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Décisions | Chambre civile

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C/850/2021

ACJC/280/2023 du 28.02.2023 sur JTPI/6319/2022 ( OS ) , CONFIRME

Normes : CO.366; CO.368
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/850/2021 ACJC/280/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 28 FÉVRIER 2023

 

Entre

Monsieur A______ et Madame B______, domiciliés ______ (GE), appelants d'un jugement rendu par la 13ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 18 mai 2022, comparant par Me Christian PETERMANN, avocat, rue Général-Dufour 20, 1204 Genève, en l'Étude duquel ils font élection de domicile,

et

Monsieur C______, domicilié ______ (VD), intimé, comparant par Me Alain VUITHIER, avocat, chemin de la Clergère 23, case postale 303, 1009 Pully (VD), en l'Étude duquel il fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/6319/2022 du 18 mai 2022, notifié à A______ et B______ le 25 mai 2022 et à C______ le 27 mai 2022, statuant par voie procédure simplifiée, le Tribunal de première instance (ci-après: le Tribunal) a constaté l'inexistence de la créance de 1'300 fr. réclamée par C______ dans la poursuite n. 1______ dirigée contre B______ (ch. 1 du dispositif) et débouté pour le surplus A______ et B______ des fins de leur action en constatation d'inexistence de la créance dirigée contre C______ (ch. 2).

Simultanément, le Tribunal a mis les frais judiciaires – arrêtés à 2'520 fr. – à la charge de A______ et de B______, pris conjointement et solidairement, à hauteur de 2'000 fr. et à la charge de C______ à hauteur de 520 fr., compensé ces frais avec l'avance de frais de 2'520 fr. fournie par A______ et B______, condamné C______ à payer aux précités, pris conjointement et solidairement, la somme de 520 fr. à titre de remboursement partiel de leur avance (ch. 3), condamné C______ à payer à l'Etat de Genève un montant de 150 fr. (ch. 4), condamné A______ et B______, pris conjointement et solidairement, à payer à C______ un montant 500 fr. à titre de dépens (ch. 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

B.            a. Par acte expédié au greffe de la Cour de justice le 24 juin 2022, A______ et B______ appellent de ce jugement, dont ils sollicitent l'annulation des chiffres 2 à 6 du dispositif.

Principalement, ils concluent à ce que l'inexistence de la créance de 10'539 fr. 85 déduite en poursuite à leur encontre par C______ soit constatée, avec suite de frais judiciaires et dépens de première instance et d'appel.

A l'appui de leurs conclusions, ils produisent un bordereau de diverses pièces, préalablement soumises au Tribunal.

b. Dans sa réponse, C______ conclut au rejet de l'appel, avec suite de frais judiciaires et dépens.

c. Les parties ont respectivement répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger par plis du greffe du 12 janvier 2023.

C.           Les faits pertinents suivants résultent de la procédure:

a. A______ et B______ sont propriétaires d'une villa sise no. ______, chemin 2______ à D______ (GE).

b. C______ exploite en raison individuelle une entreprise active dans les revêtements de sols.

c. Dans le cadre de travaux de rénovation de leur villa, A______ et B______, en qualité de maîtres de l'ouvrage, et C______, en qualité d'entrepreneur, ont conclu un contrat daté du 7 janvier 2019, portant sur l'installation par le second d'un parquet fourni par les premiers, soit sur les travaux suivants: "Préparation des sols après dépose, Pose du parquet + Pose du parquet dans l'escalier + Plinthes".

c.a A______ et B______ étaient représentés par le bureau d'architectes d'intérieur E______ Sàrl, qui était en charge de la direction des travaux.

c.b La rémunération de C______ était fixée sur la base des prix et quantités figurant dans un descriptif établi par ses soins le 14 décembre 2018, pour un montant de 17'156 fr. 85, arrondi à 17'156 fr. TTC (art. 2).

c.c Ledit descriptif susvisé détaillait le coût des travaux comme suit: :

" - Ponçage de préparation des sols après dépose (*)
88.00 m2 à fr. 16.00/m2 fr. 1'408.00

-          Préparation support Nivelline - Lissage 2 mains (*)
88.00 m3 à fr. 14.00/m3 fr. 1'232.00

-          Pose du parquet collé en plein
114.40 m2 à fr. 38.00 m2 fr. 4'347.20

-          Plus-value pour pose dans les escaliers
33.00 ml à fr. 115.00/ml fr. 3'795.00

-          Création en atelier des Nez de marche dans le parquet Client
33.00 ml à fr. 96.00/ml fr. 3'168.00

-          Fourniture et pose de plinthes et contre plinthes (Laquées Blanc)
110.00 ml à fr. 18.00/ml fr. 1'980.00

Total fr. 15'930.20

TVA + 7.7% fr. 1'226.65

TOTAL TTC fr. 17'156.85

Note 1: La dépose des revêtements de sol existants sera réalisée par l'entreprise en charge de la démolition et n'est pas comprise dans cette offre.

Note 2 : (*) : Sous réserve de l'état des supports après dépose."

c.d Les travaux dans la villa devaient débuter le 14 janvier 2019 et l'ouvrage achevé être remis aux propriétaires le 22 mars 2019 (art. 4).

c.e Le contrat prévoyait un for au domicile de C______ ou, à défaut d'un tel domicile/siège en Suisse, celui du lieu de l'ouvrage (art. 9).

c.f Il était également prévu que la norme SIA 118 "Conditions générales pour l'exécution des travaux de construction" (édition 2013) faisait partie intégrante du contrat (art. 1).

d. Le 30 janvier 2019, E______ Sàrl a indiqué à C______ qu'il pouvait prendre livraison du parquet pour les nez de marche le 6 février 2019. Elle a déclaré lui rappeler que le début de la pose du parquet était prévue le 25 février 2019.

e. Dans un procès-verbal de rendez-vous de chantier du 28 février 2019, auquel C______ n'a pas assisté bien qu'il y ait été convoqué, il a été mentionné à l'attention de celui-ci, sous la rubrique "avancement", que le client exprimait un fort mécontentement dès lors que la zone sous radiateurs n'était pas couverte. Ce point devait être corrigé immédiatement le vendredi 1er mars 2019.

Sous la rubrique "ordres pour la semaine n° 10" figuraient à l'attention de C______ les instructions suivantes:

" - Entrée principale : La jonction entre le carrelage et le parquet n'est pas bonne. Un seuil dans l'entrée principale sera refusé. Merci de corriger ce point selon explications données par la D. T. ce jour (2-3mm maxi entre carrelage et parquet). Le joint silicone sera réalisé par F______.

- Poser escaliers XX-RC et RC-Etage.

- Terminer Etage. A l'étage.

Nous vous rendons particulièrement vigilant à la zone de contact entre le parquet et le carrelage des salles de bains. Le niveau doit être parfait. Pas de seuil toléré. 2-3 mm maxi entre carrelage et parquet."

Le procès-verbal rappelait en outre que la maison devait être rendue aux propriétaires le vendredi 22 mars 2019 à 17h et qu'aucun retard ne serait autorisé.

f. Par courrier adressé le 9 mars 2019 à E______ Sàrl, C______ a déclaré qu'il réfutait en bloc le procès-verbal du 8 mars 2019, au motif que celui-ci comportait de nombreuses interprétations et affirmations erronées. Il a affirmé que "l'entier du travail devisé et accepté par le client [était] posé, ce dans les délais impartis, soit le vendredi 8 mars 2019".

g. Le 11 mars 2019, les maîtres de l'ouvrage, représentés par E______ Sàrl, ont adressé à C______ un avis de défauts comprenant neuf points, accompagné de photographies, en exigeant que ces défauts soient éliminés le vendredi 15 mars 2019 à 18h au plus tard, eu égard à la date de remise de l'ouvrage.

g.a Les défauts invoqués étaient les suivants:

" 1) Plinthes des escaliers n. 1 et n. 2 sont non réalisées

2) Plinthes retour bar de la cuisine sont non réalisées

3) Plinthe sous fenêtre de la cuisine est non fixée

4) Plinthe sous les deux baies vitrées chambre parentale non réalisées

5) Zone palière sous-sol et ses plinthes non réalisées

6) Latéral gauche marche terminale escalier n. 1 est non terminée

7) Latéral gauche marche terminale escalier n. 2 est non terminée

8) Protections des parquets avant votre départ. Non réalisé.

9) Protections des escaliers et nez de marche non réalisées ou insuffisantes."

g.b Une case "URGENT" était en outre cochée.

h. Le 22 mars 2019, C______ a adressé à A______ et B______ une facture d'un montant de 17'800 fr. 85 pour ses travaux.

i. Le 3 avril 2019, par le biais de E______ Sàrl, les maîtres d'ouvrage ont adressé à C______ un second avis de défauts, accompagné de photographies et comportant la mention "URGENT", en lui impartissant un délai de sept jours pour éliminer les défauts suivants:

" 1) Un nombre important de têtes de marche est apparu endommagé, en raison de votre abandon du chantier sans la mise en place de protections et malgré les mesures de protection prises par la D.T. très rapidement après votre départ de l'intéressé afin d'éviter d'autres dégâts.

2) Têtes de marches non adoucies. Rayon 2 à 3mm selon votre promesse au M.O. en présence de la D.T. et autres personnes sur site. Le détail exécuté n'est pas acceptable en l'état, car se dégradant très vite.

3) Zone bar, Pose d'une lame dont la teinte n'est pas en rapport. Refusée."

j. Par courrier du 4 avril 2019, C______ a contesté les défauts susmentionnés, expliquant notamment ne pas être responsable d'éventuels dégâts survenus après son passage, que la protection des marches d'escaliers avait été réalisée par les peintres de l'entreprise F______, alors même qu'il n'avait pas terminé son intervention, que les nez de marche correspondaient au modèle présenté et laissé sur place et que la lame de parquet incriminée avait été fournie par le maître d'ouvrage. Dans un geste de bonne volonté, C______ indiquait être prêt à adoucir les nez de marches à l'aide d'un ponçage approprié et à réimprégner les parties poncées.

k. Le 18 avril 2019, E______ Sàrl a indiqué à C______ que l'envoi de sa facture du 22 mars 2019 directement aux clients contrevenait aux instructions qui lui avaient été données, que le libellé de cette facture n'était pas conforme et que son descriptif ne correspondait en rien aux travaux adjugés.

E______ Sàrl a déclaré dès lors retourner sa facture à C______ et l'a prié d'en établir une nouvelle. Se référant à la norme SIA 118.2013, elle a précisé que la somme qui restait due s'élevait à 7'261 fr., compte tenu des montants facturés par elle-même et trois entreprises tierces pour éliminer les défauts affectant les travaux réalisés par C______.

l. Par courriel du 20 avril 2019, C______ s'est plaint auprès de A______ et de B______ de ce que E______ Sàrl entendait amputer sa facture de 50%. Indiquant avoir réalisé l'ensemble des travaux devisés et commandés dans les délais impartis, il a prié les maitres d'ouvrage de s'acquitter de sa facture du 22 mars 2019. Il a notamment joint à son courriel un message injurieux que lui avait adressé l'animateur de E______ Sàrl par WhatsApp le 6 mars 2019.

m. Les maîtres d'ouvrage ont versé au total 7'261 fr. à C______.

n. Le 3 juin 2019, C______ a fait notifier à A______ un commandement de payer, poursuite n. 3______, pour un montant de 10'539 fr. 85, correspondant au solde de sa facture du 22 mars 2019.

A______ a formé opposition à ce commandement de payer.

o. Le 4 juillet 2020, C______ a fait notifier à B______ un commandement de payer, poursuite n° 1______, pour un montant de 10'539 fr. 85 avec intérêts à 5% l'an dès le 22 mars 2019, au titre du solde de sa facture du 22 mars 2019, auquel s'ajoutait un montant de 1'300 fr. à titre d'indemnité selon l'art. 103 CO.

B______ a formé opposition à ce commandement de payer.

p. Par acte du 10 août 2021, A______ et B______ ont formé contre C______ une action tendant principalement à ce que le Tribunal constate l'inexistence de la créance de celui-ci à leur encontre à hauteur d'un montant de 11'839 fr. 85 TTC, sans intérêts ni frais, à ce qu'il soit fait interdiction à l'Office des poursuites de communiquer à des tiers l'existence des poursuites n. 4______ (recte: n. 3______) et 1______ (recte: n° 1______), et à ce que C______ soit condamné à leur verser un montant de 1'200 fr. à titre de dommage supplémentaire, avec suite de frais.

A l'appui de leurs conclusions, A______ et B______ ont exposé en substance que C______ n'avait pas corrigé les défauts affectant ses travaux malgré plusieurs avis de défauts, qu'il avait ensuite abandonné le chantier sans préavis, qu'ils avaient ainsi été contraints de faire achever les travaux et éliminer les défauts par des entreprises tierces pour un coût de 9'895 fr., et que C______ ne pouvait dès lors prétendre au paiement du solde de sa facture.

q. Le Tribunal a imparti à C______ un délai au 10 novembre 2021 pour se déterminer par écrit, délai qui a été prolongé au 29 novembre 2021 à la demande de celui-ci.

r. C______ ne s'est pas déterminé dans le délai ainsi fixé. Le 9 décembre 2021, il a sollicité la restitution d'un délai pour produire sa réponse.

s. Par ordonnance du 10 mars 2022, le Tribunal a rejeté la requête de restitution, arrêté les frais à 150 fr. et mis ceux-ci à la charge de C______.

t. A l'audience du 4 mai 2022, le Tribunal a ouvert des débats d'instruction. C______ a déposé des déterminations écrites, tandis que A______ et B______ ont indiqué n'avoir aucun acte d'instruction à solliciter.

u. Le Tribunal a ensuite ouvert des débats principaux et donné la parole aux conseils des parties pour les premières plaidoiries, en précisant que celles-ci vaudraient plaidoiries finales.

A______ et B______ ont persisté dans leurs conclusions.

C______ a conclu principalement à l'irrecevabilité de la demande pour cause d'incompétence ratione loci et, subsidiairement, au déboutement des parties demanderesses de toutes leurs conclusions, les défauts invoqués par celle-ci n'étant pas prouvés. En tout état, il a conclu à l'allocation de dépens.

v. A l'issue de l'audience susvisée, le Tribunal a gardé la cause à juger.

w. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré qu'il était compétent pour connaître de l'action en constatation de l'inexistence de dette formée sur la base de l'art. 85a LP, vu les poursuites introduites à Genève. Il était en revanche incompétent pour statuer sur les prétentions des demandeurs en paiement d'un montant de 1'200 fr. à titre de dommage supplémentaire, lesquelles devaient être exercées au for du domicile du défendeur.

Sur le fond, le Tribunal a considéré que l'existence de la plupart des défauts invoqués par les maîtres d'ouvrage et leur imputabilité à l'entrepreneur assigné n'était pas établie. Seule l'absence de plinthes à certains endroits était démontrée, mais les allégations des maîtres d'ouvrage ne permettaient pas de déterminer quel était le dommage résultant de ce défaut, notamment dans les factures d'entreprises tierces produites. Partant, les maître d'ouvrage devaient être déboutés de leurs conclusions tendant à la constatation de l'inexistence de la créance de 10'539 fr. 85 invoquée par l'entrepreneur.

Pour le surplus, l'entrepreneur ne démontrait pas avoir subi un quelconque dommage supplémentaire, justifiant de réclamer un montant de 1'300 fr. à la seule personne de B______. Partant, il convenait de faire droit aux conclusions de celle-ci sur ce point et de constater l'inexistence de la créance ainsi déduite en poursuite. L'admission de la demande dans cette seule mesure ne justifiait cependant pas de faire interdiction à l'Office des poursuites de communiquer les poursuites litigieuses à des tiers, ce d'autant que les numéros de poursuites indiqués dans les conclusions des maîtres d'ouvrage étaient erronés.

EN DROIT

1.             1.1 Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable contre les décisions finales de première instance lorsque la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 et 2 CPC).

En l'espèce, la valeur litigieuse devant le Tribunal s'établissait en dernier lieu à 11'839 fr. 85 au moins (10'539 fr. 85 + 1'300 fr., cf. art. 94 al. 1 CPC), de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

Interjeté dans le délai utile de trente jours suivant la notification du jugement querellé et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.2 La compétence ratione loci et materiae des tribunaux genevois n'est, à juste titre, pas contestée par les parties, au vu des poursuites intentées à Genève (art. 85a al. 1 LP), étant précisé que les appelants ne persistent pas à solliciter en appel la condamnation de l'intimé à leur payer 1'200 fr. à titre de dommage supplémentaire.

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC), dans la limite des griefs suffisamment motivés qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4 et les références citées).

1.4 La valeur litigieuse étant inférieure à 30'000 fr., la procédure simplifiée est applicable (art. 243 al. 1 CPC).

2.             Les appelants reprochent au Tribunal de ne pas avoir constaté l'inexistence de la créance déduite en poursuite par l'intimé, au motif qu'ils n'auraient pas prouvé que l'ouvrage réalisé par ce dernier était affecté de défauts, ni démontré le dommage résultant de l'élimination de tels défauts par des tiers. Il se plaignent d'une violation du fardeau de l'allégation et de la preuve applicables, relevant que l'intimé n'a pas répondu à la demande devant le Tribunal.

2.1 Que la poursuite ait été frappée d'opposition ou non, le débiteur poursuivi peut agir en tout temps au for de la poursuite pour faire constater que la dette n'existe pas ou plus, ou qu'un sursis a été accordé (art. 85a al. 1 LP).

L'action prévue par cette disposition a une double nature : elle déploie à la fois des effets de droit matériel et de droit des poursuites (ATF 129 III 197 consid. 2.1; 125 III 149 consid. 2.c). En tant qu'action de droit matériel, elle a pour effet, tout comme l'action en libération de dette et contrairement à l'action prévue à l'art. 85 LP, de constater que la dette n'existe pas ou plus. En outre, l'action fondée sur l'art. 85a LP a pour effet, en matière de droit des poursuites, que le juge annule ou suspend la poursuite en cas de succès, comme dans la procédure selon l'art. 85 LP (Bangert in Basler Kommentar SchKG, 3e éd., 2021, n. 3 ad art. 85a LP).

L'inversion des rôles des parties ne modifie pas la répartition du fardeau de la preuve fondée sur le droit matériel: bien que le créancier ait le rôle de défendeur, il supporte l'entier du fardeau de la preuve et de la justification de l'existence de sa créance, de sorte que le défaut de motivation ou l'absence de preuve entraîne la perte du droit, en raison l'autorité de chose jugée attachée au jugement constatatoire (Bangert, op. cit., n. 4 ad art. 85a LP; cf. ég. ATF 120 II 20 consid. 3.a avec références ; arrêt du Tribunal fédéral 4D_68/2008 du 28 juillet 2008 consid. 2.2).

2.1.1 A teneur de l'art. 363 CO, le contrat d'entreprise est un contrat par lequel une des parties (l'entrepreneur) s'oblige à exécuter un ouvrage, moyennant un prix que l'autre partie (le maître) s'engage à lui payer.

La preuve du caractère onéreux du contrat incombe, selon la règle générale de l'art. 8 CC, à l'entrepreneur. Tel est notamment le cas lorsque l'on peut déduire des circonstances du cas d'espèce que l'ouvrage en question suppose habituellement une rémunération (Chaix in Commentaire romand, Code des obligations I, 3ème éd., 2021, n. 4 ad art. 363 CO).

2.1.1.1 L'art. 366 CO confère au maître des droits particuliers pour les cas où l'entrepreneur viole ses obligations relatives aux délais de livraison ou à la conformité de l'ouvrage. La particularité de cette disposition réside dans le fait que ces droits sont donnés avant la réception de l'ouvrage. Son but est d'éviter que le maître doive attendre la livraison de l'ouvrage pour faire valoir ses droits découlant de la garantie des défauts ou des règles sur la demeure (Chaix, op. cit., n. 1 ad art. 366 CO). Ainsi, lorsqu'il est possible de prévoir avec certitude que, par la faute de l'entrepreneur, l'ouvrage sera exécuté d'une façon défectueuse, le maître peut notamment recourir à l'exécution par un tiers aux frais et risques de l'entrepreneur, aux conditions de l'art. 366 al. 2 CO.

La prévisibilité d'une exécution défectueuse est donnée lorsque, au stade de l'exécution, on reconnaît de manière certaine que l'ouvrage achevé sera entaché d'un défaut. Tel est le cas lorsqu'un défaut apparaît sur l'ouvrage au cours de l'exécution. Tel est également le cas lorsque l'entrepreneur viole son devoir de diligence, notamment en omettant de prendre des mesures de sécurité ou en utilisant un matériau inadéquat et qu'il en découle un risque certain de création de défaut sur l'ouvrage (Chaix, op. cit., n. 28 ad art. 366 CO).

Selon le principe général exprimé à l'art. 8 CC, il appartient au maître de démontrer la réalisation des conditions d'application des dispositions susvisées (Chaix, op. cit., n. 42 ad art. 366 CO). Le maître qui agit à l'encontre de l'entrepreneur en remboursement des frais de reprise des défauts en vertu de l'art. 366 al. 2 CO est notamment tenu d'établir les dépenses qu'il a effectivement assumées dans ce cadre (Gauch et al., Präjudizienbuch OR, 10e éd., 2021, p. 1061, avec réf. à l'ATF 141 III 257 consid. 3.3, JdT 2015 II 403).

2.1.1.2 Après la livraison, le maître dispose des droits découlant des règles sur la garantie des défauts, tels que prévus à l'art. 368 CO, soit notamment du droit de réduire le prix aux conditions de l'art. 368 al. 2 CO.

L'ouvrage est entaché d'un défaut lorsqu'il ne possède pas les qualités convenues – expressément ou tacitement – par les parties, ou auxquelles le maître pouvait s'attendre d'après les règles de la bonne foi (ATF 114 II 239 consid. 5; arrêts du Tribunal fédéral 4A_460/2009 consid. 3.1.1 du 4 décembre 2009 et 4C.130/2006 du 8 mai 2007 consid. 3.1).

Le maître supporte le fardeau de la preuve de l'existence des défauts au moment de la livraison de l'ouvrage. Il n'a en revanche pas à démontrer l'origine des défauts. Dans le cadre du droit de réduire le prix, la preuve du montant de la diminution incombe également au maître (Chaix, op. cit., n. 74s. ad art. 368 CO).

2.1.2 Dans la procédure simplifiée, si la demande est motivée, la loi prévoit que le tribunal fixe un délai au défendeur pour se prononcer par écrit (art. 245 al. 2 CPC).

Si le défendeur omet de se déterminer par écrit dans le délai fixé par cette disposition, il n'y a pas lieu de rendre une décision par défaut selon l'art. 223 al. 2 CPC, même dans les cas où la maxime des débats s'applique. La procédure doit au contraire suivre son cours sans qu'il soit tenu compte de cette omission, conformément à la règle générale de l'art. 147 al. 2 CPC. Le tribunal ou le juge chargé de la conduite du procès doit convoquer des débats, lors desquels les parties pourront procéder oralement comme elles l'auraient pu si cette convocation avait eu lieu directement après le dépôt de la demande (Tappy in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 9 ad art. 245 CPC).

Le même auteur admet que, même si le tribunal ne lui a pas fixé de délai pour se prononcer par écrit, le défendeur est en droit de le faire spontanément avant les débats fixés selon l'art. 245 al. 1 CPC, c'est-à-dire avant les débats principaux (Tappy, op. cit., n. 5 et 6 ad art. 245 CPC). La loi prévoit par ailleurs que le tribunal peut tenir des audiences d'instruction si les circonstances l'exigent (art. 246 al. 2 in fine CPC). Celles-ci, qui correspondent aux débats d'instructions prévus en procédure ordinaire (art. 226 CPC), pourront notamment servir à discuter du déroulement de la procédure, de problèmes de faits ou de preuves, ou encore à la préparation des débats principaux (Tappy, op. cit., n. 13 ad art. 246 CPC).

2.1.3 Lorsque la maxime des débats s'applique, les parties doivent alléguer les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et produire les preuves qui s'y rapportent (art. 55 al. 1 CPC). En procédure simplifiée, l'art. 247 al. 1 CPC atténue toutefois ce principe en imposant au juge un devoir d'interpellation: il doit amener les parties, par des questions appropriées, à compléter les allégations insuffisantes et à désigner les moyens de preuve (ATF 146 III 413 consid. 4.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_630/2021 du 26 novembre 2021 consid. 3.3.2.3 et 4D_57/2013 du 2 décembre 2013 consid. 3.2).

Le devoir d'interpellation du juge dépend des circonstances concrètes, notamment de la difficulté de la cause, du niveau de formation des parties et de leur représentation éventuelle par un mandataire professionnel. Ce devoir concerne avant tout les personnes non assistées et dépourvues de connaissances juridiques, tandis qu'il a une portée restreinte vis-à-vis des parties représentées par un avocat. Dans ce dernier cas, le juge doit faire preuve de retenue. Le devoir d'interpellation du juge ne doit pas servir à réparer des négligences procédurales (arrêt du Tribunal fédéral 4D_57/2013 précité consid. 3.2).

2.2 En l'espèce, la conclusion d'un contrat d'entreprise portant sur la pose par l'intimé, dans la villa des appelants, d'un parquet et de plinthes aux conditions et au prix prévus par le descriptif du 14 décembre 2018 et par le contrat daté du 7 janvier 2019, est expressément admise par les appelants.

Les appelants admettent également que l'intimé a effectivement procédé à des travaux de pose dans leur villa, de sorte que celui-ci peut en principe prétendre à la rémunération convenue.

2.2.1 Les appelants soutiennent toutefois que l'exécution des travaux par l'intimé s'est avérée défectueuse et incomplète, de sorte qu'ils seraient fondés à déduire du prix convenu le coût de l'élimination des défauts et de l'achèvement de l'ouvrage par des tiers. Conformément aux principes rappelés, le fardeau de l'allégation et de la preuve d'une exécution entachée de défauts ou contraire au contrat incombe aux appelants, sans qu'il soit nécessaire de déterminer ici si leurs prétentions relèvent de l'art. 366 CO, comme ils l'affirment, ou de l'art. 368 CO, comme l'a considéré le Tribunal. Les appelants n'allèguent par ailleurs pas, ni ne démontrent, que la norme SIA 118 à laquelle renvoyait le contrat dérogerait au régime susvisé en matière d'allégation ou de preuve.

En l'occurrence, on relèvera tout d'abord que le fait que l'intimé ne se soit pas déterminé par écrit dans le délai imparti par le Tribunal ne doit pas amener à considérer que celui-ci aurait ce faisant admis les allégués des appelants relatifs aux défauts, ou qu'il ne se serait pas opposé à la demande formée par ceux-ci, comme ils le prétendent. L'intimé en effet a comparu à l'audience de débats ensuite convoquée par le Tribunal, conformément aux principes rappelés ci-dessus, et a notamment conclu au déboutement des appelants, en contestant la réalité des défauts invoqués par ceux-ci. Si la recevabilité des déterminations écrites spontanément produites par l'intimé à l'audience en question paraît certes douteuse, encore qu'elle n'apparaisse pas fondamentalement contraire aux dispositions et principes susévoqués, puisque leur dépôt est intervenu formellement lors des débats d'instruction et non après le début des débats principaux (cf. consid. 2.1.2 in fine ci-dessus), il n'en demeure pas moins que l'existence de défauts ou de violations du contrat dans l'exécution des travaux doit être appréciée sur la base des allégués de fait contenus dans la demande des appelants et des pièces qu'ils ont produites à l'appui de celle-ci, étant observé que lesdits appelants, à qui incombe le fardeau de l'allégation et de la preuve sur ces questions, ont pour leur part renoncé à solliciter d'autres mesures d'instruction devant le Tribunal. Considérant que les appelants étaient représentés par un conseil, et au vu de la motivation détaillée de la demande, il n'appartenait par ailleurs pas au Tribunal d'attirer spontanément l'attention de ceux-ci sur le caractère éventuellement insuffisant de leurs allégués ou de leur offre de preuve, nonobstant le devoir d'interpellation applicable en procédure simplifiée.

2.2.2 En l'espèce, il ressort des faits retenus sur cette base que les défauts invoqués par la direction des travaux dans le procès-verbal de chantier du 28 février 2019, soit l'absence de couverture de la zone sous radiateurs et une différence de niveau dans la jonction entre le parquet et le carrelage, ne figurent pas dans l'avis de défaut communiqué à l'intimé le 11 mars 2019. De même, les défauts énumérés dans cet avis de défaut, qui concernent essentiellement les plinthes, ne sont pour la plupart pas repris dans l'avis de défaut subséquent, daté du 3 avril 2019, lequel ne mentionne plus lesdites plinthes. Faute d'élément contraire, il faut donc admettre que ces défauts ont été corrigés par l'intimé dans l'intervalle et que leur persistance lorsque les appelants ont déclaré recourir à leur élimination par des tiers, le 18 avril 2019, n'est pas démontrée. Ceci concerne notamment la pose des plinthes, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal.

Les seuls défauts préalablement invoqués que l'on retrouve dans l'avis de défaut subséquent du 3 avril 2019 ont trait à la pose de protections avant l'issue des travaux et à la réalisation de têtes (ou nez) de marche. Comme l'a relevé le Tribunal, la pose de protections particulières n'était cependant pas prévue dans le descriptif des travaux intégré au contrat. Il n'est donc pas établi que leur éventuelle absence constitue un défaut, imputable à l'appelant. La mauvaise exécution des nez de marche a quant à elle été spontanément contestée par l'intimé, qui a indiqué que ceux-ci correspondaient au modèle présenté, sans être contredit. L'existence d'un défaut ne peut dès lors être admise dans ces conditions. Il en va de même du troisième point soulevé dans l'avis de défaut du 3 avril 2019 (celui-là pour la première fois), soit la pose d'une lame d'une teinte inadéquate, dès lors que le parquet devait être fourni par les appelants, et non par l'intimé, ce que celui-ci a également relevé sans être contredit.

Par conséquent, c'est à bon droit que le Tribunal a retenu qu'une exécution défectueuse des travaux n'était pas suffisamment démontrée par les appelants et que ceux-ci ne pouvaient se prévaloir d'un tel motif pour s'opposer aux prétentions en paiement de l'intimé. Il n'est pas non plus établi que l'exécution des travaux aurait accusé du retard par la faute de l'intimé, ce que les appelants ne soutiennent d'ailleurs pas, et l'existence d'une violation du contrat ne peut davantage être retenue sous cet angle.

2.2.3 A cela s'ajoute, comme l'a retenu le Tribunal, que les appelants n'ont jamais allégué le détail des factures des entreprises tierces auxquelles ils soutiennent avoir dû recourir, ni même indiqué précisément quels travaux celles-ci auraient effectués. A supposer qu'une exécution défectueuse des travaux puisse être reprochée à l'appelant sur certains points, notamment sur la réalisation des têtes de marche ou la mise en place de protections, les allégués des appelants ne permettraient pas de déterminer le coût effectif de la réfection des travaux concernés, ni de calculer par conséquent le montant qui pourrait être compensé avec le prix convenu pour la réalisation de l'ouvrage. Pour ce motif également, on ne saurait constater l'inexistence de la créance dont se prévaut l'intimé.

2.3 Le jugement entrepris sera dès lors dès lors confirmé en tant qu'il a débouté les appelants de leurs conclusions tendant à la constatation de cette inexistence (ch. 2 du dispositif).

3.             3.1 La décision du Tribunal sur les frais (ch. 3 à 5 du dispositif) n'est au surplus pas contestée en tant que telle et sera également confirmée, au vu des considérants qui précèdent (art. 318 al. 3 CPC a contrario).

3.2 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 2'200 fr. (art. 13, 17 et 35 RTFMC) et mis à la charge des appelants, qui succombent (art. 105 al. 1, art. 106 al. 1 CPC). Ces frais seront compensés avec l'avance de frais de même montant fournie par les appelants, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Les appelants seront par ailleurs condamnés à payer à l'intimé la somme de 1'800 fr. à titre de dépens d'appel (art. 105 al. 2 CPC, art. 84, 85 et 90 RTFMC), débours et TVA compris (art. 25 et 26 LaCC).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 24 juin 2022 par A______ et B______ contre le jugement JTPI/6319/2022 rendu le 18 mai 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/850/2021.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 2'200 fr., les met à la charge de A______ et B______, pris conjointement et solidairement, et les compense avec l'avance de frais de même montant fournie par ceux-ci, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ et B______, pris conjointement et solidairement, à payer à C______ la somme de 1'800 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX, Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.