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Décisions | Chambre civile

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C/26061/2013

ACJC/1102/2023 du 29.08.2023 sur ORTPI/366/2023 ( OO ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26061/2013 ACJC/1102/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 29 AOÛT 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______[GE], recourant contre une ordonnance rendue par la 4ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 30 mars 2023, comparant par Me Peter PIRKL, avocat, REGO Avocats, esplanade de Pont-Rouge 4, case postale, 1212 Genève 26, en l'étude duquel il fait élection de domicile,

et

B______ SA, sise ______[ZH], intimée, comparant par Me Fabio SPIRGI, avocat, Keppeler Avocats, rue Ferdinand-Hodler 15, case postale 6090, 1211 Genève 6, en l'étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. a. B______ SA, sise en Suisse, a notamment pour but l'exploitation d'une entreprise de construction.

b. Le 3 juillet 2006, elle a conclu avec A______ un contrat d'entreprise générale portant sur la construction d'une maison familiale comprenant un bâtiment principal, un garage et une orangerie à C______[GE].

La villa a été livrée en août 2008.

Le litige opposant les parties concerne ladite construction.

c. Par acte porté devant le Tribunal de première instance le 25 juin 2014, B______ SA a réclamé à A______ le paiement de 477'075 fr. 90 avec intérêts à 5% l'an dès le 30 mars 2010 à titre de solde impayé pour la construction de la villa.

B______ SA a notamment allégué que dans le cadre du litige qui l'opposait à A______, elle avait été contrainte de saisir le Tribunal d'une requête en désignation d'un expert aux fins de faire établir l'existence et l'origine d'un défaut d'étanchéité constaté au sous-sol de la villa, ainsi que de déterminer la meilleure solution pour y remédier. Le Tribunal avait alors désigné comme expert D______, lequel avait rendu son rapport le 21 août 2012. B______ SA a produit ledit rapport d'expertise.

d. Dans sa réponse du 5 décembre 2014, A______ a pris des conclusions préalables en administration de preuves, en requérant notamment la production de pièces par B______ SA et la mise en œuvre d'une expertise.

Principalement, il a notamment conclu à ce qu'il soit dit et constaté que le solde impayé s'élevait à 470'270 fr. 58 TTC au plus et qu'il était en droit d'opposer aux prétentions en paiement de B______ SA les travaux inachevés par celle-ci et leur coût, les nombreux et importants défauts de l'ouvrage et le coût pour y remédier, les nombreuses retouches à effectuer et leur coût, une indemnité pour livraison tardive de l'ouvrage à fixer ex aequo et bono, mais d'au moins 50'000 fr., la non-livraison des plans de l'ouvrage à jour, la balance des postes à budget, et qu'il était en droit d'exercer le droit formateur à la réduction du prix de l'ouvrage. Il a également conclu à la fixation d'une indemnité pour livraison tardive de l'ouvrage ex aequo et bono, mais d'au moins 50'000 fr., et à ce qu'il soit dit que si le montant final (celui qui devait être déterminé par expertise + indemnité pour livraison tardive) était inférieur à la somme de 470'270 fr., B______ SA devrait alors lui verser la différence, sur facture, dans les trente jours.

A______ a par ailleurs formé une demande reconventionnelle, concluant à ce qu'il soit dit que si le coût pour achever l'ouvrage, remédier à ses défauts, et effectuer les retouches, augmenté de l'indemnité pour livraison tardive, excédait la somme de 470'270 fr., B______ SA devrait alors lui verser la différence dans les trente jours, et à ce qu'il soit acheminé à chiffrer, en fonction du résultat de l'expertise judiciaire à venir, ses prétentions en paiement contre B______ SA pour la part qui excéderait les prétentions de celle-ci à son encontre (chiffrées à ce stade à 30'001 fr.).

Ses allégations de fait étaient numérotées de 1.1 à 3.2.

A l'appui de ses conclusions, il a notamment produit une liste de témoins, par laquelle il sollicitait l'audition de seize personnes (E______, F______, G______, H______, D______, I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, Q______, R______ et S______).

e. Par réponse sur demande reconventionnelle du 20 février 2015, B______ SA a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions.

B______ SA a également déposé une liste de témoins, par laquelle elle a sollicité l'audition de quatre personnes (F______, G______, H______ et D______).

f. Lors de l'audience du 3 février 2016, le Tribunal a ouvert les débats d'instruction et principaux et les parties ont procédé aux premières plaidoiries.

A______ a produit une liste de témoins, par laquelle il a sollicité l'audition de dix-huit personnes (E______, F______, G______, H______, D______, I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, Q______, R______, S______, T______ et U______).

g. Lors de l'audience du 7 décembre 2016, le Tribunal a indiqué que la cause serait gardée à juger sur la question des mesures probatoires et de la suite de la procédure le 17 mars 2017.

h. Par pli du 15 février 2017, A______ a sollicité du Tribunal d'être autorisé à alléguer des faits nouveaux complémentaires en lien avec une inondation qui s'était produite le 5 janvier 2017.

i. Par ordonnance du 16 août 2017, le Tribunal a révoqué les délais fixés, notamment s'agissant des mesures probatoires. Il a tenu une audience de débats d'instruction le 12 septembre 2017, lors de laquelle les parties se sont accordées sur la réouverture d'une "instruction préalable écrite limitée" à l'introduction de faits nouveaux en lien avec l'inondation susmentionnée.

Un délai au 20 novembre 2017 a été imparti à A______ pour compléter sa demande reconventionnelle.

j. Le 20 novembre 2017, A______ a déposé des conclusions sur faits nouveaux. Il a amplifié sa demande reconventionnelle en réclamant le paiement d'un montant supplémentaire de 32'003 fr. 25 lié aux dommages causés par l'inondation du 5 janvier 2017.

Il a repris en substance les explications déjà fournies sur l'origine des infiltrations dans le sous-sol de la maison. Ses allégations de fait étaient numérotées de 4.1 à 8.4.

k. Par réponse du 15 janvier 2018, B______ SA a conclu à l'irrecevabilité des conclusions nouvelles prises par A______ le 20 novembre 2017, subsidiairement à leur rejet.

l. Le 23 février 2018, les parties ont adressé au Tribunal des premières plaidoiries écrites. A______ a formulé une offre de preuves complémentaires, sollicitant l'audition de dix autres témoins (V______, W______, X______, Y______, Z______, AA______, I______, AB_____, AC_____ et AD_____).

m. Le 19 septembre 2018, le Tribunal a procédé à un transport sur place.

n. Par ordonnance du 30 décembre 2019, le Tribunal a notamment dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la recevabilité des conclusions modifiées prises par A______ le 20 novembre 2017 séparément du jugement au fond et invité les parties à lui transmettre leurs conclusions sur expertise (principe, mission et personne de l'expert), ce que celles-ci ont fait les 20 avril et 4 juin 2020.

o. Par ordonnance du 22 décembre 2020, le Tribunal a ordonné la réalisation d'une expertise aux fins de déterminer quelles malfaçons, parmi celles énumérées par A______, étaient imputables à B______ SA, et d'établir les moyens adéquats pour y remédier ainsi que les coûts prévisibles de réfection.

p. Le 10 mai 2022, l'expert a rendu son rapport d'expertise.

Lors de ses auditions par le Tribunal les 27 septembre et 19 octobre 2022, il a confirmé les termes et les conclusions de son rapport.

Il a été requis de l'expert, lors de l'audience du 19 octobre 2022, qu'il procède à un complément d'expertise (en lien avec la porte de la cave à vin, la réfection du carrelage de la terrasse et de la piscine, la problématique de la pente, la ventilation du bâtiment et le refoulement de fumée de la chambre parentale et du salon, le boîtier qui contient la grille à l'entrée de la cuisine et l'indice général genevois du coût de la construction pour 2022), ce qu'il a fait en date du 3 novembre 2022.

q. Lors de l'audience de débats d'instruction du 25 janvier 2023, B______ SA a renoncé à l'audition des témoins requise le 20 février 2015, de même qu'à l'interrogatoire des parties, estimant que la cause était en état d'être jugée sur le fond.

A______ a déposé une écriture datée du 24 janvier 2023, contenant des allégués (9.1 à 12.7) et des conclusions complémentaires en lien avec les frais de déménagement et d'entreposage engendrés, selon lui, par la mise en œuvre de l'expertise. Il a également produit un bordereau de pièces complémentaires (pièces 71 à 123).

B______ SA a soulevé l'irrecevabilité de ces éléments.

A______ a alors fait valoir que dans l'hypothèse où le Tribunal déclarerait son écriture complémentaire irrecevable, il persisterait à solliciter l'audition des témoins requise le 3 février 2016.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a réservé la question de la recevabilité des éléments susmentionnés, fixé un délai à B______ SA pour se déterminer et indiqué qu'une ordonnance de preuves serait rendue à réception desdites déterminations.

r. Par acte du 27 février 2023, B______ SA a conclu à l'irrecevabilité des allégués nouveaux (9.1 à 12.7) et moyens de preuve nouveaux (pièces 71 à 123) de sa partie adverse ainsi que de la modification de la demande reconventionnelle.

B. Par ordonnance ORTPI/366/2023 du 30 mars 2023, reçue par A______ le 3 avril 2023, le Tribunal a déclaré irrecevables les allégués et conclusions complémentaires, de même que le bordereau de pièces, déposés par le précité à l'audience du 25 janvier 2023 et les a écartés de la procédure (chiffre 1 du dispositif), a écarté les moyens de preuve supplémentaires sollicités (ch. 2), clos les débats et fixé un délai aux parties au 12 mai 2023 pour déposer leurs plaidoiries finales écrites (ch. 3).

Le Tribunal a considéré que les débats principaux avaient été ouverts le 3 février 2016, qu'il n'avait admis la réouverture d'une instruction préalable le 12 septembre 2017 que dans le cadre restreint de faits nouveaux liés à l'inondation du 5 janvier 2017 et que la recevabilité de conclusions modifiées dans ce cadre avait été réservée par ordonnance du 30 décembre 2019 pour être tranchée dans le cadre du jugement au fond. A ce stade de la procédure, la demande reconventionnelle ne pouvait donc plus être modifiée et complétée comme A______ entendait le faire. Il convenait toutefois d'examiner l'écriture du 24 janvier 2023 à l'aune de l'art. 229 CPC, quand bien même le précité ne faisait pas valoir de faits nouveaux. Les allégués 9 (9.1 à 9.13), 10 (10.1 à 10.40) et 11 (11.1 à 11.19) concernaient des faits s'étant produits en 2021 et en 2022 et étaient dès lors irrecevables puisqu'invoqués tardivement. Les allégués 12.1 à 12.7 ne constituaient pas des novas et étaient par conséquent également irrecevables.

S'agissant des moyens de preuve que A______ avait persisté à solliciter lors de l'audience du 25 janvier 2023, soit l'audition des témoins figurant dans la liste déposée le 3 février 2016, le Tribunal a considéré que la majorité des allégués à l'appui desquels les témoins étaient cités concernait les défauts allégués affectant l'ouvrage. A______ avait offert de prouver ces éléments par témoins ainsi que par expertise. Or, les expertises et le complément d'expertise figurant au dossier avaient eu pour but de déterminer les défauts affectant l'ouvrage. Ces moyens de preuve étaient donc suffisants pour établir les faits pertinents, sans qu'il ne soit encore nécessaire d'entendre des témoins à ce propos. Selon le premier juge, il était de plus illusoire d'entendre des témoins à propos d'un ouvrage qui avait été livré en août 2008, soit quinze ans auparavant.

Les autres allégués à l'appui desquels l'audition des témoins était proposée "à titre de contre-preuve des allégués de la demande principale, (…) concern[ai]ent principalement le retard pris pour la livraison de l'ouvrage et le qualificatif de menus travaux de finition ou de nombreux travaux inachevés et de graves défauts affectant l'ouvrage au moment de la réception et de la prise de possession de la villa en août 2008". La date de livraison de la villa en août 2008 n'était toutefois pas contestée. Par ailleurs, les titres produits suffisaient à établir les différents allégués concernant le retard de livraison de l'ouvrage. De plus, les expertises figurant au dossier permettaient de déterminer si au moment de la réception, de menus travaux de finition restaient à effectuer ou si de graves défauts affectaient l'ouvrage. Dans ces conditions, les actes d'instruction complémentaires sollicités devaient être refusés.

C. a.a Par acte expédié le 25 avril 2023 au greffe de la Cour de justice, A______ a formé recours contre l'ordonnance précitée, dont il a sollicité l'annulation.

Il a conclu, sous suite de frais, à ce que la Cour invite le Tribunal à rendre une nouvelle ordonnance de preuves qui tienne compte des éléments suivants (conclusion 3) : "(a) de la liste de témoins (bordereau de preuves du Recourant, (l'Intimée ayant renoncé à l'audition de ses témoins), (b) des pièces versées aux débats ayant une valeur probante suffisante, (c) des constatations faites par l'expert (rapport d'expertise, rapport complémentaire et audition)". Il a également conclu à ce que la Cour dise que les allégués et conclusions complémentaires du 24 janvier 2023 étaient recevables (conclusion 4), de même que le bordereau de pièces produit à l'appui de cette écriture (conclusion 5).

a.b Préalablement, A______ a conclu à ce que l'effet suspensif soit accordé à son recours.

B______ SA s'en est rapportée à justice.

Par arrêt ACJC/587/2023 du 8 mai 2023, la Cour a admis la requête formée par A______ tendant à suspendre le caractère exécutoire de l'ordonnance entreprise et dit qu'il serait statué sur les frais dans l'arrêt rendu sur le fond.

b. Par réponse du 11 mai 2023, B______ SA a conclu, sous suite de frais judiciaires et dépens, à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.

Elle a notamment fait valoir que les conclusions 3a, 3b, 3c, 4 et 5 du recourant étaient irrecevables, puisqu'elles portaient sur la recevabilité d'allégués et de pièces dont il pouvait tenter d'obtenir l'administration dans le cadre d'une éventuelle procédure d'appel (conclusions 3b, 3c, 4 et 5) ou parce que le Tribunal avait tenu compte de la liste de témoins produite par le recourant, de sorte que sa conclusion y relative (conclusion 3a) était sans objet.

c. A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions. Il a produit une pièce non soumise au premier juge, soit une photographie non datée d'une cour en travaux.

d. B______ SA a renoncé à dupliquer, considérant que la réplique n'apportait aucun élément nouveau relevant. Elle a persisté dans ses conclusions.

e. Par pli du 9 juin 2023, A______ a informé la Cour de ce que les travaux entrepris avaient permis de constater des faits nouveaux, lesquels avaient été annoncés le jour même au Tribunal. Il a produit l'écriture en question, soit les conclusions sur faits nouveaux, preuves nouvelles et suspension, datée du 8 juin 2023, et le bordereau de pièces y relatif.

f. Le même jour, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Le recours est recevable contre les décisions finales, incidentes et provisionnelles de première instance qui ne peuvent pas faire l'objet d'un appel (art. 319 let. a CPC) et contre les autres décisions et ordonnances d'instruction de première instance dans les cas prévus par la loi (art. 319 let. b ch. 1 CPC) ou lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable (ch. 2).

Par définition, les décisions visées à l'art. 319 let. b CPC ne sont ni finales, ni partielles, ni incidentes, ni provisionnelles. Il s'agit de décisions d'ordre procédural par lesquelles le tribunal détermine le déroulement formel et l'organisation matérielle de l'instance (JEANdin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 11 ad art. 319 CPC; Freiburghaus/Afheldt, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2016, n. 11 ad art. 319 CPC).

1.2 Dans le cadre de la décision querellée, le Tribunal a notamment déclaré irrecevables certains allégués, conclusions et pièces, écarté des moyens de preuve supplémentaires et clos les débats. Il a ainsi rendu une ordonnance d'instruction par laquelle il a statué sur le déroulement et la conduite de la procédure. Ladite ordonnance peut faire l'objet d'un recours conformément à l'art. 319 let. b CPC.

1.3 Le recours, écrit et motivé, doit être déposé auprès de l'instance de recours dans un délai de dix jours à compter de la notification de la décision (art. 321 al. 1 et 2 CPC).

En l'espèce, le recours a été introduit dans le délai et la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 145 al. 1 let. a, 146 al. 1 et 321 CPC), de sorte qu'il est recevable sous cet angle.

2. Reste à déterminer si l'ordonnance attaquée est susceptible de causer un préjudice difficilement réparable au recourant, les autres hypothèses visées par l'art. 319 let. b ch. 1 CPC n'étant pas réalisées.

2.1 La notion de "préjudice difficilement réparable" est plus large que celle de "préjudice irréparable" consacré par l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Ainsi, elle ne vise pas seulement un inconvénient de nature juridique, mais toute incidence dommageable, y compris financière ou temporelle, pourvu qu'elle soit difficilement réparable. L'instance supérieure devra se montrer exigeante, voire restrictive, avant d'admettre la réalisation de cette condition, sous peine d'ouvrir le recours à toute décision ou ordonnance d'instruction, ce que le législateur a clairement exclu. Il s'agit de se prémunir contre le risque d'un prolongement sans fin du procès (ATF 138 III 378 consid. 6.3; 137 III 380 consid. 2; Colombini, Code de procédure civile, condensé de la jurisprudence fédérale et vaudoise, 2018, n. 4.1.3 ad art. 319 CPC; Jeandin, op. cit., n. 22 ad art. 319 CPC et références citées).

Le préjudice sera ainsi considéré comme difficilement réparable s'il ne peut pas être supprimé ou seulement partiellement, même dans l'hypothèse d'une décision finale favorable au recourant (Reich, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2010, ad art. 319 CPC n. 8; Jeandin, op. cit., n. 22a ad art. 319 CPC).

En d'autres termes, la notion de préjudice difficilement réparable doit être interprétée restrictivement puisque la personne touchée disposera le moment venu de la faculté de remettre en cause la décision ou ordonnance en même temps que la décision au fond : il incombe au recourant d'établir que sa situation procédurale serait rendue notablement plus difficile et péjorée si la décision querellée était mise en œuvre, étant souligné qu'une simple prolongation de la procédure ou un accroissement des frais ne suffisent pas. On retiendra l'existence d'un préjudice difficilement réparable lorsque ledit préjudice ne pourra plus être réparé par un jugement au fond favorable au recourant, ce qui surviendra par exemple lorsque des secrets d'affaires sont révélés ou qu'il y a atteinte à des droits absolus à l'instar de la réputation, de la propriété et du droit à la sphère privée (Jeandin, op. cit., n. 22 et 22a ad art. 319 CPC).

Selon la jurisprudence, la décision refusant ou admettant des moyens de preuve offerts par les parties ne cause en principe pas de préjudice difficilement réparable puisqu'il est normalement possible, en recourant contre la décision finale, d'obtenir l'administration de la preuve refusée à tort ou d'obtenir que la preuve administrée à tort soit écartée du dossier (arrêts du Tribunal fédéral 4A_58/2021 du 8 décembre 2021 consid. 1.2; 4A_248/2014 du 27 juin 2014; 4A_339/2013 du 8 octobre 2013 consid. 2; 5A_315/2012 du 28 août 2012 consid. 1.2.1). Sont réservés les cas exceptionnels, tels que le refus d'entendre un témoin mourant ou lorsqu'il existe un risque que les pièces dont la production est requise soient finalement détruites (Jeandin, op. cit., n. 22b ad art. 319 CPC).

Il appartient au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision attaquée lui cause un préjudice difficilement réparable, à moins que cela ne fasse d'emblée aucun doute (par analogie ATF 134 III 426 consid. 1.2 et 133 III 629 consid. 2.3.1).

2.2 En l'espèce, le recourant fait valoir que le chiffre 1 du dispositif de l'ordonnance attaquée lui causerait un préjudice difficilement réparable. Selon lui, la décision entreprise reviendrait à le priver d'une partie des moyens nécessaires à établir le dommage dont il réclame réparation mais également à établir la moins-value de l'ouvrage, de sorte qu'au moment de juger, "le Tribunal ne sera[it] pas saisi de toutes les données qu'il faut prendre en compte pour rendre une décision".

Si tel était le cas, le recourant concède qu'il pourrait, en cas de jugement défavorable, remettre en cause la décision dans le cadre d'un appel contre le jugement au fond et la recevabilité de l'écriture, des conclusions et des pièces écartées par le Tribunal serait alors examinée par l'autorité de seconde instance.

Le recourant fait toutefois valoir qu'il y aurait lieu de tenir compte du fait que le litige dure depuis quinze ans, qu'il est aujourd'hui âgé de 68 ans et qu'il entend prendre sa retraite à l'étranger et ainsi "tourner la page". Or, conformément aux principes rappelés supra, la seule prolongation de la procédure liée au fait que l'instance d'appel pourrait, le cas échéant, retourner le dossier au Tribunal pour complément d'instruction (cf. art. 318 CPC), ne cause pas de dommage difficilement réparable au recourant. En l'occurrence, la procédure de première instance arrive à son terme, un délai devant être imparti aux parties pour déposer leurs plaidoiries finales écrites. De plus, le recourant ne fait pas valoir de circonstances particulières propres à établir une impossibilité de remettre en cause, dans le cadre d'une procédure d'appel, la décision prise par le premier juge. La procédure ne l'empêche, pour le surplus, pas de déménager à l'étranger, de sorte que sa retraite ne constitue pas un argument valable permettant d'admettre un préjudice difficilement réparable.

Compte tenu de ce qui précède, le chiffre 1 du dispositif de l'ordonnance querellée n'est pas susceptible de causer au recourant un préjudice difficilement réparable, au sens des dispositions et principes rappelés ci-dessus. Le recours sera en conséquence déclaré irrecevable sur ce point.

Il en va de même du chiffre 2 du dispositif de l'ordonnance attaquée, le recourant pouvant remettre en cause cette décision dans le cadre d'un appel contre le jugement au fond, dans le cas où celui-ci lui serait défavorable.

Selon le recourant, l'âge avancé d'un des témoins dont il sollicite l'audition, soit I______ (qui serait né en 1943), pourrait rendre impossible celle-ci dans le cadre d'un appel ou après l'admission de celui-ci et le renvoi de la cause au Tribunal. Cependant, le recourant n'expose pas en quoi l'impossibilité d'entendre le précité lui causerait un dommage difficilement réparable, en détaillant, par exemple, les faits qui ne pourraient être prouvés que par ce biais et en démontrant en quoi ces faits pourraient avoir une incidence sur la solution du litige.

Contrairement à ce que semble soutenir le recourant, le Tribunal a du reste examiné à l'appui de quels allégués l'audition de témoins était requise par le recourant et a considéré que le dossier contenait d'autres moyens de preuve – les expertises mais également les titres produits par les parties – susceptibles d'établir les faits en question.

Pour le surplus, les éléments développés par ce dernier dans sa réplique ne sauraient être pris en compte, la réplique ne pouvant pas servir à apporter au recours des éléments qui auraient pu l'être pendant le délai légal, en particulier à compléter une motivation inexistante ou insuffisante (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_318/2023 du 14 juillet 2023 consid. 2.4; 4A_412/2021 du 21 avril 2022 consid. 3.2; 5A_737/2012 du 23 janvier 2013 consid. 4.2.3; 1B_183/2012 du 20 novembre 2012). En tout état, l'expertise n'est pas l'unique moyen de preuve qui a été admis par le Tribunal, de sorte que le seul fait que ladite expertise ne couvre pas certains allégués pour lesquels l'audition de nombreux témoins a été sollicitée par le recourant ne signifie pas encore que ces allégués ne seraient pas assortis d'autres offres de preuve, étant relevé que le recourant admet lui-même, dans sa réplique, que la plupart des témoignages requis n'apparaissent, à ce stade, plus indispensables, voire utiles.

Il n'est ainsi pas rendu vraisemblable que le refus de procéder à l'audition des dix-huit témoins sollicités par le recourant causerait à celui-ci un dommage difficilement réparable.

Le recours sera par conséquent déclaré irrecevable dans son intégralité.

3. Le recourant, qui succombe, sera condamné au paiement des frais judiciaires du recours (y compris la décision sur effet suspensif), fixés à 1'200 fr. (art. 104 al. 1, 105 et 106 al. 1 CPC; art. 41 RTFMC), et aux dépens de l'intimée, arrêtés à 2'000 fr., débours et TVA inclus (art. 105 al. 2 CPC; 84, 85, 87 et 90 RTFMC; art  25 et 26 LaCC).

Les frais judiciaires seront compensés avec l'avance de frais du même montant effectuée par le recourant, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Déclare irrecevable le recours interjeté le 25 avril 2023 par A______ contre l'ordonnance ORTPI/366/2023 rendue le 30 mars 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/26061/2013.

Met les frais judiciaires du recours, arrêtés à 1'200 fr., à la charge de A______ et dit qu'ils sont compensés avec l'avance versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser 2'000 fr. à B______ SA à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.