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Décisions | Chambre civile

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C/24405/2022

ACJC/1723/2023 du 12.12.2023 ( IUO ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/24405/2022 ACJC/1723/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 12 DECEMBRE 2023

 

Entre

1) A______/1______ SA, sise ______ (FR);

2) A______/2______ BV, sise ______, Pays-Bas;

3) A______/3______ SA, sise ______ (FR);

demanderesses, représentées toutes trois par Me Frédéric SERRA, avocat, HOUSE ATTORNEYS SA, route de Frontenex 46, case postale 6111, 1211 Genève 6,

et

B______ GMBH, sise ______ (SG), défenderesse.

 


EN FAIT

A. a. A______/1______ SA (ci-après : A______/1______ SA ou demanderesse 1) est une société anonyme inscrite au Registre du commerce fribourgeois, qui a pour but la fourniture de prestations de services en faveur de toutes entités du groupe A______ ainsi que l'acquisition, l'exploitation, la concession et la vente de licences, brevets, marques, dessins, modèles, droits d'auteurs, connaissances techniques et autres valeurs immatérielles.

A______/3______ SA (ci-après : A______/3______ SA ou demanderesse 2) est une société anonyme inscrite au Registre du commerce fribourgeois, dont le but est notamment la promotion, la distribution et la commercialisation en Suisse de produits de luxe et qui distribue notamment en Suisse les produits de "D______" auprès des boutiques portant cette enseigne.

A______/2______ BV (ci-après : A______/2______ BV ou demanderesse 3) est une entité de droit néerlandais, chargée notamment de la distribution de produits vendus sous la marque "D______" en Suisse auprès de partenaires tiers soit des boutiques qui ne portent pas l'enseigne de la marque précitée.

A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV appartiennent au groupe A______.

b. B______ GmbH est une société à responsabilité limitée, inscrite au Registre du commerce saint-gallois, qui a pour but notamment le "e-commerce", soit une boutique en ligne virtuelle exploitée par le truchement du site internet "C______.ch".

Elle offre à la vente en ligne des produits (dont les best-sellers sont "les aspirateurs, les ventilateurs, les chaises de bureau, les lampes annulaires, les caméras selfie, les toilettes de camping et autres articles ménagers") dont elle se procure les données, contre paiement, auprès de diverses bases de données de produits et d'images aux Etats-Unis et en Allemagne. Elle utilise des algorithmes qui ajoutent chaque jour de façon automatique de nouveaux produits sur la plateforme en ligne.

B______ GmbH affirme ne pas disposer de stocks ni produire des marchandises en Suisse. Selon ses dires, lorsqu'elle reçoit une commande, payée en franc suisse par un client, via le site "C______.ch", elle procède à l'achat en euro des produits visés auprès de commerçants et logisticiens en ligne en Allemagne, avant de les dédouaner en Suisse et les expédier au client par la poste suisse.

c. En 2008, la marque horlogère "D______" a intégré le groupe A______. Elle se décrit comme à l'avant-garde de la haute horlogerie contemporaine depuis sa création en 1995.

Elle commercialise diverses collections, dont l'une est intitulée "E______". Selon A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV, il s'agirait d'une collection "signature", composée de "pièces complexes dont l'ensemble reflète une ______ teintée d'une ______".

d. En 2020, a été lancé le modèle de montre "E______/4______", qui comporte des complications importantes dont un "______ – l'une des fonctions horlogères les plus complexes – accompagnées d'indicateurs de fonctions pour la répétition des sonneries". Cette montre est offerte à la vente en Suisse au prix de 577'000 fr. dans les boutiques D______ ainsi qu'auprès des revendeurs D______.

A______/1______ SA est titulaire du design international DM/5______ (ci-après : Design D______), déposé et enregistré le ______ mars 2020 pour des montres, désignant notamment la Suisse et valable à tout le moins jusqu'au ______ mars 2025.

Le design D______ est composé d'une ______ (fixée à la ______ du mouvement), créant un effet ______ du fait de ______.

Si les chiffres romains X, XI et XII se devinent encore, les autres index ne sont plus identifiables, éclatés en autant de 6______ ______ de tailles différentes et orientées de manière ______ depuis le bord de la lunette.

Les caractéristiques essentielles du Design D______ sont les suivantes :

(1) Une première bande circulaire est composée de ______ marquant les heures 1 à 11;

(2) Les éléments décoratifs en forme de "6______" placés respectivement aux heures 3, 4 et 6 à 9, de base trapézoïdale et de différentes longueurs, partent de l'extérieur du cadran et pointent en s'effilant vers l'intérieur du cadran;

(3) La "6______" à 9h pointe légèrement au-dessus du centre du cadran et s'étend légèrement plus loin que le centre;

(4) La "6______" à 8h pointe légèrement au-dessus du centre du cadran pour venir toucher la "6______" à 9h;

(5) La "6______" à 7h pointe à gauche de centre du cadran et s'étend jusqu'à toucher la "6______" à 8h, formant avec elle un ______;

(6) La "6______" à 6h pointe légèrement à gauche du centre du cadran et s'étend jusqu'à toucher la "6______" à 8h, légèrement à droite de la "6______" à 7h, formant avec ces deux "6______" deux ______;

(7) La "6______" à 5h (sans base trapézoïdale), plus courte, pointe vers le centre du cadran;

(8) La "6______" à 4h pointe et s'étend plus ou moins jusqu'au centre du cadran dans la direction de la "6______" à 8h;

(9) La "6______" à 3h pointe vers le centre du cadran et s'étend jusqu'à un peu plus du quart du cadran, créant un léger espace avec l'extrémité des autres "6______";

(10) Les heures 10 à 3 sont représentées par des chiffres romains, d'aspect ______ dont la pointe est orientée vers le centre du cadran;

(11) Les chiffres romains des heures 10 à 12 s'étendent jusqu'à la "6______" à 9h et viennent s'écraser contrer cette dernière;

(12) Entre les chiffres romains et les "6______", le cadran est ajouré.

La montre E______/4______ présente non seulement les caractéristiques du Design D______, mais aussi les éléments suivants :

(1)        La couleur ______ pour les "6______" à 3, 4, 6 et 9h;

(2)        La couleur ______ pour les chiffres romains aux heures 10 à 2;

(3)        Quatre ______ extérieures, plus larges en leur base, intégrées au boîtier et courbées vers le bas;

(4)        Deux ______ centrales plates intégrées au boîtier;

(5)        Une ______ côté droit du boîtier avec cabochon cylindrique dentelé.

e. Durant quelques jours en mars et avril 2022, B______ GmbH a offert à la vente un modèle de montre "F______", avec une image, dans sa boutique en ligne ("C______.ch"), suivant le procédé d'apport automatique de produits à la plateforme présenté plus haut (cf. A. b).

Le 21 mars 2022 en particulier, il était possible d'acquérir la montre "F______" au prix de 124 fr. 50 sur "C______.ch" et de se la faire livrer à une adresse en Suisse.

A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV soutiennent que de nombreuses caractéristiques de la montre "F______" reprennent le design D______ de manière identique ou légèrement modifiée faisant d'elle une imitation.

Les caractéristiques essentielles de la montre "F______" sont les suivantes :

(1) Une première bande circulaire est composée de ______ marquant les heures de 1 à 12;

(2) Les éléments décoratifs en forme de "6______" placés respectivement aux heures 3 à 9, de base ______ et de différentes longueurs, partent de l'extérieur du cadran et pointent en s'effilant vers l'intérieur du cadran;

(3) La "6______" à 9h pointe légèrement au-dessus du centre du cadran et s'étend légèrement plus loin que le centre;

(4) La "6______" à 8h pointe légèrement au-dessus du centre du cadran pour venir toucher la "6______" à 9h.

(5) La "6______" à 7h pointe à gauche du centre du cadran et s'étend jusqu'à toucher la "6______" à 8h formant avec elle un ______;

(6) La "6______" à 6h pointe légèrement à gauche du centre du cadran et s'étend jusqu'à toucher la "6______" à 8h, légèrement à droit de la "6______" à 7h, formant avec ces deux "6______" deux ______;

(7) La "6______" à 5h, d'une longueur similaire à la "6______" à 4h, pointe vers le centre du cadran;

(8) La "6______" à 4h pointe et s'étend plus ou moins jusqu'au centre du cadran dans la direction de la "6______" à 8h;

(9) La "6______" à 3h (rectangulaire) s'étend jusqu'à un peu plus du quart du cadran, créant un léger espace avec l'extrémité des autres "6______";

(10) Les heures 10 à 2 sont représentées par des chiffres romains d'aspect ______ dont la pointe est orientée vers le centre du cadran;

(11) Les chiffres romains des heures 10 à 12 s'étendent jusqu'à la 6______ à 9h et viennent s'écraser contre cette dernière;

(12) Entre les chiffres romains et les "6______", le cadran est ajouré.

f. Par courrier de son conseil du 21 mars 2022, A______/1______ SA a mis en demeure B______ GmbH de cesser d'offrir à la vente des imitations, annonçant qu'elle intenterait des procédures judiciaires pour faire respecter ses droits de propriété intellectuelle, sauf si la précitée s'engageait par écrit, avant le 25 mars 2022, à notamment "cesser et renoncer dès ce moment et pour le futur à offrir à la vente, stocker, fabriquer, mettre en circulation, importer, exporter et faire transiter les [montres "F______"]".

A réception de ce courrier, B______ GmbH a retiré du site internet l'offre de la montre litigieuse. Elle n'a pas pris l'engagement requis par A______/1______ SA dans le délai prolongé par celle-ci au 8 avril 2022.

Par courriel du 7 avril 2022, B______ GmbH s'est adressée en ces termes à l'avocate de A______/1______ SA : "Si à l'avenir, nous devions répertorier des produits qui ne respectent pas la propriété intellectuelle de votre client, n'hésitez pas à nous envoyer un e-mail avec l'URL précise et nous la retirerons immédiatement dans les 48h".

A______/1______ SA a imparti un ultime délai à B______ GmbH au 19 avril 2022 pour prendre les mesures requises dans son courrier du 21 mars 2022.

Par courriel du 25 avril 2022, B______ GmbH a répondu ne pas avoir vendu une seule montre "F______" et a contesté toute implication dans un conflit de droits de propriété intellectuelle ou de marques entre "F______" et "D______". Elle ne pouvait pas s'engager dans la mesure requise par A______/1______ SA car cela couvrirait tous les litiges susceptibles de se présenter à l'avenir entre elles. La procédure la plus appropriée consistait à ce que A______/1______ SA l'interpelle lorsqu'elle considèrerait que sa propriété intellectuelle était lésée et cela, dans l'optique de retirer immédiatement l'offre en ligne.

B. a. Par acte déposé au greffe universel le 8 décembre 2022, A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV ont saisi la Cour de justice d'une action en interdiction avec fourniture de renseignements et en remise de gain échelonnée à l'encontre de B______ GmbH. Elles ont pris les conclusions suivantes, avec suite de frais judiciaires et dépens :

"1. Interdire à B______ GmbH d'utiliser, notamment de fabriquer, entreposer, offrir, mettre en circulation, importer, exporter, faire transiter et posséder à ces fins, en Suisse, la montre identifiée ci-dessous, quelle que soit la couleur utilisée [suit une reproduction du modèle de montre];

 

[image]

 

2. Interdire à B______ GmbH de reproduire et mettre à disposition la montre identifiée au chiffre 1 ci-dessus, sur quelque support que ce soit, y inclus dans une publicité, et/ou dans un catalogue et/ou sur les réseaux sociaux et/ou sur tout site internet, notamment www.C______.ch, pour les personnes situées en Suisse;

3. Ordonner la confiscation de toute montre, identifiée au chiffre 1 ci-dessus, en possession de B______ GmbH, et la destruction du cadran de ces montres;

4. Ordonner à B______ GmbH, dans un délai de 30 jours à compter de la décision à rendre, d'indiquer à A______/1______ SA, A______/2______ BV et A______/3______ SA, prises conjointement et solidairement, en lien avec la montre identifiée au chiffre 1 ci-dessus (i) la provenance (avec adresse exacte des fournisseurs) de ces montres et le nombre de ces montres en sa possession et (ii) les coordonnées complètes des acquéreurs industriels de ces montres et le nombre de montres qui ont été remises à ces acquéreurs industriels;

5. Ordonner à B______ GmbH, dans un délai de 30 jours à compter de la décision à rendre, de remettre à A______/1______ SA, A______/2______ BV, et A______/3______ SA, prises conjointement et solidairement, tous les justificatifs et pièces comptables, tels que notamment les bons de commandes et factures, permettant de déterminer :

(i) le nombre de montres identifiées au chiffre 1 ci-dessus que B______ GmbH a vendu en Suisse ou à l'étranger depuis la Suisse, à des clients finaux (privés) et/ou des acquéreurs industriels;

(ii) le prix hors taxes de vente de chaque montre (prix par unité) mentionnée sous chiffre 5 (i) et

(iii) le chiffre d'affaires total réalisé par B______ GmbH en lien avec les montres mentionnées sous chiffre 5 (i).

6. Dire que les interdictions et injonctions prononcées aux chiffres 1 à 5 ci-dessus sont assorties de la menace, signifiée aux organes de B______ GmbH, de la peine d'amende prévue à l'art. 292 du Code pénal qui réprime l'insoumission à une décision de l'autorité;

Cela fait mais dans tous les cas :

7. Autoriser A______/1______ SA, A______/2______ BV et A______/3______ SA à modifier leurs conclusions sous chiffre 8 ci-dessous en fonction des informations obtenues conformément à leur conclusion sous chiffre 5 ci-dessus et/ou de l'administration des preuves.

8. Condamner B______ GmbH à verser à A______/1______ SA, A______/2______ BV et A______/3______ SA, prises conjointement et solidairement, un montant de CHF 124.50".

A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV allèguent notamment que B______ GmbH a vendu un ou des modèles de montres "F______".

Elles ont offert en preuve de leurs allégués des pièces, ainsi que l'interrogatoire de B______ GmbH, l'inspection du modèle "F______" et la production des pièces no 501 (toutes les données, dans un format fichier "Word" ou similaire, relatives au nom de domaine www.C______.ch, en particulier les noms et coordonnées complètes du titulaire du nom de domaine www.C______.ch, en mains de la fondation Switch) et no 502 (justificatifs et pièces comptables tels que notamment bons de commande et factures relatifs aux montres vendues en Suisse ou à l'étranger depuis la Suisse, en mains de B______ GmbH).

b. Dans sa réponse du 7 mars 2023, B______ GmbH a conclu au déboutement de A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV des fins de leur action. Elle a notamment contesté la valeur litigieuse avancée, observant sur ce point que celle-ci était de "CHF 0.00 pour 0 montre vendue : minima non curat praetor".

Elle conteste avoir procédé à une vente de la montre "F______", précisant que si elle avait reçu une commande, ce qui ne s'était pas produit, elle se serait approvisionnée auprès de "G______.de", où le modèle était disponible et pouvait être livré en Suisse, et affirme n'avoir ainsi réalisé aucun bénéfice.

Elle n'a pas formulé d'offre de preuve.

c. Aux termes de la réplique et de la duplique, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

d. A l'audience des débats d'instruction tenue par la Cour le 6 juin 2023, B______ GmbH a admis que la contrefaçon alléguée était "évidente", sur quoi A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV ont renoncé à requérir l'inspection du modèle "F______".

B______ GmbH a déclaré qu'elle ignorait que la montre "F______" était offerte à la vente sur son site jusqu'à ce que A______/1______ SA le lui signale; dès qu'elle en avait eu connaissance, elle avait fait en sorte de retirer l'offre, et mis sur la liste des produits bloqués la marque "F______" ainsi que tous les noms des "Maisons" du Groupe A______. Elle n'avait pas agi à dessein et considérait avoir répondu à toutes les exigences.

A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV ont renoncé à l'offre de preuve par interrogatoire de B______ GmbH ainsi qu'à la réquisition de production de la pièce 501, et persisté s'agissant de la réquisition de production de la pièce 502. Elles ont admis ne pas avoir d'élément concret donnant à penser qu'une ou plusieurs montres "F______" auraient été vendues par B______ GmbH.

Après l'ouverture des débats principaux, les parties ont plaidé, persistant dans leurs conclusions respectives.

e. Par arrêt préparatoire ACJC/1103/2023 du 29 août 2023, la Cour a rejeté la requête en production de la pièce 502 formulée par A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV, et admis les pièces produites au titre de moyens de preuve des allégués de A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ SA.

f. Lors de l'audience du 6 novembre 2023, la Cour a ordonné la clôture des débats. Les parties ont plaidé, persistant dans leurs conclusions respectives.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1.1 Aux termes de l'art. 5 al. 1 CPC, le droit cantonal institue la juridiction compétente pour statuer en instance cantonale unique sur, notamment, les litiges portant sur des droits de propriété intellectuelle, y compris en matière de nullité, de titularité et de licence d'exploitation ainsi que de transfert et de violation de tels droits (let. a) et les litiges relevant de la loi fédérale du 19 décembre 1986 contre la concurrence déloyale (LCD) lorsque la valeur litigieuse dépasse 30'000 fr. ou que la Confédération exerce son droit d'action (let. b).

Le législateur genevois a désigné la Chambre civile de la Cour civile de la Cour de justice comme juridiction compétente (art. 120 let. a LOJ).

1.1.2 Pour les actions civiles fondées sur les dispositions spéciales des lois de propriété intellectuelle (notamment la LDes), la valeur litigieuse n'est pas déterminante pour ce qui est de la saisine de l'instance cantonale unique de l'art. 5 CPC. En matière de concurrence déloyale, seuls les litiges d'une valeur litigieuse dépassant 30'000 fr. peuvent être portés devant cette juridiction spéciale. Pour les litiges visés à l'art. 5 al. 1 let. b CPC, la valeur litigieuse se détermine selon les articles 91 ss CPC (Bridel, Les effets et la détermination de la valeur litigieuse en procédure civile suisse, 2019, p. 94).

Lorsque l'action ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent déterminée et si les parties n'arrivent pas à s'entendre sur ce point, le tribunal détermine la valeur litigieuse (art. 91 al. 2 i.i. CPC). Le défendeur qui conteste la valeur litigieuse alléguée par la partie adverse a le devoir de détailler sa contestation (arrêt du Tribunal fédéral 4A_83/2016 du 22 septembre 2016 consid. 4.4). Dans l'analyse des éléments factuels avancés par les parties et propres à établir la valeur litigieuse, le degré de preuve requis réside dans la simple vraisemblance (ATF 130 III 321 consid. 3.3; Bridel, op. cit., p. 538 s.).

Définir la valeur économique de droits de propriété intellectuelle, respectivement en établir la vraisemblance, peut s'avérer très difficile. Pour le Tribunal fédéral, sauf élément objectif contraire, un litige relatif à la protection d'une marque d'importance secondaire devrait avoir une valeur litigieuse comprise entre 50'000 fr. et 100'000 fr. (ATF 133 III 490 consid. 3.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_727/2016 du 29 mai 2017 consid. 2.3.2). Selon Zürcher, la valeur de marché de droits de propriété intellectuelle d'une grande importance économique, notamment en termes de chiffre d'affaires et de publicité, devrait être comprise entre 500'000 fr. et 1'000'000 fr. (Zürcher, Der Streitwert im Immaterialgüter- und Wettbewerbsrechtsprozess, sic! 2002, p. 493 ss., 505).

1.1.3 En l'occurrence, les demanderesses se sont prévalues d'un dommage en tout état supérieur à 250'000 fr., par référence au modèle de montres qu'elles mettent en vente à un prix dépassant 500'000 fr. l'unité, en se fondant sur la LDes et sur la LCD.

La défenderesse, sans conclure formellement sur ce point, a fait valoir que la valeur litigieuse des conclusions de la demanderesse n'atteindrait pas le montant prévu à l'art. 5 al. 1 let. b CPC, au vu de l'absence de vente réalisée. L'argumentaire de la défenderesse ne convainc pas. En effet, l'action en justice intentée par les demanderesses ne se résume pas à la seule remise du gain (éventuel) réalisé par la défenderesse, mais concerne plus généralement la protection d'un design, respectivement d'un produit sujet de comparaisons parasitaires. Il s'agit donc d'un litige portant sur un droit immatériel dont la valeur litigieuse est à établir au vu des circonstances concrètes du cas d'espèce.

Au stade de la vraisemblance, il n'apparaît pas que la quotité avancée par les demanderesses serait manifestement erronée, cette dernière s'inscrivant d'ailleurs dans la ligne de la jurisprudence du Tribunal fédéral.

La valeur litigieuse de 30'000 fr., requise pour les litiges relevant de la LCD, est dès lors largement atteinte. Partant, la Cour, en tant qu'instance cantonale unique, est compétente ratione materiae pour connaître l'ensemble du présent litige.

1.2 Le tribunal du domicile ou du siège du lésé ou du défendeur ou le tribunal du lieu de l'acte ou du résultat de celui-ci est compétent pour statuer sur les actions fondées sur un acte illicite (art. 36 CPC). La notion d'acte illicite doit être interprétée de manière large, ce qui signifie que le for de l'art. 36 CPC est notamment ouvert en ce qui concerne les actions fondées sur la LDes et la LCD (Haldy, CR CPC, 2e éd., 2019, n. 2 ad art. 36 CPC).

En matière d'atteinte à un droit de propriété intellectuelle par le biais d'un site internet, la compétence des tribunaux suisses, au titre de lieu de résultat de la violation, peut être invoquée dès que l'accès au site litigieux est possible depuis la Suisse, ce qui sera en principe toujours le cas (arrêt du Tribunal fédéral 4C_341/2005 du 6 mars 2007 consid. 4.1 et 4.2; ACJC/188/2023 du 9 février 2023 consid. 1.2).

Dans le cas présent, le site internet suisse de la défenderesse (www.C______.ch), lieu de résultat de la présumée atteinte, est librement accessible depuis le canton de Genève. Ainsi, la compétence ratione loci de la Cour de céans doit être admise.

1.3 La demanderesse 1 étant titulaire du design dont la protection s'étend à la Suisse et les demanderesses 2 et 3 invoquant une concurrence déloyale commise à leur encontre, elles disposent de la qualité pour agir (art. 35 LDes et 9 LCD).

1.4 Déposée selon la forme requise (art. 130 et 221 CPC), la demande est recevable pour le surplus.

1.5 La procédure ordinaire s'applique aux litiges pour lesquels est compétente une instance unique au sens des art. 5 et 8 CPC (art. 243 al. 3 i.i. CPC).

2.             Les demanderesses prennent des conclusions fondées, pour la demanderesse 1, titulaire du Design D______, sur la Loi fédérale sur la protection des designs (LDes), pour les demanderesses 2 et 3, sur la Loi fédérale contre la concurrence déloyale (LCD).

2.1 Le design est un ensemble de lignes et/ou de surfaces, contours, formes et couleurs ou matériaux caractéristiques, qui donnent leur apparence à un produit dans son entier ou dans une de ses parties (Dessemontet, CR PI, 2013, n. 4 ad art. 1 LDes). Le droit sur un design prend naissance par l'enregistrement du design dans le Registre (suisse) des designs (art. 5 al. 1 LDes). Seul un design nouveau et original peut être protégé (art. 2 al. 1 LDes). Le dépôt crée la présomption de la nouveauté et de l’originalité du design ainsi que la présomption du droit de le déposer (art. 21 LDes).

La protection du droit sur un design s’étend aux designs qui présentent les mêmes caractéristiques essentielles et qui, de ce fait, dégagent la même impression générale qu’un design enregistré (art. 8 LDes). L'impression générale se définit en quelque sorte comme l'image, constituées de l'ensemble des caractéristiques essentielle du design, qui subsiste à court terme dans la mémoire d'un acheteur potentiel (ATF 133 III 189 consid. 3.4; 130 III 636 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_565/2016 du 2 mai 2017 consid. 3.3).

Pour identifier une éventuelle contrefaçon ou imitation, il s'agit donc de comparer le design enregistré, d'une part, et la prétendue imitation, d'autre part. Si l'imitation présente les mêmes caractéristiques essentielles que le design enregistré et si elle dégage, de ce fait, la même impression d'ensemble, celle-ci viole le droit du titulaire ayant déposé en premier son design. Selon la doctrine, toutes les caractéristiques ne doivent pas systématiquement être reprises du moment que les caractéristiques imitées et les autres éléments produisent une même impression générale (Cherpillod, CR PI, 2013, n. 12 ad art. 8 LDes et réf. citées).

2.2 Agit de façon déloyale celui qui compare de façon inexacte, fallacieuse, inutilement blessante ou parasitaire sa personne, ses marchandises, ses œuvres, ses prestations ou ses prix avec celles ou ceux d'un concurrent ou qui, par de telles comparaisons, avantage des tiers par rapport à leur concurrents (art. 3 al. 1 let. e LCD). Cette disposition tend notamment à sanctionner le parasitisme. Selon le Tribunal fédéral, les comportements par lesquels un concurrent se rapproche sans nécessité de la prestation d'autrui ou en exploite la renommée sont déloyaux indépendamment du risque éventuel de confusion. On peut exploiter la renommée d'autrui par exemple en intégrant le produit ou les services d'autrui dans sa publicité de manière à opérer un transfert d'image en sa faveur. Il suffit qu'un signe similaire à celui d'autrui se trouve utilisé d'une manière telle que ceci ne puisse être compris autrement que comme une concurrence parasitaire et qu'il suscite auprès du public une association d'idées avec la marque ou le produit d'autrui (ATF 135 III 446 consid. 7.1).

2.3 En l'espèce, la défenderesse admet que le modèle "F______" est une "contrefaçon évidente" du Design D______. De plus amples développements quant à la violation du design enregistré ne sont dès lors pas nécessaires.

La défenderesse ne conteste pas avoir offert à la vente sur sa boutique en ligne la contrefaçon que constitue la montre "F______". Les similitudes entre les deux modèles sont au demeurant manifestes. S'agissant donc d'une copie de la montre E______/4______, le public associera sans nul doute l'imitation et le produit distribué par les demanderesses 2 et 3. Le transfert d'image est bel et bien opéré et la notoriété de la montre E______/4______ est ainsi usurpée. La circonstance que, à en croire la défenderesse, cette offre soit liée à son modèle d'affaires basé sur une alimentation automatique de sa plateforme en ligne par des algorithmes, est sans pertinence à cet égard. Il n'est pas non plus relevant qu'elle ait ignoré, comme elle l'affirme, la mise en vente de cette montre.

Le fait d'avoir ainsi mis en vente la contrefaçon, qui plus est pour une somme plus que largement inférieure au prix d'acquisition de la montre imitée, constitue un comportement parasitaire, devant être qualifié d'acte de concurrence déloyale au sens de l'art. 3 al. 1 let. e LCD.

3.             Les demanderesses concluent en premier lieu à ce qu'il soit fait interdiction à la défenderesse d'utiliser, notamment de fabriquer, entreposer, offrir, mettre en circulation, importer, exporter, faire transiter et posséder à ces fins, en Suisse, la montre "F______"; de même à ce qu'il lui soit interdit de reproduire et mettre à disposition ce modèle sur quelque support que ce soit, y inclus dans une publicité et/ou réseaux sociaux et/ou sur tout site internet, notamment "C______.ch", pour des personnes en Suisse.

3.1 La demanderesse 1 fonde sa prétention en interdiction sur la Loi fédérale sur la protection des designs (LDes).

3.1.1 Le droit sur un design confère à son titulaire le droit d’interdire à des tiers d’utiliser le design à des fins industrielles. Par utilisation, on entend notamment la fabrication, l’entreposage, l’offre, la mise en circulation, l’importation, l’exportation, le transit ainsi que la possession à ces fins (art. 9 al. 1 LDes). Selon Cherpillod, "l'offre consiste à faire savoir que l'on est prêt à remettre un ou plusieurs objets qui constituent une contrefaçon ou une imitation, sans qu'il soit nécessaire que la remise de l'objet intervienne effectivement ensuite (il peut y avoir une offre même si l'objet n'est pas encore fabriqué)" (Cherpillod, op. cit., n. 14 ad art. 9 LDes; dans le même sens : Wang, Designrecht, in : SIWR VI, Designrecht, Bâle et al. 2007, p. 208).

Le titulaire qui subit ou risque de subir une violation imminente de ses droits peut en requérir l'interdiction auprès du tribunal (art. 35 al. 1 let. a LDes). Le titulaire qui intente action en interdiction doit être inscrit au registre au moment de l'ouverture de ladite action (art. 35 al. 3 LDes). Son droit d'action se dirige à l'encontre de toute personne qui participe à l'atteinte (Schlosser, CR PI, 2013, n. 3 ad art. 35 LDes). Le prononcé d'une telle interdiction n'est envisageable que lorsque le titulaire dispose d'un intérêt suffisant. Un tel intérêt n'existe que si une atteinte est imminente. Un indice pour une telle atteinte future réside par exemple dans le fait que des atteintes similaires ont eu lieu par le passé et qu'il faut craindre une réitération. Un risque de réitération sera en règle générale admis aussi longtemps que l'intimé conteste l'illicéité du comportement incriminé (ATF 124 III 72 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_570/2022 du 16 mai 2023 consid. 2.1; 4A_45/2012 du 12 juillet 2012 consid. 5.2.2).

3.1.2 En l'espèce, il n'est pas contesté que le modèle "F______" constitue une imitation illicite du Design D______. En tant que titulaire inscrit au registre pour ce design, la demanderesse 1 est fondée à obtenir l'interdiction requise à l'encontre de toute personne sur le point de porter atteinte à son droit, respectivement ayant porté atteinte à ce droit et risquant de réitérer.

Il est établi qu'il a été possible – fût-ce brièvement – d'acquérir la montre "F______" dans la boutique en ligne de la défenderesse ("C______.ch") et de se la faire livrer à une adresse en Suisse. Ce faisant, la défenderesse a violé le droit au design de la demanderesse 1.

La défenderesse, en dépit des mesures techniques qu'elle a prises, ne semble pas saisir la portée de la violation commise. Il ne peut non plus être exclu que, en fonction des aléas des algorithmes, un modèle ne se retrouve à nouveau offert à la vente sur le site "C______.ch". Il y a donc lieu d'admettre un risque de réitération justifiant le prononcé d'une interdiction.

3.2 Les demanderesses 2 et 3, qui distribuent la montre "E______/4______" en Suisse et qui se prévalent d'une violation de l'art. 3 al. 1 let. e LCD, requièrent l'interdiction de toute atteinte future à leurs droits.

3.2.1 Celui qui, par un acte de concurrence déloyale, subit une atteinte dans sa clientèle, son crédit ou sa réputation professionnelle, ses affaires ou ses intérêts économiques en général ou celui qui en est menacé, peut demander au juge de l'interdire, si elle est imminente (art. 9 al. 1 let. a LCD). Si le demandeur a déjà subi une atteinte et qu'il parvient à apporter la preuve de cette dernière, il faut présumer que l'auteur est susceptible de réitérer tant qu'il ne reconnait pas l'illicéité de son acte. Dans cette situation, le juge doit retenir l'imminence d'une nouvelle atteinte, qu'il s'agira donc d'interdire (Fornage, CR LCD, 2017, n. 17 ad art. 9 LCD).

3.2.2 Pour les mêmes motifs que ceux développés ci-dessus, comme la défenderesse ne reconnait pas sa part dans la violation de l'art. 3 let. e LCD, l'imminence d'une nouvelle atteinte doit être retenue conformément à la pratique du Tribunal fédéral. Les demanderesses 2 et 3 sont ainsi fondées à obtenir une interdiction suivant l'art. 9 al. 1 let. a LCD.

3.3 Il sera dès lors interdit à B______ GmbH d'utiliser, notamment de fabriquer, entreposer, offrir, mettre en circulation, importer, exporter, faire transiter et posséder à ces fins, en Suisse, la montre "F______", imitation du Design D______, quelle que soit la couleur utilisée. De même, il lui sera interdit de reproduire et mettre à disposition ce modèle sur quelque support que ce soit, y inclus dans une publicité et/ou sur les réseaux sociaux et/ou sur tout site internet, notamment "C______.ch", pour des personnes situées en Suisse.

Rien n'indiquant que la défenderesse ne se conformera pas à cette interdiction, il n'y a pas lieu de l'assortir de la menace d'amende prévue à l'art. 292 CP.

En définitive, au vu du libellé des conclusions en interdiction que comporte la demande, il ne se justifie pas d'opérer une distinction en fonction des fondements précités ni des titulaires des droits à l'interdiction.

4.             La demanderesse 1 et les demanderesses 2 et 3, se fondant sur la LDes, respectivement la LCD, concluent à la confiscation de toutes les contrefaçons en possession de la défenderesse et à la destruction des cadrans de celles-ci.

4.1 Selon l'art. 36 LDes, le tribunal peut ordonner la confiscation assortie de la réalisation ou de la destruction des produits fabriqués illicitement. La décision de recourir à de telles mesures appartient au juge en vertu de son pouvoir d'appréciation (art. 4 CC). La confiscation aura donc lieu lorsqu'il est à prévoir, en particulier, que le défendeur ne respectera pas l'injonction qui lui est faite de ne pas fabriquer et mettre sur le marché des produits portant atteinte aux droits de propriété intellectuelle du demandeur (Fuochi, CR PI, 2013, n. 3 ad art. 69 LBI). Une fois confisqués, les produits illicites seront réalisés ou détruits, selon les circonstances propres au cas d'espèce.

La LCD reste muette quant à la problématique de la confiscation. Selon la doctrine, cette mesure peut néanmoins être requise par le biais d'une action en cessation au sens de l'art. 9 al. 1 let. b LCD (Rüetschi/Roth, BSK UWG, 2013, n. 43 ad art. 9 LCD; Fornage, op. cit., n. 22 ad art. 9 LCD).

4.2 En l'espèce, la défenderesse affirme ne jamais avoir eu en sa possession aucune montre "F______". Ses explications, sur son modèle d'affaires, apparaissent plausibles. Pour leur part, les demanderesses ont admis ne disposer d'aucun élément permettant d'établir que la défenderesse aurait en sa possession des modèles contrefaits.

Dès lors, la Cour retiendra que les conclusions en confiscation sont dépourvues d'objet. Les demanderesses en seront déboutées.

5.             Se prévalant de son droit au design, la demanderesse 1 requiert encore un certain nombre de renseignements.

5.1 Si tant est qu'il subisse ou risque de subir une violation de ses droits, le titulaire du design peut demander au juge d'obliger le défendeur à fournir des renseignements quant à la provenance, le nombre d'objets en sa possession fabriqués illicitement, la désignation des destinataires et du nombres d'objets qui ont été remis à des acquéreurs industriels (art. 35 al. 1 let. c LDes). Le titulaire qui intente action en fourniture de renseignement doit être inscrit au registre au moment de l'ouverture de ladite action (art. 35 al. 3 LDes). Son droit d'action se dirige à l'encontre de toute personne qui participe à l'atteinte (Schlosser, op. cit., n. 3 ad art. 35 LDes).

5.2 En l'occurrence, rien n'établit que la défenderesse n'aurait pas d'ores et déjà fourni l'ensemble des informations utiles. Les demanderesses ne motivent d'ailleurs pas davantage spécifiquement leur intérêt sur ce point.

Partant, elles seront déboutées de leurs conclusions à cet égard.

6.             Les demanderesses concluent enfin, sur le principe, à la remise du gain réalisé par la défenderesse, se réservant de déterminer le montant de leurs prétentions en fonction des ventes réalisées. Elles ont formulé une conclusion portant dans tous les cas sur 124 fr. 50.

6.1 Tant l'art. 35 al. 2 LDes que l'art. 9 al. 3 LCD renvoient aux dispositions sur la gestion d'affaire du CO concernant la remise de gain. L'art. 423 al. 2 CO permet à l'ayant droit (maître) de réclamer à l'auteur de l'atteinte (gérant) les profits qui ont résulté de ses agissements (gestion), ce jusqu'à concurrence de son enrichissement (Cherpillod, op. cit., n. 44 ad art. 35 LDes). Entre autres conditions, la réalisation d'un gain en lien avec l'atteinte est essentielle à l'action fondée sur l'art. 423 CO.

6.2 En l'occurrence, rien ne permet de retenir qu'une vente de la montre litigieuse par la défenderesse se serait produite. Il n'y a donc pas lieu d'examiner davantage ces conclusions.

Les demanderesses en seront déboutées.

7.             Les frais judiciaires seront arrêtés, conformément à l'art. 17 RTFMC, à 10'800 fr. et compensés avec l'avance de frais opérée, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 CPC).

Aucune des parties n'ayant obtenu entièrement gain de cause, les frais seront répartis selon le sort de la cause (art. 106 al. 2 CPC).

La défenderesse succombe s'agissant des deux conclusions en interdiction formulées par les demanderesses. Elle supportera ainsi les frais judiciaires à raison de 5'000 fr., le solde étant mis à la charge des demanderesses.

La défenderesse sera en outre condamnée à verser aux demanderesses des dépens, arrêtés à 4'000 fr. (art. 84 et 85 RTFMC), pour les mêmes motifs et au vu de la demande d'une cinquantaine de pages (dont une dizaine consacrée à la reproduction d'images), d'une brève réplique et de deux audiences, ainsi que de la complexité relative de la cause.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'action en interdiction avec fourniture de renseignements et en remise de gain échelonnée formée le 8 décembre 2022 par A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV contre B______ GmbH dans la cause C/24405/2022.

Au fond :

Interdit à B______ GmbH d'utiliser, notamment de fabriquer, entreposer, offrir, mettre en circulation, importer, exporter, faire transiter et posséder à ces fins, en Suisse, la montre "F______" (selon reproduction à l'attendu B.a du présent arrêt), quelle que soit la couleur utilisée.

Interdit à B______ GmbH de reproduire et mettre à disposition cette montre sur quelque support que ce soit, y inclus dans une publicité et/ou sur les réseaux sociaux et/ou sur tout site internet, notamment "www.C______.ch", pour des personnes situées en Suisse.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 10'800 fr. et les compense avec l'avance de frais versée par A______/1______ SA, acquise à l'Etat de Genève.

Les met à la charge de B______ GmbH à raison de 5'000 fr. et à la charge de A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV, solidairement entre elles, à raison de 5'800 fr.

Condamne B______ GmbH à verser à A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV, solidairement entre elles, la somme de 5'000 fr. à titre de remboursement des frais judiciaires.

Condamne B______ GmbH à verser à A______/1______ SA, A______/3______ SA et A______/2______ BV, solidairement entre elles, la somme de 4'000 fr. à titre de dépens.


 

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur
Jean REYMOND, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

La présidente :

Nathalie RAPP

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.