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Décisions | Sommaires

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C/23760/2021

ACJC/710/2022 du 16.05.2022 sur JTPI/1088/2022 ( SFC ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/23760/2021 ACJC/710/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU LUNDI 16 MAI 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______[GE], recourant contre un jugement rendu par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 27 janvier 2022, comparant en personne,

et

B______ SA, sise ______[VS], intimée, comparant en personne.

 


EN FAIT

A.           Le 6 décembre 2021, B______ SA a saisi le Tribunal d'une requête de faillite dirigée contre A______.

Elle a déposé copie d'un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur 30 fr. 80 représentant des "participations LaMal 10.2020" et 50 fr. représentant des frais administratifs, notifié à A______, lequel ne l'avait pas frappé d'opposition, ainsi que de la commination de faillite établie dans la poursuite précitée le 5 novembre 2021.

Le dossier du Tribunal ne comporte pas la quittance établie le 26 janvier 2022 par l'Office des poursuites, attestant que la poursuite n° 1______ a été soldée.

A l'audience du 27 janvier 2022, aucune des parties n'était présente ni représentée.

B.            Par jugement du 27 janvier 2022, expédié pour notification aux parties le 2 février 2022, le Tribunal de première instance a déclaré A______ en état de faillite dès le 27 janvier 2022 à 14h15 (ch. 1), arrêté les frais judiciaires à 120 fr., compensés avec l'avance effectuée par B______ SA (ch. 2), mis à la charge de A______, condamné à en rembourser la précitée, qui en avait fait l'avance (ch. 3).

C.           Par acte du 10 février 2022 à la Cour de justice, A______ a formé recours contre la décision précitée. Il a conclu à l'annulation de celle-ci, cela fait au rejet de la requête de faillite, exposant qu'il était solvable et qu'il avait réglé la dette, intérêts et frais compris, objet de la poursuite intentée par B______ SA. Il a produit copie de la quittance établie le 26 janvier 2022 par l'Office des poursuites, attestant que la poursuite n° 1______ avait été soldée, copie sur laquelle figure un tampon "déposé au greffe le 26 janvier 2022" du Tribunal.

A titre préalable, il a requis la suspension du caractère exécutoire du jugement attaqué, ce qui a été accordé par décision de la Cour du 15 février 2022.

Un délai lui a été imparti pour produire les pièces justifiant sa solvabilité (comptes de l'année courante et des deux exercices précédents, contrats en cours, etc.) et pour se prononcer sur la liste des poursuites en cours et des actes de défaut de biens, dont un tirage lui a été remis.

Cette liste révèle trois actes de défaut de biens de 2021 pour des montants de l'ordre de 5'000 fr. représentant une créance de l'Administration fiscale genevoise, de l'ordre de 650 fr. représentant une créance de l'Etat de Genève, de 125 fr. représentant une créance de la Taxe professionnelle communale de la Ville de Genève, deux comminations de faillite en 2021 à la requête de la C______ SA pour deux créances d'un total de l'ordre de 2'000 fr., trois poursuites en cours de la part de l'Etat de Genève et de B______ SA pour un total supérieur à 1'000 fr., ainsi que treize poursuites soldées entre 2019 et 2021 à l'Office des poursuites pour un total d'environ 8'000 fr.

A______ a déposé copie d'un certificat de salaire établi par la Ville de Genève le 28 février 2022, mentionnant un salaire annuel brut de 82'600 fr., ainsi que des bilans et comptes de pertes et profits au 31 décembre 2020 et au 31 décembre 2021 pour "A______ Paulo Services" dont résultent respectivement un chiffre d'affaires d'environ 46'000 fr. et un bénéfice de l'ordre de 16'000 fr., et un chiffre d'affaires d'environ 56'000 fr. et un déficit de l'ordre de 7'000 fr.

Il a allégué avoir pu supprimer "certains coûts liés aux aides à [s]es parents", auxquels il devait encore apporter une aide mensuelle de 1'500 fr. à 2'000 fr., ce qui lui permettrait selon lui de régler les poursuites en cours et les actes de défaut de biens. Il a requis la compréhension de la Cour, et fait valoir ce qui suit: "Ne devrait pas être étudié, car l'ouverture de cette procédure est due à une erreur (vice de forme) du tribunal de 1ère instance. Qui reconnaît ses erreurs mais ne fait rien".

B______ SA ne s'est pas déterminée.

Par avis du 12 avril 2022, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du tribunal de la faillite selon la LP (art. 309 let. b ch. 7 CPC), seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a CPC; art. 174 LP).

Les décisions rendues en matière de faillite sont soumises à la procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).

1.2 Formé selon la forme et dans le délai prévu par la loi (art. 321 al. 1 et 2 CPC; art. 174 al. 1 LP), le recours est recevable.

1.3 D'après l'art. 174 al. 1, 2ème phrase LP, les parties peuvent faire valoir devant l'instance de recours des faits nouveaux qui se sont produits avant le jugement de première instance ("pseudo nova"; Cometta, in Commentaire romand LP, 2005, n. 5 ad art. 174 LP). Le débiteur peut également alléguer des faits et présenter moyens de preuve postérieurs au jugement de faillite ("vrais nova"), pour autant qu'ils servent à établir que les conditions de l'art. 174 al. 2 LP sont remplies (Cometta, op. cit., n. 6 ad art. 174 LP).

En l'espèce, les pièces nouvelles déposées par le recourant sont recevables dans la mesure où elles ont été produites dans le délai de recours ou dans le délai imparti par la Cour et servent à établir que la dette a été payée ainsi que la solvabilité.

2. Le recourant soutient avoir payé sa dette, produisant à cet égard une quittance de l'Office des poursuites, et être solvable.

2.1 En vertu de l'art. 174 al. 2 LP, l'autorité de recours peut annuler le jugement de faillite lorsque le débiteur rend vraisemblable sa solvabilité et qu'il établit par titre que l'une des conditions suivantes a été remplie, à savoir que la dette, intérêts et frais compris, a été payée (ch. 1), que la totalité du montant à rembourser a été déposée auprès de l'autorité de recours à l'intention du créancier (ch. 2) ou que le créancier a retiré sa réquisition de faillite (ch. 3). Ainsi, le débiteur ne doit pas seulement prouver le paiement de la dette à l'origine de la faillite, mais également rendre vraisemblable sa solvabilité. Ces deux conditions sont cumulatives (arrêts du Tribunal fédéral 5A_640/2011 du 4 janvier 2012 consid. 2 in fine; 5A_126/2010 du 10 juin 2010 consid. 6.2).

Le poursuivi doit rendre vraisemblable sa solvabilité, en produisant des titres immédiatement disponibles.

En principe, s'avère insolvable le débiteur qui, par exemple, laisse des comminations de faillite s'accumuler, fait systématiquement opposition et ne paie pas même des montants peu élevés. De simples difficultés passagères de paiements ne font en revanche pas apparaître insolvable le débiteur, à moins qu'il n'y ait aucun indice important permettant d'admettre une amélioration de sa situation financière et qu'il semble manquer de liquidités pour une période indéterminée. L'appréciation de la solvabilité repose sur une impression générale fondée sur les habitudes de paiement du failli (arrêts du Tribunal fédéral 5A_153/2017 du 21 mars 2017 consid. 3.1, 5A_118/2012 du 20 avril 2012 consid. 3.1, 5A_328/2011 du 11 août 2011 consid. 2, publié in SJ 2012 I p. 25). Pour rendre vraisemblable qu'il est solvable, le débiteur doit notamment établir qu'aucune requête de faillite dans une poursuite ordinaire ou dans une poursuite pour effets de change n'est pendante contre lui et qu'aucune poursuite exécutoire n'est en cours (arrêts du Tribunal fédéral 5A_118/2012 du 20 avril 2012 consid. 3.1 et 5A_640/2011 du 4 janvier 2012 consid. 3.1).

Un fait est rendu vraisemblable si le juge, en se basant sur des éléments objectifs, a l'impression que le fait invoqué s'est produit, sans pour autant devoir exclure la possibilité qu'il ait pu se dérouler autrement (ATF 132 III 715 consid. 3.1). Pour l'annulation du prononcé de faillite, cela signifie que la solvabilité du débiteur doit être plus probable que son insolvabilité. Dans ce domaine, il ne faut pas poser d'exigences trop sévères, en particulier lorsque la viabilité de l'entreprise endettée ne saurait être déniée d'emblée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_328/2011 du 11 août 2011 consid. 2, traduit et publié in SJ 2012 I 25; Message du Conseil fédéral du 8 mai 1991 concernant la révision de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, FF 1991 III p. 130 s.).

2.2 En l'espèce, le recourant a soldé la dette pour laquelle il était poursuivi, en capital, intérêts et frais. Il a déposé la pièce le confirmant au Tribunal la veille de l'audience, ainsi qu'en atteste le tampon apposé par le greffe de la juridiction. Ce titre n'a apparemment pas été porté au dossier du premier juge, ce qui représente sans doute le vice de forme invoqué par le recourant, qui affirme que ledit greffe aurait admis le manquement.

Il s'ensuit que la poursuite n° 1______ était éteinte. Partant, la requête de faillite était devenue sans objet, lorsque le jugement attaqué a été rendu.

Au vu de ce qui précède, le chiffre 1 du dispositif de la décision déférée sera annulé. Il sera statué à nouveau dans le sens que la requête de faillite de l'intimée sera déclarée irrecevable (art. 59 CPC). Le recourant supportera toutefois les frais de celle-ci, dans la mesure où l'intimée était fondée à agir au moment de la saisine du Tribunal.

3. Au vu de l'issue du recours, les frais judiciaires de recours seront mis à la charge de l'Etat de Genève.

Les Services financiers du Pouvoir judiciaire restitueront ainsi 220 fr. au recourant.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 10 février 2022 par A______ contre le jugement JTPI/1088/2022 rendu le 27 janvier 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/23760/2021–5 SFC.

Au fond :

Annule le chiffre 1 du dispositif de ce jugement. Statuant à nouveau sur ce point:

Déclare irrecevable la requête de faillite, poursuite n° 1______, dirigée par B______ SA contre A______.

Confirme le jugement pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions de recours.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 220 fr., et les met à la charge de l'Etat de Genève.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à verser 220 fr. à A______.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.