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Décisions | Chambre civile

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C/5260/2021

ACJC/1339/2023 du 03.10.2023 sur JTPI/1775/2023 ( OS ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5260/2021 ACJC/1339/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 3 OCTOBRE 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 23ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 6 février 2023, comparant en personne,

et

B______ SA, sise ______, intimée, représentée par Me Robert HENSLER, avocat, FONTANET & ASSO, Grand-Rue 25, case postale 3200, 1211 Genève 3.

 

 


EN FAIT

A. a. C______ exploite depuis 2010, sous la forme d'une société anonyme ayant pour raison sociale B______ SA, un centre médical spécialisé (ci-après : la clinique) dans la médecine ______ [spécialité] qui se situe dans le centre commercial de D______ (Genève). Il en est l'administrateur unique.

b. A______, né en 1940, est un ex-instituteur devenu dirigeant du groupe E______ puis de F______ [compagnies d'assurances]. Il a pris une retraite anticipée en 1998, à l'âge de 58 ans, mais a continué à déployer certaines activités. Il a notamment occupé le poste de vice-président d'une fondation créée par G______.

c. C______ et A______ se sont connus il y a une vingtaine d'années par l'intermédiaire de G______.

Dans un premier temps, leur relation a été purement "professionnelle", C______ prodiguant des soins à A______ et à son épouse. Elle est ensuite devenue amicale, les deux hommes se retrouvant régulièrement pour boire un café.

A______ s'est également lié d'amitié avec les trois enfants de C______, pour lesquels il faisait figure de grand-père, allant parfois les chercher à l'école, les accompagnant dans leurs activités extrascolaires et les assistant dans l'apprentissage de l'allemand.

d. A compter de fin 2015 – début 2016, A______ a apporté son aide à C______ pour des questions en lien avec l'administration de la clinique.

Simultanément, C______ a cessé de facturer ses soins à A______ et son épouse. Selon A______, seule une vingtaine de séances au maximum n'auraient pas été facturées.

e. En été 2020, un litige est survenu entre les deux amis au sujet de l'éventuelle rémunération de A______ pour les activités accomplies pour le compte de la clinique; ce dernier avait été déçu d'apprendre, à la fin du mois de juillet 2020, que C______ n'envisageait pas de le rétribuer pour les services qu'il avait fournis au motif qu'ils avaient une relation d'amitié.

f. Par courrier du 6 août 2020, C______ s'est dit surpris et attristé par les propos tenus par son ami dans ses envois du 4 août 2020, non produits à la procédure, dès lors qu'il le considérait comme un frère. Il lui a précisé qu'il faisait partie de la "team" de la clinique et qu'il avait, par son "implication constante et méticuleuse, œuvré et contribué au bon développement de cette dernière". Il espérait donc que leur amitié puisse perdurer au-delà de leur contentieux.

g. Par courrier du 19 octobre 2020, A______ a requis de C______ le paiement d'une somme de 28'800 fr., arrondie à 28'000 fr., à titre de salaire pour le travail accompli pour son compte pendant trois ans à raison de deux heures par semaine durant 48 semaines par année (4 semaines de vacances déduites) au taux horaire de 100 fr. (2 heures x 144 semaines x 100 fr.).

Admettant qu'ils n'avaient jamais parlé de salaire, il a fait valoir que C______ lui avait dit à une reprise "tu ne regretteras pas ton engagement". En outre, comme C______ avait reproché à G______ de ne jamais l'avoir rémunéré pour l'activité déployée pour la fondation, il avait pensé qu'il en irait différemment avec lui.

h. Dans sa réponse du lendemain, C______ a contesté l'existence d'une quelconque collaboration ou proposition d'engagement de sa part. Il a exposé avoir apprécié l'aide de A______, mais ne l'avoir jamais mandaté.

i. Par courrier du 19 janvier 2021, A______ a déclaré résilier le contrat de mandat qui le liait à C______ en vertu de l'art. 404 al. 1 CO. Il le sommait, en conséquence, de lui verser la somme de 28'000 fr.

j. Par courrier du 17 février 2021, rédigé sous la plume de leur conseil, C______ et B______ SA ont contesté les prétentions financières de A______.

B. a. Par acte déposé le 11 mars 2021 en vue de conciliation puis introduit le 20 mai 2021, A______ a saisi le Tribunal de première instance d'une demande en paiement dirigée contre B______ SA portant sur la somme de 28'000 fr. due en vertu d'un contrat de mandat conclu entre eux.

Il a allégué avoir travaillé pour B______ SA de début 2017 à août 2020 à titre de "responsable RH et administration", les prestations qu'il avait effectuées étant exposées aux pièces 4 à 18 produites en annexe à sa demande. B______ SA avait refusé de le rémunérer au motif qu'aucun contrat n'avait été conclu. Il a fait valoir que ses prestations relevaient du contrat de mandat de sorte qu'une rémunération lui était due car il avait agi en tant que professionnel et qu'il avait rempli correctement son mandat.

Il a accompagné sa demande d'un chargé de pièces comprenant notamment un courrier électronique que lui avait adressé C______ le 8 septembre 2020 par lequel ce dernier le remerciait de tout ce qu'il avait fait pour la clinique ("Thank you ver very much for wat you have done for Clinic") (pièce 11 page 6).

Il a également produit une vingtaine de courriers (y compris électroniques) qu'il aurait rédigés pour le compte de la clinique ainsi que les plannings hebdomadaires des semaines du 17 septembre 2018, du 10 décembre 2018, du 18 février 2019, du 15 avril 2019 et du 6 janvier 2020, lesquels énonçaient les travaux à réaliser pendant la semaine. Il résulte de ces documents que cinq à dix tâches y étaient inscrites, étant précisé que certaines étaient reportées de semaine en semaine, à l'instar de "gestion de [la banque] H______ (code e-banking)" et de "voir les baux et transfert des loyers", inscrites sur les plannings des semaines du 17 septembre 2018, du 10 décembre 2018, du 18 février 2019 et du 15 avril 2019, ou encore "Contrat N______ [prénom]" inscrite sur les plannings des semaines du 10 décembre 2018, du 18 février 2019 et du 15 avril 2019.

Le 24 février 2020, après avoir reçu une invitation à l'assemblée générale de l'association du centre commercial de D______, C______ a suggéré à A______ d'y participer ("I belive you need participate this").

b. Dans sa réponse du 14 juillet 2021, B______ SA a conclu au rejet de la demande.

Elle a fait valoir n'avoir jamais mandaté A______ et qu'il n'y avait jamais eu de discussions relatives à une éventuelle rémunération en sa faveur. Celui-ci était un ami de C______ qui passait de temps en temps à la clinique pour discuter, prodiguer certains conseils et occuper ses longues journées de retraité.

c. Le 26 octobre 2021, A______ a fait parvenir au Tribunal la liste des témoins dont il sollicitait l'audition et les questions qui devaient leur être posées.

d. Lors de l'audience du 11 novembre 2021 du Tribunal, A______ a confirmé n'avoir jamais été mandaté par B______ SA mais que C______ lui avait demandé de l'aider avec son administration et son personnel en lui indiquant qu'il "ne le regretterait jamais", ce qu'il avait accepté. Par ailleurs, C______ lui avait rapporté un jour avoir dit à G______ qu'il trouvait "dégueulasse" de ne pas avoir rémunéré A______ pour son activité au sein de la fondation. A______ a indiqué ne pas avoir compris pourquoi C______ l'avait informé de cela.

e. Par ordonnance de preuve du 31 janvier 2022, le Tribunal a notamment autorisé chacune des parties à apporter la preuve des faits allégués dans leurs écritures respectives et leur a réservé la possibilité d'apporter la contre-preuve.

f. A l'audience du 28 avril 2022, A______ a exposé avoir déployé une activité pour le compte de C______ dès 2015/2016. Il était intervenu une première fois au milieu du mois de novembre 2016 en vue d'examiner les soupçons de vol portant sur une réceptionniste/secrétaire de la société. On lui avait alors confié pour mission d'éclaircir les faits, de sorte qu'il avait effectué "une sorte d'audit", lors duquel il avait constaté des détournements d'argent. Il avait discuté avec la secrétaire en présence de C______, puis celle-ci avait été licenciée le 18 février 2017. Il avait ensuite cherché une nouvelle secrétaire pour la société.

La partie la plus dense de son activité avait cependant débuté en été 2017, lors de l'agrandissement de la clinique. Il avait alors suivi le chantier relatif aux travaux, sur demande orale de C______. Ils n'avaient pas parlé de rémunération s'agissant de son activité, C______ lui ayant dit à une reprise "tu ne le regretteras pas".

Il s'était également occupé du recrutement du personnel de la clinique, intervenant en particulier dans l'engagement d'une réceptionniste/téléphoniste à la fin du printemps 2019, en collaborant avec l’Antenne Objectif Emploi (AOE) de la commune de D______, en recevant les dossiers de candidature et en adressant les lettres de refus. Il avait également géré des contrats et des certificats de travail. Lors de l'engagement d'un couple, il avait effectué les démarches, notamment auprès de l'OCIRT, pour que ceux-ci puissent obtenir un permis. A l'occasion du licenciement d'un employé, il a fait des démarches auprès du chômage.

Chaque lundi, il préparait un planning de ce qu'il allait faire pendant la semaine et en discutait avec C______ après avoir amené la fille de ce dernier à son cours de danse.

Il avait estimé ses honoraires en tenant compte des rendez-vous qu'il avait inscrit dans son agenda et avait investi beaucoup d'heures pour écrire des lettres.

Il n'avait jamais demandé à être rémunéré avant le 19 octobre 2020.

g. Plusieurs témoins ont été entendus lors des audiences des 2 juin, 10 octobre et 7 novembre 2022.

Il est notamment protocolé que, lors de l'audience du 2 juin 2022, J______, directeur du centre commercial de D______, s'est exprimé sur un mail où C______ avait dit à A______ : "gook luck my friend, thank you". Lors de cette même audience, A______ a posé des questions au témoin K______, électricien ayant effectué les travaux pour la clinique en été 2017.

Il résulte des témoignages, s'agissant des travaux d'agrandissement de la clinique, qu'il s'était avéré que les plans dressés par l'architecte présentaient des inexactitudes lorsque le début du chantier avait commencé, par exemple un mur aboutissait sur une vitre. Comme l'employé de l'entreprise chargée de bâtir les murs n'arrivait pas à joindre l'architecte et que C______ était absent pour une quinzaine de jours, il s'était adressé à A______ qui était en contact avec C______. A______ avait alors redessiné les plans en plusieurs endroits pour que les travaux puissent être effectués, changements que C______ avait validés. A______ avait également transmis le devis pour les travaux d'électricité à C______ qui l'avait validé. A la fin du chantier, l'électricien n'avait pas voulu remettre l'attestation de fin de travaux avant d'avoir été entièrement payé. Après différentes discussions, A______ avait payé le solde dû d'environ 3'000 fr. en disant qu'il se ferait rembourser.

En 2019, C______ avait présenté A______ comme un ami qui lui donnait un coup de main à J______, directeur du centre commercial de D______. Lors de cette rencontre, C______ avait émis le souhait d'ajouter le nom des nouveaux médecins sur le site internet du centre commercial et A______ s'était spontanément proposé pour lui transmettre les informations nécessaires. Il avait ensuite parfois croisé A______ dans le centre commercial. Il s'était toujours adressé à C______, mais avait parfois eu des retours d'informations de la part de A______, depuis son adresse e-mail privée. Il en avait reçu neuf en deux ans.

h. Par courrier du 10 juin 2022, A______ a déposé un échange de courriels datant du 8 septembre 2020 contenant les compliments dont faisait référence J______.

i. La cause a été gardée à juger le 7 novembre 2022, à l'issue de l'audience d'audition de témoins et de plaidoiries finales, lors de laquelle les parties ont persisté dans leurs précédentes conclusions.

D. Par jugement JTPI/1775/2023 du 6 février 2023, le Tribunal, indiquant statuer par voie de procédure ordinaire, a rejeté la demande en paiement formée par A______ (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 4'200 fr. qu'il a mis à la charge de A______ (ch. 2 et 3 du dispositif), condamné ce dernier à verser 5'300 fr. à B______ SA à titre de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

S'agissant de la procédure, le Tribunal a considéré que, compte tenu de la valeur litigieuse inférieur à 30'000 fr., la procédure simplifiée était applicable.

Au fond, le Tribunal a retenu qu'il était admis que A______ avait apporté son aide, son soutien et son conseil à B______ SA pendant plusieurs années, intervenant notamment dans la rédaction de plusieurs courriers, dans le recrutement de certains membres du personnel, dans la procédure de recouvrement d'une créance et dans le chantier de rénovation de la clinique Toutefois, cette activité avait été ponctuelle, circonscrite à certaines tâches spécifiques et limitée à des projets de peu d'envergure. Bien que se présentant comme "responsable RH et administration" de la clinique, A______ n'assumait pas ou très peu de responsabilités. Son implication semblait s'être limitée à un soutien logistique. Les tâches qu'il avait inscrites sur ses plannings hebdomadaires étaient parfois reprises de semaine en semaine, parfois même sur plusieurs mois, ce qui faisait douter du caractère indispensable et décisif de son activité dans la gestion de l'entreprise. La participation de A______ dans le chantier de rénovation de la clinique semblait d'ailleurs avoir découlé d'un simple concours de circonstances. Enfin, les témoignages avaient mis en lumière la relation amicale existant entre A______ et l'administrateur unique de la société et non leurs liens contractuels, quels qu'ils soient. Les parties n'avaient en outre jamais discuté d'une quelconque rémunération. De tels éléments plaidaient en faveur d'actes de complaisance, accomplis en échange des prestations médicales, fournies, elles aussi, gratuitement.

E. a. Par acte expédié le 10 mars 2023 à la Cour de justice, A______ a appelé de ce jugement, qu'il a reçu le 9 février 2023. Il a conclu à l'annulation de cette décision et à ce que B______ SA soit condamné à lui verser la somme de 28'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 15 février 2021, sous suite de frais judiciaires et dépens de première instance et d'appel.

Il a produit des pièces nouvelles, soit un résumé de ses prestations auprès de L______ depuis le 1er janvier 2023 et deux pages listant des dossiers datés de 2019.

b. Dans sa réponse du 15 mai 2023, B______ SA a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement, sous suite de frais et dépens.

c. Dans leurs réplique et duplique, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

d. Par avis du 19 juillet 2023, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement querellé est une décision finale de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), rendue dans une affaire patrimoniale, dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions était supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC). La voie de l'appel est ainsi ouverte.

1.2 Interjeté dans le délai et les formes prescrits par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1 et 311 al. 1 CPC) auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), l'appel est recevable.

1.3 S'agissant d'un appel, la Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), dans la limite des griefs motivés qui sont formulés (ATF
142 III 413 consid. 2.2.4). Elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

1.4 La maxime des débats et le principe de disposition (art. 55 al. 1 et art. 58 al. 1 CPC) sont applicable.

2. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir statué par voie de procédure ordinaire alors que la procédure simplifiée était applicable.

Il est vrai que, compte tenu de la valeur litigieuse, la présente procédure est soumise à la procédure simplifiée (art. 243 al. 1 CPC), ce que le Tribunal a retenu à juste titre dans les considérants du jugement. Il résulte également de la procédure que le premier juge a fait application de cette procédure (art. 243 ss CPC) puisqu'il a fixé un délai à la partie intimée pour répondre à la demande en application de l'art. 245 al. 2 CPC. Ce n'est donc qu'en raison d'une erreur de plume que le dispositif du jugement indique que le Tribunal a statué par voie de procédure ordinaire.

Le grief se révèle donc infondé.

3. L'appelant a articulé des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles en appel.

3.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, un fait ou un moyen de preuve nouveau n'est pris en compte au stade de l'appel que s'il est produit sans retard (let. a) et qu'il ne pouvait l'être devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

Les pseudo nova sont des faits et moyens de preuves qui étaient déjà survenus à la fin de l'audience des débats principaux de première instance. Leur recevabilité en appel est largement limitée, en ce sens qu'ils sont exclus lorsqu'en faisant preuve de la diligence requise, ils auraient pu être présentés en première instance déjà. S'il introduit des pseudo nova, l'appelant doit notamment exposer en détails les motifs pour lesquels il n'a pas pu présenter le fait ou le moyen de preuve en première instance déjà (ATF 143 III 42 consid. 4.1).

3.2 En l'espèce, la pièce datée du 8 septembre 2020, dans laquelle C______ lui adressait des remerciements, ne constitue pas une pièce nouvelle dès lors que, contrairement à ce que plaide l'appelant, cette pièce figurait dans le chargé de pièces accompagnant sa demande. Elle fait donc d'ores et déjà partie des documents de la procédure.

En revanche, les autres pièces produites par l'appelant sont irrecevables dès lors qu'elles sont antérieures à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger et que l'appelant n'explique pas pourquoi ces pièces n'ont pas pu être produites devant le premier juge. Elles ne sont, en tout état, pas déterminantes pour l'issue du litige.

4. L'appelant fait grief au Tribunal de ne pas avoir posé aux témoins les questions pertinentes qu'il lui avait préalablement soumises par écrit et de ne pas lui avoir offert la possibilité de poser des contre-questions aux témoins

4.1 La jurisprudence a déduit de l'art. 29 al. 2 Cst. le droit des parties d'être informées et de s'exprimer sur les éléments pertinents du litige avant qu'une décision touchant leur situation juridique soit prise, d'obtenir l'administration des preuves pertinentes et valablement offertes, de participer à l'administration des preuves essentielles et de se déterminer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 V 465 consid. 4.3.2; 133 I 270 consid. 3.1 et les références). 

4.2 En l'espèce, le devoir d'interpellation du juge découlant de l'art 247 al. 1 CPC, ne soustrait pas le présent litige à la maxime des débats (art. 55 CPC), de sorte qu'il incombait à l'appelant de poser lui-même aux témoins qu'il avait fait citer les questions susceptibles de susciter les réponses constituant les preuves de ses allégués (ACJC/373/2016 du 11 mars 2016 consid. 4). Lors de l'audience du 2 juin 2022, l'appelant a d'ailleurs posé des questions au témoin K______, qu'il avait fait citer.

En outre, l'appelant n'a pas prouvé avoir été empêché de poser des contre-questions aux témoins. Dans son ordonnance de preuve du 31 janvier 2022, le Tribunal a réservé aux parties le droit d'apporter la contre-preuve des faits allégués par l'adverse partie et il ne résulte pas des procès-verbaux d'audience – dont le contenu est présumé exact sauf preuve du contraire (art. 179 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_639/2014 du 8 septembre 2015 consid. 3.2.1) – que l'appelant aurait été empêché par le premier juge de poser des questions et des contre-questions aux témoins.

Ce grief se révèle donc également infondé.

5. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir inexactement établi les faits pertinents pour la solution du litige en retenant que l'architecte M______ avait déclaré avoir suivi le déroulement du chantier, alors qu'il avait dit le contraire en audience. Outre que le Tribunal n'a fait que rapporter les éléments qui ont été portés à sa connaissance dans la partie "EN FAIT", le témoignage de l'architecte n'a pas été déterminant pour l'issue du litige dès lors qu'il n'est pas contesté que l'appelant est intervenu dans le cadre des travaux de la clinique.

6. S'agissant du fond du litige, l'appelant reproche au Tribunal de ne pas avoir retenu que les parties étaient liées contractuellement, que ce soit par un contrat de mandat tacite ou par une gestion d'affaires dans l'intérêt du maître, et que son activité devait être rémunérée dès lors qu'il l'avait fournie à titre professionnel.

6.1.1 La différence entre l'acte de complaisance et celui effectué dans le cadre d'un contrat est que le premier, contrairement à la prestation contractuelle, est gratuit, désintéressé et ne repose pas sur une obligation juridique (ATF
137 III 539 consid. 4.1 in SJ 2012 I p. 329 et les références citées). Dans le cadre d'une relation de service gratuit, les parties n’ont pas l’intention de créer des droits et des obligations, de sorte qu'il n'existe pas de relation contractuelle (Werro, CR-CO II, n. 42 ad art. 394 CO).

6.1.2 En droit suisse des contrats, la question de savoir si les parties ont conclu un accord est soumise au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective. Lorsque les parties se sont exprimées de manière concordante, qu'elles se sont effectivement comprises et, partant, ont voulu se lier, il y a accord de fait. Si au contraire, alors qu'elles se sont comprises, elles ne sont pas parvenues à s'entendre, ce dont elles étaient d'emblée conscientes, il y a un désaccord patent et le contrat n'est pas conclu. Subsidiairement, si les parties se sont exprimées de manière concordante, mais que l'une ou les deux n'ont pas compris la volonté interne de l'autre, ce dont elles n'étaient pas conscientes dès le début, il y a désaccord latent et le contrat est conclu dans le sens objectif que l'on peut donner à leurs déclarations de volonté selon le principe de la confiance; en pareil cas, l'accord est de droit (ou normatif) (ATF 144 III 93 consid. 5.2.1; 123 III 35 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_643/2020 du 22 octobre 2021 consid. 4.1).

En procédure, le juge doit donc rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices (art. 18 al. 1 CO). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes. Cette interprétation subjective repose sur l'appréciation des preuves, le juge appréciant les indices concrets selon son expérience générale de la vie. Si elle s'avère concluante, le résultat qui en est tiré, c'est-à-dire la constatation d'une commune et réelle intention des parties, relève du domaine des faits (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 ; 142 III 239 consid. 5.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_417/2022 du 25 avril 2023 consid. 5.2).

Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties - parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes - ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves -, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. Il s'agit d'une interprétation selon le principe de la confiance (ATF
144 III 93 consid. 5.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_417/2022 du 25 avril 2023 consid. 5.2).

6.2.1 En l'espèce, les parties s'opposent sur le caractère contractuel ou non des activités déployées par l'appelant. Ce dernier allègue avoir été lié à l'intimée par un contrat de mandat, ou de gestion d'affaires, tandis que l'intimée fait valoir que l'appelant lui a rendu des services gratuits en raison des liens d'amitié qu'il entretenait avec son administrateur.

On ne saurait suivre l'appelant lorsqu'il fait valoir qu'il n'a jamais été convenu qu'il travaillerait gratuitement. Il résulte clairement de la procédure que l'appelant a agi sans la volonté de se lier contractuellement lorsqu'il est intervenu les premières fois dans les affaires de l'intimée. Il n'a, d'ailleurs, pas formulé de prétention pour cette période. C'est ainsi que, par amitié, il a géré la question de la secrétaire soupçonnée d'avoir soustrait de l'argent en 2016. Par conséquent, il est établi que, dans un premier temps, les deux parties étaient d'accord sur le fait que les services rendus pas l'appelant relevaient d'actes de complaisance.

Au cours de l'année 2020, l'appelant a fait savoir à l'intimée qu'il considérait que son activité devait être rémunérée pour les trois années passées dès lors qu'elle avait pris une cadence très soutenue dès l'été 2017 et qu'elle était devenue quasiment journalière.

Pour cette période, l'intimée a continué de considérer les interventions de l'appelant comme des services rendus à titre gratuit. En effet, si elle a suggéré à l'appelant de participer à l'assemblée générale du centre commercial, sans que cela ne soit imposé à celui-ci, les actes effectués par l'appelant ont été décidés par ce dernier et il ne résulte pas de la procédure que l'intimée aurait formulé un quelconque reproche à l'appelant lorsque celui-ci n'effectuait pas les tâches qu'il s'était lui-même fixées dans ses plannings hebdomadaires. Il n'apparait également pas que l'intimée ait demandé à l'appelant de lui rendre des comptes sur ce qu'il faisait. L'intimée ne considérait donc pas que l'appelant ait des obligations à son égard. Le fait que l'ami de l'appelant lui ait indiqué, à une reprise, qu'il "ne le regretterait pas" ne peut être considéré comme un engagement de l'intimée à rémunérer l'appelant, dès lors qu'il s'est agi d'une déclaration dont même l'appelant ne savait pas exactement ce qu'elle signifiait.

Pour sa part, l'appelant n'a pas allégué à quel moment il a considéré être lié par des obligations à l'intimée, impliquant pour cette dernière de le rémunérer. Les seuls éléments portés à la procédure établissant cette volonté d'être rétribué sont les courriers échangés entre l'appelant et l'intimée en octobre 2020. Aucun document antérieur, ni aucun témoignage, ne viennent prouver que l'appelant pensait être lié contractuellement à l'intimée avant cette date. Il est admis que les parties n'ont jamais parlé de rémunération avant l'été 2020. L'appelant a même rapporté au Tribunal ne pas avoir compris pourquoi son ami avait mentionné la discussion qu'il avait eu avec G______ s'agissant de son absence de rémunération pour son activité déployée pour la fondation. A ce moment, l'appelant n'a notamment pas réagi en déclarant à l'intimée vouloir être payé pour son activité auprès d'elle. Il ne considérait donc pas encore que l'intimée devait le rémunérer. On peut encore relever que l'appelant n'a pas tenu de comptabilité s'agissant des heures qu'il a effectuées en faveur de l'intimée, puisqu'il a admis avoir, a postériori, évalué ces heures sur la base de son agenda. Le comportement de l'appelant prouve également que, jusqu'en été 2020, il n'avait pas la volonté d'être lié par des obligations à l'intimée. Il agissait en effet à sa guise, choisissant les aspects de l'administration de l'intimée dont il voulait s'occuper compte tenu de ses envies. Il n'est pas pertinent que l'appelant ait développé une activité importante, parce qu'il disposait de beaucoup de temps du fait qu'il était à la retraite, car la jurisprudence reconnaît que, même dans le domaine des prestations de travail, il existe des faveurs non contraignantes qui ne donnent pas lieu à un contrat (ATF 137 III 539 consid. 4.1). C'est l'intention de l'appelant de mener son activité dans le cadre de règles contractuelles qui devait être établie. Or, comme retenu ci-dessus, une telle intention n'existait pas.

Compte tenu de ce qui précède, jusqu'en été 2020 les parties ont eu la volonté commune de ne pas être liée contractuellement si bien qu'il n'existe aucune obligation de rémunération de l'intimée à l'égard de l'appelant, même s'il eut été bienvenu que l'activité déployée par l'appelant soit reconnue à sa juste valeur. Dès lors que la volonté réelle et concordante des parties a pu être établie, il n'y a pas lieu d'opérer une interprétation objective du contrat selon les règles de la bonne foi.

Par conséquent, le jugement querellé doit être confirmé par substitution de motifs.

7. Les frais judiciaires d'appel, arrêtés à 1'800 fr. (art. 95, 96 et 104 al. 1 CPC; art. 17 et 35 RTFMC), seront mis à la charge de l'appelant, qui succombe entièrement (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance de frais de même montant fournie par celui-ci, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Les dépens d'appel, arrêtés à 2'500 fr., débours et TVA compris (art. 84, 85 et 90 RTFMC; art. 20, 25 et 26 LaCC; art. 25 al. 1 LTVA), seront également mis à la charge de l'appelant (art. 106 al. 1 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 10 mars 2023 par A______ contre le jugement JTPI/1775/2023 rendu le 6 février 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/5260/2021.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'800 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont entièrement compensés avec l'avance de frais fournie par celui-ci, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ SA 2'500 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges;
Madame Gladys REICHENBACH, greffière.

 

La présidente :

Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE

 

La greffière :

Gladys REICHENBACH

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005
(LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.