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Décisions | Chambre civile

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C/21294/2019

ACJC/102/2022 du 21.01.2022 sur JTPI/3364/2021 ( OO ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/21294/2019 ACJC/102/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 21 JANVIER 2022

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 14ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 12 mars 2021, comparant par Me Antoine BERTHOUD, avocat, rue de la Corraterie 14, 1204 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile, et intimée sur appel joint.

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant par Me Luis ARIAS, avocat, ARIAS AVOCATS, rue du Conseil Général 8, 1205 Genève, en l'Étude duquel il fait élection de domicile, appelant sur appel joint.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/3364/2021 du 12 mars 2021, communiqué aux parties le jour-même et reçu par l'appelante le 15 mars 2021, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a condamné B______ à verser en mains de A______, par mois et d'avance, 700 fr. à titre de contribution à son entretien dès le 1er octobre 2019 et jusqu'au 31 mai 2021 (ch. 1 du dispositif), dit que, dès le 1er juin 2021, B______ n'était plus tenu de contribuer à l'entretien de A______ (ch. 2), modifié en conséquence le chiffre 2 du dispositif du jugement du Tribunal de première instance JTPI/4424/2016 rendu le 5 avril 2016 entre les parties, à compter du 1er octobre 2019 (ch. 3), arrêté les frais judiciaires à 1'000 fr., compensés avec l'avance fournie par B______, mis à la charge des parties par moitié et condamné en conséquence A______ à verser 500 fr. à B______ (ch. 4), dit qu'il n'était pas alloué de dépens et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5 et 6).

En substance, le Tribunal a considéré que des faits nouveaux et durables avaient affecté la condition de B______ depuis le prononcé du jugement de divorce, dans la mesure où il se trouvait au chômage depuis 2018, réalisant des gains intermédiaires, et que ses revenus s'en étaient trouvés affectés et qu'il se justifiait en conséquence de fixer à nouveau son obligation d'entretien à l'égard de son ancienne épouse. Il a estimé que le solde disponible de B______ par rapport au moment du prononcé du divorce avait passé de 2'747 fr. à 2'000 fr., le déficit de A______ ayant pour sa part passé de 383 fr. à 231 fr. Le Tribunal a encore estimé que la pension réduite à 700 fr. par mois devait être supprimée à partir de juin 2021 dans la mesure où B______ aura atteint 55 ans et qu'"il ne sera plus en mesure de bénéficier d'un revenu suffisant aux fins de l'entretien de A______ ( ) en considération du chômage important dans la branche [de la restauration]".

B. a. Par acte expédié le 28 avril 2021 à l'adresse de la Cour de justice A______  a formé appel contre ledit jugement concluant à son annulation et au rejet de la demande de modification du jugement de divorce du 5 avril 2016 déposée par B______, sous suite de frais et dépens.

En substance, elle fait grief au Tribunal d'avoir violé la loi en considérant que les circonstances s'étaient notablement modifiées depuis le prononcé du jugement de divorce des parties et que les perspectives de l'intimé pour un retour à l'emploi n'étaient pas bonnes. Elle fait en outre valoir que l'intimé travaille d'ores-et déjà effectivement dans le domaine de la restauration, puisqu'il est actif dans le bar exploité par sa compagne, sa capacité de gain étant restée inchangée depuis le prononcé du jugement de divorce.

b. Par mémoire réponse expédié le 14 juin 2021 à l'adresse de la Cour, dans lequel il forme un appel joint, B______ conclut au rejet de l'appel et à la modification du jugement de divorce en ce sens que l'obligation d'entretien cesse à compter du 16 septembre 2019, date de l'introduction de la requête en modification, sous suite de frais et dépens.

En substance, il affirme que sa situation financière s'est durablement et notablement péjorée de sorte que les conditions d'une modification sont réunies. Il estime qu'il lui est impossible de retrouver un emploi dans son secteur d'activité, notamment vu son âge, et fait état d'une maladie. Dans son appel joint, il fait valoir que le calcul des charges de A______ auraient dû prendre en compte un loyer moindre que celui de 1'709 fr. par mois qui est le sien pour un appartement de cinq pièces trop vaste pour elle, de sorte que la suppression de la contribution doit rétroagir à la date d'introduction de la demande.

Il produit à l'appui de son mémoire cinq pièces nouvelles, soit les tableaux mensuels de recherches d'emploi effectuées par lui de janvier à mai 2021.

c. Par réponse à l'appel joint du 11 octobre 2021, A______ a persisté à exposer que les conditions d'une modification du jugement de divorce n'étaient pas réalisées, un changement de logement de sa part pour en réduire le coût étant par ailleurs illusoire.

Les parties n'ont pas fait d'autres observations. La cause a été mise en délibérations le 12 novembre 2021.

C. Ressortent pour le surplus de la procédure les faits pertinents suivants :

a. A______, née le ______ 1968 à C______ (Portugal), et B______, né le ______ 1966 à D______ (Portugal), tous deux de nationalité portugaise, ont contracté mariage le ______ 1987 à E______ (Portugal).

b. Deux enfants, aujourd'hui majeurs, sont issus de cette union.

c. B______ est le père de F______, né le ______ 2013 de sa compagne actuelle.

d. Par jugement JTPI/4424/2016 du 5 avril 2016, le Tribunal de première instance a notamment condamné B______ à verser à A______ 1'000 fr. à titre de contribution à son entretien.

S'agissant de la situation financière des parties, le Tribunal a retenu que B______ percevait un revenu mensuel net de 6'290 fr. pour son travail en qualité de gérant du G______ pour des charges de 3'542 fr., lesquelles comprenaient un loyer de 1'260 fr., une charge fiscale de 474 fr., une prime d'assurance maladie de 388 fr., un minimum vital OP de 850 fr., un minimum vital OP pour son fils F______ de 200 fr., une prime d'assurance maladie pour F______ de 36 fr., des frais de déplacement de 85 fr., un impôt véhicule de 35 fr. et une assurance véhicule de 214 fr., étant précisé que les frais de logement et de minimum vital de B______ et d'assurance maladie et de minimum vital de F______ ont été divisés par deux compte tenu de son concubinage avec la mère de l'enfant, quand bien même celle-ci n'y participait pas.

Quant à A______, ses charges ont été admises à hauteur de 4'087 fr. et composées du loyer en 1'709 fr., de la prime d'assurance maladie en 357 fr., de la charge fiscale en 85 fr., des frais de déplacements de 336 fr. (forfait km), de l'impôt véhicule de 35 fr. et l'assurance véhicule de 214 fr. et du minimum vital OP de 1'350 fr., étant précisé que H______, alors en apprentissage, vivait chez sa mère. Ses revenus nets s'élevaient à 3'703 fr., treizième salaire inclus.

e. Par requête du 27 juin 2018 déjà, B______ a requis la modification du jugement de divorce des parties visant à la réduction de la contribution à l'entretien de son ex-épouse.

Il a été débouté par jugement non motivé JTPI/10659/2019 du 16 juillet 2019.

f. Par nouvelle requête du 16 septembre 2019, B______ a conclu à la modification du jugement de divorce du 5 avril 2016 et à la suppression de la contribution à l'entretien de son ex-épouse.

g. Après consultation d'un avocat, B______ a déposé une requête motivée le 28 février 2020, concluant à la suppression de la contribution à l'entretien due à A______ à compter du dépôt de la requête, sous suite de frais.

h. Lors de l'audience du 2 juin 2020 du Tribunal, A______ s'est opposée à la requête de B______ relevant être confrontée chaque année à la même requête de modification de sa part, sans toutefois qu'il ne documente la situation financière de sa compagne.

A______ a expliqué que la formation de son fils devait se terminer en juin 2020. Celui-ci avait perçu un salaire jusqu'au 31 août 2019 mais sa dernière année scolaire se déroulait uniquement à l'école. Il percevait en revanche des allocations d'études de 400 fr. par mois.

i. Un commandement de payer a été notifié à B______ portant sur la somme de 7'000 fr. à la requête du SCARPA concernant les pensions alimentaires des mois de mars à septembre 2019, auquel il a fait opposition.

j. Le 25 août 2020, A______ a conclu au déboutement de B______ des fins de sa demande au motif que sa situation personnelle ne s'était pas améliorée contrairement à celle de B______ dont l'épouse travaillait actuellement alors que tel n'était pas le cas lors du jugement de divorce.

k. Les parties ont à nouveau été entendues par le Tribunal lors de son audience du 6 octobre 2020. A______ a expliqué qu'elle ne percevait plus d'avance de la part du SCARPA, lequel reversait uniquement les montants qu'il recevait de B______.

l. Les parties ont persisté dans leurs conclusions par plaidoiries finales des 11 et 12 janvier 2021.

m. Sur le plan professionnel, B______, qui était au moment du divorce gérant d'établissement public et percevait à ce titre un revenu de 6'300 fr. par mois, après avoir rencontré des problèmes de santé non déterminés durant l'année 2018, est en pleine capacité de travail depuis le 1er décembre 2018. Dès le 3 décembre 2018, toutefois, il s'est inscrit au chômage.

Il a travaillé durant les mois de juillet et d'août 2019 et du 1er novembre 2019 au 30 juin 2020 dans la restauration, en gains intermédiaires.

Depuis le 7 septembre 2020, il exerce une nouvelle activité en qualité de serveur dans le bar qu'exploite sa compagne. Il a exposé y travailler à raison de 4 heures par jour cinq jours par semaine et a fait état d'un salaire mensuel brut de 2'200 fr. Sa compagne avait quitté son emploi fixe rémunéré 5'000 fr. par mois, pour se lancer dans sa nouvelle activité.

Sur la période du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2020, son revenu mensuel net moyen s'est élevé à 5'400 fr.. Ce montant tient compte des salaires, des indemnités chômage et des pourboires allégués en 200 fr. du mois de novembre 2019 jusqu'à la mi-mars 2020, compte tenu de la fermeture des bars et restaurants, ainsi que d'un pourboire de 100 fr. pour le mois de septembre compte tenu du mi-temps exercé.

Selon le décompte de la Caisse cantonale genevoise de chômage du mois de septembre 2020, le délai-cadre d'indemnisation de B______ est arrivé à échéance le 2 juin 2021.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance, dans les causes dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité précédente, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

Dès lors qu'en l'espèce, le litige porte exclusivement sur l'entretien de l'ancien conjoint, il est de nature pécuniaire (ATF 133 III 393 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_42/2013 consid. 2). La capitalisation, conformément à l'art 92 al. 1 CPC, du montant des contributions d'entretien restées litigieuses au vu des dernières conclusions des parties devant le premier juge excède 10'000 fr.

1.2 Formé en outre en temps utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

De même, formé dans la réponse à l'appel principal et selon les formes prescrites, l'appel joint est recevable (art. 313 al.1 CPC).

Dans la suite du présent arrêt, l'appelante principale sera désignée comme l'appelante, l'appelant joint comme l'intimé.

1.3 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

La maxime des débats s'applique (art. 277 al.1 CC et 55 CPC).

1.4 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

En l'espèce, les pièces nouvelles produite par l'intimé dans sa réponse, postérieures à la date des plaidoiries finales devant le Tribunal, sont recevables.

2. 2.1.1 Selon l'art. 129 al. 1 CC, si la situation du débiteur ou du créancier change notablement et durablement, la rente peut être diminuée, supprimée ou suspendue pour une durée déterminée; une amélioration de la situation du créancier n'est prise en compte que si une rente permettant d'assurer son entretien convenable a pu être fixée dans le jugement de divorce.

Dans ce cas, la modification de la contribution d'entretien suppose que des faits nouveaux importants et durables surviennent, qui commandent une réglementation différente. La procédure de modification n'a, en effet, pas pour but de corriger le premier jugement, mais de l'adapter aux circonstances nouvelles. Le fait revêt un caractère nouveau lorsqu'il n'a pas été pris en considération pour fixer la contribution d'entretien dans le jugement de divorce. Ce qui est déterminant, ce n'est pas la prévisibilité des circonstances nouvelles mais exclusivement le fait que la pension ait été fixée sans tenir compte de ces circonstances futures. On présume néanmoins que la contribution d'entretien a été fixée en tenant compte des modifications prévisibles, soit celles qui, bien que futures, sont déjà certaines ou fort probables (ATF 141 III 376 consid. 3.3.1; 138 III 289 consid. 11.1.1). Le moment déterminant pour apprécier si des circonstances nouvelles se sont produites est la date du dépôt de la demande de modification du jugement de divorce. C'est donc à ce moment-là qu'il y a lieu de se placer pour déterminer le revenu et son évolution prévisible (ATF 137 III 604 consid. 4.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_154/2019 du 1er octobre 2019 consid. 4.1).

Ce sont donc les constatations de fait et le pronostic effectués dans le jugement de divorce, d'une part, et les circonstances actuelles et futures prévisibles examinées au jour de la demande en modification, d'autre part, qui servent de fondement pour décider si on est en présence d'une situation qui s'est modifiée de manière durable et importante. Un état de fait futur incertain et hypothétique ne constitue pas une cause de modification. Des éléments concrets relatifs à une modification prochaine des circonstances peuvent par contre être pris en considération, afin d'éviter autant que possible une nouvelle procédure ultérieure en modification (cf. en matière de modification de la contribution d'entretien due à l'enfant : ATF 120 II 285 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_874/2019 consid. 3.2).

La survenance d'un fait nouveau – important et durable – n'entraîne toutefois pas automatiquement une modification de la contribution d'entretien. Ce n'est que si la charge d'entretien devient déséquilibrée, au vu des circonstances prises en compte dans le jugement précédent, qu'une modification de la contribution peut entrer en considération. Le juge ne peut donc pas se limiter à constater une augmentation ou une diminution des revenus des parties pour admettre la demande; il doit procéder à une pesée des intérêts respectifs de chacune des parties pour juger de la nécessité d'une telle modification ou suppression dans le cas concret (ATF 137 III 604 consid. 4.1.1). En particulier, une modification du montant de la contribution d'entretien ne se justifie que lorsque la différence entre le montant de la contribution d'entretien nouvellement calculée sur la base de faits nouveaux importants et durables et celle initialement fixée est d'une ampleur suffisante (arrêt du Tribunal fédéral 5A_890/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3).

Le fardeau de la preuve incombe au demandeur; il revient à ce dernier de prouver que les circonstances retenues lors du divorce se sont modifiées depuis d'une manière importante, durable et imprévisible (Pichonnaz, in Commentaire romand, Code civil I, 2010, n° 94 ad art. 129 CC).

Conformément à l'art. 277 al. 1 CPC, la maxime des débats s'applique à la procédure concernant la modification des contributions d'entretien, ce qui signifie qu'il revient aux parties d'alléguer et de prouver les faits (art. 55 CPC) à prendre en compte pour déterminer si la situation appelle une modification de la contribution d'entretien; le juge ne pourra tenir compte que de ces éléments dans son jugement (Simeoni, op. cit., n° 95 ad art. 129 CC).

Lorsqu'il admet que les circonstances ayant prévalu lors du prononcé du jugement de divorce se sont modifiées durablement et de manière significative, le juge doit calculer à nouveau la contribution d'entretien selon les mêmes principes, après avoir actualisé tous les éléments pris en compte pour le calcul dans le jugement précédent et litigieux devant lui (ATF 138 III 289 consid. 11.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_131/2014 du 27 mai 2014 consid. 2.1).

S'agissant du dies a quo, le juge de l'action en modification des contributions d'entretien peut fixer le moment à partir duquel son jugement prend effet selon son appréciation et en tenant compte des circonstances du cas concret. En principe, la jurisprudence retient, au plus tôt, la date du dépôt de la demande (arrêt du Tribunal fédéral 5A_651/2014 du 27 janvier 2015 consid. 4.1.2).

2.1.2 Pour fixer la contribution d'entretien, le juge doit en principe tenir compte du revenu effectif des parties, tant le débiteur d'entretien que le créancier pouvant néanmoins se voir imputer un revenu hypothétique supérieur si le revenu effectif ne suffit pas pour couvrir leurs besoins. Il s'agit ainsi d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et qu'on peut raisonnablement exiger d'elle afin de remplir ses obligations (ATF 137 III 118 consid. 2.3; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; 128 III 4 consid. 4a). Cette incombance s'applique en particulier lorsque la reprise de la vie commune, et donc le maintien de la répartition antérieure des tâches, ne sont ni recherchés ni vraisemblables; le but de l'indépendance financière des époux, notamment de celui qui jusqu'ici n'exerçait pas d'activité lucrative, ou seulement à temps partiel, gagne alors en importance (ATF 137 III 385 consid. 3.1).

Lorsqu'il entend tenir compte d'un revenu hypothétique, le juge doit examiner successivement deux conditions. Tout d'abord, il doit juger si l'on peut raisonnablement exiger de cette personne qu'elle exerce une activité lucrative, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé. Lorsqu'il tranche celle-ci, le juge ne peut pas se contenter de dire, de manière toute générale, que la personne en cause pourrait obtenir un revenu supérieur en travaillant; il doit préciser le type d'activité professionnelle que cette personne peut raisonnablement devoir accomplir. Ensuite, il doit examiner si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail (ATF 137 III 102 consid. 4.2.2.2; 128 III 4 consid. 4c/bb).

2.2 En l'espèce, le Tribunal a considéré que des faits nouveaux et durables sont survenus depuis le prononcé du divorce des parties, puisque le demandeur est au chômage depuis la fin de l'année 2018 et bénéficie d'indemnités chômage cumulées à des gains intermédiaires.

Comme rappelé ci-dessus, il ne suffit pas que des faits nouveaux soient survenus depuis le prononcé du divorce pour ouvrir la voie à une modification du jugement de divorce. Ces faits doivent encore modifier notablement et durablement la situation du débiteur ou du créancier.

L'on doit admettre dans le cas présent avec le Tribunal une modification notable et durable de la situation de l'intimé. Certes celui-ci, tombé au chômage, a retrouvé du travail à plusieurs reprises mais dans des postes toutefois inférieurs à celui qu'il avait au moment du jugement de divorce. Il a en outre démontré avoir effectué nombre de recherches visant un emploi du type de celui qu'il exerçait au moment du divorce, en vain. Il a perçu en moyenne depuis lors un revenu mensuel net de 5'400 fr. en l'espace de près de deux ans, au lieu des 6'300 fr. nets retenus dans le jugement de divorce. Cette diminution apparaît notable et durable. C'est donc à juste titre que le Tribunal est entré en matière et a adapté la contribution d'entretien.

Les calculs effectués par lui et le montant nouvellement fixé de contribution jusqu'en mai 2021 ne sont pas contestés en tant que tels, à l'exception du montant de charge loyer de l'appelante faisant l'objet de l'appel joint. A ce propos, la Cour relève d'une part, que la charge de loyer de l'appelante ne s'est pas modifiée depuis le prononcé du jugement de divorce, et d'autre part, avec l'appelante, qu'il est illusoire d'envisager que, même dans le cadre d'un logement à loyer contrôlé par l'Etat, l'appelante puisse trouver à se reloger pour un loyer bien inférieur à celui actuellement payé (1'709 fr.). Par conséquent, en tant qu'il portait sur ce seul point, l'appel joint doit être rejeté à ce stade déjà.

2.3 Après être entré en matière sur la modification requise et avoir réduit la contribution en conséquence (à 700 fr. par mois), le Tribunal a en outre considéré que toute contribution d'entretien devait être supprimée dès le 1er juin 2021, du fait que dès cette date, B______ aurait atteint l'âge de 55 ans, la situation difficile du secteur des bars et restaurants découlant de la pandémie ne permettant pas de s'attendre à ce qu'il trouve facilement à s'employer pour compléter le revenu qu'il acquiert dans le bar de sa compagne par un salaire lui garantissant un revenu équivalent à celui qui est le sien actuellement.

Avec l'appelante, la Cour ne partage pas cette analyse.

D'une part, il ne ressort pas du dossier que l'intimé serait atteint dans sa santé de manière à ne pas pouvoir exercer une activité dans son domaine d'activité à plein temps, même à l'âge de 55 ans. Au contraire, il ressort des faits, que sa capacité de travail qui était altérée en 2018, est de nouveau entière dès le 1er décembre 2018. En outre, son âge n'est aucunement un empêchement à ce qu'il retrouve un emploi dans le secteur de la restauration, que ce soit par une augmentation de son temps de travail dans le bar dans lequel il exerce déjà ou en postulant ailleurs. Comme le dossier l'enseigne, à 54 ans, l'intimé avait en effet retrouvé un emploi dans ledit secteur, qu'il semble occuper toujours. Certes, la pandémie a frappé le secteur d'activité de la restauration. Cela étant, à l'heure actuelle, ledit secteur se trouve plutôt en pénurie d'emploi de sorte que les perspectives d'un retour à l'emploi de tous ceux qui en sont demandeurs sont bonnes. A ce stade, il n'est pas requis de l'intimé qu'il retrouve un emploi de gérant, qu'il avait au moment du prononcé du divorce, mais qu'il maintienne sa capacité de gain telle qu'il l'a actuellement, à hauteur d'un gain de l'ordre de 5'400 fr. par mois, et qui a justifié l'adaptation de la contribution d'entretien due (cf. c.2.2). Un revenu de ce montant devant lui être imputé, il n'y a pas lieu de faire cesser l'obligation d'entretien au 30 mai 2021, contrairement à l'avis du Tribunal.

Par conséquent, l'appel sera admis en ce qui concerne le ch. 2 du dispositif du jugement attaqué. Pour plus de clarté le ch. 1 dudit dispositif sera également reformulé pour en supprimer la limitation temporelle.

3. Les frais judiciaires d'appel arrêtés à 800 fr. (art. 95, 96 et 104 CPC et art. 5 et 30 RTFMC) seront mis à la charge des parties à raison de la moitié chacune, l'appelante succombant partiellement et l'intimé complètement (art. 106 al. 1 CPC) et compensés avec les avance de frais versées. Chaque partie se verra restituer le surplus d'avance versée, soit 400 fr. chacune.

Il sera alloué des dépens en 500 fr. à l'appelante à charge de l'intimé (art. 106 al. 2 CPC), du fait que celui-ci succombe entièrement alors que l'appelante obtient partiellement gain de cause, son appel ayant été nécessaire.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevables l'appel interjeté par A______ et l'appel joint interjeté par B______ contre le jugement JTPI/3364/2021 rendu le 12 mars 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/21294/2019-14.

Au fond :

Annule les chiffres 1 et 2 du dispositif du jugement attaqué et cela fait, statuant à nouveau sur ces points :

Condamne B______ à verser à A______ par mois d'avance la somme de 700 fr. à titre de contribution d'entretien dès le 1er octobre 2019.

Confirme ledit jugement pour le surplus.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr., les met à la charge de chaque partie par moitié et les compense avec les avances de frais versées, qui reste acquise à l'Etat.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à rembourser le surplus d'avance de frais, en 400 fr., à chacune des parties.

Condamne B______ à payer à A______ la somme de 500 fr. à titre de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Pauline ERARD,
Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 


 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.