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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2411/2020

ATAS/676/2021 du 17.06.2021 ( CHOMAG ) , REJETE

Recours TF déposé le 03.09.2021, rendu le 20.01.2022, REJETE, 8C_559/2021
*** ARRET DE PRINCIPE ***
Descripteurs : GARDERIE;SUBVENTION;SUBVENTION POUR FRAIS D'EXPLOITATION;FONDATION(PERSONNE MORALE)
Normes : LACI.31.al1; LACI.32; OACI.51; 5
Résumé : Droit à l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail (RHT) pour une fondation de droit public qui gère des crèches sur délégation de la Commune du Grand-Saconnex et qui est subventionnée par cette dernière. Questions du statut du personnel des crèches et du risque de licenciement à brève échéance laissées ouvertes. Examen du risque restreint de fermeture. En tant que fondation de droit public, dont le statut est régi par le droit communal dont elle relève, la fondation recourante doit être considérée comme une autorité administrative au sens de la LPA et est présumée courir, à ce titre déjà, un risque restreint de fermeture. Cependant, dans la mesure où il n’est pas exclu que certaines unités administratives soient soumises à restructuration et puissent être exposées aux mêmes risques que les entreprises privées, la Chambre de céans a examiné si les dispositions légales applicables en matière de financement des crèches prévoient que les pertes ou dépenses supplémentaires sont couvertes par les fonds publics. Après avoir procédé à une interprétation littérale, historique et téléologique de l’art. 8 LAPr, la Chambre de céans est arrivée à la conclusion que les communes devaient couvrir le déficit – ordinaire ou extraordinaire – des structures d’accueil qu’elles subventionnent. Les structures d’accueil doivent remplir leur mandat indépendamment de la situation conjoncturelle et d’un éventuel déficit. Il n’y a donc pas de risque d’exploitation et, partant, il n’y a pas de place pour des indemnités RHT.
En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2411/2020 ATAS/676/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 juin 2021

6ème Chambre

 

En la cause

FONDATION POUR LA PETITE ENFANCE A______, sise ______, Le Grand-Saconnex, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Alexia RAETZO

recourante

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, représenté par son service juridique, sis rue des Gares 16, Genève

SECRÉTARIAT D'ÉTAT À L'ÉCONOMIE, représenté par la Direction du travail, Secteur Service juridique, TCJD, Holzikofenweg 36, Berne

 

 

intimé

 

appelé en cause

 


EN FAIT

1.        A______ (ci-après : la fondation ou la recourante) est une fondation de droit public d’intérêt communal, dont le siège est au Grand-Saconnex (art. 1 et 3 des Statuts). Elle a été constituée par délibération du Conseil municipal du Grand-Saconnex du 17 mars 1997, approuvée par la loi du 28 mai 1998.

La fondation a pour but d’organiser, de gérer et de développer une institution pour la petite enfance comprenant des structures telles que crèche, garderie et jardin d’enfants (art. 2 des Statuts).

Dans les faits, la fondation gère deux crèches, B______ et C______, lesquelles offrent chacune 52 places et une garderie, D______, pouvant accueillir 15 enfants. La fondation propose également quinze places de crèche en Ville de Genève, grâce à un accord avec cette dernière.

Ses ressources proviennent des terrains et bâtiments mis à disposition par la ville du Grand-Saconnex, des subventions de la ville du Grand-Saconnex, des subventions de la Confédération suisse et du Canton de Genève, des subsides, dons et legs ainsi que du résultat d’exploitation (art. 6 des Statuts).

2.        Suite aux mesures officielles prises dans le cadre de la pandémie de coronavirus par le Conseil fédéral et le Conseil d’Etat genevois, la fondation a été contrainte de fermer ses structures d’accueil dès le 16 mars 2020, tout en ménageant un service d’accueil minimum.

3.        Le 17 mars 2020, la fondation a transmis à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE ou l’intimé) un préavis de réduction de l’horaire de travail (RHT) pour la quasi-totalité de ses employés, soit 66 personnes sur les 67 employés, dont 15 employés étaient liés par des contrats de travail de durée déterminée, trois collaborateurs sur appel et deux apprentis, pour une durée prévisible du 16 mars au 18 avril 2020, la perte de travail estimée étant de 95%.

4.        Par décision du 24 mars 2020, l'OCE a partiellement fait opposition au paiement de l’indemnité en cas de RHT, considérant que l’indemnité en question ne pouvait être versée qu’à compter du 21 mars 2020 vu le délai d’attente de trois jours et ce jusqu’au 20 juin 2020.

5.        Compte tenu de la décision précitée, la fondation a adressé à l’OCE les décomptes pour les mois de mars à mai 2020 et l’office précité lui a versé les indemnités en cas de RHT pour le mois de mars 2020, soit CHF 65'638.55 (voir ch. 57 du recours du 14 août 2020 et décompte des indemnités pour le mois de mars 2020).

6.        Le 1er mai 2020, le Secrétariat d’Etat à l’économie (ci-après : SECO) s’est opposé à la décision de l’OCE du 24 mars 2020, considérant en substance que la fondation devait être qualifiée d’entreprise publique ou d’administration, ou du moins d’entreprise qui fournit des services publics. Dans la mesure où la fondation n’avait pas fourni la preuve qu’il existait un risque imminent pour les collaborateurs concernés de perdre leur emploi, elle n’avait pas droit à l’indemnité en cas de RHT.

7.        Par observations du 15 mai 2020, la fondation a contesté la position du SECO, expliquant notamment que le projet de loi approuvant sa constitution ne prévoyait aucune obligation financière de la part d’une autorité. Se référant à la législation cantonale applicable, la fondation a considéré que les communes n’avaient aucune obligation légale de financer les structures d’accueil préscolaire. Leur financement était en outre subsidiaire à la participation des parents. Quant aux subventions fédérales, elles ne constituaient pas un droit. S’y ajoutait en outre le fait que la fondation n’avait conclu aucun contrat de prestations lui donnant droit à une subvention ou à une indemnisation, en particulier avec la Ville du Grand-Saconnex. En conclusion, la fondation n’avait aucun droit, que ce soit en application de la loi ou d’un contrat, d’obtenir des subventions communales, cantonales ou fédérales.

En 2020, la fondation prévoyait d’obtenir une subvention communale de CHF 3,575 millions sur un total de charges de CHF 5,213 millions, soit 68,5%. S’y ajoutaient une subvention fédérale de CHF 35'280.- représentant 0,67% du budget et les montants facturés aux parents, lesquels étaient censés couvrir la différence avec le total des charges budgétées. Suite aux mesures prises dans le cadre de la pandémie, la fondation avait subi un déficit d’exploitation, de CHF 100'000.- en mars et CHF 156’0000.- en avril. Elle ne pouvait compter sur aucune base légale ou contractuelle pour demander à ce que ce déficit d’exploitation soit couvert par une autorité publique. Seule une aide extraordinaire pouvait éventuellement être votée par la Ville du Grand-Saconnex. Elle n’avait toutefois aucun droit à cette aide et doutait, compte tenu de la situation économique, que les ressources de la commune le permettent.

Sans indemnité en cas de RHT, la fondation risquait la faillite et elle allait devoir licencier le personnel, réduisant ainsi la capacité d’accueil à zéro, étant encore précisé que le personnel ne bénéficiait pas du statut de fonctionnaire, des contrats de droit privé ayant été signés.

8.        Par décision sur opposition du 15 juin 2020, l'OCE a admis l’opposition du SECO du 1er mai 2020 et a annulé la décision du 25 mars 2020, « en ce sens qu’il [était] fait opposition au préavis de RHT déposé par l’employeur ». En substance, l’OCE a relevé que la fondation était une entreprise de droit public, qu’elle percevait des subventions à hauteur de 69%, auxquelles s’ajoutaient les terrains et bâtiments mis à sa disposition par la ville du Grand-Saconnex et qu’elle n’était dès lors pas crédible lorsqu’elle indiquait encourir un risque de faillite et de disparition d’emplois. Au surplus, la prise en charge d’un éventuel déficit par la ville du Grand-Saconnex n’était pas exclu. C’était ainsi à tort que le Service juridique de l’OCE avait accordé des indemnités en cas de RHT.

9.        Le 14 août 2020, sous la plume de son conseil, la fondation a interjeté recours contre la décision sur opposition du 15 juin 2020, concluant à son annulation et à l’octroi des indemnités en cas de RHT sollicitées le 17 mars 2020.

A l’appui de sa position, la recourante a notamment considéré que la directive 06/2020 du SECO, sur laquelle l’OCE s’était fondé pour s’opposer au versement de l’indemnité pour RHT, dépassait le cadre légal. Elle a également relevé que le personnel des entreprises de droit public n’était pas d’emblée exclu du droit à l’indemnité en cas de RHT. Par ailleurs, le critère du risque immédiat de disparition d’emploi ne ressortait ni des dispositions légales applicables ni de la jurisprudence y relative. Cette exigence d’immédiateté était au demeurant en contradiction avec le système de RHT qui prévoyait une durée d’octroi maximum de 12 mois, dans un délai cadre de 24 mois. En outre, l’exigence liée à l’existence d’un risque de faillite ou de fermeture outrepassait également les conditions légales et le but visé par le système de l’indemnité pour RHT. Partant, la directive du SECO n’était pas applicable en l’espèce, dès lors qu’elle violait le principe de la légalité.

La recourante a également invoqué une violation des principes de l’égalité de traitement et de l’interdiction de l’arbitraire, en tant que la directive 06/2020 du SECO rendant plus difficile, voire impossible, pour les entreprises publiques, l’accès aux RHT.

Enfin, la recourante a expliqué qu’elle avait dû fermer ses portes en raison de mesures prises par une autorité, qu’elle assumait un risque entrepreneurial, dès lors qu’elle ne bénéficiait d’aucune garantie de prise en charge du déficit ou des coûts, les pertes étant au final à sa charge et qu’il y avait par conséquent un risque avéré de perte d’emplois.

10.    L’OCE a répondu le 28 août 2020 et a persisté dans les termes de sa décision sur opposition. Pour lui, la recourante devait manifestement être qualifiée d’entreprise de droit public et en cette qualité, elle n’encourait aucun risque de faillite ni risque entrepreneurial. L’office intimé a relevé, pour le surplus que les structures d’accueil de la petite enfance n’avaient pas eu l’obligation de fermer à Genève, un service d’accueil minimum ayant été organisé et que la perte d’exploitation desdites structures était liée à l’exonération faite aux parents de payer les contributions pour la garde de leurs enfants. Or, selon une ordonnance du Conseil fédéral, les cantons devaient octroyer, sur demande, des indemnités pour pertes financières sous formes d’aides financières aux institutions d’accueil extra-familial pour compenser les contributions d’enfants non versées entre le 17 mars et le 17 juin 2020, ladite indemnisation couvrant 100% des contributions non perçues. Il n’y avait donc aucun risque de perte d’exploitation. Pour le surplus, la législation en la matière prévoyait que les communes prennent en charge l’éventuel déficit d’exploitation des structures de coordination de l’accueil familial de jour.

11.    Le 28 septembre 2020, la recourante a produit sa réplique et a notamment considéré qu’il n’existait aucun motif juridique permettant de refuser les indemnités pour cause de rht à une institution de droit public, telle qu’une fondation, qui remplissait les conditions d’octroi de telles indemnités. Il n’existait aucune garantie de paiement par les communes dans son cas. Quant à l’ordonnance évoquée par l’intimé, elle n’était pas applicable aux institutions exploitées par les pouvoirs publics. Par ailleurs, la disposition à laquelle l’intimé faisait référence s’appliquait aux structures de coordination et non aux structures d’accueil préscolaire. Enfin, elle rappelait que la RHT de son personnel avait découlé de motifs d’ordre économique qui ne lui étaient pas imputables. La tenue d’un service d’accueil minimum limité aux parents exerçant certaines professions avait notablement diminué le nombre d’enfants pouvant être accueil et, par conséquent, les contributions payées par les parents. Cette situation était consécutive aux mesures prises par la Confédération et les cantons dans le cadre de l’épidémie de coronavirus.

12.    Par duplique du 26 octobre 2020, l’intimé a rappelé que la recourante était une entreprise de droit public, ayant été instaurée par le biais d’une loi cantonale. En cette qualité et vu son taux élevé de subventionnement, elle n’encourait aucun risque de faillite ni de disparition d’emplois.

Cela étant, compte tenu de la question de principe soulevée dans la cause, l’intimé sollicitait l’appel en cause du SECO.

13.    Malgré l’opposition de la recourante, la chambre de céans a appelé en cause le SECO par ordonnance du 10 novembre 2020 et lui a imparti un délai pour se déterminer.

14.    Par détermination du 26 janvier 2021, le SECO a notamment précisé que le but de l’indemnité pour RHT était d’éviter des licenciements consécutifs à un recul temporaire de la demande de biens et de services. Sans l’obtention de la RHT, l’employeur se verrait certainement dans l’obligation de mettre fin aux contrats de travail conformément aux dispositions du code des obligations pour remédier à une baisse temporaire de son activité. Quant à la condition du risque de faillite, il permettait de déterminer si un employeur devait supporter entièrement une perte d’exploitation pouvant le mettre en péril. Le but de la RHT était d’éviter tout licenciement et, partant, la faillite. En maintenant la structure, les contrats de travail sont également maintenus. Or, une entreprise recevant en partie des subventions et qui n’avait pas besoin de s’autofinancer par ses propres ressources ne remettait pas en cause sa survie, ce d’autant moins lorsqu’elle offrait des prestations sur mandat de l’Etat couvrant un réel besoin du public.

15.    Le 18 février 2021, la recourante s’est prononcée sur la détermination du SECO, reprenant en substance ses précédents arguments.

16.    Par courrier du 11 février 2021, l’intimée a persisté dans les termes de sa décision sur opposition.

17.    Le 24 mars 2021, la recourante a informé la chambre de céans que la Ville du Grand-Saconnex, par l’intermédiaire de son conseil administratif, avait refusé de donner suite à sa demande de subvention complémentaire pour l’année 2020 en raison du manque de disponibilité budgétaire d’une part et compte tenu de l’absence d’obligation de prise en charge du déficit d’exploitation par la ville d’autre part.

18.    La décision de la Ville du Grand-Saconnex a été soumise au SECO et à l’OCE.

Par courrier du 22 avril 2021, le SECO a considéré que les décisions d’octroi en matière de RHT relevaient exclusivement de la compétence de l’autorité cantonale. Il s’était opposé à la décision de l’OCE, dès lors que la recourante, qui s’apparentait à une entreprise fournissant des prestations d’un service public, n’avait pas rendu plausible le risque de licenciements. Pour le surplus, elle se référait à ses observations du 26 janvier 2021.

Pour sa part, l’OCE ne s’est pas déterminé.

19.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b LPA), le recours formé le 14 août 2020 contre la décision sur opposition du 15 juin 2020 est recevable (art. 56ss LPGA).

3.        Le litige porte sur la question de savoir si c'est à bon droit que l'intimé s’est opposé au versement de l'indemnité en cas de RHT sollicitée par la recourante dès le 16 mars 2020.

4.        Afin de surmonter les difficultés économiques passagères, un employeur peut introduire, avec l'accord de ses employés, une réduction de l’horaire de travail (RHT), voire une suspension temporaire de l'activité de son entreprise (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, ch. 1 relatif aux remarques préliminaires concernant les art. 31ss).

Le but de l'indemnité en cas de RHT consiste, d'une part, à garantir aux personnes assurées une compensation appropriée pour les pertes de salaire dues à des RHT et à éviter le chômage complet, à savoir des licenciements et résiliations de contrats de travail. D'autre part, l'indemnité en cas de RHT vise au maintien de places de travail dans l'intérêt tant des travailleurs que des employeurs, en offrant la possibilité de conserver un appareil de production intact au-delà de la période de réduction de l'horaire de travail (ATF 121 V 371 consid. 3a).

5.        a. Selon l’art. 31 al. 1 LACI,

les travailleurs dont la durée normale du travail est réduite ou l’activité suspendue ont droit à l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail (ci-après : l’indemnité) lorsque :

a.       ils sont tenus de cotiser à l’assurance ou qu’ils n’ont pas encore atteint l’âge minimum de l’assujettissement aux cotisations AVS ;

b.     la perte de travail doit être prise en considération (art. 32) ;

c.     le congé n’a pas été donné ;

d.     la réduction de l’horaire de travail est vraisemblablement temporaire, et si l’on peut admettre qu’elle permettra de maintenir les emplois en question.

L’art. 32 LACI, auquel l’art. 31 al. 1 let. b LACI renvoie, prévoit que :

1 La perte de travail est prise en considération lorsque :

a.       elle est due à des facteurs d’ordre économique et est inévitable et que

b.       elle est d’au moins 10% de l’ensemble des heures normalement effectuées par les travailleurs de l’entreprise.

2 ( )

3 Pour les cas de rigueur, le Conseil fédéral règle la prise en considération de pertes de travail consécutives à des mesures prises par les autorités, à des pertes de clientèle dues aux conditions météorologiques ou à d’autres circonstances non imputables à l’employeur. ( )

4 ( )

5 ( )

L'art. 51 de l’ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02) concrétise l'art. 32 al. 3 LACI en énumérant, à son al. 2, de façon non exhaustive (cf. ATF 128 V 305 consid. 4), différentes situations (notamment des mesures d'autorités) permettant de prendre en considération une perte de travail (interdiction d'importer ou d'exporter des matières premières ou des marchandises (let. a) ; contingentement des matières premières ou des produits d'exploitation, y compris les combustibles (let. b) ; restrictions de transport ou fermeture des voies d'accès (let. c) ; interruptions de longue durée ou restrictions notables de l'approvisionnement en énergie (let. d) ; dégâts causés par les forces de la nature (let. e). L'art. 51 al. 4 OACI précise encore que la perte de travail causée par un dommage n'est pas prise en considération tant qu'elle est couverte par une assurance privée.

b/aa. La LACI ne définit pas ce que recouvre la notion fondamentale de « facteurs d'ordre économique » mentionnée à l’art. 32 al. 1 LACI.

Ces facteurs d'ordre économique comprennent en réalité essentiellement ceux liés à la conjoncture. Ils peuvent toutefois également englober des facteurs structurels (DTA 2004 p. 127 consid. 1.3 p. 128; 2000 p. 53 consid. 4a p. 56 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_291/2010 du 19 juillet 2010 consid. 4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral des assurances C 279/05 du 2 novembre 2006 consid. 2.2 ; C 24/99 du 11 juin 2001 consid. 4a ; C 203/95 du 8 janvier 1997 (RUBIN, op. cit. n. 6 ad art. 31 et les références citées). Le recul de la demande des biens ou des services normalement proposés par l'entreprise concernée est caractéristique pour apprécier l'existence d'un facteur économique (DTA 1985 p. 109 c. 3a).

b/bb. L'art. 32 al. 3 phr. 1 permet d’accorder l’indemnité en cas de RHT pour des motifs autres qu’économiques, dans certains cas appelés « cas de rigueur ». Cet alinéa s'écarte en conséquence de la logique du système d'indemnisation en cas de RHT, qui veut que seules les pertes de travail causées par des motifs économiques puissent être prises en considération (art. 32 al. 1 let. a LACI). Ces « cas de rigueur » consistent en des situations qui compliquent ou empêchent l’activité économique et impliquent des risques d'exploitation suffisamment inhabituels pour qu'ils ne puissent être assumés par les seuls employeurs (ATF 138 V 333 consid. 3.2; voir également, parmi d’autres, RUBIN, op. cit., n. 15 ad art. 32).

En d’autres termes, dans les cas de rigueur prévus par les art. 32 l. 3 phr. 1 et 51 OACI, l’employeur est empêché d’exercer une activité économique et, est par conséquent, en raison d’une telle entrave, soumis à des risques d’exploitation inhabituels qu’il ne peut assumer seul (voir par exemple le jugement du Tribunal administratif du canton de Berne 200.2020.6011.AC du 16 novembre 2020, conid. 4.3 a contrario).

b/cc. La seule présence d'un motif de prise en considération de la perte de travail au sens des art. 31 et 32 LACI n'est pas suffisante pour conduire à une indemnisation.

Lorsque la perte de travail est due à l'un des motifs de l'art. 33 LACI, l'indemnisation est exclue. Ainsi, même lorsque les critères des art. 31 et 32 LACI (voire de l’art. 51 OACI) sont réalisés, l'indemnisation est exclue lorsque l'une des conditions de l'art. 33 LACI est remplie, par exemple en présence d'un risque normal d'exploitation, (RUBIN, op. cit., n. 18 ad art. 32 LACI et n. 1 et 4 ad art. 33 LACI et les références citées, notamment ATF 138 V 333 consid. 3.2 et ATF 128 V 305 consid. 4a).

C’est le lieu de préciser, dans ce contexte, que le SECO considère que l’apparition inattendue d’un nouveau type de coronavirus et ses conséquences ne font pas partie du risque normal d’exploitation (Jean-Philippe DUNAND / Rémy WYLER, Quelques implications du coronavirus en droit suisse du travail, in Newsletter DroitduTravail.ch du 9 avril 2020 de l'Université de Neuchâtel, p. 14 ; Directive 2020/08 du SECO du 1er juin 2020, actualisant les règles spéciales dues à la pandémie, dans sa version en vigueur du 1er mars au 31 août 2020, p. 1 et 5, ici pertinente).

6.        a. Le droit à l’indemnité en cas de RHT est réservé aux travailleurs tenus de cotiser à l’assurance-chômage (art. 31 al. 1 let. a LACI) et dont le contrat n’a pas été résilié (art. 31 al. 1 let. c LACI).

La qualité de travailleur selon l'art. 31 LACI dépend uniquement du statut juridique de cotisant à l'AVS, et non pas du statut de l'employeur (communauté et établissement public d'une part, personne physique ou morale au sens du droit civil d'autre part ; ATF 121 V 362 consid. 2).

Le personnel des services publics n’est donc pas d’emblée exclu du droit à l’indemnité en cas de RHT. Pour cette catégorie d’employés, l’accès est toutefois limité pour des motifs ayant trait au statut du personnel concerné et au risque restreint de fermeture auquel les entités administratives sont généralement exposées (ATF 121 362 consid. 3a et RUBIN, op. cit., n° 20 ad art. 31).

L'indemnité en cas de RHT est une mesure préventive au sens large : son allocation a pour but d'éviter le chômage complet des travailleurs - soit leur congé ou leur licenciement -, d'une part, de maintenir simultanément les emplois dans l'intérêt des employeurs aussi bien que des travailleurs, d’autre part. Or, en règle générale, les conditions du droit à l'indemnité en cas de RHT ne sauraient être remplies si l'employeur est une entreprise de droit public, faute pour celui-ci d'assumer un risque propre d'exploitation. Au contraire, les tâches qui lui incombent de par la loi doivent être exécutées indépendamment de la situation économique, et les impasses financières, les excédents de dépenses ou les déficits peuvent être couverts au moyen des deniers publics (recettes des impôts). Bien plus, il n'existe en général aucune menace de perdre son emploi là où les travailleurs ont la possibilité d'être déplacés dans d'autres secteurs. En revanche, compte tenu des formes multiples de l'action étatique, on ne saurait de prime abord exclure, dans un cas concret, que le personnel des services publics remplisse les conditions du droit à l'indemnité en cas de RHT. Ce qui est déterminant en fin de compte, conformément à la finalité du régime de la prestation, c'est de savoir si, par l'allocation de l'indemnité, un licenciement - respectivement une non-réélection - peut être évité (ATF 121 V 362 consid. 3a et les références).

C'est à brève échéance que le versement de l'indemnité en cas de RHT doit pouvoir éviter un licenciement. En effet, ces indemnités ont un caractère préventif. Il s'agit de mesures temporaires (art. 31 al. 1 let. d LACI ; ATF 121 V 362 consid. 3b).

b/aa. Le statut du personnel touché par la RHT est dès lors décisif pour l'allocation de l'indemnité. Ainsi, là où ce personnel est au bénéfice d'un statut de fonctionnaire ou d'un statut analogue limitant les possibilités de licenciement que connaît le contrat de travail, ce statut fait échec à court terme - éventuellement à moyen terme - à la suppression d'emploi. Dans ce cas, les conditions du droit à l'indemnité en cas de RHT ne sont pas remplies (ATF 121 V 362 consid. 3b et les références ; voir également arrêt du Tribunal fédéral des assurances rendu le 26 mai 1994 dans la cause Commune de H, paru in DTA 1993/1994 n° 18 p. 140 ss).

b/bb. Le droit à l’indemnité en cas de RHT suppose également que la perte de travail soit susceptible de mettre l’existence de l’entreprise en danger (art. 32 al. 1 let. a LACI ; RUBIN, op. cit., n° 22 ad art. 31 ; voir SVR 1995 ALV n° 28 consid. 4a en matière de cas de rigueur). À l'évidence, cette condition ne saurait être remplie si l'entreprise ne court aucun risque propre d'exploitation, à savoir un risque économique où l'existence même de l'entreprise est en jeu, p.ex. le risque de faillite ou le risque de fermeture de l'exploitation. Or, si l'entreprise privée risque l'exécution forcée, il n'en va pas de même du service public, dont l'existence n'est pas menacée par un exercice déficitaire (ATF 121 V 362 consid. 3b et les références). Le Tribunal fédéral a ainsi considéré qu’on ne pouvait juger de la nécessité d’une RHT sans tenir compte du statut juridique de l’employeur, des mandats qui lui sont confiés par les pouvoirs publics et de sa situation financière. En règle générale, le droit à l’indemnité n’existe pas lorsque l’employeur n’endosse pas à proprement parler de risque d’exploitation, c’est-à-dire lorsqu’il doit remplir son mandat légal, indépendamment de la situation conjoncturelle et d’un éventuel déficit, celui-ci étant pris en charge par les pouvoirs publics (arrêt du Tribunal fédéral des assurances rendu le 9 janvier 1997 dans la cause Eidg. Flugzeufwerk E, paru in DTA 1996/1997 n° 22 p. 123 ss).

Concrètement, lorsque la loi impose que l’administration concernée accomplisse une tâche déterminée, l’existence du service devant accomplir la tâche ne peut généralement pas être remise en cause à brève échéance compte tenu de la durée des procédures législatives. S’y ajoute le fait qu’un service administratif ne risque en principe pas de devoir fermer ses portes en cas de manque de travail ou de pertes financières. Son financement, au travers de l’impôt, garantit d’éventuels découverts. Un service administratif ne court par conséquent en principe pas un risque propre d’exploitation. Toutefois, il n’est pas exclu que certaines unités administratives soient soumises à restructuration en cas de problèmes économiques et puissent ainsi être exposées aux mêmes risques que les entreprises privées (RUBIN, op. cit., n° 22 ad ar. 31).

7.        L'indemnité pour cause de RHT s'élève à 80 % de la perte de gain prise en considération (art. 34 al. 1 LACI). Elle doit être avancée par l'employeur (art. 37 let. a LACI) et sera, par la suite, remboursée par la caisse de chômage à l'issue d'une procédure spécifique (art. 36 et 39 LACI), moyennant un délai d'attente de trois jours au maximum (art. 32 al. 2 LACI et 50 al. 2 OACI), étant toutefois précisé que l’art. 50 al. 2 OACI a été supprimé temporairement en raison de la pandémie de coronavirus).

8.        Pour lutter contre l'épidémie de coronavirus (ci-après : Covid-19) qui a atteint la Suisse début 2020, le Conseil fédéral a pris une série de mesures urgentes.

a. Ainsi, le 28 février 2020, le gouvernement suisse a adopté, en se fondant sur la loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de l'homme du 28 septembre 2012 (Loi sur les épidémies, LEp - RS 818.101), l'ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (Ordonnance COVID-19 - RS 818.101.24), dont le but est de prévoir des mesures devant permettre de diminuer le risque de transmission du COVID-19 (art. 1), laquelle a été abrogée et remplacée par l'ordonnance 2 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus du 13 mars 2020 (ordonnance 2 COVID-19 ; RS 818.101.24). Par cette nouvelle ordonnance, - modifiée à plusieurs reprises depuis son adoption - le Conseil fédéral a notamment interdit les activités présentielles dans les écoles, les hautes écoles et les autres établissements de formation (art. 5).

En application de l’art. 5 précité, notamment, le Conseil d’Etat genevois a, par arrêté du 13 mars 2020 relatif à la fermeture des structures d’accueil préscolaire, des établissements scolaires publics et privés ainsi que des hautes écoles sur le territoire de la République et canton de Genève, ordonné la fermeture de toutes les structures d’accueil préscolaire, de tous les établissements scolaires publics et privés ainsi que de toutes les hautes écoles sises sur le territoire de Genève, et ce du 16 mars 2020 à 6h jusqu’au 8 avril 2020 inclus (art. 1). Un service d’accueil minimum devait toutefois être organisé par les structures d’accueil préscolaire (art. 2). La fermeture de ces établissements a, par la suite, été prolongée jusqu’au 26 avril 2020 (arrêté du Conseil d’Etat genevois du 9 avril 2020 prolongeant l’arrêté du 13 mars 2020 relatif à la fermeture des structures d’accueil préscolaire, des établissements scolaires publics et privés ainsi que des hautes écoles sur le territoire de la République et canton de Genève).

Le 16 mars 2020, le Conseil fédéral a nuancé la fermeture des crèches, considérant que celles-ci ne pouvaient être fermées que si les autorités compétentes prévoyaient des offres d’accueil de remplacement adéquates (art. 5 al. 4 entré en vigueur le 17 mars 2020).

À compter du 27 avril 2020, le Conseil fédéral a progressivement assoupli les mesures restrictives qu'il avait imposées en mars. Dès cette date, les structures d’accueil préscolaire, notamment, ont pu rouvrir (voir art. 2 de l’arrêté du 23 avril 2020 du Conseil d’Etat de Genève modifiant les arrêtés des 13 mars et 9 avril 2020 relatifs à la fermeture des structures d’accueil préscolaire, des établissements scolaires publics et privés ainsi que des hautes écoles sur le territoire de la République et canton de Genève).

b. Parallèlement aux restrictions imposées par l'ordonnance 2 COVID-19, le Conseil fédéral a adopté plusieurs mesures en matière d'assurance-chômage.

Le 20 mars 2020, sur la base de l'art. 185 al. 3 Cst., le Conseil fédéral a adopté l'ordonnance sur les mesures dans le domaine de l'assurance-chômage en lien avec le coronavirus (COVID-19 ; ordonnance COVID-19 assurance-chômage – RS 837.033), entrée en vigueur avec effet rétroactif au 17 mars 2020. En substance, dès le 17 mars 2020, le cercle des bénéficiaires des indemnités RHT a notamment été élargi au conjoint ou au partenaire enregistré de l'employeur (art. 1) ainsi qu’aux personnes fixant les décisions prises par l'employeur (art. 2). Plus aucun délai d'attente ne devait être déduit de la perte de travail à prendre en considération (art. 3) et l'employeur pouvait demander le versement de l'indemnité en cas de RHT sans devoir l'avancer (art. 6), ces mesures devant permettre aux entreprises concernées de disposer de liquidités supplémentaires pendant la durée de la situation extraordinaire (rapport explicatif du SECO relatif à ladite ordonnance, p. 7).

L'ordonnance COVID-19 assurance-chômage a ensuite été modifiée à plusieurs reprises, en particulier le 9 avril 2020, avec effet rétroactif au 1er mars 2020 (art. 9).

9.        En l’occurrence, dans la décision sur opposition entreprise, l’intimé s’est opposé au paiement de l’indemnité en cas de RHT en se référant notamment à la directive 2020/06 du SECO du 9 avril 2020, au motif que la recourante était une entreprise de droit public, qu’elle percevait des subventions à hauteur 69% et qu’elle n’était dès lors pas crédible lorsqu’elle indiquait encourir un risque de faillite et de perte d’emplois. Pour sa part, la recourante conteste la position de l’intimé considérant que la directive précitée n’est pas valable. S’ajoutait le fait qu’elle avait conclu des contrats de travail de droit privé avec ses employés, lesquels n’avaient par conséquent pas de statut particulier. Enfin, elle encourait un risque entrepreneurial, dès lors que la loi n’imposait pas aux communes de prendre en charge un éventuel déficit.

10.    En premier lieu, il s’agit d’examiner la validité de la directive 2020/06 du SECO, adoptée par ce dernier en tant qu’autorité de surveillance et destinée aux organes d’exécution en matière d’assurance-chômage.

a. A teneur de la directive 2020/06 du SECO du 9 avril 2020, le but de l’indemnité en cas de RHT est de préserver les emplois dans des entreprises dans lesquelles ils risquent de disparaître en raison d’une évolution économique défavorable. Une condition essentielle du droit à l’indemnité est le risque de disparition d’emplois. De nombreuses entreprises de droit public n’assument pas de risque entrepreneurial ou de risque de faillite parce qu’elles doivent mener à bien les tâches qui leur ont été confiées par la loi indépendamment de la situation économique. Les problèmes de liquidités, les dépenses supplémentaires ou même les pertes résultant de l’activité de l’entreprise sont couverts par des moyens publics, qu’il s’agisse de subventions ou d’autres moyens financiers. Il n’existe pas dans ces cas de risque de disparition d’emplois. Si les éventuelles évolutions économiques négatives ne conduisent pas à la disparition d’emplois, et cela en raison de la structure organisationnelle des institutions de droit public (règles en matière de subventions, garantie d’État dans les mandats de prestations, etc.), l’indemnité ne servirait pas à remplir le but qui lui est assigné.

Ces réflexions s’appliquent aussi bien aux entreprises de droit public elles-mêmes (en ce qui concerne les employés de la Confédération, des cantons et des communes) qu’aux secteurs privatisés qui fournissent des prestations sur mandat d’une institution publique sur la base d’un accord. L’élément déterminant est, s’il figure dans l’accord dans quelle mesure l’institution publique garantit les coûts (p. ex. par des subventions) et si, par conséquent, le risque de disparition d’emplois est inexistant même lorsqu’il n’est pas possible de couvrir les coûts d’exploitation de l’entreprise. Cela peut concerner des grandes comme des petites entreprises (p. ex. si la piscine d’une commune est tenue par des privés ou une association mais que la commune ne fournit pas de garantie en cas de déficit). Le seul élément déterminant est de savoir si, en raison de la situation juridique, il existe un risque immédiat de disparition d’emplois.

Les entreprises de droit public comme les associations ou les employeurs privés qui exploitent une entreprise ou fournissent des prestations sur mandat d’une institution publique doivent montrer qu’ils sont confrontés à un risque immédiat de disparition d’emplois malgré les accords existant avec l’institution publique qui les mandate. S’ils ne parviennent pas à le faire de manière crédible, il convient de s’opposer au versement de l’indemnité en cas de RHT.

b. Destinées à assurer l'application uniforme des prescriptions légales, les directives de l'administration n'ont pas force de loi et, par voie de conséquence, ne lient ni les administrés ni les tribunaux; elles ne constituent pas des normes de droit fédéral au sens de l'art. 95 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF ; RS 173.110) et n'ont pas à être suivies par le juge. Elles servent tout au plus à créer une pratique administrative uniforme et présentent à ce titre une certaine utilité; elles ne peuvent en revanche sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu'elles sont censées concrétiser. En d'autres termes, à défaut de lacune, les directives ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 132 V 121 consid. 4.4 et les références; ATF 131 V 42 consid. 2.3 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 9C_283/2010 du 17 décembre 2010 consid. 4.1).

11.    En l’espèce, la recourante conteste la validité de la directive 2020/06 du 9 avril 2020 du SECO, considérant qu’elle ne repose sur aucune disposition de la loi ou de l’ordonnance.

Certes, les dispositions légales en matière de RHT ne prévoient pas de réglementation particulière concernant les entreprises de droit public et les secteurs privatisés qui fournissent des prestations sur mandat d’une institution publique.

Cela étant, le Tribunal fédéral des assurances a abordé cette problématique dans les arrêts qu’il a rendus le 26 mai 1994 dans la cause Commune de H (publié in DTA 1993/1994 n° 18 p. 140 ss), le 9 janvier 1997 dans la cause Eidg Flugzeugwerk E (publié in DTA 1996/1997 n° 22 p. 123 ss), ainsi qu’à l’ATF 121 V 362, arrêts dans lesquels les art. 31 al. 1 let. b et 2 et 32 al. 1 let. a LACI ont été examinés et précisés. De plus, les principes énoncés par le Tribunal fédéral en ce qui concerne le cas particulier des employés des secteurs publics ont également été repris par la doctrine (voir notamment RUBIN, op.cit, n° 20ss ad art. 31 et n° 9 ad art. 32).

La directive 2020/06 du 9 avril 2020 ne fait en réalité que préciser les principes développés par le Tribunal fédéral et déjà repris par la doctrine, de sorte qu’il n’existe aucun motif pour considérer que ladite directive serait contraire à la loi.

Dans tous les cas, le présent litige peut être tranché sans qu’il ne soit nécessaire de se référer à la directive contestée.

12.    En raison des mesures prises par les autorités tant fédérales que cantonales, la recourante a été contrainte de fermer ses crèches. La fondation a, par conséquent, éprouvé une perte de travail due à des mesures prises par les autorités au sens des art. 32 al. 3 LACI et 51 OACI, de sorte que les conditions pour la reconnaissance d’un cas de rigueur doivent être considérées comme réalisées. Il n’est pas contesté que la pandémie du coronavirus constitue une circonstance exceptionnelle qui dépasse le cadre du risque normal d’exploitation à la charge de l’employeur, de sorte qu’il n’y a pas non plus de motif d’exclusion au sens de l’art. 33 al. 1 let. a LACI, seul pertinent en l’espèce.

Il reste toutefois à déterminer si la recourante est éligible à recevoir l’indemnité en cas de RHT compte tenu du statut de son personnel et du risque restreint de fermeture auquel les entités administratives sont généralement exposées (cf. RUBIN, op cit., n. 20 ad art. 31 LACI ; ATAS/1121/2020 consid. 9).

13.    En premier lieu, il s’agit d’examiner la question du statut du personnel de la recourante et plus particulièrement celle de la condition d’un risque de licenciement à brève échéance, étant rappelé que pour cet examen, il convient de se placer au moment de la décision litigieuse et de raisonner de manière prospective sur la base des faits tels qu'ils se sont déroulés jusqu'alors (ATF 121 V 362 consid. 1b ; DTA 1993/1994 p. 142 consid. 4b).

Dans ce contexte, la recourante allègue que ses employé(e) sont liés par un contrat de travail de droit privé, ne comportant aucun privilège de droit public.

a. A teneur de l’art. 5 de la convention collective de travail intercommunale du personnel des institutions genevoises de la petite enfance (ci-après : la CCT), entrée en vigueur le 1er janvier 2014, applicable à la fondation en sa qualité de membre de la Fédération des institutions petite enfance genevoises suburbaines (FIPEGS) (art. 1 CCT et annexe 12) sous réserve de résiliation pour justes motifs avec effet immédiat, les délais de résiliation ordinaires sont les suivants : a) au terme de la période d’essai et durant la 1ère année de service : 1 mois pour la fin d’un mois b) au terme de la 1ère et durant la 2ème année de service : 2 mois pour la fin d’un mois et c) dès la 3ème année de service : 3 mois pour la fin d’un mois (al. 1). Le congé est notifié par lettre recommandée. Sur demande de l’intéressé(e), les motifs doivent être fournis par écrit (al. 2).

L’art. 10 CCT prévoit une procédure et des conditions particulières en cas de suppression de poste. Selon cette disposition, les parties signataires de la convention s’engagent d’une part à éviter les suppressions de postes dans la mesure du possible et d’autre part, en cas de suppression de poste inévitable, à tout mettre en œuvre pour faciliter le réengagement du-de la salarié(e) dans un poste similaire dans l’une des structures d’accueil de la petite enfance signataires de la CCT. a) L’employeur peut néanmoins licencier moyennant un préavis de 4 mois pour la fin d’un mois, tout employé(e) dont le poste est supprimé et dont il s’avère impossible de l’affecter à un autre emploi correspondant à ses aptitudes et à ses capacités au sein des structures d’accueil de la petite enfance. b) L’employé(e) licencié(e) reçoit alors une indemnité correspondant à 2 mois de salaire (al. 1). Les organisations syndicales et les associations professionnelles sont avisées immédiatement des suppressions de postes envisagées (al. 2).

b/aa. Lorsque les rapports de service sont soumis au droit public, la résiliation est assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité, de l’égalité de traitement, de la proportionnalité et de l’interdiction de l’arbitraire (ATA/674/2017 du 20 juin 2017 consid. 16).

b/bb. En matière de droit public, la suppression de poste constitue un cas spécial de licenciement lorsque la personne dont le poste est supprimé n'est pas reclassée dans une autre fonction. Elle doit être justifiée par des motifs objectifs, comme la suppression d'un poste d'enseignant ensuite de la diminution des effectifs scolaires. Il peut également se produire que certains services soient supprimés, qu'une rationalisation du travail ou une recherche d'économie rendent des postes de travail inutiles. Il doit s'agir d'une réelle suppression de fonction, justifiée par des motifs objectifs d'organisation de l'administration publique et non d'un simple prétexte utilisé dans le but de se séparer sans trop de difficultés d'un collaborateur (arrêt du Tribunal fédéral 8C_454/2019 du 20 mai 2020 consid. 3.1.2 ; ATA/608/2020 précité consid. 5b ; ATA/885/2020 du 15 septembre 2020 consid. 5b ; ATA/163/2011 du 15 mars 2011 consid. 6b).

b/cc. Le principe du reclassement, applicable aux seuls fonctionnaires, est l’une des expressions du principe de la proportionnalité. Il impose à l’État de s’assurer, avant qu’un licenciement ne soit prononcé, qu’aucune mesure moins préjudiciable pour l’administré ne puisse être prise (art. 36 al. 3 Cst.; arrêt du Tribunal fédéral 1C_309/2008 du 28 janvier 2009 consid. 2.2; ATA/806/2012 du 27 novembre 2012 consid. 4c; ATA/223/2010 du 30 mars 2010 consid. 10b).

Selon la jurisprudence, lorsque la loi prescrit à l'État de ne pas licencier une personne qu'il est possible de reclasser ailleurs, elle ne lui impose pas une obligation de résultat, mais celle de mettre en œuvre tout ce qui peut être raisonnablement exigé de lui. En outre, l'obligation de l'État de rechercher un autre emploi correspondant aux capacités du membre du personnel dont le poste est supprimé se double, corrélativement, d'une obligation de l'employé, non seulement de ne pas faire obstacle aux démarches entreprises par l'administration, mais de participer activement à son reclassement (ATA/679/2017 du 20 juin 2017 consid. 7c ; ATA/298/2016 du 12 avril 2016 consid. 5b ; ATA/128/2015 du 3 février 2015 consid. 4).

c/aa. A teneur de l’art. 335c al. 1 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), le contrat de travail peut être résilié pour la fin d’un mois moyennant un délai de congé d’un mois pendant la première année de service, de deux mois de la deuxième à la neuvième année de service, de trois mois ultérieurement.

c/bb. En matière de droit du travail (soumis aux dispositions du CO), les motifs économiques de licenciement se définissent comme des motifs non inhérents à la personne du salarié, c'est-à-dire des raisons liées à la situation économique de l'entreprise, comme sa fermeture totale ou partielle, sa restructuration ou sa rationalisation, qui rendent nécessaires la suppression ou la modification de postes de travail. Ils se distinguent des motifs inhérents à la personne de l'employé (ACAPH/46/2007 du 14 mars 2007 consid. 3.3.3, in JAR 2008 p. 390 et les références citées).

14.    En l’occurrence, un éventuel licenciement aurait été prononcé non pas en raison d’un motif inhérent à la personne de l’employé mais en raison de la situation économique de la recourante et des pertes qu’elle aurait subies du fait de la fermeture des crèches et, partant, du défaut de participation des parents. En d’autres termes, que l’on retienne les principes applicables en matière de droit public ou ceux prévalant en droit privé, en licenciant ses employés pour des motifs économiques, la recourante aurait en réalité procédé à une suppression de poste.

La question qui se pose dès lors dans ce contexte est celle de savoir si ce licenciement aurait pu être effectué à brève échéance, à savoir conformément aux disposition de l’art. 335c CO, ou si les dispositions légales ainsi que celles de la CCT prévoient des délais plus longs.

Force est de constater, en premier lieu, que ni les dispositions légales ni la CCT ne confèrent la qualité de fonctionnaire - pour qui le principe de reclassement est applicable - aux employés de la recourante, les rapports de travail étant régis par le droit privé (art. 58 CCT).

Cependant, ce ne sont pas les règles de l’art. 335c CO qui s’appliquent, mais la procédure spéciale en cas de suppression de poste prévue par l’art. 10 CCT. En effet, comme indiqué précédemment, un licenciement pour motifs économiques est en principe signifié à un employé en raison de la suppression de son poste. Or, dans un tel cas, conformément à la procédure prévue à l’art. 10 CCT, la recourante doit favoriser le réengagement, auprès d’une autre structure d’accueil, des collaborateurs dont elle veut supprimer le poste. Ce n’est qu’en l’absence de réengagement que le licenciement peut être prononcé moyennant un délai de congé de quatre mois pour la fin d’un mois.

Cette procédure de réengagement est en réalité similaire à la procédure de reclassement existant pour les fonctionnaires, de sorte que la question d’un statut analogue à celui des fonctionnaires, leur apportant une certaine protection en cas de suppression de postes, peut se poser (voir dans le même sens l’ATAS/1121/2020 du 19 novembre 2020, concernant des collaborateurs liés à leur employeur par un contrat de droit public, mais ne bénéficiant pas d’un statut de fonctionnaire, pour lesquels une procédure de reclassement est prévue en cas de suppression de postes).

La question d’un statut analogue à celui des fonctionnaires et celle du risque de licenciement à brève échéance peuvent toutefois rester ouvertes, dès lors que la recourante est exposée à un risque restreint de fermeture comme cela ressort des considérations suivantes.

15.    Jusque dans les années 2000, les communes subventionnaient seules les structures d’accueil préscolaire conformément à l’art. 1 de la loi cantonale concernant l’attribution de subventions aux institutions recevant des enfants d’âge préscolaire du 17 décembre 1971 (J 6 30).

Constatant toutefois que le nombre de places de garde pour les enfants d’âge préscolaire était notablement insuffisant pour répondre à la demande et que certaines communes avaient totalement négligé les besoins en la matière, le canton de Genève a décidé d’intervenir dans la politique de la petite enfance en encourageant les communes par l’octroi de subventions (exposé des motifs, MGC 2002-2003/VI A 23210).

Ainsi, le 10 janvier 2004 est entrée en vigueur la loi cantonale sur les structures d’accueil de la petite enfance et sur l’accueil familial de jour (LSAPE ; RS J 29). Dans sa teneur entre 2004 et 2008, cette loi prévoyait que le canton subventionnait la création de nouvelles places d’accueil et le fonctionnement de structures existantes (art. 3 al. 2). Quant aux communes, elles assuraient le financement des places d’accueils après déduction de la participation des parents, des subventions cantonales ainsi que des éventuelles autres recettes (art. 4 al. 2).

Toutes les structures d’accueil préscolaire étaient soumises à la LSAPE et à son règlement d’application (PL 12197 p- 31).

Les subventions octroyées par le canton ont été supprimées avec effet au 12 février 2008. L’art. 3 al. 2 LSAPE a donc été supprimé et l’art. 4 al. 2 LSAPE a été modifié en ce sens que les communes assurent le financement des places d’accueils après déduction de la participation des parents et d’éventuelles autres recettes. Cette dernière disposition a été reformulée, avec effet au 1er septembre 2011, la disposition pertinente prévoyant que lorsque les communes assurent le financement des places d’accueil, il s'effectue après déduction de la participation des parents et d'éventuelles autres recettes.

Constatant que depuis son entrée en vigueur, en 2004, la LSAPE n’avait jamais pu atteindre son objectif principal qui était notamment celui d’adapter l’offre de places d’accueil à la demande et que suite à la modification, en 2008, de la responsabilité du financement public, avec le retrait du financement du canton, les communes devenant seules responsables, l’assemblée constituante a souhaité ne pas mettre obligatoirement toute la charge financière sur les communes (IN 143- D PL 10895 p. 2 et 8), raison pour laquelle l’art. 202 de la Constitution de la République et canton de Genève (A 2 00) a été adopté.

Selon cette disposition,

1 Les communes ou groupements de communes financent la construction et l’entretien des structures d’accueil de jour.

2 Le canton et les communes ou groupements de communes en financent l’exploitation après déduction de la participation des parents et d’éventuelles autres recettes.

Ce cadre général a été précisé dans une loi d’application, la loi cantonale sur l’accueil préscolaire (LAPr ; J 6 28 ; PL 1297 p. 20). Ainsi, depuis le 1er janvier 2020, l’art. 8 LAPr prévoit que

1 Les communes, ou groupements de communes, financent la construction et l’entretien des structures d’accueil préscolaire qu’elles exploitent ou subventionnent.

2 Elles en financent l’exploitation après déduction de la participation des parents, du canton et des autres recettes.

3 Lorsque les communes, ou groupements de communes, assurent le financement des structures de coordination de l’accueil familial de jour, elles prennent en charge leur éventuel déficit d’exploitation.

Quant au canton, il participe au financement de l’exploitation des structures d’accueil préscolaire à prestations élargies et des structures de coordination de l’accueil familial de jour subventionnées ou exploitées par les communes (art. 9 al. 1 LAPr).

16.    En matière d'interprétation, il faut, en premier lieu, se fonder sur la lettre de la disposition en cause (interprétation littérale). Si le texte de cette dernière n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, le juge recherchera la véritable portée de la norme en la dégageant de sa relation avec d'autres dispositions, de son contexte (interprétation systématique), du but poursuivi, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique), ainsi que de la volonté de son auteur telle qu'elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation historique). Le sens que prend la disposition dans son contexte est également important (ATF 128 II 347 consid. 3.5 ; ATF 128 V 105 consid. 5 ; ATF 128 V 207 consid. 5b ; ATF 125 II 484 consid. 4). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; en particulier, il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 143 II 202 consid. 8.5 ; ATF 143 I 109 consid. 6.1 ; ATF 134 I 184 consid. 5.1). Par ailleurs, les dispositions d'exception ne doivent être interprétées ni restrictivement ni extensivement, mais conformément à leur sens et à leur but, dans les limites de la règle générale (ATF 131 V 279 consid. 2.4 ; ATF 130 V 229 consid. 2.2 ; ATF 130 V 472 consid. 6.5.6 ; ATF 118 Ia 175 consid. 2d ; ATF 117 Ib 114 consid. 7c ; ATF 114 V 298 consid. 3e).

17.    a. En l’espèce, la recourante, est une fondation d'utilité publique au sens de la loi sur l'administration des communes du 13 avril 1984 (LAC - B 6 05 ; art. 30 let. t et art. 93 LAC). S’agissant d'une fondation de droit public (art. 4 al. 1 let. c de la loi sur l'organisation des institutions de droit public du 22 septembre 2017 - LOIDP - A 2 24 ; art- 1 de la loi sur les fondations de droit public - LFond - A 2 25 ; abrogée le 1er mai 2018 suite à l’entrée en vigueur de la Loi sur l’organisation des institutions de droit public – LOIDP –A 2 24), dont le statut est régi par le droit communal dont elle relève  (art. 59 al. 1 CC), la recourante doit être considérée comme une autorité administrative au sens de l'art. 5 let. e de la loi sur la procédure administrative du  12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) (ATA/425/2021 du 20 avril 2021 consid. 1c).

A ce seul titre déjà, la recourante est présumée courir un risque restreint de fermeture.

Toutefois, dans la mesure où il n’est pas exclu que certaines unités administratives soient soumises à restructuration et puissent être exposées aux mêmes risques que les entreprises privées, il convient d’examiner si les dispositions légales applicables en matière de financement des crèches prévoient que les pertes ou dépenses supplémentaires sont couvertes par les fonds publics, les parties s’opposant sur ce point.

b. Il convient donc d’interpréter l’art. 8 al. 2 LAPr en examinant, en premier lieu, la lettre de cette disposition.

L’Académie française définit l’« exploitation » par l’« action d’exploiter un bien, de le faire valoir, de le gérer, en vue d’en tirer un profit » et le verbe « financer » par « procurer à une entreprise, à un service public ou à un organisme semi-public les moyens financiers nécessaires à sa création, à son fonctionnement ou à son développement » (https://www.dictionnaire-academie.fr/). Le Ministère français de la culture a notamment défini la notion de « dépenses d’exploitation ». Il s’agit des dépenses inhérentes à l’activité d’une entreprise, à l’exclusion des investissements. L’expression « dépenses d’exploitation » est utilisée plutôt par les entreprises industrielles et commerciales et l’expression « dépenses de fonctionnement » par les administrations et les associations (voir le site du Ministère français de la culture, http://www.culture.fr/franceterme/result?francetermeSearchTerme=exploitation&france terme SearchDomaine=0&francetermeSearchSubmit=rechercher&action=search).

Dans le contexte de l’art. 8 al. 2 LAPr, cela revient à retenir que les communes ou groupement de communes procurent aux structures d’accueil les moyens financiers nécessaires à leur fonctionnement, après prise en considération de la participation des parents, du canton et des autres recettes. En d’autres termes, les communes ou groupement de communes fournissent les moyens financiers nécessaires pour que les structures d’accueil puissent remplir leur fonction, à savoir accueillir des enfants en âge préscolaire, dans les conditions requises par la législation applicable.

Par ailleurs, compte tenu de l’utilisation du présent de l’indicatif, sans locution telle que par exemple « lorsque » ou « si », force est d’admettre que les communes ou groupements de communes n’ont aucune marge de manœuvre.

c. Les interprétations historique et téléologique conduisent au même résultat.

c/aa. Sous l’empire de la LSAPE, l’art. 4 prévoyait, à son alinéa 2, que les communes assuraient le financement [des places d’accueil dans les différents modes de garde pour les enfants de 0 à 4 ans] après déduction de la participation des parents, des subventions cantonales ainsi que des éventuelles autres recettes ».

Le commentaire article par article relatif au PL 8952 précise que les communes ou groupements de communes doivent pourvoir aux besoins prépondérants de la population dans les différents modes de garde et qu’elles doivent en assurer le financement sous réserve de ce qu’elles reçoivent des parents, du canton ou encore d’autres sources comme par exemple de la Confédération (Commentaire article par article, ad Art. 4, MGC 2002-2003 /VI A 3217). Compte tenu de l’emploi du verbe « devoir », la commune ou groupement de communes avait de toute évidence l’obligation de financer les différents modes de garde.

A teneur d’un avis de droit de la direction des affaires juridiques de la Chancellerie, cité dans l’exposé des motifs concernant le projet de loi PL 10710 modifiant la LSAPE, la LSAPE prévoyait clairement le principe du financement des places d’accueil de la petite enfance par la commune, sans toutefois en préciser les modalités. Pour la garde dans les crèches, la loi prévoyait une participation financière des parents en fonction de leur capacité économique. Elle ne prévoyait délibérément rien en ce qui concernait la participation des parents lorsque leur(s) enfant(s) était gardé(s) par les « mamans de jour ». La volonté du législateur quant au financement de la petite enfance par les communes était claire (exposé des motifs concernant le PL 10710, MGC 2009-2010 XI A 14119). Compte tenu de ces constatations, le Conseil d’Etat a proposé de modifier la LSAPE afin d’y intégrer différentes dispositions concernant les structures de coordination et notamment un art. 10 al. 7 et 8, libellé comme suit : « la participation financière des parents est fixée en fonction de leur capacité économique » (al. 7) et « lorsque les communes ou groupements de communes assurent le financement des structures de coordination, elles prennent en charge leur éventuel déficit d’exploitation » (al. 8). Il ressort de l’exposé des motifs qu’« afin de répondre à la question de l’obligation des communes vis-à-vis du financement du dispositif, il est proposé de préciser, par cet alinéa 7 [devenu 8 finalement], la disposition de l’article 4 alinéa 2, actuel de la loi en indiquant que les communes doivent assurer le financement des structures de coordination et prendre en charge également l’éventuel déficit d’exploitation résultant de la différence entre les montants payés aux personnes pratiquant l’accueil familial de jour de [recte et] ce qui est facturé aux parents » (exposé des motifs concernant le PL 10710, MGC 2009-2010 XI A 14123).

Il ressort en outre du rapport de la Commission de l’enseignement, de l’éducation, de la culture et du sport chargée d’étudier le projet de loi modifiant la LSAPE (en y insérant notamment des dispositions sur les structures de coordination) que des discussions entre le département de l’instruction publique et l’association des communes genevoises avaient abouti à un projet de contrat-cadre avec la reprise du principe valable pour les crèches (soit la participation des parents en fonction de leurs revenus) (PL 10710-A, MGC 2010-2011 V A 4493). Dans ce contexte, l’obligation des communes de participer au financement, y compris celui des déficits, a également été rappelée (rapport de la Commission de l’enseignement, de l’éducation, de la culture et du sport chargée d’étudier le projet de loi modifiant la LSAPE ; PL 10710-A, MGC 2010-2011 V A 4493).

Il ressort ainsi des travaux préparatoires que le financement de structures d’accueil préscolaire constituait une obligation, tant pour les communes que pour le canton de Genève et que ce financement intervenait, que ce soit dans le cas des crèches ou des mamans de jour, après prise en considération de la participation des parents notamment.

c/bb. L’art. 202 al. 2 Cst. gen. prévoit que le canton et les communes ou groupements de communes financent l’exploitation des structures d’accueil de jour après déduction de la participation des parents et d’éventuelles autres recettes. La structure d’accueil de jour est un terme générique pour définir les différents modes d’accueil pour les enfants en âge préscolaire (PL 12197 p. 21).

L’art. 8 al. 2 et 3 LAPr précise ce financement en fonction de la nature de la structure. Ainsi, les alinéa 1 et 2 concernent les structures d’accueil préscolaire et notamment les crèches (PL 12197 p. 23) alors que l’alinéa 3 concerne l’accueil familial de jour ou, en d’autres termes, les accueillantes familiales de jour, les mamans de jour et les assistantes de crèche familiale (PL 12197 p. 23).

En réalité, les alinéas 2 et 3 de l’art. 8 LAPr se recoupent. En effet, ces deux alinéas prévoient que les communes doivent intervenir financièrement afin d’équilibrer les comptes des structures d’accueil, les recettes (notamment la participation des parents et les subventions cantonales) n’étant pas suffisantes pour couvrir les charges. Dans la mesure où l’alinéa 2 mentionne que c’est après participation des parents que les communes interviennent, la notion de déficit d’exploitation n’a pas été intégrée à la disposition. En revanche, dans le cas de l’alinéa 3, la participation des parents n’est pas mentionnée, mais elle est en réalité incluse dans celle de « déficit d’exploitation », le déficit correspondant au montant de ce qui manque en espèces ou en crédit dans une caisse publique ou privée pour équilibrer les comptes entre les recettes et les dépenses (cf. définition donnée par l’académie française).

c/cc. Il ressort ainsi de ce qui précède que les communes doivent couvrir le déficit – ordinaire ou extraordinaire – des structures d’accueil qu’elles subventionnent.

18.    La chambre de céans relèvera encore que le refus de la Ville du Grand-Saconnex d’augmenter la subvention accordée à la recourante ne constitue pas un motif pour s’écarter des considérations qui précèdent et admettre le droit à une indemnité pour RHT, dans la mesure où l’art. 8 LAPr prévoit une obligation pour les communes de financer les structures d’accueil de jour, en couvrant un éventuel déficit d’exploitation.

19.    En résumé, il ressort de ce qui précède que les structures d’accueils font partie intégrante de la politique de la petite enfance du canton de Genève. Elles sont d’utilité publique. Chaque commune est toutefois libre de décider si elle entend déléguer sa compétence en la matière à une association ou à une fondation, avec subventionnement, ou si elle préfère municipaliser cette tâche (MGC 2010-2011 V A 4517 p.- 4517 ; voir également rapport de la commission des finances chargées d’étudier le projet de loi du Conseil d’état concernant la constitution d’une « Fondation pour le petite enfance», PL 7681).

De toute évidence, les structures d’accueil doivent remplir leur mandat indépendamment de la situation conjoncturelle et d’un éventuel déficit. Retenir le contraire reviendrait à autoriser, dans un contexte conjoncturel difficile, la fermeture de certaines structures, alors même qu’il manque 3'000 à 4'000 places de crèche dans le canton de Genève (PL 12197, exposé des motifs, p. 24).

Du reste, la Ville de Genève a bien compris que le financement incombait aux communes, dès lors qu’elle fait signer aux différentes associations un contrat de prestations, prévoyant, à son art. 10 al. 4, qu’elle prend en charge l’éventuelle perte annuelle comptabilisée (cf. exemplaire-type du contrat publié à l’adresse suivante : https://www.geneve.ch/sites/default/files/fileadmin/public/Departement_5/Publications/2019/contrat-prestations-modele.pdf).

C’est donc à juste titre que l’intimé s’est opposé au préavis de RHT et, partant, à l’indemnisation de la recourante, faute de risque d’exploitation encouru par cette dernière. Dans le cas contraire, le versement d’indemnités en cas de RHT en cas de suspension temporaire de la fourniture de ces prestations reviendrait à répercuter les coûts du salaire sur le fonds de l’assurance-chômage sans que le risque de licenciements à court terme, contre lequel se bat justement le législateur, ne soit avéré (cf. directive du SECO 2021/01 du 20 janvier 2021, ch. 2.6 p. 13).

20.    Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté et la décision sur opposition confirmée.

La procédure est gratuite.

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

Conformément à l’art. 133 al. 2 LOJ

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Julia BARRY

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le