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Décisions | Chambre civile

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C/3102/2021

ACJC/1124/2023 du 31.08.2023 sur JTPI/11429/2022 ( OS ) , CONFIRME

Normes : CO.197; CO.201
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3102/2021 ACJC/1124/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 29 AOÛT 2023

 

Entre

1) Monsieur A______, domicilié ______ [GE], et

2) B______ SA SA, sise ______ [ZH], appelants tous deux d'un jugement rendu par la 3ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 30 septembre 2022, comparant par Me Sabrina KHOSHBEEN, avocate, c/o Etude de Me Olivier WASMER, Grand'Rue 8, case postale 221, 1211 Genève 28, en l'Étude de laquelle ils font élection de domicile,

et

C______ AG, sise ______ (ZH), intimée, comparant par Me Yvan JEANNERET, avocat, Keppeler Avocats, rue Ferdinand-Hodler 15, case postale 6090, 1211 Genève 6, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/11429/2022 du 30 septembre 2022, notifié à C______ AG le 3 octobre 2022, ainsi qu'à A______ et B______ SA le 5 octobre suivant, statuant par voie de procédure simplifiée, le Tribunal de première instance a déclaré irrecevable la demande formée par B______ SA à l'encontre de C______ AG (ch. 1 du dispositif), débouté A______ de toutes ses conclusions dirigées contre C______ AG (ch. 2), mis les frais judiciaires – arrêtés à 2'840 fr. – pour moitié à la charge de B______ SA et pour moitié à celle de A______, compensé partiellement ces frais avec l'avance de 180 fr. fournie par C______ AG, condamné A______ et B______ SA à verser chacun les sommes de 90 fr. à C______ AG et de 1'150 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 3), condamné A______ et B______ SA à verser chacun une sommes de 1'330 fr. à C______ AG à titre de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

B.            a. Par acte expédié au greffe de la Cour civile le 4 novembre 2022, A______ et B______ SA appellent de ce jugement, dont ils sollicitent l'annulation.

Principalement, ils concluent à ce que C______ AG soit condamnée à payer à A______ la somme de 10'000 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 6 août 2018, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Alternativement, ils concluent à ce que C______ AG soit condamnée à reprendre le véhicule de marque D______ vendu à A______, ainsi qu'à en restituer le prix de vente intégral, soit 26'900 fr., avec suite de frais judiciaires et dépens.

A l'appui de leurs conclusions, les appelants produisent divers extraits de la procédure de première instance, ainsi qu'un extrait de site internet relatif à la définition du terme "véhicule accidenté", non soumis au Tribunal.

b. Dans sa réponse, C______ AG conclut principalement à l'irrecevabilité de l'appel formé par B______ SA, au rejet de l'appel formé par A______ et à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et dépens.

c. Les parties ont respectivement répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées de ce que la cause était gardée à juger par plis du greffe du 4 avril 2023.

C.           Les faits pertinents suivants résultent la procédure :

a. Par contrat de vente conclu et exécuté le 6 août 2018, C______ AG a vendu et remis à A______ une voiture d'occasion de marque D______, mise en circulation la première fois en 2016 et présentant 24'000 km au compteur, contre le prix de 26'900 fr.

Le véhicule était stipulé vendu en l'état ("wie besichtigt und gefahren") et sans garantie autre que celle éventuelle du constructeur ("Ausschliesslich fortlaufende Werksgarantie").

A______ a simultanément conclu un contrat de leasing avec B______ SA, en vue de financer l'acquisition du véhicule.

b. Par courriel du 5 juillet 2019, A______ s'est plaint auprès de C______ AG de ce que la peinture de l'une des portes arrière était "en train de s'enlever", ce qui n'était selon lui pas normal, et lui a demandé de vérifier les éventuelles réparations effectuées sur le véhicule.

C______ AG n'a pas réagi à ce courriel.

c. Par courriel du 12 août 2020, A______ a réitéré à C______ AG que la peinture de l'une des portes arrière s'enlevait, ajoutant que la serrure de cette portière ne s'ouvrait pas ou ne se fermait pas toujours au moyen de la clef électronique.

Les 19 et 20 août 2020, C______ AG a répondu à A______ qu'elle ne comprenait pas le sens de ses questions et lui a demandé de préciser ce qu'il souhaitait qu'elle fasse.

d. Le 31 août 2020, A______ a fait examiner le véhicule par le centre technique de [la société] E______.

Dans un rapport daté du même jour, celui-ci a indiqué que la portière et l'aile arrière droite avaient été repeintes et que leur teinte ne correspondait pas à celle du véhicule.

A______ a transmis ce rapport à C______ AG le 24 novembre 2020, en la priant de l'appeler pour trouver un compromis et éviter une procédure judiciaire.

e. Par courrier du 25 décembre 2020, invoquant des défauts affectant la peinture du véhicule vendu, A______ a sommé C______ AG de lui verser une somme de 10'000 fr., ou de reprendre la voiture et de lui en restituer le prix.

C______ AG n'a pas donné suite à ce courrier.

f. Par acte déposé en vue de conciliation le 12 février 2021, A______ a formé contre C______ AG une demande tendant principalement au paiement de 10'000 fr., alternativement à la reprise de la voiture vendue et à la restitution de son prix.

La cause a été déclarée non conciliée à l'audience de conciliation du 19 avril 2021, à laquelle C______ AG n'a pas comparu. Le Tribunal a délivré à A______ l'autorisation de procéder contre C______ AG.

g. Par demande introduite conjointement devant le Tribunal le 18 août 2021, A______ et B______ SA ont conclu à ce que C______ AG soit condamnée à payer à A______ la somme de 10'000 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 6 août 2018, avec suite de frais judiciaires et dépens.

A l'appui de leur demande, A______ et B______ SA ont notamment allégué que le véhicule vendu avait été accidenté et réparé avant que le premier ne l'achète d'occasion. En raison de cet accident et de cette réparation, la valeur de la voiture était réduite d'au moins 6'000 fr. "selon les experts en automobile"; les frais de réfection de la portière et de l'aile arrière s'élevaient quant à eux à 4'000 fr. au moins "selon le concessionnaire D______".

h. Dans sa réponse, C______ AG a conclu au déboutement des parties demanderesses des fins de leur demande, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Elle a notamment exposé qu'à supposer que la teinte de la portière et de l'aile arrière droite soit effectivement différente au 31 août 2020, on ne pouvait pas exclure que cette partie du véhicule ait été repeinte après son acquisition par A______. Elle a ajouté que le prénommé se prévalait de ce qu'un défaut lui aurait été dissimulé, dans le seul but de contourner son manque de diligence et la tardiveté de son avis de défaut.

i. Devant le Tribunal, A______ a notamment déclaré qu'il n'aurait pas conclu la vente s'il avait su que le véhicule était accidenté. Il ne savait pas si le véhicule avait été effectivement accidenté, mais il y avait en tout cas des dégâts sur le véhicule.

Le représentant de C______ AG a pour sa part déclaré que le véhicule avait été vendu en bon état et qu'aucune intervention n'avait eu lieu sur celui-ci avant la vente.

j. A la demande de C______ AG, le Tribunal a entendu un témoin en la personne de F______, soit l'employé de C______ AG qui s'est chargé de la vente du véhicule litigieux à A______. Celui-ci a notamment déclaré qu'au moment de la vente, la voiture était en bon état et garantie sans accident. Il ignorait cependant si une intervention avait été effectuée sur le véhicule avant que celui-ci n'arrive au garage de C______ AG. Il avait eu connaissance d'un courriel de A______ indiquant que la peinture s'écaillait sur la portière arrière droite, mais il n'était pas en mesure de l'expliquer, dès lors qu'il était vendeur de voitures et non spécialiste en carrosserie.

k. Avec l'accord des parties, le Tribunal a ordonné des plaidoiries finales écrites. Les parties ont produit de telles plaidoiries le 13 mai 2022, persistant dans leurs conclusions.

l. Par ordonnance du 16 mai 2022, le Tribunal a transmis aux parties les plaidoiries écrites de leur partie adverse et leur a imparti un délai au 1er juin 2022 pour produire leurs éventuelles déterminations sur celles-ci, à défaut de quoi la cause serait gardée à juger.

m. Les parties se sont encore déterminées par écrit le 1er juin 2022, persistant dans leurs conclusions.

Le Tribunal leur a transmis les déterminations de leur partie adverse par ordonnance du 3 juin 2022, précisant que la cause serait gardée à juger à l'issue d'un délai de dix jours.

n. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que B______ SA, qui ne prenait pas de conclusion propre au fond, n'était pas au bénéfice d'une autorisation de procéder contre C______ AG, faute d'avoir assigné celle-ci au stade de la conciliation. La demande formée par la première était dès lors irrecevable.

A______, qui invoquait la garantie de la partie venderesse pour défaut de la chose vendue, avait quant à lui la charge d'établir l'existence des défauts dénoncés et le montant d'une moins-value qui leur soit consécutive. Or, les éléments versés à la procédure ne permettaient pas de tenir pour établi que la voiture aurait été accidentée et réparée avant que le prénommé ne l'achète, que sa peinture ne serait pas d'origine et s'écaillerait, ni qu'une de ses serrures ne fonctionnerait parfois pas. A cette absence de preuve des défauts s'ajoutait celle d'une moins-value consécutive, chiffrée à 10'000 fr. par la seule référence à des "experts" ou à un "concessionnaire", ce qui était insuffisant. Par conséquent, la demande devait être rejetée.

 

EN DROIT

1.             1.1 Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance, lorsque la valeur litigieuse au dernier état des conclusions atteint 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 et 2 CPC).

En l'espèce, le jugement entrepris est une décision finale et la valeur litigieuse devant le Tribunal s'élevait à 10'000 fr. La voie de l'appel est dès lors ouverte.

1.2 Interjeté dans le délai utile de trente jours, dans la forme écrite prévue par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1, et 311 al. 1 CPC) et auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), l'appel est recevable de ces points de vue.

1.3 La valeur litigieuse étant inférieure à 30'000 fr., la procédure simplifiée s'applique (art. 243 al. 1 CPC). S'agissant d'un appel, la Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

2.             L'intimée conteste la recevabilité de l'appel formé par B______ SA, pour les motifs ayant déjà conduit le Tribunal à déclarer la demande de celle-ci irrecevable.

2.1 Le tribunal n'entre en matière que sur les demandes et les requêtes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l'action (art. 59 al. 1 CPC).

Il examine d'office si les conditions de recevabilité sont remplies (art. 60 CPC).

2.1.1 La procédure au fond est précédée d'une tentative de conciliation devant une autorité de conciliation (art. 197 CPC). La requête de conciliation est introductive d'instance. Elle fixe la litispendance (Bohnet, in Commentaire romand, Code procédure civile, 3ème éd, 2021, n. 8 ad art. 197 CPC).

Lorsque la tentative de conciliation n'aboutit pas, l'autorité de conciliation consigne l'échec au procès-verbal et délivre l'autorisation de procéder (art. 209 al. 1 CPC). L'existence d'une autorisation de procéder valable, délivrée par l'autorité de conciliation, est une condition de recevabilité de la demande, au sens de l'art. 59 CPC (ATF 139 III 273 consid. 2.1; Bohnet, op. cit., n. 7 ad art. 197 CPC).

2.1.2 En cas de consorité nécessaire, les actes de procédure accomplis en temps utile par l'un des consorts valent pour ceux qui n'ont pas agi, à l'exception des déclarations de recours (art. 70 al. 2 CPC).

Chaque consort conserve la faculté d'accomplir valablement seul les actes de procédure qui n'ont pas d'effet formateur sur l'objet du litige (Jeandin, in Commentaire romand, Code procédure civile, 3ème éd, 2021, n. 12
ad art. 70 CPC). Ceci ne vaut toutefois ni pour le dépôt de la demande, ni pour celui d'un recours ou d'un appel, pas plus que pour se désister, transiger ou acquiescer ou prendre des conclusions additionnelles (May Canellas, in Petit Commentaire du Code de procédure civile, 2020, n. 25 ad art. 70 CPC).

2.1.3 Le CPC ne traite pas explicitement de la qualité pour appeler ou recourir. Ce sont avant tout les parties à la procédure (Hauptparteien) qui disposent de cette qualité, tout comme leurs successeurs à titre universel (Jeandin, in Commentaire romand, Code procédure civile, 3ème éd, 2021, Intro. aux art. 308 à 334 CPC, n. 12).

Compte tenu du fait que l'appel ordinaire a un effet réformatoire, une partie appelante ne saurait – sous peine d'irrecevabilité – se limiter à conclure à l'annulation de la décision attaquée mais devra, au contraire, prendre des conclusions au fond permettant à l'instance d'appel (qui aurait par hypothèse décidé d'annuler le premier jugement) de statuer à nouveau en reprenant les conclusions de ladite partie appelante (Jeandin, op. cit., ad art. 311 CPC n. 4).

2.2 En l'espèce, bien que l'appelante B______ SA n'ait pas pris part à la procédure de conciliation, il est constant qu'elle était partie à la procédure de première instance, puisqu'elle a, conjointement avec l'appelant A______, introduit la demande présentement litigieuse devant le Tribunal et que ce dernier a expressément déclaré ladite demande irrecevable en ce qui concernait l'appelante, en la condamnant à supporter une partie des frais.

Il s'ensuit que la susdite appelante possède la qualité pour former appel, ne serait-ce que pour pouvoir contester la décision d'irrecevabilité susmentionnée, ce qu'elle fait d'ailleurs dans ses écritures, en exposant les raisons pour lesquelles cette décision serait selon elle erronée. Il n'y a dès lors pas lieu de déclarer son appel, dûment motivé sur ce point (cf. art. 311 al. 1 CPC), irrecevable pour ces motifs.

En revanche, il n'en va pas nécessairement de même du fait que l'appelante B______ SA ne prend toujours, sur le fond, aucune conclusion propre au stade de l'appel, mais se contente d'appuyer diverses conclusions en faveur de l'appelant A______. Un tel procédé, contraire à l'adage "nul ne plaide par procureur", lequel découle de la nécessité de posséder la légitimation active (cf. ACJC/402/2014 du 28 mars 2014 consid. 4.1.2 et les réf. citées), n'est pas admissible, quels que puissent être les rapports de représentation prévus par le contrat de leasing conclu entre les appelants. Il est ici rappelé que la représentation devant les tribunaux est strictement régie par les dispositions de l'art. 68 CPC, dont les parties appelantes ne remplissent à l'évidence pas les conditions l'une envers l'autre.

Il n'est toutefois pas nécessaire de trancher ici la question de savoir si cette absence de conclusions propres doit entraîner l'irrecevabilité de l'appel formé par B______ SA. Par économie de moyens, on relèvera en effet que l'appel doit en tous les cas être rejeté en ce qui la concerne, dès lors que c'est à bon droit que le Tribunal a déclaré sa demande irrecevable, faute pour elle d'avoir agi au state de la conciliation et d'avoir obtenu l'autorisation de procéder contre l'intimée. A supposer même que les parties appelantes forment une consorité nécessaire, l'art. 70 al. 2 CPC dont se prévaut l'appelante ne permet notamment pas à l'un des consorts de former une demande en justice pour le compte de l'autre, même au stade de la conciliation, ni à le représenter à cette fin, a fortiori tacitement, l'adage "nul ne plaide par procureur" s'y opposant également dans ce cas. Faute de se fonder sur une autorisation de procéder valablement délivrée à l'appelante, la demande formée par celle-ci est donc irrecevable, conformément aux principes rappelés ci-dessus.

Il s'ensuit que l'appel sera déclaré recevable, mais rejeté dans la mesure où il porte sur le ch. 1 du dispositif du jugement entrepris, lequel sera confirmé.

3.             Les appelants produisent une pièce nouvelle et prennent alternativement de nouvelles conclusions.

3.1

3.1.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard
(let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

En ce qui concerne Internet, seules les informations bénéficiant d'une empreinte officielle (par ex : Office fédéral de la statistique, inscriptions au Registre du commerce, etc.) peuvent être considérées comme notoires (ATF 143 IV 380 consid. 1.2).

3.1.2 Aux termes de l'art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies (let. a) et si la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (let. b). L'art. 227 al. 1 CPC autorise la modification de la demande si la prétention nouvelle ou modifiée relève de la même procédure et présente un lien de connexité avec la dernière prétention (let. a) ou, à défaut d'un tel lien, si la partie adverse consent à la modification de la demande (let. b).

3.2 En l'espèce, l'extrait de site internet produit devant la Cour par les appelants, relatif à la définition du terme "véhicule accidenté", n'émane pas d'un organisme officiel et ne peut donc être considéré comme relatant un fait notoire. Rien n'indique que cet extrait, qui n'est pas daté, n'ait pas été disponible avant que le Tribunal ne garde la cause à juger, ni que les appelants n'auraient donc pu le soumettre au premier juge en faisant preuve de la diligence requise. Par conséquent, la pièce en question est irrecevable.

S'agissant des conclusions alternatives des appelants, qui ne figuraient pas dans la demande introduite devant le Tribunal, celles-ci diffèrent de leurs conclusions principales non seulement quantitativement, mais également dans leur nature, puisqu'elles ne visent plus la réduction du prix (action minutoire), mais tendent à la résiliation du contrat et à la restitution des prestations fournies (action rédhibitoire). Or, si le juge saisi d'une action rédhibitoire peut se borner à réduire le prix s'il estime que la résiliation n'est pas justifiée par les circonstances (art. 205 al. 2 CO), l'inverse n'est pas vrai. Partant, les conclusions alternatives des appelants constituent une modification, soit plus exactement une amplification, de la demande, et non une réduction de celle-ci, et sont donc soumises en tant que telles aux conditions de l'art. 317 al. 2 CPC.

En l'occurrence, lesdites conclusions sont certes soumises à la même procédure et présentent un lien de connexité avec les conclusions principales des appelants, mais il n'apparaît pas (et les appelants n'indiquent pas) qu'elles reposeraient sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux. Le seul fait que l'appelant A______ ait pris des conclusions similaires au stade de la conciliation, avant d'y renoncer dans la demande introduite au fond, démontre que tel n'est effectivement pas le cas.

Par conséquent, les conclusions alternatives des appelants sont irrecevables.

4.             Les appelants reprochent au Tribunal d'avoir prolongé inutilement la procédure, notamment en invitant les parties à se déterminer après le dépôt de leurs plaidoiries finales écrites. Ils se prévalent notamment de l'art. 246 al. 1 CPC, qui prévoit que le tribunal décide des mesures à prendre pour que la cause puisse être liquidée autant que possible lors de la première audience.

Les appelants n'invoquent toutefois aucun déni de justice pour retard à statuer et ne prennent aucune conclusion en relation avec la violation du principe de célérité alléguée. Ils n'allèguent pas, ni ne démontrent, que l'allongement dénoncé de la procédure leur aurait causé un quelconque préjudice, étant observé que les dernières déterminations écrites des parties n'ont repoussé la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger que d'une quinzaine de jours (soit du 1er au 15 juin 2022 environ). Le déroulement du procès n'a dès lors pas empêché le Tribunal de statuer dans un délai raisonnable, compatible avec la nature simplifiée de la procédure, et il n'y a pas lieu d'examiner ces questions plus avant.

5.             Sur le fond, il n'est pas contesté que l'intimée a conclu avec l'appelant A______ un contrat de vente. Les appelants reprochent au Tribunal de ne pas avoir admis que le véhicule vendu était affecté d'un défaut, ni que ce défaut justifiait une réduction du prix de vente dans la mesure alléguée.

5.1 Selon l'art. 197 CO, le vendeur est tenu de garantir l'acheteur tant en raison des qualités promises qu'en raison des défauts qui, matériellement ou juridiquement, enlèvent à la chose soit sa valeur, soit son utilité prévue, ou qui les diminuent dans une notable mesure (al. 1). Il répond de ces défauts, même s'il les ignorait (al. 2).

Le défaut doit déjà exister au moment du transfert des risques, étant précisé qu'il peut n'exister encore qu'en germe à ce moment. Une détérioration de la chose qui se produit après le transfert des risques ne constitue pas un défaut, même si elle entraîne la disparition d'une qualité promise ou attendue; le vendeur n'est pas tenu de maintenir la chose dans l'état promis ou attendu, sauf s'il s'y est engagé contractuellement (arrêt du Tribunal fédéral 4C.321/2006 du 1er mai 2007 consid. 4.3.1).

Le fardeau de la preuve du défaut et du moment auquel il existait incombe à l'acheteur (cf.  art. 8 CC). Si l'acheteur accepte sans réserve la chose livrée, il ne peut ensuite se prévaloir que de la garantie pour les défauts cachés. L'avis donné pour ces défauts ne modifie pas la répartition du fardeau de la preuve; il appartient à l'acheteur de prouver leur existence au moment déterminant du transfert des risques (Venturi/Zen-Ruffinen in Commentaire romand, Code des obligations I, 3ème éd., 2021 n. 10 ad art. 197 CO).

5.1.1 Selon l'art. 201 CO, l'acheteur a l'obligation de vérifier l'état de la chose reçue aussitôt qu'il le peut d'après la marche habituelle des affaires; s'il découvre des défauts dont le vendeur est garant, il doit l'en aviser sans délai (al. 1). Lorsqu'il néglige de le faire, la chose est tenue pour acceptée, à moins qu'il ne s'agisse de défauts que l'acheteur ne pouvait découvrir à l'aide des vérifications usuelles (al. 2). Si des défauts de ce genre se révèlent plus tard, ils doivent être signalés immédiatement; sinon, la chose est tenue pour acceptée, même avec ces défauts (al. 3).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il appartient à l'acheteur de prouver qu'il a respecté son devoir (fardeau de la preuve) lorsque le vendeur allègue la tardiveté de l'avis des défauts (fardeau de l'allégation; ATF 118 II 142 consid. 3a; 107 II 50 consid. 2a; arrêts du Tribunal fédéral 4A_28/2017 du 28 juin 2017 consid. 4; 4A_405/2017 du 30 novembre 2017 consid. 3.3).

S'agissant du délai acceptable de l'avis des défauts cachés, l'avis est donné immédiatement s'il a été donné dans un délai de sept jours. Le Tribunal fédéral estime toutefois qu'il y a lieu de prendre en considération l'ensemble des circonstances (arrêt du Tribunal fédéral 4A_82/2008 du 29 avril 2009 consid. 7.1).

5.1.2 Selon l'art. 205 al. 1 CO, l'acheteur peut réclamer par l'action en réduction du prix une indemnité pour la moins-value. Il s'agit là du droit de l'acheteur à la réduction du prix (Venturi/Zen-Ruffinen, op. cit., n. 15 ad art. 205 CO).

L'acheteur ne peut réduire le prix que si le défaut engendre une moins-value au moment du transfert des risques, soit une différence entre la valeur objective de la chose supposée sans défauts et la valeur objective de la chose défectueuse; une seule baisse d'utilité (cas rare en pratique) ne saurait suffire (Venturi/Zen-Ruffinen, op. cit., n. 17 ad art. 205 CO).

Pour faciliter le calcul de la réduction, la jurisprudence présume notamment que la moins-value est égale aux coûts de la réparation de la chose. Cette présomption oblige la partie qui veut se prévaloir d'une différence entre la moins-value et le coût de la réparation à en apporter la preuve (Venturi/Zen-Ruffinen, op. cit., n. 24 ad art. 205 CO).

5.2.1 En l'espèce, les appelants soutiennent que, contrairement aux indications données par l'intimée, le véhicule litigieux avait été accidenté et avait subi une première réparation préalablement à la vente, ce qui aurait entraîné après celle-ci une différence de teinte des parties du véhicule impactées, un écaillement de la peinture appliquée sur celles-ci, ainsi que le dysfonctionnement d'une serrure.

A supposer que l'existence de certains de ces défauts puissent être considérée comme vérifiée par le seul rapport de E______ que les appelants ont versé à la procédure, étant rappelé qu'une telle une expertise privée n'a pas la qualité d'un moyen de preuve, mais d'une simple allégation de partie (cf. ATF 135 III 670 consid. 3.3.1, JdT 2011 II 564), force est de constater que ce rapport, établi le 31 août 2020 – soit plus de deux ans après la vente –, ne permet pas de retenir, ni même ne rend vraisemblable, que la portière et l'aile concernées auraient été repeintes et/ou auraient présenté une différence de teinte au moment de la vente déjà. Le rapport en question ne fait par ailleurs aucune mention d'une serrure défectueuse. Aucun témoin ni aucun expert ne s'est exprimé sur ces points et l'on ne peut raisonnable exclure, au vu du temps écoulé entre la vente et le rapport susvisé, que le véhicule ait été accidenté et repeint dans l'intervalle.

L'existence d'un défaut imputable à l'intimée au moment de la vente ne peut dès lors être retenue et l'appel doit être rejeté pour ce motif déjà.

5.2.2 A supposer que l'aile et la portière du véhicule litigieux aient effectivement été repeintes dans le cadre d'une réparation effectuée avant la vente, on ne voit pour quelle raison l'appelant A______ n'aurait pas pu s'en rendre compte avant le mois de juillet 2019 – soit onze mois après la vente –, date à laquelle ledit appelant a pour la première fois avisé l'intimée d'un "défaut".

Il est notamment douteux qu'une différence de teinte entre des parties repeintes et non repeintes n'ait pu se manifester que plusieurs mois après la vente. Aucun témoin ni expert n'a confirmé la possibilité d'un tel phénomène, ni la date à laquelle l'appelant aurait pu s'en apercevoir. Dès lors, il faut admettre que l'appelant, qui supporte le fardeau de la preuve sur ce point, échoue également à démontrer qu'il aurait avisé l'intimée des défauts invoqués immédiatement, au sens des dispositions rappelés ci-dessus, soit dans les quelques jours suivant celui où il s'en serait rendu compte.

Pour ce motif également, les conditions de la garantie invoquée ne sont pas réalisées et le jugement doit être confirmé en tant qu'il a débouté l'appelant de ses prétentions.

5.2.3 A supposer enfin que les défauts allégués soient établis et que l'intimée en ait été avisée en temps utile, force serait de constater que les coûts de remise en état du véhicule, présumés correspondre à la moins-value couverte par la garantie, de même que la subsistance d'une éventuelle dépréciation malgré une telle remise en état, dont l'indemnisation est également demandée par l'appelant, ne sont en l'espèce nullement démontrés. Le rapport susvisé [de la société] E______ est en effet muet à ce sujet et l'unique témoin entendu n'a articulé aucun chiffre quant à la valeur du véhicule, avec ou sans défaut. Aucune expertise judiciaire de ces questions n'a par ailleurs été requise par les appelants, à qui incombe là encore le fardeau de la preuve.

L'action en garantie devrait ainsi dans tous le cas être rejetée et le jugement entrepris, qui a débouté l'appelant de toutes ses conclusions, sera dès lors intégralement confirmé.

6.             Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'100 fr. (art. 13, 17 et 35 RTFMC) et mis à la charge des appelants, qui succombent (art. 105 al. 1, art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance de frais de même montant fournie par ceux-ci, qui demeure acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).

Les appelants seront également condamnés, conjointement et solidairement, à payer à l'intimée la somme de 1'200 fr. à titre de dépens d'appel (art. 105
al. 2 CPC, art. 84, 85 et 90 RTFMC), débours et TVA compris (art. 25
et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 4 novembre 2022 par A______ et B______ SA contre le jugement JTPI/11429/2022 rendu le 30 septembre 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/3102/2021-3.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'100 fr. et les compense avec l'avance de frais de même montant fournie par A______ et B______ SA, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ et B______ SA, pris conjointement et solidairement, à payer à C______ AG la somme de 1'200 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX,
Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Camille LESTEVEN

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.