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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1060/2015

ATAS/708/2015 du 22.09.2015 ( LPP ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1060/2015 ATAS/708/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 septembre 2015

1ère Chambre

 

En la cause

FONDATION COLLECTIVE VITA, c/o Zurich Cie d'Ass. sur la vie, sise Austrasse 46, ZÜRICH

 

 

demanderesse

 

contre

A______ SÀRL, c/o M. B______, sise à GENÈVE

 

 

défenderesse

 


EN FAIT

1.        A______ SÀRL (ci-après la société), société ayant pour buts notamment la distribution en Suisse de technologies informatiques et la vente de matériel hardware et software, a été créée à Genève le 18 février 2011. Elle s’est affiliée auprès de la Fondation collective VITA (ci-après la Fondation) à compter du 1er janvier 2012 (contrats d’adhésion n° 2______/000 des 29 novembre 2012 et 14 mars 2013).

2.        La société ne s’est pas acquittée des cotisations de prévoyance échues depuis le 30 juin 2014.

Le 30 mars 2015, la Fondation a déposé auprès de la chambre de céans une demande visant à obtenir de la société le paiement de la somme de CHF 43'363.65 « (dont à déduire CHF 8'864.05 pour une correction de primes), plus intérêts de 5% à compter du 1er septembre 2014 (ainsi que les intérêts de CHF 1'441.45 à déduire CHF 341.25 suite correction de primes au 31 août 2014) et les frais de poursuite ». Elle a requis la mainlevée définitive de l’opposition formée par la société au commandement de payer (poursuite n° 1______) et à ce que les frais et dépens soient mis à la charge de celle-ci.

La Fondation a exposé qu'afin de garantir les risques décès, invalidité et longévité, elle avait conclu avec Zurich compagnie d'assurances sur la vie SA (ci-après : Zurich Vie) un contrat d'assurance vie collectif dont elle était elle-même preneuse d'assurance et bénéficiaire. Elle devait à Zurich Vie les primes facturées au titre de cette garantie. Comme elle était une fondation semi-autonome, elle assumait elle-même le risque de placement. Les cotisations dues en vertu du contrat d'adhésion comprenaient les avoirs de vieillesse, les primes de risques ainsi que les frais accessoires LPP.

3.        Dans sa réponse du 8 juin 2015, la société, représentée par Monsieur B______, gérant, a expliqué que

« Lors de notre constitution, nous (le comptable M. C______ @c______.org) nous sommes immédiatement adressés à un [seul] courtier en assurance afin de contracter toutes les assurances nécessaires (M D______ ______@gmail.com).

Nous avons vite obtenu des réponses, fiches de déclarations que nous avons complétées, et contrats de toutes les compagnies, sauf de la Zurich (alors que notre courtier avait retourné nos déclarations).

En 2011 nous nous sommes adressés à maintes reprises au courtier afin qu’il relance la Zurich, sans succès. Nous avions provisionné une somme avoisinante à celle que nous aurions dû payer.

Ce n’est qu’au début 2012 que le courtier est revenu vers nous pour nous informer que la Zurich avait finalement décidé que les cotisations à verser ne commenceraient que pour début 2012, étant donné que rien n’a pu être fait avant.

A ce moment-là, nous avons utilisé les fonds que nous avions provisionnés en 2011 pour recruter du personnel.

Parallèlement, nous avons commencé à recevoir des factures très élevées pour couvrir plusieurs mois, mais :

Nous avons finalement été facturés pour 2011 tardivement, ce qui nous a créé un problème de trésorerie.

Nous n’avons jamais obtenu la confirmation que les calculs avaient bien pris en compte nos annonces de modifications de salaires, entrées, et sorties, malgré le fait que nous avons rempli les formulaires et communiqué le tableau joint d’année en année.

Nous avons reçu une proposition de remboursement que nous devions retourner signée pour rembourser le retard, à raison de CHF 4'000.- additionnels / mois, mais suite à cette proposition nous avons contesté les frais d’amendes et de retards dus au manque de réaction de la compagnie, et d’autre part notre souhait de rembourser un montant moindre mensuel n’a pas été pris en compte (montant imposé).

Les deux correspondants successifs de la Zurich ne parlant ni français ni anglais mais seulement allemand (que nous ne parlons pas), cela n’a rien arrangé à la situation.

Aujourd’hui, pour les raisons énoncées ci-dessus, nous souhaitons obtenir de la Zurich qu’elle annule tous les frais de retard et amendes dues à ses négligences, afin de pouvoir discuter ensemble d’un plan de paiement sur le solde ouvert, et non pas qu’il nous soit imposé avec les frais en sus ».

4.        Le 27 mai 2015, la Fondation a, en substance, rappelé que le versement des cotisations 2ème pilier est obligatoire.

5.        Par courrier du 30 juin 2015, la société a informé la chambre de céans qu’elle avait pris contact avec la Fondation afin de trouver un arrangement de paiement.

6.        Le 18 août 2015, constatant que la société ne s’était pas déterminée sur les écritures de la Fondation du 27 mai 2015, la chambre de céans a accordé un nouveau délai à la société au 4 septembre 2015 pour d’éventuelles observations, étant précisé que sans nouvelle de sa part passé ce délai, la cause serait gardée à juger.

7.        La société ne s’est pas manifestée.

8.        Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations [CO - RS 220]; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40]; art. 142 du Code civil [CC - RS 210]).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        L'ouverture de l'action prévue à l'art. 73 al. 1 LPP n'est soumise comme telle à l'observation d'aucun délai (SPIRA, Le contentieux des assurances sociales fédérales et la procédure cantonale, recueil de jurisprudence neuchâteloise 1984, p 19). C'est pourquoi, en matière de prévoyance professionnelle, le juge ne peut pas renvoyer l'affaire aux organes de l'assurance pour complément d'instruction et nouveau prononcé (ATF 117 V 237, consid. 2, 115 V 224 et 239, 114 V 102, consid. 1b, 113 V 200, consid. 2, 112 Ia 184 consid. 2).

3.        En l'espèce, la demande respecte la forme prévue à l'art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA; RSG E 5 10). Elle est recevable.

4.        Le litige porte sur une demande en condamnation au paiement des cotisations échues, frais et intérêts et au prononcé de la mainlevée de l'opposition faite au commandement de payer.

5.        La loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, du 25 juin 1982 (LPP; RS 831.40) institue un régime d'assurance obligatoire des salariés (art. 2 al. 1 LPP).

6.        Selon l'art. 11 al. 1 LPP, tout employeur occupant des salariés soumis à l'assurance obligatoire doit être affilié à une institution de prévoyance inscrite dans le registre de la prévoyance professionnelle. Si l'employeur ne se conforme pas à son obligation, l'autorité cantonale de surveillance le somme de s'affilier dans les six mois à une institution de prévoyance. A l'expiration de ce délai, l'employeur qui n'a pas obtempéré à cette injonction est annoncé à l'institution supplétive pour affiliation (art. 11 al. 5 LPP). L'affiliation a alors lieu avec effet rétroactif (art. 11 al. 3 LPP).

La convention dite d’affiliation («Anschlussvertrag») d’un employeur à une fondation collective ou à une fondation commune est un contrat sui generis fondé sur l’art. 11 LPP (ATF 120 V 299 consid. 4a et les références). L’employeur affilié à une institution de prévoyance par un tel contrat est tenu de verser à celle-ci les cotisations qu’elle fixe dans ses dispositions réglementaires (cf. art. 66 al. 1, 1ère phrase LPP).

7.        Sont obligatoirement soumis à l'assurance les salariés auxquels un même employeur verse un salaire annuel supérieur à la limite légale pour les risques de décès et d’invalidité dès le 1er janvier qui suit la date à laquelle ils ont eu 17 ans et, pour la vieillesse, dès le 1er janvier qui suit la date à laquelle ils ont eu 24 ans (art. 7 LPP). L’assurance obligatoire commence en même temps que les rapports de travail et prend fin, notamment, en cas de dissolution des rapports de travail, le salarié restant assuré auprès de l'institution de prévoyance pour les risques de décès et d’invalidité, durant un mois après la fin des rapports avec l’institution de prévoyance (art. 10 LPP).

Conformément à l'art. 66 al. 2 LPP, l'employeur est le débiteur de la totalité des cotisations envers l'institution de prévoyance. Celle-ci peut majorer d'un intérêt moratoire les cotisations payées tardivement. Le taux d'intérêt se détermine en premier lieu selon la convention conclue par les parties dans le contrat de prévoyance et, à défaut, selon les dispositions légales sur les intérêts moratoires des art. 102 ss. CO. (SVR 1994 BVG n° 2 p. 5 consid. 3b/aa; RSAS 1990 p. 161 consid. 4b).

Aux termes du chiffre 10 du contrat d’adhésion,

« les contributions sont toujours exigibles au début de l’année d’assurance (1er janvier). Lors de mutations intervenant en cours d’année (p. ex. nouvelles entrées en service), les contributions sont échues à la date d’entrée en vigueur correspondante.

L’employeur est débiteur envers la fondation de la totalité des contributions facturées par celle-ci. Il s’engage à payer les contributions dans les délais et à régler le compte au prorata jusqu’au 30 juin et 31 décembre de l’année en question, dans la mesure où celui-ci présente un solde en faveur de la fondation. (…)

Les contributions facturées sont portées au débit du compte de contributions. Les paiements et les bonifications sont crédités conformément à la date-valeur et servent à couvrir, en premier lieu, les contributions pour l’assurance de risque. Les intérêts actifs et passifs sont calculés à la bonne valeur, indépendamment de la date de la facturation ».

Le chiffre 12 précise que

« l’employeur est mis en demeure pour tous les arriérés de contributions et créances selon les chiffres 10 et 11 du présent contrat. Si la sommation reste sans effet, la fondation se réserve le droit de recourir à la voie judiciaire pour l’encaissement des arriérés de contributions et créances, intérêts et frais compris, et de résilier immédiatement le contrat sans observer un délai de résiliation. (…)

Les frais de sommation et, le cas échéant, d’autres démarches d’encaissement sont régis par le règlement sur les coûts ».

Le règlement sur les coûts, faisant partie intégrante du contrat d’adhésion (art. 5 contrat d’adhésion) prévoit expressément le montant des frais relatifs aux procédures de sommation et aux mesures d’encaissement.

8.        En matière de prévoyance professionnelle, le juge saisi d’une action doit se prononcer sur l’existence ou l’étendue d’un droit ou d’une obligation dont une partie prétend être titulaire contre l’autre partie (ATFA non publié B 91/05, du 17 janvier 2007, consid. 2.1). L’objet du litige devant la juridiction cantonale est déterminé par les conclusions de la demande introduite par l’assuré (ATFA non publié B 72/04, du 31 janvier 2006, consid. 1.1). C’est ainsi la partie qui déclenche l’ouverture de la procédure et détermine l’objet du litige (maxime de disposition). L’état de fait doit être établi d’office selon l’art. 73 al. 2 LPP seulement dans le cadre de l’objet du litige déterminé par la partie demanderesse. La maxime inquisitoire ne permet pas d’étendre l’objet du litige à des questions qui ne sont pas invoquées (ATF 129 V 450 consid. 3.2). Le juge n’est toutefois pas lié par les conclusions des parties; il peut ainsi adjuger plus ou moins que demandé à condition de respecter leur droit d’être entendu (ATFA non publié B 59/03, du 30 décembre 2003, consid. 4.1).

La chambre des assurances sociales statuant en dernière instance cantonale et dans l'accomplissement de tâches de droit public peut, selon ce qui précède, prononcer la mainlevée définitive d'une opposition à un commandement de payer puisque, statuant au fond, la condamnation au paiement est assimilée à un jugement exécutoire. Cette solution est d'ailleurs la conséquence du fait que, dans les matières qui sont de son ressort, le juge des assurances est effectivement le juge ordinaire selon l'art. 79 LP et qu'il a qualité pour lever une opposition à la poursuite en statuant sur le fond (ATF 109 V 51).

9.        En l'espèce, en sa qualité d'employeur occupant des personnes salariées, la société devait être affiliée à une caisse de prévoyance professionnelle et elle doit les primes convenues avec la Fondation.

Force est de constater qu’elle n'a pas payé, depuis le 30 juin 2014, les cotisations de prévoyance échues, et qu'elle n'a ainsi pas respecté ses obligations découlant de la LPP et du contrat d'adhésion. Elle doit ainsi à la Fondation la somme due à ce titre, soit CHF 43'363.65 (dont à déduire CHF 8'864.05 pour une correction de primes), plus intérêts de 5% à compter du 1er septembre 2014 (ainsi que les intérêts de CHF 1'441.45 à déduire CHF 341.25 suite correction de primes au 31 août 2014) et les frais de poursuite.

L'associé-gérant de la société n'a du reste pas contesté les montants dont le paiement est réclamé par la Fondation. Il s’est borné à conclure à l’annulation des frais de retard et amendes dont il estime qu’ils sont dus aux négligences commises par la Fondation.

En ce qui concerne les frais de poursuite, ils sont d'office supportés par le débiteur lorsque la poursuite aboutit (JdT 1974 III 32). Les intérêts de 5% réclamés par la Fondation sont également dus par la société.

Celle-ci sera dès lors condamnée à payer ces montants et la mainlevée définitive de l'opposition formée dans la poursuite prononcée en conséquence.

10.    La Fondation conclut également à ce que la société soit condamnée aux frais et dépens de la procédure.

L'art. 73 al. 2 LPP prescrit que les cantons doivent prévoir une procédure simple, rapide et, en principe, gratuite.

Selon l'art. 89H al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA; RS E 5 10) la procédure est gratuite, sous réserve de l'al. 4 (relatif à l'assurance-invalidité). Toutefois, les débours et un émolument peuvent être mis à charge de la partie qui agit de manière téméraire ou témoigne de légèreté.

En l'espèce, il ne sera pas octroyé de dépens à la Fondation, les conditions de l'art. 89H al. 1 LPA n'étant pas remplies.

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.        L’admet et condamne A______ Sàrl à payer à la FONDATION COLLECTIVE VITA :

- la somme de CHF 43'363.65 selon contrat n° 2______/000 (dont à déduire CHF 8'864.05) avec intérêts de 5% à compter du 1er septembre 2014 ;

- les intérêts de CHF 1'441.45 au 31 août 2014 (dont à déduire CHF 341.25) ;

- les frais de poursuite.

3.        Prononce la mainlevée définitive de l’opposition faite au commandement de payer poursuite n° 1______.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

La présidente

 

 

 

 

Doris GALEAZZI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le