans lequel il se plaignait de nuisances sonores entre le 2 et le 13 mai 2022 (pièce 3), un courrier de lui-même à une conseillère administrative de la commune de C______ du 15 juin 2022 dans lequel il se plaignait de nuisances sonores les 14 et 15 juin 2022 (pièce 4), un courrier de lui-même au Service des contraventions du 18 juin 2022 dans lequel il se plaignait de nuisances sonores le 14 juin 2022 (pièce 5), un courrier du Service des contraventions du 20 juin 2022 transmettant les courriers de A______ au Ministère public (pièce 6), un courrier de la société L______ SA du 24 juin 2022 relatif aux relevés des mesures du 17 au 22 juin 2019 (pièce 7), des courriels envoyés entre le 16 et le 18 mai 2022 (pièce 8), un courrier de A______ au Service des contraventions du 2 juillet 2022 dans lequel il se plaignait de la persistance des nuisances (pièce 9), un courrier du secrétaire général de la commune de C______ du 5 juillet 2022 (pièce 10), un courrier de J______ à A______ du 6 juillet 2022 (pièce 11), un "rapport de commercialisation" de la régie M______ pour la période du 19 mai au 17 juillet 2022 indiquant que, compte tenu du passage des camions à côté de la maison ainsi que du bruit des moteurs qui tournaient lorsque ceux-ci étaient au quai de chargement, il conviendrait de baisser le loyer de 5'500 fr. par mois fixé par A______ afin de relancer le bien sur le marché (pièce 12), des courriers de A______ au DSES envoyés entre le 18 juillet 2022 et le 27 août 2022 relatifs à des nuisances sonores survenues entre le 16 juillet 2022 et le 25 août 2022 (pièces 13 à 19), un courrier du DSES à A______ du 29 juillet 2022 (pièce 20), un courrier de A______ à la commune de C______ du 23 juillet 2022 (pièce 21), une attestation médicale datée du 26 juillet 2022 (pièce 22), un certificat médical du 6 octobre 2022 déclarant A______ en incapacité de travail pour cause de maladie tout le mois d'octobre 2022 (pièce 23), un courrier de A______ à la mairie de C______ demandant à consulter les archives du 19 août 2022 (pièce 24), un courrier de A______ à la mairie de C______ du 8 septembre 2022 (pièce 25), un courrier de N______ au conseil administratif de la commune de C______ du 15 septembre 2022 (pièce 26), une offre de prestation de la part de L______ SA du 13 septembre 2022 (pièce 27), le procès-verbal de la réunion du 21 octobre 2022 en présence de représentants de la mairie de C______ et J______ (pièce 28), un courrier de A______ au service des autorisations de construire du 29 septembre 2022 et ses annexes (pièce 29), un dossier d'autorisation de construire daté du 29 août 2022 (pièce 30), un courrier du service des autorisations de construire du 7 octobre 2022 (pièce 31), un courrier de N______ au conseil administratif de la commune de C______ du 7 novembre 2022 (pièce 32), des photographies de camions (pièce 33), un courrier de A______ à la mairie de C______ du 18 novembre 2022 et ses annexes (pièces 34 et 35), un courriel de N______ à A______ du 19 novembre 2022 (pièce 36), une facture de J______ du 16 novembre 2022 (pièce 37), un recours au Tribunal fédéral daté du 3 octobre 2022 contre un arrêt de la Chambre administrative de la Cour du 30 aout 2022 (pièce 38), un recours devant la Chambre administrative de la Cour du 16 février 2023 contre un jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 janvier 2023 (pièce 39) et un courrier de la commune de C______ daté du 7 février 2023 (pièce 40).

e. Les parties ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger par courriers du 4 mai 2023.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), dans les causes patrimoniales dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

En matière d'action en cessation de trouble, pour déterminer la valeur litigieuse, il faut évaluer la valeur dont augmentera le bien-fonds concerné par les atteintes, ou la valeur dont diminuera le bien-fonds qui cause ces atteintes, si les atteintes alléguées sont supprimées; le montant le plus élevé est alors décisif (arrêt du Tribunal fédéral 5A_774/2017 du 12 février 2018 consid. 1.2.4).

En tant qu'il déboute l'appelant de sa demande le jugement entrepris constitue une décision finale de première instance et l'on peut retenir, sur la base de l'appréciation du Tribunal, non contestée en appel, que la moins-value de l'immeuble en raison des nuisances alléguées serait supérieure à 30'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Interjeté dans le délai et les formes prescrits par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1, et 311 al. 1 CPC) auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), l'appel est recevable.

1.3 S'agissant d'un appel, la Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), dans la limite des griefs motivés qui sont formulés (ATF
142 III 413 consid. 2.2.4). Elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

Hormis les cas de vices manifestes, la Cour doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).

1.4 La maxime des débats et le principe de disposition (art. 55 al. 1 et art. 58 al. 1 CPC) sont applicables.

2. L'appelant a produit des pièces nouvelles et sollicite l'audition de deux nouveaux témoins.

2.1.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

Les moyens de preuve qui ne sont apparus qu'après la fin des débats principaux, soit après la clôture des plaidoiries finales (cf. ATF 138 III 788 consid. 4.2; Tappy, Commentaire romand, CPC, 2019, n. 11 ad art. 229 CPC), sont en principe toujours admissibles en appel, pourvu qu'ils soient produits sans retard dès leur découverte. En revanche, il appartient au plaideur qui entend se prévaloir en appel de moyens de preuve déjà existants lors de la fin des débats principaux de première instance de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être invoqué devant l'autorité précédente (ATF
144 III 349 consid. 4.2.1).

2.1.2 Si l'instance d'appel peut librement décider d'administrer des preuves en vertu de l'art. 316 al. 3 CPC, cette disposition ne confère pas au justiciable un droit à la réouverture de la procédure probatoire et à l'administration de preuves (arrêt du Tribunal fédéral 5A_505/2021 du 29 août 2022 consid. 3.3.2). Elle peut administrer des preuves lorsqu'elle estime opportun de renouveler leur administration ou de donner suite à une offre que l'instance inférieure a refusé d'accueillir, de procéder à l'administration d'un moyen nouveau ou d'instruire à raison de conclusions et/ou de faits nouveaux. Le droit à la preuve, comme le droit à la contre-preuve, découlent de l'art. 8 CC ou, dans certains cas, de l'art. 29 al. 2 Cst., dispositions qui n'excluent pas l'appréciation anticipée des preuves (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

2.2 Les pièces 3 à 6, 8 à 32, 34 à 40 produites par l'appelant sont recevables dès lors qu'elles se rapportent à des faits survenus après que la cause a été gardée à juger par le Tribunal, étant relevé que les dernières écritures des parties datent du 28 avril 2022 et que le Tribunal a considéré que les pièces déposées le 23 mai 2022 l'avaient été tardivement.

En revanche, la pièce 7 de l'appelant, soit le courrier de la société L______ SA du 24 juin 2022 relatif aux relevés des mesures du 17 au 22 juin 2019, est irrecevable dès lors qu'elle aurait pu être produite devant le Tribunal et que l'intimé n'expose pas en quoi il avait été empêché de le faire. En effet, disposant des relevés du SABRA à tout le moins depuis le mois de septembre 2021, l'appelant aurait pu faire appel à l'analyse de L______ SA avant que le Tribunal ne garde la cause à juger. Il en va de même des photographies des camions (pièce 33) qui ne portent pas sur un fait nouveau.

L'audition de K______ ayant pour but de corroborer le contenu de la pièce 7 de l'appelant, irrecevable en raison de sa production tardive, cette réquisition de preuve est également tardive dès lors que l'appelant n'explique pas pourquoi il n'a pas pu solliciter l'audition de ce témoin devant le Tribunal.

Enfin, l'appelant sollicite l'audition de J______ pour corroborer le contenu de la pièce 7 et celui du procès-verbal du 21 octobre 2022. S'agissant du premier fait, cette réquisition est tardive, pour les mêmes raisons que l'audition de K______. Le second fait étant d'ores et déjà établi par le procès-verbal du 21 octobre 2022 et la Cour disposant par ailleurs de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la question de savoir si un autre chemin pourrait être emprunté par les camions, il n'est pas nécessaire d'entendre J______ sur ce point. Il ne sera donc pas donné suite à son audition.

3. L'appelant a modifié ses conclusions en appel.

3.1 Selon l’art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée en appel que si les conditions fixées à l’art. 227 al. 1 CPC sont remplies (let. a) et que la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (let. b).

La restriction des conclusions ne constitue pas une conclusion nouvelle mais un retrait partiel de cette demande. Pour ce motif, la réduction des conclusions est admissible en tout temps, c'est-à-dire jusqu'au début des délibérations (art. 227 al. 3 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_184/2013 du 26 avril 2013 consid. 3.2).

3.2 En l'espèce, devant le Tribunal, l'appelant a conclu à ce qu'il soit ordonné à l'intimée de prendre toutes mesures pour que "cessent" immédiatement les nuisances sonores nocturnes provoquées par son activité, l'une des mesures étant la pose d'un panneau indiquant aux chauffeurs de camions de couper le moteur et le compresseur frigorifique de leurs véhicules durant le chargement et le déchargement. En appel, il sollicite qu'il soit ordonné à l'intimée de prendre toutes les mesures pour "réduire" immédiatement les nuisances sonores "(diurnes et/ou nocturnes)" provenant de l'aire d'exploitation et notamment la pose de panneau indiquant aux chauffeurs de camions de couper le moteur et le compresseur frigorifique de leur véhicule durant le chargement et le déchargement des marchandises.

En demandant que l'intimée réduise les nuisances sonores et non qu'elles cessent, l'appelant a restreint ses conclusions de sorte que celles-ci sont recevables à cet égard. En revanche, devant le Tribunal, l'appelant a limité ses conclusions aux nuisances sonores nocturnes de sorte que ses conclusions nouvelles relatives aux nuisances sonores diurnes, qui ne reposent pas sur des faits nouveaux puisque ces nuisances existaient déjà lorsque l'appelant a introduit son action, ne sont pas recevables.

4. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir considéré que les nuisances sonores nocturnes émises par le fonds de l'intimée n'étaient pas excessives.

4.1.1 Selon l’art. 679 CC, celui qui est atteint ou menacé d’un dommage parce qu’un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu’il remette les choses en l’état ou prenne des mesures en vue d’écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts.

L’art. 684 CC dispose que le propriétaire est tenu, dans l’exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d’exploitation industrielle, de s’abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin (al. 1) et que sont interdits en particulier la pollution de l’air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d’ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d’après l'usage local, la situation et la nature des immeubles (al. 2).

L'action à raison de l'atteinte due à une immission excessive tend à faire prendre les mesures propres à ramener les effets de l'exploitation du fonds à une mesure tolérable (Steinauer, Droit réels, Tome II, 2020, n. 2621).

Les immissions ne sont prohibées par l'art. 684 CC que si elles sont excessives. Pour délimiter les émissions qui sont admissibles et celles qui ne le sont pas, c'est-à-dire s'il y a excès, l'intensité de l'effet est déterminante (ATF 132 III 49 consid. 2.1 in JdT 2006 I 99).

L’excès, soit le caractère illicite de l’immission, s’apprécie au regard de l’ensemble des circonstances, en mettant en balance l’intérêt à l’exercice libre du droit de propriété et celui du voisin à ne pas subir de troubles ou dommages dans l’exercice du sien, d’autres intérêts ne devant pas entrer dans la règle en ligne de compte, notamment des intérêts économiques, techniques ou sociaux. Cette pesée des intérêts doit prendre en considération, d’une part, que l’auteur de l’immission n’a pas de droit subjectif à émettre à charge des fonds voisins et, d’autre part, que le voisin touché a une obligation de tolérer vis-à-vis de l’exploitation des fonds voisins (Piotet, Commentaire romand, CC II, 2016, n. 25 ad art. 684 CC).

Le caractère excessif des immissions doit être apprécié selon des critères objectifs, en prenant comme échelle la sensibilité d'une personne moyenne qui se trouverait dans la même situation (ATF 132 III 49 précité). Cela signifie que l'appréciation subjective de l'immission par le voisin touché n'entre pas en ligne de compte. La pesée des intérêts doit être opérée objectivement, sans égard à une prédisposition ou à une pathologie particulière de la personne légitimée à agir. On parle ainsi de l’appréciation de l’immission par une personne ordinaire, moyennement sensible (Piotet, op. cit., n. 27 ad art. 684 CC).

4.1.2 En matière de protection contre les immissions excessives, le droit public et le droit privé prévoient des régimes qui sont en soi distincts l'un de l'autre. Toutefois, il existe des convergences et des recoupements entre les deux domaines. En particulier, lorsqu'il s'agit de déterminer les limites de la tolérance que se doivent les voisins eu égard à l'usage local, à la situation et à la nature des immeubles (art. 684 al. 2 CC), les normes de droit public peuvent jouer un rôle (règles de police des constructions, plans d'affectation, règles relatives à la protection contre le bruit, à la protection de l'air, etc.). Certes, les règles de droit public sont destinées à protéger d'autres intérêts que les règles de droit privé : le droit public de l'environnement tient par exemple compte du fait que certaines catégories de personnes ont une sensibilité plus élevée (art. 13 al. 2 LPE) que le sujet de droit ordinaire qui sert de référence en droit privé. Ainsi, le droit public prévoit des valeurs générales de référence, contrairement au droit privé qui suppose une appréciation limitée au cas d'espèce. Cependant, il y a lieu, selon un principe général, d'appliquer les différentes normes de l'ordre juridique de façon cohérente et non contradictoire : dans l'application des règles de droit pertinentes pour trancher un litige, le juge doit tenir compte des éventuelles règles qu'un autre domaine du droit consacre au même objet, dans toute la mesure possible. En ce sens, les autorités compétentes doivent donc contribuer à l'harmonisation du régime de protection contre les immissions excessives. En particulier, dès lors que les annexes à l'OPB prévoient des valeurs limites d'exposition pour les immissions sonores, celles-ci doivent être prises en considération pour juger de la limite tolérable en droit privé (ATF 126 III 223, consid. 3c et les références citées).

Pour évaluer et limiter la pollution sonore, la législation sur la protection contre le bruit définit des valeurs de planification, des valeurs limites d’immission et des valeurs d’alarme, et ce pour différents types de bruit. Ces valeurs sont adaptées au degré de sensibilité de la zone exposée et sont plus basses la nuit que le jour. Les valeurs limites d'exposition sont arrêtées dans l'ordonnance sur la protection contre le bruit (ci-après : OPB) et s'appuient sur la loi sur la protection de l'environnement. L'OPB définit en ses annexes des valeurs limites d'exposition pour différents types de bruit. Les annexes 3 et 6 de l'OPB concernent respectivement le bruit du trafic routier et le bruit de l'industrie et des arts et métiers. Selon dites annexes, les valeurs limites d'immission Lr en dB (A) s'appliquant au bruit du trafic routier en zone DS II est de 60 le jour et de 50 la nuit (cf. art. 1 et 2 de l'Annexe 3 à l'OPB). La valeur limite de planification et d'immission Lr en dB (A) s'appliquant aux bruit produit en zone DS II par les installations industrielles, artisanales et agricoles, par la manutention des marchandises dans les installations industrielles, artisanales et agricoles, par le trafic sur l'aire d'exploitation des entreprises industrielles et artisanales ainsi que dans les environs immédiats des bâtiments agricoles ou encore par les installations de chauffage de ventilation ou de climatisation est de 55 (valeur limite de planification), respectivement 60 (valeur limite d'immission) le jour et de 45 (valeur limite de planification), respectivement 50 (valeur limite d'immission) la nuit.

4.2 En l'espèce, le premier juge, se fondant sur le rapport du SABRA, a considéré que les nuisances sonores engendrées par l'intimée étaient d'une intensité admissible pour une personne moyennement sensible compte tenu des valeurs limites édictées dans l'OPB.

L'appelant n'a pas fait valoir devant le Tribunal que les chiffres indiqués dans le rapport du SABRA seraient inexacts, ni sollicité qu'une contre-expertise soit réalisée ou encore demandé que les résultats du SABRA soient soumis à un expert acousticien afin qu'ils soient circonstanciés. Par ailleurs, les pièces produites par l'appelant devant la Cour tendant à remettre ces chiffres en question sont irrecevables. Par conséquent, en tant qu'il s'est fondé sur le rapport du SABRA pour évaluer l'intensité des nuisances sonores, le jugement n'est pas critiquable. Par ailleurs, le fait que la valeur locative de l'appartement voisin de celui de l'appelant soit moindre compte tenu des nuisances sonores nocturnes ne permet pas de retenir que celles-ci seraient objectivement excessives. Il est en effet indiscutable que la valeur d'un bien immobilier situé aux abords de nuisances sonores s'en trouve diminuée même si ces nuisances sont admissibles.

Devant le Tribunal, l'appelant s'est limité à faire valoir que les chiffres résultant du rapport du SABRA ne reflétaient pas ce qu'il subissait, à savoir son ressenti subjectif. En appel, il ne conteste pas le jugement en tant qu'il retient que les nuisances sonores engendrées sont d'une intensité admissible pour une personne moyennement sensible. Il plaide uniquement que ces nuisances ont sur lui des conséquences importantes qui ont engendré des incapacités de travail et qu'il a même déposé une demande de prestations auprès de l'assurance-invalidité pour cette raison. Or, le fait, incontestable, que l'appelant souffre du bruit occasionné par le bruit émis par les camions et de leur chargement la nuit ne permet pas encore de conclure que toute personne de sensibilité moyenne placée dans la même situation en souffrirait avec la même intensité. A cet égard, rien de pertinent ne peut être tiré de la pétition signée par les membres de la famille de l'appelant et par un autre couple. En effet, la portée des affirmations des premiers doit être relativisée compte tenu de leurs liens affectifs avec l'appelant et la signature de la pétition par un couple dont le logement ne se trouve pas à proximité du quai de chargement n'est pas de nature à établir des immissions excessives sur le fonds de l'appelant. Par ailleurs, les deux attestations faites par les locataires de l'appelant, à la requête de ce dernier, alors qu'ils ne s'étaient jamais plaints de nuisances sonores précédemment ne sont pas probantes dès lors qu'ils n'ont pas été entendus en qualité de témoins. L'appelant n'a d'ailleurs pas remis en cause la décision du Tribunal sur ce point. Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que l'appelant était plus sensible que la moyenne des gens de sorte que les nuisances sonores ne pouvaient pas être considérées comme excessives puisqu'elles respectaient les limites fixées par le droit public.

Les immissions produites par le fonds de l'intimée n'étant pas excessives, cette dernière ne saurait être contrainte à prendre des mesures pour les diminuer et la solution à laquelle est parvenu le Tribunal sera confirmée.

Il n'est dès lors pas nécessaire d'examiner si les transporteurs, dont l'intimée n'est pas l'employeuse, seraient en mesure de circuler selon un autre itinéraire que le chemin 1______, lequel n'est pas interdit aux camions, étant relevé que l'absence d'éclairage du chemin 4______ ne semble pas permettre à des camions d'y circuler de nuit sans danger. Il n'est pas non plus nécessaire de statuer sur la pose d'une signalétique aux abords du quai de chargement afin de sensibiliser les chauffeurs au bruit engendré par les moteurs et compresseurs des camions frigorifiques; si la Cour ne saurait ainsi imposer une telle mesure, force est d'admettre qu'elle serait souhaitable, aux fins d'apaiser une situation de voisinage litigieuse depuis de nombreuses années.

4.3 Compte tenu de l'issue du litige, point n'est besoin d'examiner si, comme elle le prétend, l'intimée ne possèderait pas la légitimation passive dès lors qu'elle n'est pas propriétaire du bien fonds sur lequel elle exerce son activité et que ce sont des transporteurs indépendants, et non ses employés, qui procèdent au chargement des camions.

4.4 Au vu de ce qui précède, l'appel est rejeté.

5. Les frais judiciaires d'appel seront mis à la charge de l'appelant qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront fixés à 2'700 fr. (art. 17 et 35 RTFMC) et compensés avec l'avance de même montant fournie par l'appelant, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

L'appelant sera condamné aux dépens d'appel de l'intimée, arrêtés à 4'000 fr., débours et TVA compris (art. 84, 85 et 90 RTFMC; art. 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 9 novembre 2022 par A______ contre le jugement JTPI/11543/2022 rendu le 3 octobre 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/24858/2019.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 2'700 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont entièrement compensés avec l'avance de frais fournie par lui, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser 4'000 fr. à B______ SA à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.