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Décisions | Chambre de surveillance

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C/11513/2017

DAS/177/2018 du 28.08.2018 sur DJP/293/2018 ( AJP ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/11513/2017 DAS/177/2018

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 28 AOÛT 2018

 

Appel (C/11513/2017) formé le 9 juin 2018 par Monsieur A______, domicilié ______, comparant en personne.

* * * * *

Arrêt communiqué par plis recommandés du greffier
du 13 septembre 2018 à :

 

- Monsieur A______
______.

- Monsieur B______
c/o Me C______, avocat,
______.

- Maître D______
______.

- Maître E______
______.

- JUSTICE DE PAIX.

 


EN FAIT

A.           Par décision DJP/292/2018 du 7 mai 2018 par apposition d'un timbre humide sur le courrier de D______, notaire, du 4 mai 2018, la Justice de paix a autorisé D______, en sa qualité de représentant de l'hoirie désigné par la Justice de paix, à payer une note d'honoraires et à verser une provision à des avocats mis en œuvre dans l'intérêt de la succession, en vue d'effectuer des recherches relatives à un compte bancaire ouvert par F______ de son vivant en G______, non déclaré, et à rapatrier les fonds en Suisse de manière à pouvoir les distribuer à ses héritiers.

Par décision DJP/293/2018 par timbre humide apposé le 29 mai 2018 sur un courrier de D______, la Justice de paix l'a autorisé à recevoir des actions d'une [société] dont F______ était de son vivant titulaire pour les garder dans le coffre de son Etude.

La première décision n'a été communiquée qu'au notaire, la seconde a été communiquée "aux parties".

B. Par acte du 9 juin 2018, A______ a déclaré appeler des deux décisions en question. Il fait valoir, s'agissant de la première, que la Justice de paix a violé le droit fédéral en ne la lui communiquant pas. D'autre part, il conteste que la note d'honoraires de 8'000 fr. de l'avocat C______ doive être prise en charge par la succession dans la mesure où ces honoraires concerneraient une activité exécutée dans l'unique intérêt de son frère B______ et non pas dans l'intérêt commun de la succession.

Quant à la seconde décision, il estime qu'elle doit être annulée dans la mesure où, s'il détient les actions de la société anonyme propriétaire de la maison que B______ occupe personnellement, c'est dans la mesure de conventions passées avec son frère et à titre conservatoire, cette détention n'ayant pas "un caractère définitif" et ne servant "qu'à garantir une exécution conforme aux engagements contractuels pris de part et d'autre".

Il n'a pas été sollicité de réponse au recours.

C.           Ressortent pour le surplus de la procédure les faits pertinents suivants :

F______, de nationalité française, née le ______ 1931, domiciliée à ______ [GE], est décédée le ______ 2017 à ______ [GE]. Elle était veuve de H______, décédé le ______ 2000. Elle a laissé pour seuls héritiers ses fils A______, né en 1960, et B______, né en 1966.

Par testament olographe du 5 septembre 1988, F______ avait désigné I______, notaire, au titre d'exécuteur testamentaire de sa succession. Celui-ci a renoncé à son mandat d'exécuteur testamentaire par déclaration du 26 juin 2017.

Par requête du 15 novembre 2017, A______ a sollicité la désignation d'un représentant de la communauté héréditaire au vu de sa relation difficile avec son frère B______.

Par réponse du 28 novembre 2017 à cette requête, B______ s'est déclaré favorable à la requête et proposé que soit désigné ès-qualités D______, notaire.

Par courrier du 5 décembre 2017 à l'adresse de la Justice de paix, A______ a confirmé ne pas s'opposer à la désignation de D______, notaire, en qualité de représentant de l'hoirie, souhaitant que le représentant "ne sous-traite pas tout ou partie de son mandat à la faveur d'une des parties héritières ou de son représentant exclusif".

Par décision en force du 28 décembre 2017, la Justice de paix a désigné
D______, notaire, aux fonctions de représentant de la communauté héréditaire de F______ décédée le ______ 2017.

Par courrier du 4 mai 2018 à l'adresse de la Justice de paix, le représentant de l'hoirie a exposé à la Justice de paix que F______ était titulaire de comptes bancaires non déclarés en G______ et qu'il s'agissait de régulariser la situation à Genève et d'obtenir la libération des fonds. Pour ce faire, B______ avait déjà mandaté un avocat, C______ à Genève, lequel s'était adressé à un correspondant en G______, A______ n'ayant pas été consulté à l'époque. Au vu du fait que ces conseils agissaient dans l'intérêt de la succession et que la procédure était déjà lancée et bien avancée, il a sollicité l'établissement d'une note d'honoraires pour le travail d'ores et déjà effectué et d'une demande de provisions pour le travail à effectuer dans ce cadre. Il a exposé que les deux héritiers avaient accepté les demandes de provisions, mais que A______ refusait que soit acquittée la note d'honoraires pour le travail effectué. Le représentant de l'hoirie requérait l'autorisation de payer les notes de C______ et de son correspondant en G______ par le débit des comptes de la défunte. La première décision rendue comporte cette autorisation.

Par courrier du 28 mai 2018, D______, en sa qualité de représentant de l'hoirie, a requis de la Justice de paix l'autorisation de recevoir l'intégralité des actions de la J______ SA à déposer dans le coffre de son Etude du fait d'un risque fiscal inhérent au fait qu'une partie des actions de la [société J______] excédant la part de A______ dans la succession était en mains de ce dernier.

Cette demande a fait l'objet de la deuxième décision contestée.

 

 

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions du juge de paix, qui relèvent de la juridiction gracieuse et sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. e CPC), sont susceptibles d'un appel, dans le délai de dix jours (art. 314 al. 1 CPC), auprès de la Chambre civile de la Cour de justice (art. 120 al. 2 LOJ) si la valeur litigieuse est égale ou supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

L'appel doit être motivé (art. 311 al. 1 CPC).

1.2 La seconde décision rendue par la Justice de Paix le 29 mai 2018 a été
semble-t-il adressée aux parties par plis simples, de sorte que l'on ignore quand elle a été communiquée et quand elle a été reçue. Cela étant, si l'on part du principe, vraisemblable, qu'elle a été communiquée le lendemain de la date à laquelle elle a été rendue et est parvenue à son destinataire le surlendemain, le recours, expédié le 9 juin 2018, est recevable.

Il l'est également contre la première décision rendue dont il ressort de la procédure qu'elle n'a pas été communiquée au recourant, mais uniquement au notaire représentant de l'hoirie.

Point n'est besoin de déterminer si cette décision devait être communiquée aux héritiers en sus de la communication au représentant de l'hoirie. De même la question de la recevabilité du recours quant à ladite décision peut rester indécise au vu du sort réservé à celui-ci.

2. L'appelant soulève tout d'abord la violation de son droit d'être entendu dans le cadre de la décision autorisant le représentant de l'hoirie à payer une note d'honoraires de 8'000 fr. d'un avocat mis en œuvre par son seul frère sans lui avoir octroyé la possibilité de se déterminer sur cette question.

2.1 Le droit d'être entendu est une garantie de caractère formel dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours au fond. Toutefois, une violation pas particulièrement grave du droit d'être entendu peut exceptionnellement être guérie si l'intéressé peut s'exprimer devant une instance de recours ayant libre pouvoir d'examen en fait et en droit. Même en cas de violation grave du droit d'être entendu, la cause peut ne pas être renvoyée à l'instance précédente si et dans la mesure où ce renvoi constitue une démarche purement formaliste qui conduirait à un retard inutile incompatible avec l'intérêt de la partie concernée à un jugement rapide de la cause (ATF 135 I 272 consid. 2.6.1, JT 2010 I 255).

2.2 S'il y a plusieurs héritiers, tous les droits et obligations compris dans la succession restent indivis jusqu'au partage (art. 602 al. 1 CC).

A la demande de l'un des héritiers, l'autorité compétente peut désigner un représentant de la communauté héréditaire jusqu'au moment du partage (art. 602 al. 3 CC).

La nomination d'un représentant d'hoirie doit être faite chaque fois qu'elle paraît utile selon l'appréciation de l'autorité parce que les héritiers ne peuvent pas agir envers les tiers d'une façon générale ou dans un cas particulier en raison de leurs divergences ou en cas de blocage survenu en raison des dissensions des héritiers ou encore, lorsque la substance ou les rendements de la succession sont mis en péril (SPAHR CR-CC, ad art. 602 no 62 ss 71, 73, 74).

L'autorité peut donner un pouvoir général de gérer la succession au représentant d'hoirie. Elle peut exiger du représentant qu'il lui fournisse des renseignements sur son activité; elle peut lui donner des directives, le sanctionner et annuler certains actes juridiques (STEINAUER, Le droit des successions, 2015, no 1224; SPAHR op. cit., ad art. 602 no 80, 81). Le représentant de l'hoirie indivise est nommé pour la communauté des héritiers, non comme le représentant et dans l'intérêt d'un unique héritier (arrêt du Tribunal fédéral 5A_241/2014 consid. 2.1). L'instauration d'une mesure de représentation de la communauté héréditaire déploie ses effets pour tous les membres de l'hoirie (arrêt du Tribunal fédéral 5A_796/2014 consid. 5.2).

2.3 Les procédures relevant de la juridiction gracieuse se distinguent notamment par le fait que, en règle générale, seule une partie intervient en qualité de requérant (arrêt du Tribunal fédéral 5A_796/2014 consid. 5.3).

2.4 Dans le cas d'espèce, on relèvera d'emblée qu'est douteux le fait que la Justice de paix doive, en cas de désignation par elle d'un représentant de l'hoirie à la demande d'un héritier, communiquer à d'autres personnes que le représentant de l'hoirie les décisions qu'elle rend à la requête de celui-ci, dans la mesure où il agit pour l'ensemble de l'hoirie et que ses actes s'imposent à tous les héritiers.
Voulût-on admettre néanmoins que la décision de la Justice de paix du 7 mai 2018 aurait dû être communiquée aux héritiers que l'on ne pourrait retenir de violation du droit d'être entendu du recourant. En effet, celui-ci a eu quoiqu'il en soit l'occasion d'exposer dans le cadre de son appel sa position à une juridiction ayant plein pouvoir de cognition, de sorte qu'une éventuelle violation aurait été réparée.

2.5 S'agissant toujours de la décision en question, le recourant se plaint du fait que la Justice de paix a autorisé le paiement de la note d'honoraires présentée par l'avocat mis en œuvre par son frère dans le cadre de la recherche de fonds non déclarés situés sur des comptes en G______ appartenant à la défunte et objet de la succession.

Au vu des principes rappelés ci-dessus, la Justice de paix est compétente pour donner des instructions et des autorisations au représentant de l'hoirie dans le cadre de sa mission. C'est donc à juste titre qu'elle a répondu à la demande de celui-ci de s'acquitter de la note d'honoraires en question ainsi que, ce qui n'est pas litigieux, d'une demande de provisions pour l'activité à venir de cet avocat. Cette décision rentre non seulement dans le cadre des décisions que la Justice de paix peut prendre mais apparaît également parfaitement justifiée dans la mesure où il ressort de la procédure qu'elle est dans l'intérêt de la succession, la recherche des fonds placés sur des comptes en G______ et la régularisation desdits comptes étant à l'évidence dans l'intérêt de l'hoirie.

Par conséquent, cette décision sera intégralement confirmée.

3. En tant que l'appel concerne la décision prise le 29 mai 2018 par la Justice de paix, il doit également être rejeté. En effet, comme dit plus haut, la désignation d'un représentant de la communauté héréditaire est une mesure ordonnée dans le cadre de la dévolution successorale, les fonctions d'un tel représentant prenant fin au plus tard préalablement au partage de la succession. Or, dans la mesure où il est en particulier compétent pour préparer le partage successoral (SPAHR op. cit., no 75 ad art. 602), le représentant de la communauté gère la succession et l'administre même sans l'assentiment des héritiers. Il a le devoir de prendre toutes les mesures adéquates pour le maintien du patrimoine successoral. Il doit mettre en œuvre toutes les mesures nécessaires à la conservation de celui-ci.

Dans cette mesure et afin d'éviter tout risque pour l'hoirie comme pour les héritiers, il apparaissait judicieux que les actions de la société J______ considérée entrant dans la succession soient rassemblées au sein de l'Etude du représentant de l'hoirie, avant que le partage ne puisse être effectué. La décision en ce sens de la Justice de paix ne souffre aucune critique.

4. Dans la mesure où le recourant succombe entièrement, les frais de la procédure fixés à 800 fr. seront mis à sa charge (art. 106 al. 1 CPC) et compensés partiellement par l'avance de frais payée à hauteur de 500 fr. Le recourant sera condamné au paiement du solde des frais judiciaires en 300 fr. en faveur de l'Etat. Dans la mesure où il n'a pas été requis de réponse, il n'y a pas lieu à dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Rejette en tant que recevable l'appel déposé le 9 juin 2018 par A______ contre les décisions DJP/292/2018 rendue le 7 mai 2018 et DJP/293/2018 rendue le 29 mai 2018 par la Justice de paix dans la cause C/11513/2017.

Confirme les décisions attaquées.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel fixés à 800 fr. et dit qu'ils sont partiellement compensés par l'avance de frais versée à hauteur de 500 fr.

Condamne A______ à payer la somme de 300 fr. à titre de solde des frais à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'y a pas lieu à dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.