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Décisions | Chambre civile

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C/20275/2021

ACJC/219/2023 du 14.02.2023 ( ADOPT ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/20275/2021 ACJC/219/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 14 FÉVRIER 2023

 

Requête (C/20275/2021) formée le 23 septembre 2021 par Monsieur A______, domicilié ______ (Genève), comparant par Me Alexandre MONTAVON, en l’étude duquel il élit domicile, tendant à l'adoption de B______, né le ______ 1976.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier du 14 février 2023 à :

- Monsieur A______
c/ o Me Alexandre MONTAVON, avocat
Rue François-Bellot 6, 1206 Genève.

- Monsieur B______
______
______

 


EN FAIT

A.           a) A______, né le ______ 1937 à C______ (Hongrie), de nationalité hongroise, a contracté mariage le ______ 1968 à D______ (Belgique) avec E______, née [E______] le ______ 1941 à C______ (Hongrie), de nationalité hongroise.

Le couple n’a pas eu d’enfant.

b) B______, né le ______ 1976 à G______ (Equateur), originaire de I______ (Genève), s’est marié le ______ 1993 avec F______, née le ______ 1976 à G______ (Equateur), originaire de I______ (Genève).

Deux enfants, aujourd’hui majeurs, sont issus de leur union, soit J______, né le ______ 1994, et K______, née le ______ 1998.

La mère de B______, L______, de nationalité équatorienne, est domiciliée en Equateur. Aucun père n’est inscrit sur l'acte de naissance équatorien de B______, ni à l’Etat civil genevois.

c) Le 1er décembre 2017, B______ et F______ ont été engagés par A______ et E______, en qualité d'employés de maison. B______ était chargé d’assurer le gardiennage de la propriété, d’entretenir le jardin, de conduire ses employeurs à leurs rendez-vous, tandis que son épouse devait s'occuper du ménage et aider à la cuisine. Le contrat de travail stipule que les employés s’engagent à consacrer toute leur activité et tous leurs soins aux époux A______/E______. Le salaire de B______ a été fixé à 1'250 fr. bruts par mois pour 12 heures d'activité par semaine, étant précisé que dans une annexe au contrat, intitulé "description de l'emploi du couple de gardiens", il est stipulé que l'un des deux employés doit être en permanence à la maison afin de réceptionner le courrier, les livraisons, accueillir les entreprises, assurer les travaux de la maison et conduire les employés en cas d'urgence médicale chez le médecin ou à l'hôpital, l'épouse devant effectuer des tâches ménagères à l'intérieur de la maison trois jours par semaine et aider en cuisine. Son salaire n'a pas été précisé.

Un logement de fonction, soit une maison neuve complètement équipée, a été mis à disposition des employés sur la propriété des époux A______/E______. En cas de résiliation de leur contrat de travail, les employés devaient libérer le logement de fonction dans les 30 jours suivants le dernier jour travaillé.

d) E______ est décédée le ______ 2021 à I______ (Genève).

B.            a) Par requête du 23 septembre 2021, adressée au greffe de la Cour civile, A______ a sollicité l'adoption de B______.

A______ expose qu'il a perdu son père lorsqu’il avait 10 ans et sa mère lorsqu’il avait 30 ans, que son épouse et lui-même n’ont pas pu concevoir d’enfant et qu’il n’a aucune famille. B______, quant à lui, n’a jamais connu son père et sa mère a fondé une nouvelle famille avec un autre homme peu de temps après sa naissance, de sorte qu’il a été élevé essentiellement par son grand-père. En 1999, à l’âge de 23 ans, B______ a quitté l’Equateur avec sa famille et est venu en Suisse, dans l’espoir de trouver une vie meilleure.

A______ indique que des liens très forts se sont très rapidement noués entre le couple A______/E______ et le couple B______/F______, après leur engagement à leur service en décembre 2017. Ils ont rapidement commencé à partager des moments importants de leur vie (anniversaires, anniversaires de mariage, Noël, 1er août, etc.), mais également des moments de loisirs. Leurs logements respectifs se situent tous deux sur la même parcelle de 1730 m² et sont distants de moins d’une dizaine de mètres. En peu de temps, les moments de partage sont devenus quasi quotidiens (repas, soirées, etc.) et les logements étaient ouverts, chacun allant et venant à sa guise dans les deux maisons. Chacun pouvait également utiliser les différents espaces situés sur la parcelle (jardin, piscine, garages). Une importante relation affective s’est développée entre eux, les uns étant les confidents des autres et chacun étant toujours présent pour soutenir et aider celui qui en avait besoin. Au fil des années, B______ et sa famille ont ainsi intégré le quotidien du couple A______/E______ et sont, pour eux, devenus des membres de leur famille à part entière.

Une relation particulièrement forte et profonde de type père/fils s’est nouée entre B______ et A______ que le premier appelle "papa". Quant au second, il présente B______ à son entourage comme son propre fils. Il est à ses yeux l’enfant qu’il n’a jamais eu. Depuis le décès de son épouse, B______ et sa famille ont été d’une présence, d’un soutien et d’un réconfort incommensurables pour A______, qui souhaite aujourd’hui que celui-ci puisse être officiellement reconnu comme son fils.

A l'appui de sa requête, A______ a notamment produit un extrait cadastral justifiant de la proximité des deux maisons sur la parcelle lui appartenant, ainsi que des photographies de 2018 à 2021 prises à l'occasion de moments festifs.

b) B______ a accepté, par courrier du 25 juin 2021, son adoption par A______. Il aurait ainsi un père dans sa vie, ce qui le touchait énormément. Il voulait porter avec fierté le nom de A______/E______ après adoption. Il était très reconnaissant à A______ de lui offrir une famille, ce qu’il n’avait jamais connu.

c) F______ s’est déclarée favorable à la demande d’adoption de son époux par A______. Ce dernier, qu’ils aimaient appeler "papa", les avait pris sous son aile et les considérait comme ses enfants. C’est ainsi qu’il les présentait à tout le monde. La demande d’adoption la touchait énormément et leurs propres enfants étaient enfin heureux d’avoir un grand-père. Entre leur "papa" et eux, il y avait beaucoup de sentiments filiaux. A______ aurait ainsi une famille qui l’aimait et qu’il pourrait aimer en retour. Elle porterait avec fierté le nom de A______/E______ aux côtés de son époux.

d) Par courrier du 25 juin 2021, J______ et K______ se sont déclarés d’accord que leur père soit adopté par A______. Cette adoption leur permettrait également d’avoir un grand-père. Ils étaient très attachés à E______ et A______, qui les avaient toujours considérés comme leurs petits-enfants. Leur "grand-mère", E______, récemment décédée, leur manquait beaucoup et leur "grand-père" leur apportait du réconfort.

e) La mère de B______, L______, s’est également déclarée favorable à l’adoption de son fils par A______ et a transmis une attestation authentique d’un notaire équatorien dans ce sens.

EN DROIT

1.             La requête d'adoption présente un élément d'extranéité du fait de la nationalité étrangère du requérant.

Au vu du domicile du requérant et du candidat à l’adoption dans le canton de Genève, la Cour de justice est compétente pour statuer sur l'adoption (art. 75 al. 1 LDIP, 268 al. 1 CC, 120 al. 1 let. c LOJ).

Le droit suisse est applicable (art. 77 al. 1 LDIP).

2.             2.1.1 Selon l'art. 266 al. 1 CC, dans sa nouvelle teneur selon le ch. I de la LF du 17  juin 2016, une personne majeure peut être adoptée si elle a besoin de l'assistance permanente d'autrui en raison d'une infirmité physique, mentale ou psychique et que le ou les adoptants lui ont fourni des soins pendant au moins un an (ch. 1), lorsque, durant sa minorité, le ou les adoptants lui ont fourni des soins et ont pourvu à son éducation pendant au moins un an (ch. 2), ou, pour d'autres justes motifs, lorsqu'elle a fait ménage commun pendant au moins un an avec le ou les adoptants (ch. 3).

Les dispositions sur l'adoption des mineurs s'appliquent par analogie, à l'exception de celle sur le consentement des parents (art. 266 al. 2 CC).

La différence d'âge entre l'adopté et le ou les adoptants ne doit pas être inférieure à seize ans ni supérieure à quarante-cinq ans (art. 264d al. 1 CC).

Une personne qui n’est ni mariée ni liée à une autre par un partenariat enregistré peut adopter un enfant seule si elle a 28 ans révolus (art. 264b al. 1CC).

La personne majeure adoptée, à l'instar du mineur capable de discernement, doit donner son consentement à l'adoption (art. 265 al. 1 CC).

Lorsque le ou les adoptants ont des descendants, leur opinion doit être prise en considération (art. 268 aquater al. 1 CC). Avant l'adoption d'une personne majeure, l'opinion de ses parents biologiques doit également être prise en considération (art. 268 aquater al. 2 ch. 2 CC).

2.1.2 Selon l'art. 266 al. 1 CC, les conditions au prononcé de l'adoption exigent que le majeur et le ou les futurs(s) parent(s) adoptif(s) aient partagé toit et table durant un an au moins. Si l'année de vie commune doit obligatoirement avoir été accomplie durant la minorité dans le cas prévu à l'art. 266 al. 1 ch. 2 CC, la question du déroulement de la communauté domestique est sans importance pour les hypothèses figurant à l'art. 266 al. 1 ch. 1 et 3 CC. Cependant, la communauté domestique ne suffit pas dans l'application de l'art. 266 al. 3 CC, il faut encore que de justes motifs au sens objectif existent. Les autres motifs qui guident la requête d'adoption doivent être spécifiés dans la demande soumise à la juridiction compétente.

Le nouveau droit de l’adoption, entré en vigueur au 1er janvier 2018 (RO 2017 3699), a assoupli certaines conditions auxquelles était soumise l’adoption d’une personne majeure (s’agissant notamment de la durée des soins fournis ou du ménage commun). Il n’a en revanche pas modifié la notion de "justes motifs" ni celle de "ménage commun", de sorte que les critères dégagés à cet égard par la jurisprudence et la doctrine relatifs à l’art. 266 al. 1 aCC conservent leur pertinence (arrêt du Tribunal fédéral 5A_962/2019 du 3 février 2020 consid. 4.3.1).

2.1.3 L'art. 266 al. 1 ch. 3 CC pose comme conditions à l'adoption l'existence d'autres justes motifs et d'un ménage commun entre l'adoptant et la personne majeure durant une année au minimum. Ces conditions sont cumulatives (arrêts du Tribunal fédéral 5A_962/2019 consid. 4.3.2, 5A_636/2018 du 8 octobre 2018 condi. 4.3.2). La notion de ménage commun implique que les personnes considérées vivent sous le même toit et mangent à la même table; c'est de cette vie en commun que doivent procéder naturellement et par des contacts quotidiens les relations personnelles et une connaissance mutuelle d'autant plus étroite et solide que cette communauté se prolonge (ATF 106 II 6 consid. 2b; 101 II 3 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_1010/2014 du 7 septembre 2015 consid. 3.4.2.1). Le ménage commun suppose une relation personnelle d'une certaine intensité; le seul fait de partager des locaux, comme dans un rapport de sous-location, ne suffit pas (arrêt du Tribunal fédéral 5A_962/2019 du 3 février 2020 consid. 4.3.2).

Quand bien même le législateur a assoupli les conditions posées à l'art. 266 al. 1 CC, il n'en demeure pas moins que, compte tenu de sa nature et de ses effets, l'adoption d'une personne majeure présuppose l'existence de liens suffisamment étroits et vécus pour créer la justification d'un lien de filiation et permettre ainsi de s'assurer que l'institution n'est pas utilisée à des fins étrangères à son but (arrêt du Tribunal fédéral 5A_962/2019 du 3 février 2020 consid. 4.3.2).

2.1.4 La notion d'autres justes motifs doit être comprise comme l'existence d'autres éléments que ceux prévus aux chiffres 1 et 2 de l'art. 266 al. 1 CC démontrant qu'une relation affective particulièrement forte lie le majeur à la personne désireuse de l'adopter. Les chiffres 1 à 3 de l'art. 266 al. 1 CC présupposent tous trois une relation particulièrement solide et étroite liant l'adoptant à l'adopté, ainsi que l'existence d'une aide et attention en principe quotidienne relevant de la solidarité familiale, de sorte que les "autres justes motifs" du chiffre 3 sont dans leur nature comparables aux circonstances justifiant l'adoption d'un majeur au sens des chiffres 1 et 2 ( .). Les liens affectifs unissant le ou les adoptant(s) et l'adopté doivent être suffisamment étroits pour que leur relation puisse être assimilée à une filiation naturelle (ATF 106 II 6 consid. 2b). La relation liant les protagonistes doit être perçue et vécue par eux comme une relation de nature filiale ( ). Le fait que les parents adoptifs aient assuré directement et personnellement une assistance importante et des soins à l'adopté ou inversement peut en particulier parler en faveur de l'existence d'un tel lien ( ). Une relation personnelle étroite n'est à elle seule pas suffisante (arrêt du Tribunal fédéral 5A_803/2008 du 5 mars 2009 consid. 5.2, publié in. FamPra.ch 2009 p. 493). Des motivations purement successorales, fiscales ou relevant du droit d'établissement ne constituent pas un juste motif à l'adoption d'un majeur (Cyril HEGNAUER, in. Berner Kommentar, 4e éd. 1984, n° 20 ad art. 266 CC) (arrêt du Tribunal fédéral 5A_126/2013 du 13 juin 2013 consid. 4.1).

Il a été ainsi retenu par la jurisprudence l'existence d'autres motifs en cas de durée de vie commune de longue durée (25 ans), les protagonistes ayant fait preuve de solidarité, d'aide, de dévouement et de soutien mutuel, de sorte que le lien existant entre l'adoptant et l'adopté a été assimilé à un lien de filiation naturelle (arrêt du Tribunal fédéral 5A_800/2013 du 18 février 2014) ou encore dans le cas du mariage du père adoptif avec la mère de l'enfant adopté (arrêt du Tribunal fédéral du 25 novembre 1974 consid. 2) mais refusé dans le cas d'un homme qui voulait adopter un homme plus jeune qui exploitait le domaine agricole avec lui depuis 14 ans pour en faire un descendant capable d'exploiter lui-même l'entreprise et d'en obtenir l'attribution selon le droit foncier rural (arrêt du Tribunal fédéral 5A_803/2008 du 5 mars 2009).

2.2 En l'espèce, le requérant sollicite le prononcé de l'adoption en application de l'art. 266 al. 1 ch. 3 CC. Il soutient qu’il vit avec le candidat à l’adoption sur la même propriété depuis presque quatre ans, au dépôt de la requête, et que des liens de nature filiale se sont développés entre eux.

2.1.1 Quand bien même adoptant et candidat à l’adoption vivent sur la même propriété, soit sur une parcelle de 1'730 m², deux maisons d’habitation distinctes y sont érigées, chacun disposant de son propre logement et vivant dans celui-ci. A______ logeait dans la maison de maître (no. ______ chemin 1______) avec son épouse jusqu’au décès de celle-ci, intervenu le ______ 2021, soit quelques cinq mois avant le dépôt de la requête, tandis que le candidat à l’adoption vit avec son épouse et ses enfants majeurs dans le logement de fonction (no. ______ chemin 1______) mis à sa disposition, selon le contrat de travail conclu le 1er décembre 2017, date qui marque le moment où les protagonistes ont fait connaissance, l’un en qualité d’employeur et l’autre en qualité d’employé. Le requérant ne prétend pas qu’il dormait sous le même toit que le candidat à l’adoption, de sorte que pour cette raison déjà, il ne peut être retenu que les intéressés ont fait ménage commun pendant une année. En effet, le ménage commun suppose non seulement de vivre, mais également de dormir, sous le même toit, ce que le requérant ne soutient pas. Le toit commun ne peut être élargi comme le soutient le requérant à une vie sur une même parcelle de terre, dans deux logements proches, dès lors que les occupants d’un même immeuble pourraient prétendre vivre sous le même toit et solliciter d’être adopté par leur voisin, ce que le législateur n’a manifestement pas voulu. Le fait que les logements soient accessibles à l’une ou l’autre des familles sans restriction, comme le soutient le requérant, ou encore que les parties extérieures soient utilisées indifféremment par les deux familles, n’y changent rien, puisque chacune dormait dans son propre logement, dans lequel elle vivait par ailleurs durant la journée, et ne faisait donc pas toit commun. Au surplus, la présence du candidat à l'adoption (et de sa famille) sur la parcelle du requérant tient à sa fonction d'employé et à la nécessité d'être présent sur place, comme requis dans son contrat de travail, mais non à des liens de nature filiale qui uniraient les protagonistes. La notion de toit commun requise pour considérer que les intéressés font ménage commun ne peut donc être retenue.

Il en va de même pour la table, laquelle n’était commune que lors de quelques événements festifs (anniversaires, Noël ou sortie), comme cela ressort des photographies versées à la procédure, étant rappelé que le candidat à l’adoption et son épouse étaient les employés du requérant et étaient payés, la seconde pour faire le ménage et aider à la cuisine, ce qui lui donnait un accès à la maison de son employeur, et le premier pour s’occuper du jardin, de la piscine et pour transporter son employeur et son épouse en voiture, comme cela ressort de son contrat de travail. Il ne peut là également être retenu que le couple B______/F______ faisait table commune avec le couple A______/E______, même si des repas festifs les réunissaient, chez les uns ou les autres, dans le jardin de la propriété, à l’extérieur de celle-ci ou sur le yacht du couple A______/E______, comme cela ressort des photographies produites.

L’une des conditions, à savoir la durée de vie commune durant une année, soit le partage du toit et de la table, fait manifestement défaut en l’espèce, de sorte que cela scelle le sort de la cause.

2.1.2 La seconde condition cumulative fait, quoi qu'il en soit, également défaut. Si certes les couples A______/E______ et B______/F______ semblent avoir partagés des moments festifs, ce qu’attestent certaines photographies versées à la procédure, celles-ci sont le reflet du lien d'amitié qui les unit, lequel ne peut cependant être assimilé à un lien filial. La jurisprudence a retenu qu’un lien de nature filiale pouvait être retenu lorsque la relation affective développée entre les protagonistes était particulièrement forte, lors d’une vie commune de longue durée (25 ans) ou encore lorsqu’ils faisaient preuve l’un envers l’autre de solidarité, d'aide, de dévouement et de soutien mutuel. En l’espèce, si certes le candidat à l’adoption prend soin du requérant, il est lié à ce dernier par un contrat de travail, lequel précise expressément que l’employé s’engage à consacrer toute son activité et tous ses soins aux époux A______/E______. Il n’est donc pas surprenant, puisque cela fait partie du contrat, que le candidat à l’adoption soit attentif au bien-être du requérant et réponde à ses besoins. Les circonstances du cas particulier ne permettent pas de retenir, en l'espèce, que le lien professionnel et amical, qui s’est mis en place au fil du temps, est suffisant pour permettre de retenir que des liens de nature filiale lient les protagonistes, qui ne se connaissent que depuis quelques années seulement. Aucun témoignage écrit n'est pas ailleurs venu corroborer l'allégation selon laquelle le requérant se ferait appeler "papa" par le candidat à l'adoption, ou qu'il présenterait celui-ci aux tiers comme étant son fils. Il n'a par ailleurs pas rompu le lien de subordination qui existe entre eux, le contrat de travail qui les lie étant toujours en vigueur.

2.1.3 La date à laquelle la requête d’adoption a été déposée laisse également perplexe. Le projet d’adoption n’a pas été élaboré du vivant de E______, mais peu de temps après son décès, et le requérant ne prétend pas que le projet d’adoption aurait été commun. E______ est décédée le ______ 2021. Deux mois plus tard, soit le 25 juin 2021, le candidat à l’adoption, son épouse et ses enfants majeurs signaient déjà des courriers manifestant leur accord à l’adoption du premier par le requérant. Ce dernier, âgé de 84 ans, a précisé dans sa requête que, depuis le décès de son épouse, le candidat à l’adoption et sa famille avaient représenté pour lui une présence, un soutien et un réconfort importants. Ces éléments ne sont cependant pas suffisants pour considérer qu’un lien s’apparentant à un lien filial unit depuis lors les protagonistes, qui ne se connaissaient que depuis quatre ans à la date de la requête, dont le dépôt est intervenu alors que le requérant à l’adoption, âgé, se trouvait en souffrance suite au décès de son épouse.

2.1.4 Les deux conditions cumulatives de l’art. 266 al. 3 CC faisant défaut, il ne pourra être donné une suite favorable à la requête d’adoption, étant encore précisé que des motifs d’ordre purement successoral n’ont pas place dans le cadre des procédures d’adoption d'un majeur.

3. Les frais de la procédure, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du requérant qui succombe. Ils sont entièrement compensés avec l'avance de même montant versée par celle-ci, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 98, 101 et 111 CPC; art. 19 al. 3 let. a LaCC).

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PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


Rejette la requête d'adoption formée par A______, né le ______ 1937 à C______ (Hongrie), de nationalité hongroise, concernant le majeur B______, né le ______ 1976 à G______ (Equateur), originaire de I______ (Genève).

Arrête les frais judiciaires à 1'000 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance effectuée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 308 ss du code de procédure civile (CPC), la présente décision peut faire l'objet d'un appel par-devant la Chambre de surveillance de la Cour de justice dans les 10 jours qui suivent sa notification.

 

L'appel doit être adressé à la Cour de justice, place du Bourg-de-Four 1,
case postale 3108, 1211 Genève 3.